KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 1 Table des matières 03 Bi
KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 1 Table des matières 03 Biographie 28 Œuvres phares 64 Importance et questions essentielles 81 Style et technique 95 Où voir 103 Notes 115 Glossaire 128 Sources et ressources 137 À propos de l’auteur 138 Copyright et mentions KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 2 Kazuo Nakamura (1926-2002) a produit l’une des œuvres les plus variées et les plus originales de sa génération. Né à Vancouver de parents d’origine japonaise, détenu en tant « qu’étranger ennemi » pendant la Seconde Guerre mondiale, puis forcé de se relocaliser en Ontario, Nakamura allait créer des peintures et des sculptures au cours d’une carrière de plus de quarante ans. Inspiré par ses collègues du Groupe des Onze, il oscille constamment entre figuration et abstraction, explorant différents styles et techniques, et cherchant à révéler les lois universelles de la nature exposées par les sciences et les mathématiques. De son vivant, Nakamura jouit d’un succès sans KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 3 GAUCHE : La foule observe des femmes et des jeunes filles japonaises en vêtements traditionnels qui participent à un défilé sur la rue Powell, à Vancouver, en 1937, photographie de Karl Haspel, archives de la Ville de Vancouver. DROITE : Le dévoilement du monument à la mémoire des Canadiens japonais au parc Stanley, à Vancouver, le 9 avril 1920, photographie de Stuart Thompson, archives de la Ville de Vancouver. Le monument, un hommage aux Canadiens japonais qui se sont enrôlés et ont combattu pendant la Première Guerre mondiale, a été conçu par James Benzie. précédent parmi les artistes canadiens japonais; il a aussi ouvert la voie à une nouvelle génération d’artistes contemporains. LES PREMIÈRES ANNÉES Né le 13 octobre 1926, Kazuo Nakamura est un Canadien japonais de deuxième génération (Nisei). Son père, Toichi Nakamura, quitte Hiroshima pour le Canada en février 1911, à l’âge de quinze ans, accompagnant son propre père qui avait fait le voyage au moins deux fois auparavant. Bien que ce dernier soit retourné au Japon après quelques années, Toichi s’est installé à Vancouver dans le quartier connu sous le nom de « Petit Tokyo », une communauté largement autosuffisante où de nombreux immigrants japonais vivaient à l’époque. Comme nombre de ses compatriotes, le père de Kazuo rêve d’une vie meilleure en Amérique du Nord, fuyant les problèmes économiques du Japon, aggravés par l’urbanisation rapide à la fin des années 1800. Or, de nombreux Canadiens voient l’afflux d’immigrants asiatiques au pays, et plus particulièrement en Colombie-Britannique, comme une menace économique et sociale. C’est en septembre 1907 que les attitudes anti-immigration et racistes des Blancs à l’égard des Asiatiques atteignent leur paroxysme, alors que des émeutes éclatent dans les quartiers chinois et japonais de Vancouver. Entre 1908 et 1928, plusieurs accords gouvernementaux sont mis en place afin de limiter le nombre d’immigrants japonais autorisés à entrer au Canada. Toichi Nakamura occupe divers emplois jusqu’à ce qu’il ouvre, avec son frère, un restaurant au cœur du quartier japonais de Vancouver. En 1923, il rentre à Hiroshima pour épouser Yoshiyo Uyemoto et ils reviennent s’établir ensemble à Vancouver la même année. En 1925, naît le premier de leurs cinq enfants (trois fils et deux filles); Kazuo, le cadet, suit de près. En 1935, la Dépression oblige malheureusement la famille à fermer le restaurant et elle quitte le quartier japonais pour s’installer plus au sud, à l’angle de la 23e avenue et de la rue Main. Les Nakamura ouvrent un atelier où ils offrent un service de nettoyage à sec et de confection de robes. Ils logent dans l’espace exigu de l’arrière- boutique et s’intègrent rapidement à une communauté relativement diversifiée1. KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 4 Kazuo Nakamura, Back Alley, Vancouver (Ruelle, Vancouver), 1942, aquarelle sur papier, 22,4 x 30 cm, Musée canadien de la guerre, Ottawa. Dans sa jeunesse, Kazuo Nakamura semble avoir fait l’expérience de la vie urbaine. Ses premières œuvres représentent des points d’intérêt du quartier, comme le grand magasin de surplus militaire sur la rue East Hastings, que l’on retrouve dans First Frost (Premier gel), 1941, le pont de la rue Cambie ou encore différents points de vue de la rue Main. Nakamura suit sa première formation artistique après avoir terminé son cours primaire en 1939. C’est au secondaire, à la Vancouver Technical High School, qu’il s’inscrit au programme d’arts appliqués et étudie le dessin, le dessin mécanique et le design. Le célèbre artiste moderne Jock Macdonald (1897- 1960), enseignant à l’école, aurait possiblement enseigné le design à Nakamura et lui aurait