Module : Littérature, philosophie et éducation Professeure : M. Moufida El Beja
Module : Littérature, philosophie et éducation Professeure : M. Moufida El Bejaoui Etudiant : Berri Oussama Récit de voyage : Voyage en Orient de Gérard de Nerval INTRODUCTION Certains critiques attribuent des origines très anciennes au récit de voyage : on cite quelquefois comme ancêtres du genre l’Histoire d’Hérodote et l’Anabase de Xénophon. Genre malléable à souhait, le récit de voyage traverse les époques en évoluant au gré de divers paramètres, l’Histoire générale, politique, culturelle ou littéraire mais aussi le statut de celui qui part, ses motivations, ses objectifs. Ainsi se sont succédé les voyages d’explorateurs d’abord, au moment des grandes expéditions maritimes et des grandes découvertes, puis dès le XVIIe siècle aux explorateurs comme Jean-Baptiste Tavernier ou Jean Chardin, viennent s’ajouter des missionnaires, des militaires, des marchands, des envoyés du Roi qui partent tous à des fins utilitaires. Certains critiques affirment que c’est au XVIIe siècle que le récit de voyage s’affirme comme genre littéraire. Et surtout, l’épanouissement du genre du récit de voyage est mis en parallèle avec la naissance des « Arts de voyager », ouvrages théoriques qui livrent une méthode du voyage à l’usage de l’honnête homme. Au siècle des Lumières, l’intérêt pour le récit de voyage s’accroît : les lecteurs se montrent friands de L’Histoire générale des voyages (1746-1759) en seize volumes de l’abbé Prévost, parus dans une édition accessible au grand public. C’est le XIXe siècle qui voit l’avènement d’une nouvelle catégorie de voyageurs, celle de l’écrivain qui voyage d’abord pour lui-même. On observe alors un renversement de perspective : la relation à faire devient la motivation du voyage plus qu’elle ne dresse le bilan de recherches dans un domaine particulier. Le voyage devient littéraire tandis que la destination à la mode est le voyage en Orient. Aux XVIe et XVIIe siècles, les relations de voyage, très prisées du lectorat, sont plurielles comme en attestent les comptes-rendus de pèlerinage au Saint-Sépulcre, les chroniques de voyage en Asie, les livres d'information géographique, les lettres annuelles de missions que les Jésuites adressaient à leurs supérieurs. Leurs auteurs y relatent essentiellement des expériences missionnaires, commerciales, fonctionnaires, militaires ou d'exploration. Pour ce faire, ils font généralement appel à la narration, à la description et au commentaire. Bien que le recours au fabuleux y soit fréquent, les relations racontent des faits réels, la vérité factuelle et l'exactitude objective, comme le souligne Réal Ouellet. L'engouement pour le récit de voyage se poursuit au XVIIIe siècle. Il atteint alors les milieux philosophiques comme en témoignent les nombreuses références faites aux voyages dans les articles de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. Les encyclopédistes s'intéressent à la mise en place d'une méthodologie d'observation du voyage. Ainsi, Denis Diderot, dans son préliminaire au Voyage en Hollande, souhaite-t-il au voyageur : que l'histoire de son pays lui soit familière. Les hommes qu'il questionnera sur leurs contrées l'interrogeront sur la sienne, et il serait honteux qu'il ne pût leur répondre. [ ...] Que la langue du pays ne lui soit pas tout-à-fait inconnue; s'il ne la parle pas, du moins qu'il l'entende. [ ... ] L'esprit d'observation est rare; quand on l'a reçu de la nature, il est encore facile de se tromper par précipitation. Le sang- froid et l'impartialité sont presque aussi nécessaires au voyageur qu'à l'historien. Cette réflexion met en évidence la nécessité de qualités impartiales d'observation de la part du voyageur et rejoint ainsi, une nouvelle fois, l'idée qu'un récit de voyage doit transmettre un témoignage de la vérité. Pourtant, dans son Supplément au voyage de Bougainville, l'encyclopédiste s'intéresse aussi aux caractéristiques de l'écrivain-marin-voyageur que fut Louis-Antoine de Bougainville et apprécie son style : de la philosophie, du courage, de la véracité, un coup d'œil prompt qui saisit les choses et abrège le temps des observations ; de la circonspection, de la patience, le désir de voir, de s'éclairer et d'instruire. [ ... ] Sans apprêts, le ton de la chose; de la simplicité et de la clarté. Le XIXe siècle marque un tournant pour le récit de voyage. Les modifications ont lieu tant du point de vue du contenu que de celui de la forme, parce qu'on ne voyage plus pour des considérations politiques ou philosophiques, mais pour le plaisir. Si bien que le récit devient la condition première du voyage au lieu d'en être la résultante ou l'une des possibles conséquences. L'on nommera Chateaubriand, Lamartine, Hugo, Sand, Dumas, Nerval, Gautier et peut-être bien d'autres encore, comme figures de ce siècle des écrivains voyageurs. À l'époque romantique, en effet, la figure du voyageur