L'oeuvre des Ingénieurs du Corps des mines (1794-1894) par Louis Aguillon Ce te

L'oeuvre des Ingénieurs du Corps des mines (1794-1894) par Louis Aguillon Ce texte a été publié initialement dans "Ecole Polytechnique, Livre du Centenaire (1794-1894)", tome III, Gauthier- Villars, 1897. Il a été mis sur le web en 2002 par Robert Mahl. Les morceaux de biographies ont été séparés du document principal et sont accessibles par des hyperliens.. Institué avant l'Ecole Polytechnique, le Corps des Mines s'y est recruté depuis qu'elle a été créée. La situation du Corps et des membres qui le composent ne laisse pas de surprendre au premier abord. En outre des mines, pour lesquelles il a été formé, il s'occupe réglementairement d'usines, d'eaux minérales, de géologie, de machines à vapeur, de chemins de fer et d'enseignement technique. Son rôle normal en ces matières est de surveillance plus que d'action. Mais nombre de ses membres quittent le contrôle officiel pour la direction privée des entreprises; d'inspecteurs ils deviennent inspectés. D'autres, à peu près aussi nombreux, cultivent les sciences pures, sciences mathématiques, physiques et chimiques, sciences naturelles inorganiques, soit exclusivement, soit simultanément avec leurs services dans le Corps. Tout cela tient, d'une part, à la nature même des choses et à leur développement historique, et, d'autre part, aux conditions de recrutement du Corps. L'inspection des mines, qui est au demeurant sa raison d'être première, l'origine de ses autres occupations, est, du reste, d'une nature spéciale comme l'industrie extractive elle-même; et c'est ce qu'il ne sera pas inutile tout d'abord de rappeler. L'exploitation des mines occupe une place à part dans les entreprises humaines; elle se distingue entre toutes par des caractères propres. Ces substances minérales, rares, indispensables au développement des sociétés, ne se reproduisant pas, que l'industrie extractive a pour objet de fournir, le mineur doit les atteindre et les sortir au jour par un travail de destruction de la croûte terrestre, qui entoure de dangers continus, spécialement graves, le personnel que l'on y emploie, aussi bien que les personnes et les choses de la surface; et ces dangers s'accroissent de l'obscurité profonde au milieu de laquelle l'oeuvre doit se poursuivre. A ces conditions techniques et matérielles de l'exploitation des mines vient s'ajouter le conflit d'intérêts résultant de la superposition de deux modes d'utilisation de la terre : la jouissance normale de la surface par l'un, et la destruction du tréfonds, pour son exploitation, par un autre. Aussi, de tous temps et dans tous les pays où l'industrie extractive a pris quelque développement, les pouvoirs publics ont dû constituer une administration spéciale pour instituer la propriété minière et en surveiller l'exploitation dans le but d'atténuer, sinon de supprimer complètement les conséquences fâcheuses qui lui sont inhérentes. Le domaine du mineur ne peut, d'autre part, se restreindre à la seule extraction des substances minérales; il comprend de multiples travaux et opérations qui s'y rattachent. Les administrations constituées en vue principalement de l'exploitation des mines ont dû, de leur côté, étendre simultanément leurs fonctions dans des directions et pour des buts analogues. Tout d'abord, l'essai des substances minérales, constituant l'analyse minérale ou la docimasie, et plus encore leur traitement, qui forme la métallurgie ou plus généralement la minéralurgie, font partie du domaine naturel du mineur. Il ne peut se passer, pour la recherche et l'exploitation des gîtes, de tout ce groupe de sciences placées entre les sciences physiques et les sciences naturelles : la minéralogie, la géologie, la paléontologie ; quelles que puissent être la grandeur et la portée de leur culture purement spéculative, ces sciences, dans leur application aux entreprises humaines, se rattachent plus spécialement et presque exclusivement à l'oeuvre du mineur. Si d'ailleurs elles peuvent être cultivées et si elles progressent, comme toutes autres, par le seul effort des individus qui s'y adonnent, on n'en obtient tous les fruits pratiques que lorsque certains de leurs résultats sont coordonnés dans des conditions de généralité et d'extension qui ne peuvent guère aboutir sans une intervention des pouvoirs publics et partant de ces administrations constituées pour la surveillance des mines. A toutes ces choses qui rentrent dans le domaine des mines, qui ressortent immédiatement des conditions de Corps des mines : les ingenieurs de polytechnique au 19 eme siecle https://www.annales.org/archives/x/oeuvre.html 1 sur 70 27/05/2022 à 12:24 leur exploitation, sont venues, par la suite des temps et le développement de l'industrie extractive, s'en adjoindre d'autres qui, nées pour et par les mines, sont parties de là pour faire dans le monde un chemin que leurs débuts dans l'industrie originaire n'auraient pas toujours permis de pressentir. Il suffira de mentionner que pour l'exploitation des mines ont été