HAP 1) Comment la musique est devenue « romantique » Le terme « romantique » es

HAP 1) Comment la musique est devenue « romantique » Le terme « romantique » est utilisé aujourd’hui pour décrire une musique qui se distingue par sa sensibilité, sa fièvre lyrique et son expression de sentiments exacerbés, notamment celle du XIXe siècle. D’abord rattaché à la nature et au concept de paysage (penser surtout au jardin anglais), le terme en est venu progressivement à qualifier des objets musicaux à la suite d’un transfert d’abord artistique (de la peinture à la musique), puis culturel (des pays britanniques et germaniques à la France), en plus d’avoir été influencé par les courant politiques et idéologiques. *Poétique du passé : En France, le terme a été associé au genre de la romance, au souvenir d’un passé pittoresque et idéalisé. La nostalgie devient un principe d’écriture, avec la récurrence thématique pour instituer un certain rapport au temps dans une œuvre. *Parallèle entre la contemplation de la nature et de la musique (l’imagination qui oublie un peu l’objet contemplé pour se complaire dans les images qu’il lui a inspirées) –le terme « romantique » apparaît pour la première fois en tant qu’adjectif dans Les rêveries du promeneur solitaire, ouvrage inachevé de Jean-Jacques Rousseau (1776-78) *Importance de la nature dans son potentiel métaphorique pour les artistes romantiques Plusieurs sens différents se sont combinés pour aboutir à une certaine conception du romantisme autour du 1830 ; plusieurs œuvres surgies à ce moment témoignent de cette stabilité esthétique :  Guillaume Tell, dernier opéra de Rossini, qui opère une véritable fusion des paradigmes romantiques (« orchestre-paysage » qui conjugue évocation historique, assimilation française des styles étrangers et mise en valeur de la liberté sur le plan esthétique)  Symphonie fantastique de Berlioz avec son thème d’idée fixe qui entraîne l’auditeur dans un passé intra-diégétique (qui est situé à l’intérieur de la narration, qui en fait partie et a une incidence sur le cours de l’histoire) et la portée métaphoriquement révolutionnaire que le compositeur a voulu lui donner La notion de romantisme correspond plutôt à une façon particulière de dire et de concevoir la musique, qu’à un style musical en particulier. 2) Esthétique du fragment  Notion d’inachèvement, œuvre qui “conclut” sur une ouverture, sur quelque chose d’autre qu’elle-même (dans son lied “Im wunderschönen Monat Mai” no. 1, Dichterliebe, 1840, Schumann se permet de terminer par un accord en suspension une œuvre qui n’a pas non plus un début précis, car la partie de la voix commence comme au milieu d’une phrase, ce qui défie les codes de l’époque)  Concision vs monumentalité (Le Romantisme est une esthétique faite de conflit et de contraste, contrairement à la concision du Classicisme)  Caractère éphémère, ce qui ne s’inscrit pas dans la durée  Logique de l’assemblage (Vingt-quatre préludes de Chopin, 1835-39, des préludes sans fugue qui s’enchaînent)  Désordre (selon Schlegel le chaotique est l’esthétique du romantisme)  Critique: l’esthétique du fragment c’est aussi dire quelque chose d’autre qui vient de dehors intervenir et interpeller dans l’œuvre  L’incursion des souvenirs : On le trouve dans l’œuvre de Schumann, surtout son cycle “Carnaval op. 9” (1834-35). Schumann lui-même avait une personnalité brisée, pour laquelle il s’est invité deux personnages qui font apparition dans cette œuvre pour incarner les deux facettes musicales du compositeur : Eusebius et Florestan. Dans “Florestan” (no. 6) on trouve aussi un passage qui est la citation d’une des premières œuvres du compositeur (“Papillons” op. 2), et qui cherche à recréer cette sensation du souvenir Il n’y a plus de canevas commun (comme avec la forme sonate classique) mais un projet commun, une volonté propre à tous les créateurs. * L’œuvre romantique ne recherche pas une perfection formelle, comme celles de la période classique; il peut y avoir des éléments dérangeants qui cherchent à perturber l’auditeur. Cette œuvre peut être éclatée, fragmentée, pleine de ruptures, et cette esthétique romantique on peut l’apprécier au point de vue musical avec les ruptures de tonalité par exemple. 