1 Laïcité, liberté d’expression, liberté de presse Les textes fondamentaux ① Le
1 Laïcité, liberté d’expression, liberté de presse Les textes fondamentaux ① Le socle de notre république : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789) Article 11 : La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme ; tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. ② Article premier de la Constitution du 4 octobre 1958 La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. […] ③ La laïcité, clé du pacte républicain « Les trois valeurs indissociables que [la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État] définit en fond la pierre angulaire de notre pacte républicain. La liberté de conscience d’abord qui permet à chacun de choisir sa vie spirituelle ou religieuse ; l’égalité en droit des options spirituelles ou religieuses, ensuite qui interdit toute discrimination ou contrainte ; enfin, la neutralité du pouvoir politique qui reconnaît ses limites en s’abstenant de toute ingérence dans le domaine spirituel ou religieux […]. La laïcité, c’est la liberté, mais c’est aussi l’égalité entre les citoyens quelle que soit leur croyance […]. Mais la laïcité, c’est aussi et surtout la fraternité. Parce qu’elle reconnaît les différences culturelles, spirituelles, religieuses, elle a aussi pour mission, et c’est la plus noble de toutes, de créer les conditions permettant à tous de vivre ensemble dans le respect réciproque et dans l’attachement commun à un certain nombre de valeurs. » Bernard Stasi, extrait de l’article « Laïcité », Guide républicain. L’idée républicaine aujourd’hui, 2004 ④ La loi du 29 juillet 1881, sur la liberté de la presse est le texte de référence sur la liberté d'expression. Son article 1 est très clair : « L'imprimerie et la librairie sont libres », on peut imprimer et éditer ce qu'on veut. Mais là encore, après le principe viennent les exceptions (voir la fin de l’article 11 de la DDHC « sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi »). La première est l'injure (« X est un connard »), puis viennent la diffamation ou la calomnie, c'est‐à‐dire le fait de porter atteinte à l'honneur d'une personne (diffamation, par exemple « X a une mauvaise haleine et ronfle »), ou d'imputer à quelqu'un des actions qu'il n'a pas commises, le tout dans le but de lui faire du tort (calomnie, par exemple « X a volé dans la caisse de l'entreprise »). Les articles 23 et 24 de cette même loi expliquent que « seront punis comme complices d'une action qualifiée de crime ou délit ceux qui en font l'apologie1 ». Dans cette liste on trouve : « ‐ l'apologie (…) des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité […] ‐ la provocation à la discrimination, la haine ou la violence envers des personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non‐appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ou encore leur orientation sexuelle ou leur handicap ». Dernier cas particulier : l'apologie du terrorisme, plus durement sanctionné depuis la loi de novembre 2014 sur la lutte contre le terrorisme [y compris sur les réseaux sociaux]. 1 faire l’apologie = défendre, justifier, approuver En résumé, la liberté d'expression (et par là la liberté de la presse) ne permet pas d'appeler publiquement à la mort d'autrui, ni de faire l'apologie de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité, ni d'appeler à la haine contre un groupe ethnique ou national donné. On ne peut pas non plus user de la liberté d'expression pour appeler à la haine ou à la violence contre une religion, envers un sexe, une orientation sexuelle ou un handicap. Mais, en dehors de ces limites tout à fait compréhensibles, chacun « peut donc parler, écrire, imprimer librement » (art.11 de la DDHC de 1789) et « L'imprimerie et la librairie sont libres » (art.1 de la loi du 29 juillet 1881) 2 Le cas complexe de l’humour et de la caricature La liberté d'expression est donc une des libertés fondamentales de notre République, avec les limites déterminées par la loi. Néanmoins, le cas de Charlie Hebdo pose un autre type de question, celui de l'humour et de ses limites. La justice autorise en effet le droit à l'excès, à l'outrance et à la parodie lorsqu'il s'agit de fins humoristiques. Ainsi, en 1992, le tribunal de grande instance de Paris estimait que la liberté d'expression « autorise un auteur à forcer les traits et à altérer la personnalité de celui qu'elle représente », et qu'il existe un « droit à l'irrespect et à