11 Sincretismo afro-brasileiro e resistência cultural Horizontes Antropológicos
11 Sincretismo afro-brasileiro e resistência cultural Horizontes Antropológicos, Porto Alegre, ano 7, n. 16, p. 11-34, dezembro de 2001 Culture inavouée dans la nature... CULTURE INAVOUÉE DANS LA NATURE, NATURE SOUMISE DANS LA CULTURE Claude Rivière Université de Paris V/Sorbonne – França Résumé: On peut tirer de l’idée que l’on se fait de la nature, soit une apologie de l’ordre dans le cosmos, soit un argument pour justifier l’existence d’un Dieu maître de la foudre et des saisons, soit l’enchantement d’un retour à l’état de nature supposé non conflictuel, soit enfin une conviction matérialiste selon laquelle l’homme doit dompter sa gourmandise et assurer la survie optimale de l’environnement sans le polluer. La société n’est pas à penser comme une modalité d’oubli de la nature mais en rapport d’inclusion dans la nature. Après périple philosophique de Platon à Moscovici, on déviera dans le champ des artistes peignant d’après nature et dans celui des linguistes analysant ce qui est dit contre nature. C’est la culture qui oppose nature et convention, fait et norme, matière et liberté humaine. C’est elle aussi qui nous fournit notre vocabulaire, nos classifications et nos jugements de valeur à propos de la nature. Récemment un courant écologiste se pose en protecteur sourcilleux de l’environnement et en organisateur d’un développement durable, mais dans la deep ecology, on glisse vers le culte d’une biosphère de rêve. Mots-clés: culture, développement, écologie, environnement, nature. Resumo: A partir da idéia que se faz de natureza é possível desenvolver, seja uma apologia da ordem no cosmos, seja um argumento para justificar a existência de um Deus senhor do trovão e das estações, seja o encantamento de um retorno ao estado de natureza supostamente sem conflitos, seja enfim a convicção materialista de que o homem deve dominar sua gula e otimizar a sobrevivência do meio am- biente sem poluí-lo. A sociedade não deve ser pensada como uma modalidade de esquecimento da natureza, mas, sim, como uma relação de inclusão na natureza.. Depois de um périplo filosófico de Platão a Moscovici, faremos uma incursão pelo campo dos artistas que pintam a natureza e pelo dos lingüistas que analisam o que é dito contra a natureza. É a cultura que opõe natureza e convenção, fato e norma, matéria e liberdade humana. É ela também que nos fornece nosso vocabulário, nossas classificações e nossos julgamentos de valor sobre a natureza. Recentemen- te uma corrente ecológica se coloca como protetor severo do meio ambiente e 12 Sérgio F. Ferretti Horizontes Antropológicos, Porto Alegre, ano 7, n. 16, p. 11-34, dezembro de 2001 Claude Rivière organizador do desenvolvimento sustentável, mas na deep ecology, escorrega-se para o culto de uma biosfera de sonho. Palavras-chave: cultura, desenvolvimento, ecologia, meio ambiente, natureza. Introduction A l’ethnologie d’autrefois, évoquant encore le problème des races, s’est substituée après la seconde guerre mondiale, sous une influence anglo- saxonne, l’anthropologie sociale et culturelle qui manifeste un changement de label plus que de thématique et de méthode. Focalisée sur l’homme (anthropos) en société et sur les systèmes culturels, cette anthropologie moderne, évitant tout présupposé philosophique quant à une essence de la nature, prend pour thème capital d’analyse moins la culture que les cultures. Si le rapport nature-culture devient objet de discussion, c’est par exemple, pour se débarrasser des diktats de géographes quant au déterminisme absolu du milieu (Marcel Mauss a tiré des tendances plus que des lois des variations saisonnières des sociétés eskimos), pour corriger les oracles marxistes quant à la prédominance en dernière instance des facteurs économiques, ou pour dénoncer les sophismes de Léon Poliakov, lequel déprécie les cultures parce qu’elles séparent, tandis que la nature et le corps sont supposés unir. Après que Lévi-Strauss ait soulevé, dans Les structures élémentaires de la parenté (1952), le problème des rapports entre nature et culture sous un angle quelque peu philosophique, d’autres ont abordé concrètement cette question à partir du conditionnement des cultures par le milieu (kwakiutl, dogon, zuñi...) qu’ils étudiaient sur le terrain. L’anthropologie économique actuelle ne se conçoit pas sans un prélude relatif à l’écologie (oïkos: habitat, logos: discours) qui précise, après définition du terme, les effets de l’environnement sur les sociétés et les impacts des techniques humaines sur les modifications physiques, biologiques et sociales. Sans négliger le phénomène culture, sujet de nombreux discours dans notre discipline (dont le mien dans le Dictionnaire de la sociologie, Larousse, 1989, et dans l’Encyclopédie philosophique universelle, PUF, 1990), j’insisterai sur la manière dont la culture occidentale a élaboré le concept de nature dans la philosophie (ma discipline-mère), sur quelques 13 Sincretismo afro-brasileiro