se modifie pour se fondre dans celle de l'écrivain, avec ces auteurs dont les souvenirs de voyages constituent une partie de l'œuvre. Le moi du voyageur prend dès lors une importance centrale, si bien que le lecteur se trouve confronté à l'aventure d'un sujet. Cependant, pour l'écrivain de ce début du vingt et unième siècle, le récit de voyage romantique, outre sa prééminence subjective, ne révèle pas a posteriori que des préoccupations littéraires. Le récit de voyage, comme genre littéraire, se caractérise au XIXe siècle par une tension entre, d'un côté, le désir des voyageurs de restituer par l'écriture la réalité qu'ils observent et, de l'autre, la nature littéraire de leur projet qui les incite bien souvent à privilégier une dimension mythique et pittoresque de cette réalité au détriment des données objectives. Certes, la plupart des voyageurs prétendent reproduire le plus fidèlement possible les lieux de leur voyage. Mais tous sont confrontés au même problème : l'impossibilité d'une reproduction qui soit parfaitement naturelle. Aussi sont-ils souvent tentés de se rabattre sur la rhétorique, celle des lieux communs et des referents culturels qui imposent une vision préétablie du monde extérieur. À la limite, la fonction de leurs récits est réduite à prouver que la réalité est conforme à l'érudition qu'on en a. Par ailleurs, le genre n'échappe pas, au XIXe siècle, au discours de la modernité qui valorise l'originalité individuelle et la subjectivité. Dès la fin du XVIIIe siècle, en effet, il abandonne peu à peu sa visée encyclopédique au profit d'une subjectivité naissante marquée par les écrits autobiographiques de Rousseau. En France, les écrivains-voyageurs, Chateaubriand en tête, donnent alors à leur aventure une dimension personnelle, un sens qui démarquera leurs récits des itinéraires purement descriptifs. Pour éviter la répétition et marquer leur originalité, ils prennent leurs distances par rapport aux poncifs et aux lieux communs que se transmettent les générations de voyageurs. Gérard de Nerval, qui fait partie de cette génération d'écrivains romantiques qui prônent l'exaltation du moi et l'expression des sentiments les plus intimes, est l'objet de notre étude et plus particulièrement sur son récit de voyage intitulé Voyage en Orient. Pour Nerval, mystique dans l'âme, passionné par les rites initiatiques des anciens Egyptiens, avide de se bâtir une religion qui serait la synthèse de toutes les religions, l'Orient est «la terre maternelle». Le poète fait la connaissance de Joseph de Fonfride, un passionné d'égyptologie qui accepte de financer la plus grande part du voyage. Ils partent ensemble fin décembre 1842. LE PLAN I STRUCTURE NARRATIVE 1) Deux voyages différents en un voyage continu 2) Voyage réel et voyage imaginaire 3) LE CAIRE 4) BEYROUTH ET L'ARRIERE PAYS 5) CONTANTINOPLE II Métadiscours du narrateur-auteur sur son écriture du voyage III Résistance au discours eurocentrique et la fluidité identitaire IV Le voyageur comme statut d'intermédiaire V LA RELIGION VI L'ESCLAVAGE CONCLUSION I STRUCTURE NARRATIVE 1) Deux voyages différents en un voyage continu L’auteur fusionne en un seul voyage continu deux voyages différents pour obtenir une certaine cohérence dans la construction du récit. Le voyage de 1839 à Vienne se transforme en préambule du voyage en Orient de 1843, au moyen de l’itinéraire fictif « de Vienne à Syra via Trieste » et du récit imaginaire de la croisière aux îles grecques, notamment le voyage à Cythère. La relation du voyage de 1839 occupe l’« Introduction : Vers l’Orient », donnant un avant-goût de l’Orient. Si l’on tient le Voyage en Orient pour un récit initiatique, l’« Introduction : Vers l’Orient» se lit comme une étape préparatoire pour le candidat qui veut accéder au monde mystique, en particuler au pays de la déesse Isis. À ce propos, rappelons que l’épisode de la mort est récurrent : meurent un Anglais en escale de l’Adriatique, le consul français en Égypte, Hakem, Adoniram... De surcroît, pour le narrateur nervalien l’Égypte est un vaste tombeau, et dans cette perspective les pyramides, qui représentent le monde souterrain de l’au-delà, sont emblématiques. En revanche, l’Égypte contemporaine ne présente que ruines et cendres, aux yeux du voyageur que cette déception entraîne dans le monde du rêve et le monde mythique et religieux sous forme d’un conte. L’atmosphère nocturne enivrante de Vienne, ville théâtrale par excellence, est une annonce de la prochaine étape. Vienne préfigure l’Orient. La fête de la Saint Sylvestre, marquée par son atmosphère onirique, donne un avant-goût du mystérieux Orient, représenté par le masque et le voile que le futur initié doit découvrir peu à peu. Au niveau de l’ordre du récit, l’étape de Vienne uploads/Voyage/ voyage-en-orient-nerval.pdf
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- Publié le Mai 16, 2021
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