l'insolence ». Il appartient donc souvent aux juges de décider ce qui relève de la liberté de caricature et du droit à la satire dans le cadre de la liberté d'expression. En 2007, Charlie Hebdo devait répondre devant la justice des caricatures de Mahomet qu'il avait publiées dans ses éditions. Le tribunal avait jugé que l'hebdomadaire avait le droit de publier ces dessins dans ses conclusions qu’on appelle « attendus ». « Attendu que le genre littéraire de la caricature, bien que délibérément provocant, participe à ce titre à la liberté d'expression et de communication des pensées et des opinions (…) ; attendu qu'ainsi, en dépit du caractère choquant, voire blessant, de cette caricature pour la sensibilité des musulmans, le contexte et les circonstances de sa publication dans le journal “Charlie Hebdo”, apparaissent exclusifs de toute volonté délibérée d'offenser directement et gratuitement l'ensemble des musulmans ; que les limites admissibles de la liberté d'expression n'ont donc pas été dépassées (…) » On peut donc user du registre de la satire et de la caricature, dans certaines limites. Dont l'une est de ne pas s'en prendre spécifiquement à un groupe donné de manière gratuite et répétitive. En résumé, la loi n'interdit pas de se moquer d'une religion ‐ la France est laïque, la notion de blasphème n'existe pas en droit ‐ mais elle interdit en revanche d'appeler à la haine contre les croyants d'une religion, ou de faire l'apologie de crimes contre l'humanité. Les protestations et les manifestations hostiles contre Charlie Hebdo et la France se sont exacerbées avec la publication par le journal, dans son numéro du 2 septembre dernier, des caricatures danoises du prophète Mahomet déjà parues 2005. Le tout se faisant dans le cadre de l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015 qui avaient, entre autres, décimé la rédaction du journal satirique. Pourtant Charlie Hebdo ne s’attaque pas seulement à l’islam. La religion catholique est, elle aussi, régulièrement moquée comme le montre cette couverture du 13 mars 2013 après l’élection du pape François. Une des caricatures les plus controversées du dessinateur danois Kurt Westergaard : le prophète Mahomet représenté avec une bombe sur son turban = allusion aux fondamentalistes islamistes (comme le groupe terroriste Al-Qaïda) qui commettent des attentats au nom de l’islam 3 Un cas concret d’usage de la caricature pour faire débat sur la liberté d’expression Le cas d’Aylan Kurdi Né en 2012, Aylan Kurdi est un garçon syrien d'origine kurde, originaire de Kobané et réfugié de la guerre civile syrienne. Il est mort noyé le 2 septembre 2015 à l'âge de trois ans. L’embarcation dans laquelle il se trouvait avec sa famille devait traverser la Mer Egée pour trouver refuge en Grèce. Les réfugiés syriens, trop nombreux dans ces embarcations de fortune ont fait naufrage. La photographie de sa dépouille gisant sur une plage de Turquie entraîne une onde de choc mondiale en pleine crise des réfugiés et relance la question de l'accueil des migrants syriens. Les clichés du photographe turc Nilüfer Demir sont diffusés d’abord par les réseaux sociaux avant d’être repris par les journaux du monde entier. Cette actualité terrible n’a pas échappé aux dessinateurs de presse et a donné lieu à des caricatures. Le dessinateur Emmanuel Chaunu a reçu des menaces de mort pour cette caricature. Un dessin fort qui répondait bien à la définition du dessin de presse, celui de pousser l'actualité dans ses contradictions. Ce que le texte ne peut pas faire. Charlie Hebdo suscite encore une vive polémique pour cette caricature qui n’est pourtant pas drôle du tout. 9 mois après l’attentat qui a décimé une partie de sa rédaction et qui a entraîné un élan de sympathie « Je suis Charlie », c’est l’inverse avec le #JeNeSuisPasCharlie. Thème du débat : Dans le cas des caricatures d’Aylan, les dessinateurs de presse sont-ils allés trop loin ? Ont-ils outrepassé la liberté d’expression ? Caricature de Riss dans Charlie Hebdo du 9 septembre 2015 Caricature de Chaunu parue dans le quotidien L’Union du 6 septembre 2015 4 Eléments réservés au professeur pour nourrir le débat Justification de Chaunu « Je voulais faire un dessin qui confronte deux actualités, en rendant hommage à cet uploads/s3/ activites-laicite-liberte-expression-liberte-presse-caricatures-nov2020.pdf
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- Publié le Dec 28, 2022
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