e resistência cultural Horizontes Antropológicos, Porto Alegre, ano 7, n. 16, p. 11-34, dezembro de 2001 Culture inavouée dans la nature... utilisations linguistiques du mot nature et sur les discours contemporains des écologistes portant sur la nature, l’environnement et le développement durable. D’où les thèmes: la nature et l’ordre vus par quelques cultures, la nature appréhendée par une culture religieuse, un état de nature conçu comme culture primitive, les éléments de culture présents dans la nature et les éléments de nature présents dans la culture. Des philosophies inspiratrices de l’Anthropologie Nature et cosmos. Une culture philosophique interprétatrice d’un ordre naturel Les premiers mythologues et ethnologues qui se sont interrogés sur les rapports initiaux de l’homme à la nature externe ont eu tendance, comme James Frazer, à souligner combien ont pu être étonnants le mouvement régulier des astres avec retour des saisons, la constance des phénomènes de naissance, développement et déclin des vies végétale, animale et humaine. Il reste à voir si la foudre, les comètes, les incendies, les tremblements de terre et autres cataclysmes n’incitent pas plus à réfléchir, après émotion forte, que les cycles à répétition de la nature? Max Müller entre autres avait montré au milieu du XIXème siècle, langage à l’appui, comment étaient personnifiés et considérés comme doués de volonté, certains faits extraordinaires, saisis comme ensemble de messages à interpréter. Au lieu de spéculer avec les évolutionnistes sur l’origine supposée de la religion et de la magie, il est préférable de se référer aux conceptions philosophiques des Grecs. Chez Platon, dans le ciel intelligible des Idées, tel que présenté dans le Timée, la nature est cosmos, c’est-à-dire bon ordre, bon arrangement des êtres et des choses, ceux-ci hiérarchisés et harmonieusement équilibrés selon des cycles temporels. Mais immuables, les Idées platoniciennes échappent à la corruption du sensible, qu’elles appartiennent à l’ordre esthétique ou à l’ordre mathématique (impliquant juste proportion dans le dernier platonisme). L’homme lui-même, un microcosme, fait partie du cosmos et la cité juste de La République reproduit à son niveau l’ordre hiérarchique qui est celui de la nature. A l’inverse de la sagesse qui consiste à tenir sa place, le désordre est le fait de l’homme qui ne sait pas calquer ses lois morales sur les lois de la nature, ou qui s’y oppose. 14 Sérgio F. Ferretti Horizontes Antropológicos, Porto Alegre, ano 7, n. 16, p. 11-34, dezembro de 2001 Claude Rivière Chez Aristote, si rien n’est à chercher en dehors du cosmos, raison suprême, le monde sublunaire présente cependant des imperfections. Certes la nature (physis) ne fait rien en vain et procure ce qu’il y a de meilleur; elle est totalité de ce qui en soi a son principe de développement; mais si le développement des choses est finalisé, il se peut que l’homme interfère par sa volonté dans le devenir du monde. Aussi Aristote laisse-t-il ouvert un vaste champ de réflexion sur les heurs et malheurs du vouloir. Face à ces visions mythifiées, la pensée moderne pose scientifiquement l’éclatement du cosmos et de sa notion, ce qui réclame une prise en considération des échelles micro-macro. Les lois d’un niveau ne valent pas dans un autre qui n’obéit pas aux mêmes types ou formes de causalité plus ou moins complexes. Avec Cournot, Monod, Balandier, Boudon..., ont été approfondis les places du hasard et du désordre dans les sciences naturelles et humaines, et l’harmonie des places dans l’univers a subi, bien avant 1968, des assauts contestataires: contestation d’un ordre hiérarchique dans la nature et parmi les humains, contestation d’une finalisation du développement de la nature, effacement des causes finales au profit des causes efficientes, des causes formelles au profit des causes matérielles et surtout rejet des causes premières avec habilitation des seules causes secondes. Que les actions sur la nature physique et humaine produisent, par technologie appropriée, des mutations génétiques et sociales, voilà ce qui atteste de la modification du devenir par action humaine et donc d’une évacuation de la surnature, déjà présente dans le matérialisme du De natura rerum de Lucrèce. Nature et surnature. La nature définie par une culture religieuse Tandis que l’épicurien ne rend compte de la nature par aucune cause surnaturelle (il vit selon ses désirs et la nécessité), le stoïcien s’accommode de l’ordre de la nature et s’ajuste avec ataraxie au monde du logos identifié à la raison divine, comme l’évoque Cicéron, auteur du De natura deorum. L’idée plotinienne d’une phronesis (sagesse) supérieure à la physis, tout le Moyen Age va la conserver en même temps qu’une vision chrétienne uploads/Societe et culture/ culture-inavouee-dans-la-nature-nature-soumise-dans-la-culture-claude-riviere 1 .pdf
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- Publié le Sep 07, 2022
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