Langue parlee et langue ecrite

LANGUE PARLEE ET LANGUE ECRITE par André MARTINET Lorsqu ? un linguiste déclare que pour comprendre ce qu ? est le langage humain il convient d ? étudier en priorité les langues telles qu ? on les parle lorsqu ? il rappelle que les enfants parlent la langue avant de l ? écrire et de la lire que par le monde beaucoup d ? adultes ne savent ni lire ni écrire qu ? il y a eu et qu ? il y a encore beaucoup de peuples qui parlent bien sûr mais n ? ont pas d ? écriture on l ? écoute poliment mais le plus souvent avec le sentiment qu ? il cultive le paradoxe Tout ce qu ? il dit n ? est certes pas niable mais ne convainc pas que la langue telle qu ? on la parle ait une existence indépendante de la réalité qu ? elle décrit Il faudra pour qu ? on commence à la saisir comme distincte qu ? elle se présente sous la forme de mots écrits séparés les uns des autres par des blancs Pour un Français une chaise est un objet bien connu Il y a identité absolue entre cet objet et le terme qui le désigne Essayer de dissocier l ? objet et le terme c ? est faire de la philosophie ce n ? est plus vivre le monde Si on lui demande de but en blanc Qu ? est-ce qu ? une chaise ? il répondra après une seconde d ? étonnement Une chaise ? c ? est une chaise ? A moins que le questionneur se révèle par son accent comme un étranger une sorte d ? in ?rme Dans ce cas on o ?rira non sans condescendance une explication Pour savoir à tout moment ce dont il parle le linguiste s ? est vu contraint de distinguer entre l ? objet lui-même la chaise qui se tient là sur ses pieds l ? idée que s ? en fait celui qui parle et les sons qui lui permettent de le désigner Dans son jargon l ? objet est le référent l ? idée est le signi ?é les sons sont le signi ?ant Ce qui en tout cas lui para? t indispensable c ? est de ne pas confondre la réalité indépendante de la façon dont une langue donnée en désigne les éléments et la langue en cause qui organise cette réalité à sa façon En face du linguiste nous avons celui qui parle sa langue à l ? exclusion de toute autre ou qui traite toute langue étrangère comme un calque de la sienne Pour lui il ne peut être question de dissocier la chose et les sons qui lui correspondent dans le parler le mot et la chose doivent se confondre le mot ne doit pas traduire la chose mais être la chose de façon que parler ne soit pas autre chose que vivre le monde en commun L ? optique change

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