1 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster Table des matières
1 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster Table des matières 03 Biographie 30 Œuvres phares 61 Importance et questions essentielles 83 Style et technique 103 Où voir 111 Notes 125 Glossaire 135 Sources et ressources 148 À propos de l’auteur 149 Copyright et mentions 2 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster Iljuwas Bill Reid (1920-1998) fait partie du clan Raven-Wolf de la Nation haïda. Il est considéré comme l’un des plus importants artistes de la côte du Nord-Ouest du Canada, à la fin du vingtième siècle. Tout en travaillant comme communicateur pour la radio de la Canadian Broadcasting Corporation (CBC), le réseau anglophone de la Société Radio-Canada, il devient un orfèvre très en vue. Plus tard, il se met à la sculpture ainsi qu’à la création d’œuvres publiques de grande envergure tout en découvrant son héritage haïda à travers l’art de ses ancêtres. Dans sa carrière, qui s’échelonne sur cinquante ans, il est à la fois un faiseur et un penseur : il a créé plus d’un millier d’œuvres originales et rédigé une douzaine de textes exprimant sa vision et les 3 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster enjeux culturels de son époque. Activiste communautaire, mentor et auteur, on se souvient de lui comme étant un artiste passionné et un défenseur de l’« objet bien fait n’ayant d’égal que la joie de le fabriquer ». INTRODUCTION J’ai rencontré Iljuwas Bill Reid pour la première fois à l’automne 1978, à l’occasion du premier rassemblement national d’artistes autochtones1 sur l’île Manitoulin auquel assistent de nombreux artistes consacrés et émergents2. Le deuxième rassemblement, que j’ai organisé avec Bob Boyer (1948-2004), a lieu l’année suivante à Regina. C’est à cette époque que j’ai eu l’idée de faire des entrevues avec des participants. Reid me permet gentiment de l’interviewer. Je suis à la fois jeune et nerveux. Au cours des vingt années qui suivent, jusqu’à son décès en 1998, nos chemins s’entrecroisent, mais toujours en présence d’autres personnes et je n’ai plus jamais eu l’occasion d’être seul avec lui. Ma première rencontre a été fortuite et a laissé une impression durable. Comme nul autre, Bill Reid a subi le jugement d’autrui envers son identité autochtone. Le fait d’être et de devenir Haïda est capital dans son évolution. Sa carrière représente un cheminement, de ses origines en tant que « Bill Reid », à son travail artistique en tant que« Iljuwas », « Kihlguulins » et « Yalth- Sgwansang ». Alors qu’il participe à la complexe transformation politique et culturelle des personnes qu’il accepte comme son peuple, les Haïdas, il loge à un croisement, au sein d’une zone de contact conflictuelle. L’évolution et la réception de sa pratique artistique reflètent les conditions de cet enchevêtrement culturel3. Bill Reid avec le coffret Master of the Black Field No. 1 (Maître du champ noir no 1), qui lui a servi d’inspiration pour la boîte The Final Exam (L’examen final), 1967, photographe inconnu. 4 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster GAUCHE : Bill Reid avec sa mère et son père, 1920, photographe inconnu. DROITE : Sophie Gladstone quand elle était jeune à Skidegate, v.1920, photographe inconnu. ORIGINES Bill Reid voit le jour le 12 janvier 1920 à Victoria en Colombie-Britannique. Son père, William Reid (1884-1943), est alors hôtelier et gère une auberge à Hyder en Alaska4. Né dans la région de Détroit, au sein d’une famille aux racines écossaises et irlandaises, il quitte la maison à seize ans pour travailler sur les chemins de fer. Il est éventuellement naturalisé citoyen canadien et, alors qu’il gère un hôtel qui lui appartient à Smithers en Colombie-Britannique, il fait la connaissance de Sophie Gladstone (1895-1985), la future mère de ses enfants5. Celle-ci est née à Haida Gwaii et a grandi dans l’ombre oppressante de la Loi sur les Indiens, qui impose le retrait des enfants autochtones de leur communauté. À l’âge de dix ans, elle est forcée de quitter sa maison pour aller à l’Institut industriel Coqualeetza, un pensionnat indien dirigé par des méthodistes et situé près de Chilliwack en Colombie-Britannique6. Pendant qu’elle est pensionnaire, elle est forcée de parler anglais et d’acquérir des habiletés comme la couture afin d’être assimilée à la société canadienne. En épousant William Reid, un homme non autochtone, Sophie Gladstone doit renoncer à son statut d’« Indienne ». Elle élève ses enfants dans un milieu exclusivement non haïda. Sa descendance n’apprend donc ni sa langue ni ses traditions culturelles. Les répercussions de la colonisation et de son mandat d’éradiquer la culture