10/04/2022 16:52 Le dessin comme outil d’enseignement-apprentissage en sciences

10/04/2022 16:52 Le dessin comme outil d’enseignement-apprentissage en sciences à l’école maternelle https://journals.openedition.org/rdst/3358 1/27 RDST Recherches en didactique des sciences et des technologies 22 | 2020 Les sciences et les technologies pour les élèves de 2 à 6 ans Dossier Le dessin comme outil d’enseignement-apprentissage en sciences à l’école maternelle Drawing as a teaching and learning tool for preschool science Alice Delserieys et Maria Kampeza p. 93-122 https://doi.org/10.4000/rdst.3358 Résumés Français English L’enseignement-apprentissage des sciences à l’école maternelle présente de nombreux enjeux dans un contexte complexe du fait de l’âge des enfants, de leurs capacités à exprimer leurs idées en sciences, et des moyens à disposition des enseignants pour accéder à ces idées. Cet article propose de s’intéresser au dessin pour explorer la manière qu’ont les enfants d’utiliser leurs dessins pour exprimer des idées scientifiques et le potentiel de ces dessins à fonctionner comme un outil d’enseignement et d’apprentissage des sciences. Il s’appuie sur plusieurs recueils de dessins d’enfants de 4 à 6 ans, réalisés en contexte scolaire, en lien avec une première approche du phénomène physique de formation des ombres. Un cadre d’analyse est proposé pour analyser les caractères productifs et réceptifs des dessins réalisés par les enfants. Il ressort de cette analyse que les enfants font preuve d’une grande créativité pour produire une diversité de signes et contourner les difficultés de représentations du réel. Les dessins permettent de repérer des évolutions individuelles dans la représentation du phénomène de formation des ombres au cours de l’intervention didactique. Les implications pour l’enseignement sont ainsi discutées. The teaching and learning of science in preschool education presents many challenges in a complex context due to the age of the children, their ability to express their ideas in science, and the means available to teachers to access these ideas. This paper proposes to focus on drawing to explore how children use their drawings to express scientific ideas and the potential of these drawings to function as a tool for teaching and learning science. It is based on sets of drawings made by children aged 4 to 6 years old, in a school context, related to a first approach to the physical phenomenon of shadow formation. An analytical framework is proposed to analyse the productive and receptive characteristics of the children's drawings. The analysis highlights that children show great creativity in producing a diversity of signs and in overcoming the difficulties of representing reality. The drawings make it possible to identify individual changes in the 10/04/2022 16:52 Le dessin comme outil d’enseignement-apprentissage en sciences à l’école maternelle https://journals.openedition.org/rdst/3358 2/27 representation of the phenomenon of shadow formation during the didactic intervention. The implications for teaching are thus discussed. Entrées d’index Mots-clés : dessin, ombre, école maternelle Keywords: drawing, shadow, preschool education Texte intégral Introduction L’importance d’une éducation scientifique auprès des jeunes enfants est reconnue par de nombreux chercheurs (voir par exemple Eshach & Fried, 2005 ; Orange & Plé, 2000). En effet, lorsqu’ils sont mis en situation d’apprendre en sciences, les enfants peuvent être encouragés à penser dans un environnement approprié qui favorise les explorations individuelles et collectives et fournit aux enfants des moyens de donner un sens au monde qui les entoure. En revanche, la place des sciences dans l’éducation préscolaire et la façon dont les chercheurs l’abordent prennent des formes très diverses. Dans une perspective cognitive, l’attention est portée sur les sciences en tant qu’objet d’apprentissage et les questions concernent la capacité des jeunes enfants à développer une pensée scientifique et une première compréhension des concepts scientifiques associés (Ravanis, 2010 ; Weil-Barais & Resta-Schweitzer, 2008). Dans une perspective sociale ou curriculaire, les sciences peuvent être considérées comme un contexte d’enseignement dans lequel des activités quotidiennes fournissent des expériences et des objets plus ou moins liés aux sciences mais qui participent au développement social et linguistique des jeunes enfants (Coquidé & Lebeaume, 2003 ; Chauvet-Chanoine, 2018 ; Ledrapier, 2010). Cet article, adopte une position intermédiaire, inspirée d’une perspective socio-culturelle (Fleer & Veresov, 2018) et multimodale (Kress, 2005). Parmi la diversité des modes de communication présents en maternelle, nous mettons le dessin au cœur de notre approche. Ce choix est motivé par le contexte de l’école maternelle qui encourage le recours au dessin (Picard & Zarhbouch, 2014). Mais il s’inscrit aussi dans une vision contemporaine des approches multimodales en général qui reconnaît une prédominance de l’image dans les situations de communication, bien au-delà de son rôle illustratif ou ludique (Stöckl, Caple & Pflaeging, 2020). Pourtant, Leroy (2020) met en évidence un déclin du dessin d’observation ou d’imagination dans l’école