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Daniel bensaid eloge de la politique profane

Ce texte est une reprise d ? un extrait d ? Éloge de la politique profane Albin Michel Dans les années soixante-dix ils annoncèrent l ? e ?ondrement du paradigme politique de la modernité C ? est par là sans doute qu ? ils nous touchent qu ? ils nous sont proches mais aussi parfois qu ? ils nous irritent et nous irritent contre nous-mêmes Rejetons de rescapés de survivants de miraculés nous avons été nourris aux grandes sagas de l ? émancipation des communards à l ? assaut du ciel d ? Octobre et des trains blindés de la guerre civile de la Longue Marche et de la Sierra de Teruel des guerres de libération Autrement dit nous sommes venus à la politique au c ?ur d ? une séquence à forte intensité stratégique Le problème du pouvoir était ou semblait posé dans l ? urgence des partages du monde du tracé des territoires des a ?rontements systémiques des insurrections urbaines communes ou de l ? encerclement des villes par les campagnes L ? histoire nous mordait la nuque avons-nous dit Illusion lyrique erreur sur les rythmes confusion des désirs et des réalités Pourtant cette impatience juvénile avait sa part de vérité Elle portait l ? intuition d ? un moment propice Loin que les désastres du siècle aient été une f? cheuse parenthèse sur la voie triomphale du progrès nous naissions dans un intermède propice une sorte de sursis dans la course à la catastrophe annoncée Cette part de vérité hélas n ? a cessé de grandir depuis C ? est le sentiment d ? un rendez-vous manqué d ? une perte peut-être irrémédiable qui rôde derrière les paradis arti ?ciels et les béatitudes super ?cielles des années soixante-dix Au moment des libérations consécutives à l ? ébranlement des années ici comme symbole d ? une secousse universelle de Prague à Da Nang via Mexico et Berkeley au moment dis-je o? s ? étend le domaine des politiques ou la politisation gagne le privé o? tout prétend-on na? vement devient politique se prépare l ? e ?ondrement de ce que d ? aucuns appelaient les horizons d ? attente Les termes étaient inexacts Ils imputaient à une crise des temps et des temporalités ce qui était en réalité un a ?aissement et un obscurcissement des horizons stratégiques et qu ? on désigne depuis de manière inappropriée comme une crise de la politique C ? est bien la stratégie qui est en cause Car une politique sans stratégie ne peut être rien d ? autre qu ? une gestion apeurée d ? un quotidien qui se répète et pia ?e sur place comme l ? avait déjà éprouvé Blanqui au lendemain de l ? écrasement de la Commune Les années quatre- vingt sont bien celle d ? un degré zéro de la stratégie non seulement des stratégies de subversion mais contrairement aux apparences des stratégies mêmes de la domination Car leurs logiques sont on l ? a souvent fait