donné des cours particuliers de dessin et de peinture, au moins une fois par semaine en 1940, au début de 1941 et peut-être également en 19422. Parallèlement, l’artiste novice lit attentivement les livres d’art de son oncle, peintre amateur, Shusaku Nakamura. Kazuo s’intéresse particulièrement aux reproductions de peintures impressionnistes françaises, ainsi qu’aux œuvres illustrées dans les magazines d’art japonais auxquels son oncle est abonné3. À l’époque, le jeune Nakamura se procure ses fournitures artistiques grâce aux catalogues de vente par correspondance des grands magasins Simpson et Eaton4. KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 5 Kazuo Nakamura, Strawberry Farm (Fraisière), v.1941, aquarelle sur papier, 22,3 x 30,3 cm, Musée canadien de la guerre, Ottawa. Dans ses premières œuvres, Nakamura dépeint son sujet de manière factuelle et mesurée, n’ajoutant que rarement des fioritures qui pourraient être méprises pour de l’expression personnelle. Ce détachement pourrait être dû à sa formation artistique peu conventionnelle ou au fait qu’il soit toujours en apprentissage de son art lorsqu’il en fait montre. Pourtant, cette particularité se manifeste dans la plupart de ses œuvres ultérieures, peu portées sur la peinture de figures. Seule une poignée de ses premières compositions présentent des personnages qui semblent de toute façon accessoires à la scène. Nakamura a souvent affirmé être un artiste autodidacte, peut-être parce que sa formation initiale est axée sur le dessin et le design5. Les monuments de la ville qu’il dépeint dans ses premières œuvres lui fournissent sans doute le cadre dont il a besoin pour s’exercer à la perspective linéaire. Il raconte que c’est son jeune frère Yukio, apprenant cette technique dans son cours d’art à la John Oliver High School, qui lui a enseigné les rudiments de l’utilisation de grilles et de lignes convergeant vers un point de fuite pour créer un effet de profondeur sur une surface plane6. Nakamura finit par transposer ces leçons aux peintures de paysage qu’il commence à réaliser à l’adolescence et qu’il poursuivra jusqu’à la fin de sa carrière. Par exemple, il se sert des rangs de fraises dans Strawberry Farm (Fraisière), v.1941, comme des lignes parallèles (orthogonales) qui établissent la perspective. La grille du dessinateur et la perspective linéaire éveillent vraisemblablement son intérêt pour la géométrie comme outil de représentation et de compréhension de la nature. Il est difficile de déterminer avec précision quand et comment naît l’intérêt de Nakamura pour la science, élément qui jouera un rôle très important tout au long de sa vie. Certains suggèrent qu’il a suivi les traces de Jock Macdonald, qui s’intéresse à l’étude de la science pour tenter de comprendre les principes sous-jacents de la nature7. Cependant, Nakamura ne semble pas partager le même intérêt que Macdonald pour la dimension spirituelle dont il s’est inspiré pour Etheric Form (Forme éthérique), 1936 (datée de 1934), et d’autres œuvres. Sans doute que Nakamura a choisi de suivre une formation en arts appliqués plutôt qu’en beaux-arts, car il y voit un compromis idéal entre l’art et la science. À ce sujet, il souligne dans une entrevue de 1993 : « Le temps perdu à cause de la guerre et de mon internement m’a poussé à me lancer en art plutôt que de devenir un scientifique professionnel8. » KAZUO NAKAMURA Sa vie et son œuvre par John G. Hatch 6 GAUCHE : Canadiens japonais déplacés dans des camps à l’intérieur de la Colombie- Britannique, 1942, photographie de Tak Toyota, Fonds du ministère du Travail, Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa. DROITE : Déplacement des Canadiens japonais dans des camps à l’intérieur de la Colombie-Britannique, 1942-1946, photographie de Tak Toyota, Fonds du ministère du Travail, Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa. LA SECONDE GUERRE MONDIALE ET L’INTERNEMENT DES CANADIENS JAPONAIS La vie de Kazuo Nakamura est bouleversée à la suite de l’attaque des Japonais contre la base américaine de Pearl Harbor à Hawaï, et par leur invasion de la colonie britannique de Hong Kong, le 7 décembre 1941. Le premier ministre du Canada, William Lyon Mackenzie King, déclare la guerre au Japon le soir même. La proclamation officielle a lieu le lendemain. Ces événements ravivent le racisme anti-Asie de l’Est qui envenime la Colombie-Britannique, un sentiment que le député libéral de Vancouver-Centre, Ian Alistair Mackenzie, exprime succinctement lorsqu’il déclare en avril 1942 : « Que notre slogan pour la Colombie-Britannique soit : “Pas de Japonais entre les Rocheuses et la mer”9. » Mackenzie joue un uploads/s3/ kazuo-nakamura-sa-vie-et-son-oeuvre-par-john-g-hatch.pdf
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- Publié le Aoû 08, 2022
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