3) Le compositeur comme génie Avant le XIXe, les compositeurs écrivaient dans et pour un contexte, et dépendaient des ressources matérielles mises à leur disposition. À la fin du XVIIIe, dans le monde de la musique « sérieuse » on commence à construire une nouvelle image du créateur génie requérant une autonomie et un respect sans précédent. Les compositeurs commencent à penser leurs œuvres comme des « produits finis », au même titre qu’un roman, une peinture ou une sculpture (en 1842, dans la préface de sa Symphonie écossaise, Mendelssohn demande que l’œuvre soit jouée en une fois, sans longues interruptions entre les mouvements à fin que l’unité en soit préservée). Amorcé au XIXe, le phénomène parallèle de l’évolution du rapport des musiciens avec la partition vers une interprétation stricte du texte musical trouve son aboutissement au début du siècle suivant : des compositeurs comme Stravinsky exigent publiquement le respect de ses partitions et dénoncent les musiciens qui « déforment » leur musique. Le compositeur comme figure d’autorité se caractérise par :  L’utilisation de plus en plus d’indications sur les partitions, pour désigner précisément ses intentions  Des compositions adressées aux connaisseurs (des œuvres difficiles, déjà fatigants pour les connaisseurs et insupportables pour les simples amateurs)  La définition des conditions matérielles de leur musique par les compositeurs eux- mêmes Ce renversement de perspectives a un impact profond dans la conception de l’œuvre en tant que telle. La musique ne se plie plus aux moyens mis à sa disposition ; elle commence à exister pour elle-même, indépendamment des ressources disponibles, des attentes du public et du temps présent (le fait d’écrire pour l’avenir et pas pour son époque). « Mais si elle (la musique de Beethoven) ne plaît pas actuellement, c’est que le public n’est pas assez cultivé pour en saisir toutes les beautés supérieures ; dans quelques milliers d’années elle ne manquera pas de produire son effet ! » « Ce n’est pas pour vous ! C’est pour les temps à venir » Beethoven Le cas Beethoven (période viennoise) : le compositeur était souvent célébré pour des œuvres spécialement savantes et même parfois difficiles. Il était arrivé à Vienne doté de bonnes relations et d’honneurs, ce qui l’a mis dans une forte position sociale qui rendait crédibles les aspects de son œuvre perçus comme controversés. De connivence avec ses protecteurs, Beethoven innova dans le domaine de l’art d’écouter la musique, ce qui modifia en retour la relation compositeur-protecteur. Pour reconnaître la valeur de la musique de Beethoven, ses contemporains devaient l’évaluer par rapport à des critères nouveaux, taillés sur mesure pour lui. Beethoven lui-même s’efforçait de restructurer les catégories esthétiques et les conventions d’écoute de la musique dans des voies qui correspondaient davantage à son approche personnelle. Une prédisposition culturelle favorable au génie de Beethoven fut élaborée durant les dix années qui ont suivi son arrivée à Vienne. La prétention de Beethoven à la légitimité et à la reconnaissance n’aurait jamais acquis une telle puissance si elle n’avait pas été ancrée à la fois sur ses dons exceptionnels mais aussi sur tout un ensemble de pratiques, discours critique sur la musique, technologie musicale, mis en œuvre par le compositeur et par son « parti personnel » (ses protecteurs et autres assistants musiciens), un réseau complexe orienté vers la production et la réception de son talent. Il y a dans la carrière de Beethoven, une première phase dans l’élaboration de l’image du compositeur génie ; il travailla à construire une image de lui-même comme individu autonome –ce qui était en contradiction avec le modèle de musicien-serviteur de la Vienne du XVIIIe- et comme compositeur se créant lui-même, et en faisant ça contribue au déplacement des fonctions d’évaluation, d’autorité critique et de mise en place des modèles de la sphère du protecteur (l’institution de la noblesse) à celle du compositeur et musicien (l’institution naissante d’un monde autonome de la musique). * Beethoven écrit un peu contre, au-delà de ce qui est possible pour son époque par rapport à l’effectif et à ce qui est jouable pour la facture des instruments de son temps, contrairement à Bach qui devait composer en fonction d’un ensemble, pour un contexte très précis, une occasion particulière. La vision de Beethoven de la musique est plutôt idéaliste. * Fin du classicisme-romantisme : vision de l’artiste comme un génie qui a été frappé soudainement par l’inspiration, idéalisation de l’art créateur * Précisément, l’apparition de l’artiste génial, entièrement voué à sa muse au mépris des conventions bourgeoises, est simultanée avec le développement de la société bourgeoise. D’ailleurs, ce n’est que par l’existence de ce public rémunérateur que le musicien peut échapper à son statut curial, l’artiste dépendant désormais de ses succès publics plus que des faveurs d’un maître. Pour autant, cette nouvelle liberté est ambivalente. 4) Évolution du concert et émergence du canon Les salles de concert et d’opéra au XVIIIe étaient une extension du salon. Le public n’avait pas encore l’idée d’une écoute respectueuse, mais il y assistait plutôt pour des soirées musicales très longues avec un programme assez incongru (selon uploads/s3/ 1-comment-la-musique-est-devenue-romantique.pdf

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