Agamben l x27 amitie Giorgio Agamben L'Amitié Traduit de l'italien par Martin Rue ?L'amitié est si étroitemet liée à la dé ?nition de la philosophie que l'on peut dire que sans elle la philosophie ne serait pas possible La relation intime entre amitié et

Giorgio Agamben L'Amitié Traduit de l'italien par Martin Rue ?L'amitié est si étroitemet liée à la dé ?nition de la philosophie que l'on peut dire que sans elle la philosophie ne serait pas possible La relation intime entre amitié et philosophie est si profonde que celle-ci inclut le philos l'ami dans son nom même Or comme il arrive souvent dans les cas de proximité excessive la philosophie risque de ne pas pouvoir venir à bout de l'amitié Dans le monde classique cette promiscuité et ce caractère presque consubstantiel de l'ami et du philosophe allait de soi et c'est certainement dans une intention en un sens archa? sante qu'un philosophe contemporain a pu écrire - au moment de poser la question extrême qu'est-ce que la philosophie - qu'il s'ag? t là d'une question à traiter entre amis En fait aujourd'hui la relation entre amitié et philosophie a été frappée de discrédit et c'est avec une espèce d'embarras et de mauvaise conscience que ceux qui font profession de philosopher tentent de régler leurs comptes avec ce partenaire incommode et pour ainsi dire clandestin de leur pensée Il y a plusieurs années nous avions décidé avec mon ami Jean-Luc Nancy d'échanger des lettres sur le thème de l'amitié Nous étions persuadés que c'était la meilleure façon d'approcher et d'une certaine manière de mettre en scène un problème qui semblait se dérober à un traitement analytique J'écrivis la première lettre et ce ne fut pas sans inquiétude que j'attendis la réponse Je ne saurais essayer de comprendre ici les raisons ou les méprises peut-être pour lesquelles la lettre de Jean-Luc signi ?a la ?n de ce projet Mais il est certain que notre amitié - qui selon nos plans aurait dû nous o ?rir un accès privilégié au problème - constitua plutôt un obstacle Et d'une certaine maière au moins provisoirement elle en prit ombrage C'est probablement un malaise analogue qui poussa Jacques Derrida à choisir comme leitmotiv de son livre sur l'amitié une formule sibylline que la tradition attribue à Aristote et qui nie l'amitié dans le geste même par lequel elle l'invoque ô philoi oudeis philos mes amis il n'y a pas d'amis Un des thèmes de ce livre est en e ?et la critique de ce que l'auteur dé ?nit comme la conception phallocentrique qui domine la tradition de notre philosophie politique Alors que CJacques Derrida travaillait encore au séminaire dont est né ce livre nous avions discuté tous les deux de ce curieux problème philologique que posait justement la formule ou l'énigme en question Le passage est cité entre autres par Montaigne et par Nietzsche qui l'aurait pris chez Diogène La? rce Pourtant si nous ouvrons une édition moderne des Vies doctrines et sentences des philosophes illustres nous ne trouvons pas au chapitre consacré à la biographie d'Aristote V la phrase en question mais une phrase en apparence presque identitque dont la signi ?cation est néanmoins di ?érente et bien moins énigmatique hô philoi oudeis philos celui qui a beaucoup

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