JDD | 3 novembre 2013 PARIS | VII TÉLEX Du street art à la BNF Décidément, le 1

JDD | 3 novembre 2013 PARIS | VII TÉLEX Du street art à la BNF Décidément, le 13e aime le street art : alors que la tour Paris 13, entièrement graffitée, a fermé ses portes – 25.000 visiteurs en un mois –, un autre événement s’annonce… Le photographe JR sera à Paris, du 10 au 12 novembre, sur le parvis du MK2 Bibliothèque. L’artiste, célèbre pour ses portraits géants, accrochés dans les rues, attendra les amateurs dans un camion. Chacun pourra se faire tirer le portrait et l’accrocher ensuite sur les murs du cinéma. Des maîtres- horlogers à Paris L’artisanat d’art à l’honneur au salon Les Montres, place Saint-Germain-des-Prés. Pour l’occasion, des maîtres-horlogers travailleront devant le public et montreront toute leur minutie. Du 7 au 9 novembre, gratuit. www.boutiquelesmontres.com Christian Liaigre, nature brute DESIGN Le décorateur a ouvert, il y a peu, une nouvelle galerie dans le 7e arrondissement. Un écrin minimaliste pour souligner la beauté d’objets façonnés dans des matérieux nobles PaScaLE caUSSat Bronzes masculins et vases d’al- bâtre doux… Dans sa nouvelle gale- rie située dans le 7e*, le décorateur Christian Liaigre présente actuel- lement deux artistes aux créations complémentaires, Éric Schmitt et Sophie Lafont. En ouvrant cet espace il y a quelques mois, le plus international des architectes d’inté- rieur français souhaitait un lieu in- timiste pour présenter ses propres pièces rares ou des créateurs dont il apprécie la rigueur. Cet adepte du minimalisme et de l’épure s’en explique avec un œil rieur et une franchise décomplexée : « J’expose du vrai travail d’atelier, qui n’a rien à voir avec l’art conceptuel, les installations, la vidéo ou le mobi- lier de réfectoire surestimé par les marchands à la Charlotte Perriand. » En presque quarante ans de car- rière, Christian Liaigre est devenu synonyme d’intérieurs chics aux tons brun et noir, dont les arché- types les plus connus du grand pu- blic sont le restaurant La Société à Saint-Germain-des-Prés à Paris, ou l’hôtel The Mercer à New York. Il a aussi travaillé pour des clients privés aux noms célèbres : Karl Lagerfeld, Roman Abramovich, Rupert Mur- doch… L’homme qui fut un temps éleveur de chevaux insuffle à ses réalisations prestigieuses – tables, canapés, tapis – la force authentique de la nature : soie de Thaïlande, lin d’Asie ou d’Europe du Nord, velours d’Italie, cuir issu des mêmes fournis- seurs qu’Hermès, chêne écocertifié. Défenseur de l’artisanat d’art français « Le bois est le matériau le plus généreux qui soit : il peut se vernir, se sculpter, il vibre, il sent bon… On peut dormir au pied d’un arbre, pas dans une carrière de marbre », ex- plique-t-il dans son hôtel particulier proche de la galerie, qui embaume le parquet ciré. Dans son bureau, des chaises noires témoignent de sa démarche : en chêne sablé teinté à l’encre de Chine, elles sont à la fois un hommage à la noblesse du bois et à la main de l’homme. Christian Liaigre collabore avec une dizaine d’artisans d’art fran- çais. « Cette tradition d’artisanat, c’est ce que viennent chercher nos clients étrangers, car cela fait des siècles que l’on sait faire. Depuis Louis XV jusqu’à Jean-Michel Frank ou Mallet-Stevens, notre style est reconnaissable sans être la répé- tition d’une recette. Les décorateurs américains n’ont pas cette aura », assène le créateur, qui est aussi un entrepreneur à la tête d’une société comptant 50 salariés en France. « Mais je me méfie autant des clients qui veulent des intérieurs de représentation que des hôtels pour businessmen, poursuit-il. Je préfère les hôtels familiaux et les maisons où l’on peut créer une harmonie globale par la circulation entre les pièces, l’éclairage, les œuvres d’art, et grâce aussi au simple plaisir de prendre en main une poignée de porte. » Représentant d’un art de vivre typiquement français, il ne peut s’empêcher de regretter l’absence de chantiers hexagonaux dans ses carnets de commandes. L’effet de la crise, mais pas seule- ment, puisque le fleuron du luxe LVMH fait volontiers appel à des architectes américains comme Peter Marino. Encore un snobisme que Christian Liaigre relève sans s’y attarder, préférant continuer à tracer sa voie. g * 33, rue de Verneuil. Les musées se mettent à la mode SoNIa DESPrEz La mode s’invite de plus en plus dans les musées parisiens. Une tendance d’avenir. Il y a bien sûr l’essor des musées dédiés à la mode ; le palais Galliera, qui vient de rouvrir ses portes en fanfare, présente ainsi une exposition monographique, minimaliste et somptueuse, des robes du