autochtone ont des conséquences dévastatrices sur Sophie Gladstone. Plus tard, quand Reid apprend comment elle a été dépouillée de son identité haïda, il dit : « Ma mère a appris la grande leçon enseignée [aux] peuples autochtones de notre hémisphère pendant la première moitié de ce siècle, soit qu’il était en quelque sorte honteux et dégradant d’être, en termes blancs, un Indien, et [elle] n’a assurément vu aucune raison de transmettre à ses enfants une fierté par rapport à cette partie de leur héritage7 ». L’artiste consacre une grande part de sa vie et de son œuvre à renouer avec ses racines haïdas et à ramener honneur et fierté à sa mère et à son peuple. Renouer avec ses racines signifie apprendre à connaître l’histoire culturelle haïda. Au dix-neuvième siècle, des maladies dévastatrices déciment plusieurs villages haïdas. Skidegate, où Sophie Gladstone passe son enfance, est l’une des communautés qui a survécu à l’hécatombe. Parmi les deux grands groupes sociaux de Haida Gwaii, Gladstone est née au sein de Kaadaas gaah Kiiguwaay, le clan Raven-Wolf de T’aanuu. Son père, Charles Gladstone (v.1877-1954), est le neveu du célèbre artisan sculpteur haïda Daxhiigang (Charles Edenshaw, 1839-1920)8. Sa mère, Suudahl (Josephine Ellsworth Gladstone), vient du 5 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster Daxhiigang (Charles Edenshaw) avec ses œuvres, à Masset, Colombie-Britannique, v.1890, photographie de Harlan Ingersoll Smith. village ancestral T’aanuu9. Comme il en vient à l’apprendre, Bill Reid appartient à quelque chose de bien plus grand que lui-même. GAUCHE : Mats haïdas restaurés et érigés à Prince Rupert (le mât de droite se trouvait à l’origine dans le village de T’aanuu), 1968, photographie d’Adelaide de Menil. DROITE : T’aanuu, 1897, photographie de C. F. Newcombe. Au début du vingtième siècle, T’aanuu compte de nombreux mâts totémiques ayant été choisis pour la conservation et la vente à des musées. Un coup du sort veut qu’un mât recueilli par les ethnologues Marius Barbeau (1883-1969) et Charles Newcombe (1851-1924) soit remis au Musée royal de l’Ontario (MRO). Reid le voit au moment où il est en quête d’inspiration. Alors intitulé House 16: Strong House Pole (Maison 16 : mât de la solide maison), ce chef- d’œuvre est une porte d’entrée vers son identité familiale et un objet clé qui oriente sa compréhension de l’œuvre « gravée profondément ». LA JEUNESSE À VICTORIA ET LES LIENS AVEC LE NORD Peu après la naissance de Bill Reid, sa mère retourne dans le nord pour être près de son mari. Pourtant, en 1921, après la naissance de leur cadette Peggy (plus tard connue sous le nom de Margaret Kennedy), mère et enfants rentrent à Victoria où ils demeurent jusqu’en 1926. À cette époque, Alice Carr, la sœur d’Emily Carr (1871-1945) enseigne la maternelle à Reid dans le futur atelier d’Emily. En raison des exigences de son entreprise, William partage son temps entre Hyder, en Alaska, et Stewart, en Colombie-Britannique. De 1926 à 1932, la famille vit à Stewart, où William peut continuer d’exploiter un hôtel, loin de la prohibition américaine et des lois contre les jeux de hasard qui affectent les entreprises de l’autre côté de la rivière, à Hyder. Bill fréquente surtout l’école de cette localité. Ainsi, de six à onze ans, des enseignants américains lui enseignent le programme scolaire des États-Unis. En sixième année, il change d’école pour celle de Stewart. 6 ILJUWAS BILL REID Sa vie et son œuvre par Gerald McMaster En 1932, la Grande Dépression force William à cesser ses activités et à fermer son hôtel. Comprenant qu’elle doit maintenant faire vivre sa famille, Sophie revient à Victoria avec Bill, Peggy et leur plus jeune frère, Robert, né en 1928, où elle établit son propre magasin de vêtements10. Elle a vraisemblablement de l’affection pour cette ville, car celle-ci est fréquentée par de nombreux Haïdas et autres Autochtones depuis que la Compagnie de la Baie d’Hudson y a établi un poste de traite en 1849. Pour ces communautés, la ville est synonyme de débouchés économiques. À titre d’exemple, son grand-oncle Daxhiigang (Charles Edenshaw) se rend souvent à Victoria pour vendre ses œuvres d’art11. Peu après leur arrivée, le couple Reid se sépare et Bill ne revoit plus jamais son géniteur12. Même si le père et le fils n’ont jamais été particulièrement proches, les deux entretiennent tout de même une correspondance sporadique jusqu’à la mort de William Reid en 194313. Reid fréquente l’école South Park où l’artiste canadien uploads/s3/ iljuwas-bill-reid-sa-vie-et-son-oeuvre-par-gerald-mcmaster 2 .pdf
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- Publié le Dec 10, 2022
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