maternelle française depuis plusieurs années. L’activité de dessin est souvent dirigée dans le but de faire acquérir des gestes graphiques pour développer des compétences en lecture et écriture, tandis que le dessin libre est relégué à des moments où les enfants sont en autonomie (accueil du matin, transitions entre activités, etc.) (ibid.). Les dessins d’enfants sont au cœur de recherches dans différents domaines, particulièrement en psychologie où les dessins sont utilisés, sous certaines conditions, pour repérer des caractéristiques personnelles, développementales ou repérer une pathologie (Picard, 2014) ou pour étudier la façon dont les compétences graphiques se développent chez les enfants (Lange-Kuttner & Thomas, 1995 ; Luquet, 1977). Le point de vue que nous adoptons cherche à exploiter les résultats de telles recherches, initialement ancrées dans une approche psychologique ou linguistique, au profit d’une réflexion en didactique des sciences. Il s’agit ainsi de repérer la façon dont les jeunes enfants utilisent leurs dessins pour exprimer des idées scientifiques reconnaissables et, en même temps, comment un contexte scientifique permet aux jeunes enfants d’inventer des moyens de représenter un objet ou un phénomène. La terminologie simple de dessin utilisée ici s’inscrit dans le contexte spécifique de la maternelle et désigne des « dessins produits par l’apprenant » (Picard, 2016, p. 55), dans lesquels les 1 10/04/2022 16:52 Le dessin comme outil d’enseignement-apprentissage en sciences à l’école maternelle https://journals.openedition.org/rdst/3358 3/27 1. Dessiner en sciences à l’école maternelle enfants construisent leurs propres représentations d’un phénomène, et en particulier, dans cet article, nous nous focalisons sur le phénomène de formation des ombres. L’expression « jeune enfant » est utilisée dans cet article en référence à des enfants de 4-6 ans, c’est-à-dire des enfants qui, en général, s’expriment oralement, commencent à intégrer des formes figuratives dans leurs dessins (Baldy, 2005 ; Luquet, 1977) mais n’accèdent pas encore à la lecture/écriture de textes alphabétiques (Wright, 2019). Plusieurs études soulignent d’étonnantes capacités chez les jeunes enfants pour exprimer, bien plus tôt que par des textes écrits, leur compréhension conceptuelle et leur imagination par le dessin (Brooks, 2005), allant au-delà de ce qu’ils peuvent raconter en passant par l’oral uniquement (Wright, 2019). Pourtant, alors qu’ils progressent dans leur parcours scolaire, les enfants apprennent rapidement que le dessin est une activité peu valorisée (Anning, 1999) et doit laisser place à des modes de communication considérés plus académiques, l’écriture en particulier (Leroy, 2020). Cela va à l’encontre de l’idée défendue par certains auteurs qui considèrent que le dessin offre un outil viable de communication, de prise de sens et de résolution de problèmes (Brooks, 2005). Pour les jeunes enfants, qui ne maitrisent pas encore les codes du langage écrit et parfois encore peu ceux du langage oral, le dessin peut permettre une autre approche, et correspond à une activité socialement ancrée dans l’éducation préscolaire (Picard & Zarhbouch, 2014). À l’aide de dessins, les enfants peuvent exprimer un monde imaginaire et commencer à expérimenter un langage « décontextualisé » (Wright, 2019). Les enfants combinent habituellement leurs propres symboles avec des symboles qu’ils obtiennent de leur environnement quotidien et scolaire (par ex., lettres, chiffres, enseignes), qu’ils peuvent utiliser à leur façon pour communiquer leurs idées (Papandreou, 2014). En tant que tel, le fait de participer à des activités de dessin est important pour le développement des compétences symboliques des enfants et pour les inciter à reconnaître le pouvoir des symboles linguistiques et non linguistiques (Lange-Kuttner & Thomas, 1995). En permettant aux enfants d’effectuer un éventail d’opérations de plus en plus large à l’intérieur d’un système de symboles, les activités de dessin peuvent engager un développement de la pensée abstraite, de l’imagination et du raisonnement logique (ibid.). Les travaux que nous venons de citer sont, certes, en dehors du champ de la didactique des sciences, mais identifient, selon nous, des caractéristiques du dessin qui peuvent être rapprochées de concepts fondateurs de didactique des sciences, et en particulier, les travaux qui font des liens entre représentations multimodales et modélisation dans l’enseignement- apprentissage des sciences (Bécu-Robinault, 2018). Comme le souligne Bisault (2010), à l’école maternelle, l’éducation scientifique est constituée de moments scolaires de sciences qui empruntent et entremêlent divers cadres et contextes issus d’autres « moments scolaires ou non scolaires ». Nous proposons ainsi, dans la partie suivante, un cadre qui questionne deux dimensions de la pratique du dessin dans une éducation scientifique à l’école maternelle. 2 Willats (2005) rappelle qu’il y a beaucoup de confusion dans la façon de considérer les dessins de jeunes enfants. Il n’est pas facile pour les adultes de uploads/s3/ le-dessin-comme-outil-d-x27-enseignement-apprentissage-en-sciences-a-l-x27-ecole-maternelle.pdf

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