projetés et établis les premières machines à vapeur et les premiers chemins de fer. Dans un autre milieu, dont l'importance va toujours grandissant, les mineurs peuvent aussi rappeler que, par et pour les mines, ont été constituées les premières institutions de prévoyance en faveur des ouvriers, en vue de les garantir contre les accidents, la maladie et la vieillesse; c'est dans les mines qu'on a inauguré, et poursuivi d'une façon plus particulière, la solution de ce qu'on appelle aujourd'hui les questions sociales, c'est-à-dire la recherche des moyens les plus propres à rendre la vie plus facile et plus douce à ceux qui l'abordent dans les situations les moins heureuses. Les conditions mêmes de l'exploitation des mines, les sciences et connaissances qui lui sont indispensables, forment tout un ensemble à la fois si particulier, si complexe et si étendu que de tout temps, quel qu'ait pu être l'état de l'instruction générale, un enseignement spécial aux choses des mines a été jugé nécessaire dans les pays qui se sont préoccupés du développement de leur industrie extractive, et ce dernier trait achève de caractériser comme de particulariser cette industrie. Cet enseignement est également un de ces objets qui ne peut généralement réussir qu'avec le concours des pouvoirs publics et l'intervention directe des administrations qui en dépendent. A cette diversité et à cette spécialité des choses et des nécessités des mines correspond la multiplicité des attributions de ceux qui ont charge de leur surveillance. Leurs fonctions prennent une importance particulière par la nature de l'inspection qui leur est confiée. Il ne peut s'agir d'assurer l'observation littérale d'un règlement simple, qui suffit à tout prévoir et ne nécessite, pour le faire respecter, qu'un peu de conscience et de bonne volonté. Dans cet inconnu perpétuel sous les incertitudes duquel le mineur doit poursuivre un gîte qui, si fréquemment, se dérobe à lui, dans ces changements continus qu'amène dans la mine la destruction persistante de la croûte terrestre, il n'est pas de texte réglementaire pouvant s'appliquer à toutes les contingences. Il faut, dans l'innombrable variété des circonstances qui peuvent se produire, que, avec une liberté relative, l'inspecteur des mines devienne fréquemment, en quelque sorte, le collaborateur de l'exploitant. Leurs vues apparaissent pourtant comme distinctes; celui-ci se préoccupera surtout du prix de revient et du rendement ; celui-là ne devra veiller qu'à la sécurité ; l'inspecteur ne peut cependant pas et il ne doit pas oublier qu'il méconnaîtrait les intérêts les plus vitaux pour lesquels ses fonctions doivent s'exercer, s'il ne savait imposer que des solutions pouvant menacer gravement dans sa vitalité et par suite restreindre ou détruire l'industrie extractive. L'histoire des mines est du reste là pour montrer que, pour inconciliables qu'apparaissent a priori ces deux aspects d'une même chose, ils se résolvent bien souvent en une heureuse harmonie; on obtient fréquemment le plus de sécurité avec le moindre prix de revient, lorsque les solutions sont recherchées par gens d'égale bonne foi et de compétence éprouvée. Mais ce n'est pas tout de suite qu'on le reconnaît, ni sans froissements pour les uns comme pour les autres. Plus ardue est encore l'oeuvre de l'inspection lorsque, pour mieux atteindre son but, elle n'entend pas seulement remédier à des maux devenus évidents et intolérables, mais chercher, dans des vues d'avenir, à provoquer des améliorations, dont la nécessité immédiate n'apparaît pas encore, dont la convenance sera même discutée. Il faut alors plus de circonspection pour rassurer les intérêts et plus de science pour justifier les solutions. Une tâche ainsi comprise n'est certes point sans grandeur; l'inspecteur n'y rencontre pas toutefois les satisfactions que tarit d'autres peuvent trouver dans leur travail. Le constructeur voit sortir son édifice du sol pour défier le temps dans la stabilité que ses calculs doivent lui assurer; l'artiste contemple l'inspiration de son génie matérialisée dans l'éternelle beauté du marbre ; l'officier, pour soutenir ses efforts quotidiens, peut rêver au jour où, avec la gloire, il obtiendra la réalisation de son continuel désir; l'inspecteur, si haute que soit sa mission, ne peut avoir que l'austère satisfaction du devoir accompli et du service rendu. A ceux qui ont la foi dans leur oeuvre, elle peut suffire. Ainsi s'explique que nos pouvoirs publics aient entendu recruter à l'Ecole Polytechnique le Corps des Mines et, par là déjà, on comprend beaucoup de ses attributions; comment les autres lui sont advenues, comment il Corps des mines : les ingenieurs de polytechnique au 19 eme siecle https://www.annales.org/archives/x/oeuvre.html 2 sur 70 27/05/2022 à 12:24 s'est acquitté de toutes, c'est ce que uploads/s1/ corps-des-mines-les-ingenieurs-de-polytechnique-au-19-eme-siecle 1 .pdf

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  • Publié le Apv 09, 2021
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