créateur Azzedine Alaïa ; les Arts décoratifs offrent, depuis l’été, une très belle rétrospective consacrée aux sous- vêtements. Mais la discipline s’étend : le musée Carnavalet pré- sente « Le Roman d’une garde- robe » ; Miss Dior fera l’objet d’une expo d’art contemporain en novembre au Grand Palais. Et le musée d’Orsay n’a pas désempli en 2012 avec « Les Impressionnistes et la mode ». « Dans les années 1980, se souvient Florence Müller, histo- rienne de la mode et commissaire indépendante de prestigieuses expos de mode, présenter un créa- teur dans un musée était impensable, parce qu’on considérait que la mode était liée au monde du commerce et de la vente. » Retrouver l’ADN d’une maison de couture grâce à son patrimoine Désormais, « on reconnaît la valeur d’un auteur de mode et d’une discipline, estime Olivier Saillard, directeur du palais Galliera. Et d’une manière plus pragmatique, une expo de mode fait beaucoup d’entrées », au point d’élargir le public des musées. « Quand j’ai fait l’exposition Yves Saint Laurent [en 2010, un énorme “carton”] au Petit Palais, se souvient Florence Müller, cette institution qui souffrait un peu de l’ombre que lui faisait le Grand Palais est devenue incontournable. Maintenant aux vernissages d’expos qui n’ont rien à voir avec la mode, il y a un monde fou, des gens qu’on n’y rencontrait pas avant. » Vanessa Clairet, directrice de la galerie Michel Rein, tient un blog qui répertorie les événements où se rencontrent art et mode*. Elle se dit convaincue qu’« aujourd’hui, la jeune génération, connectée via les blogs de mode, Instagram etc., est au fait de la culture mode, beaucoup plus renseignée et amateur des créateurs, et c’est aussi elle qui porte le succès de ces expositions, en font des évé- nements à ne pas manquer ». Et le sujet mode décomplexe : « C’est plus facile de pousser la porte d’un musée pour de la mode que pour de l’art conceptuel, un peu hostile pour beaucoup de gens, observe Olivier Saillard. C’est une discipline vivante : tout le monde s’habille. » Malgré la crise, il reste suffisam- ment d’argent, dans le luxe, pour financer de tels événements. On observe d’ailleurs des différences de nature entre les expositions : cer- taines comme Alaïa, sont des ini- tiatives d’institution, d’autres sont montées en interne par les griffes puis exposées dans des salles de musée louées. Une forme déguisée de promotion tout en gagnant, grâce à la vitrine par exemple d’un Grand Palais, ses lettres de noblesse ? « Les maisons réfléchissent de manière plus sophistiquée que cela, tempère Florence Müller. Elles savent qu’il serait ridicule de doubler ce qu’elles font par ailleurs en publicité. » Les formes d’arrangements entre musées et marques se déclinent en réalité à l’infini, et la démarche, pour les maisons, serait plutôt patrimo- niale : « Elles ont souhaité contreba- lancer la créativité contemporaine avec un regard sur leur propre passé pour créer une différentiation par rapport à la concurrence, définir ses codes, son ADN. » Évidemment, le succès d’une exposition profite aussi à une marque… L’actrice Tilda Swinton à Galliera « Certaines expositions sont émi- nemment commerciales, acquiesce Vanessa Clairet, mais ça peut quand même être intéressant, comme Vuit- ton à Carnavalet, parce que ça fait partie de l’histoire du pays, du siècle. » Et si Azzedine Alaïa a pris son expo au sérieux au point qu’il a annulé une collection pour la préparer, l’ou- verture d’une boutique de la marque, quelques semaines après le vernis- sage, peut difficilement être prise pour un hasard. « Ça n’enlève pas l’intérêt de l’expo, conclut Vanessa Clairet, mais il ne faut pas être dupe. » Le commerce est inhérent à la mode, ce qui a le mérite, au moins, d’être clair, à l’heure où l’art contempo- rain, délaissant souvent le roman- tisme désintéressé qu’on prêtait aux beaux-arts, n’a jamais autant fait spéculer. La bonne nouvelle, c’est qu’il reste beaucoup à explorer. Flo- rence Müller déborde de nouveaux projets et Olivier Saillard s’est fait le champion d’un renouveau créatif en matière de présentation. Pour lui, l’époque des monographies de grands créateurs s’achève et l’heure est à des thématiques « plus trans- versales ». Après une performance entre défilé et œuvre d’art, au palais de Tokyo en 2012, avec l’actrice Tilda Swinton, il imagine déjà de nouvelles formes à mettre en œuvre (toujours avec l’actrice) au palais Galliera. g * Le blog de Vanessa clairet est sur tumblr : vestiaire.tumblr.com artS Les créations de grands couturiers et l’histoire uploads/s3/ jdd-ch-liaigre-pdf.pdf

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