Extraits de l’ouvrage de Ch-E CLESSE : L’assujettissement à la sécurité sociale
Extraits de l’ouvrage de Ch-E CLESSE : L’assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salaries et indépendants : aux frontières de la fausse indépendance, Waterloo, Kluwer, 3ème édition à paraître en 2015. Titre I. Le contrat de travail Chapitre 1. Définition 5. - Les articles 2 et 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail1 définissent le contrat de travail comme le contrat par lequel un travailleur s’engage contre rémunération à fournir un travail sous l’autorité d’un employeur. Dans un arrêt de principe du 12 mars 1979, la Cour de cassation, rappelant les trois éléments constitutifs du contrat de travail, enseigne que : « l’existence d’un contrat de travail implique l’engagement d’exécuter un travail déterminé, dans un lien de subordination moyennant rémunération »2. Chapitre 2. Eléments constitutifs Section 1. La rémunération 6. - La rémunération due en contrepartie du travail presté3 doit être déterminée ou déterminable4. L’absence d’une définition de la notion de rémunération au sein de la loi du 3 juillet 1978 est palliée par la jurisprudence qui, de façon constante, considère qu’il s’agit de « la contrepartie du travail effectué en exécution d’un contrat de travail »5. Cette définition est plus restrictive6 que celle retenue par l’article 2 de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs7. 1 M.B., 22 août 1978 ; Errata, M.B.,30 août 1978 2 Cass., 12 mars 1979, Pas., 1979, I, p. 819. 3 Cass., 25 mai 1998, Pas., 1998, I, p. 270 ; C.T. Mons, 11 janv. 2002, inédit, R.G. 14.260 ; C.T. Mons, 8 juin 2001, J.T.T., 2001, p. 442. 4 Ainsi par exemple, les éléments suivants permettent de déterminer la rémunération : un taux de commission, des primes mensuelles ou annuelles sur chiffre d’affaire, la référence au minima barémique d’une convention collective de travail, etc. Relevons cet arrêt de la Cour du travail de Mons (8 juin 2001, J.T.T., 2001, p. 442) : « (…) à l’examen des factures tracées par le Sieur J-F. G. sur l’appelant et acquittées par le premier des deux, que ces documents ne comportent aucun élément indiquant le nombre d’heures prestées, pas plus que le tarif horaire pas plus enfin qu’un élément concret permettant la détermination des critères à suffisance précis susceptibles de déterminer les éléments de calcul de la rémunération. La Cour considère qu’au vu des pièces du dossier, les éléments sur lesquels porte l’accord des parties quant à la rémunération sont variables et non déterminables quant au montant de celle-ci ; ainsi particulièrement la rémunération, qui est notamment fonction des recettes du mois –celles-ci étant variables selon les résultats-, n’est pas déterminable quant au montant ; qu’en conséquence de ce qui est développé et considéré ci-avant, la Cour estime que la partie intimée n’établit pas l’existence d’un contrat de travail liant le Sieur J-F. G. à l’appelante parce qu’il n’y a pas, au vu des pièces du dossier, un accord des parties sur le montant de la rémunération ou sur les éléments permettant de déterminer ce montant ». 5 Cass., 25 mai 1998, Pas., 1998, I, p. 270 ; Cass., 26 avr.1993, Pas., 1993, I, p. 392 et note in J.T.T., 1993, p. 260 ; Cass., 18 janv. 1993, Pas., 1993, I, p. 61 et notes in J.T.T., 1993, p. 223 et in Chr. D.S., 1993, p. 233. 6 Cass., 1er avr. 1985, Pas., 1985, I, p. 959. 7 M.B., 30 avr. 1965. Cette législation vise, outre le salaire en espèces, les pourboires ou services auxquels le travailleur a droit en raison de son engagement ou en vertu de l’usage et les avantages évaluables en argent auxquels le travailleur a droit à charge de l’employeur. Cette définition fort large couvre, par exemple, les primes d’assurance-groupe payées par l’employeur (T.T. Bruxelles, 7 avr. 1995, J.T.T., 1995, p. 369), les gratifications octroyées suite à la conclusion d’une affaire importante (C.T. Liège, 28 janv. 1978, J.L., 1978, p. 137), l’usage d’une voiture de société, d’une maison de fonction, téléphone, etc. Pour de plus amples développements, voy. : M. MORSA, La notion de rémunération en sécurité sociale, Bruxelles, Larcier, 2008. 7. - La rémunération est un élément substantiel du contrat de travail, de sorte que des prestations de travail effectuées à titre bénévole, même avec l’octroi de libéralités8, ne donnent pas naissance à un contrat de travail mais à un contrat sui generis9. La Cour de cassation a censuré un arrêt qui retenait que « la fixation de la rémunération comme un détail, devant subir une certaine mise au point alors qu’il s’agissait d’un élément essentiel pour l’existence du contrat » 10. Ainsi, il n’est pas possible de désigner un expert pour déterminer le salaire qu’un employeur aurait pu attribuer au travailleur dans l’hypothèse de l’existence d’un contrat de travail car le défaut d’accord sur la rémunération implique l’absence de contrat de travail11. 8. – Enfin, précisons qu’il ne suffit pas qu’une personne « se paie » elle-même mais il est requis que la rémunération ait été convenue12. Section 2. Le travail § 1er. Notion 9. - La prestation de travail, cause première du contrat de travail, n’est pas exclusive d’autres types de contrat tels que le contrat d’entreprise13, le statut des agents des services publics, le contrat de stage, le contrat de formation professionnelle pour personnes handicapées ou le contrat d’apprentissage. 10. – L’employeur n’a pas l’obligation de fournir du travail de façon constante et régulière14. Les articles 20, 1°, et 17, 1°, de la loi du 3 juillet 1978 l’obligent uniquement à faire travailler le travailleur au temps et lieu convenus et contraignent celui-ci à exécuter son travail au temps, au lieu et dans les conditions convenues. A défaut de prestation de travail, même irrégulière, insignifiante ou occasionnelle15, il n’y a pas de contrat de travail16. 8 Voy. par exemple la situation des officiers de l’armée du salut, qui perçoivent des libéralités et non une rémunération contrairement aux employés de l’armée du salut (C.T. Liège, 22 avr. 1993, J.T.T., 1993, p. 362). De même, la ministre de l’Emploi et du Travail, interrogée au sujet des bénévoles recrutés pour l’Euro 2000, a estimé que «la rémunération est une des composantes importantes du contrat de travail. D’autre part, en vertu de l’article 1134 du Code civil, rien n’empêche une personne de s’engager à fournir un travail à titre bénévole. De telles prestations, même accompagnées de libéralités, ne sont pas constitutives d’un contrat de travail ». (Question n° 1541 de Mr. TIMMERMANS, CRA, COM 188, ch. repr., sess. ord. 1999-2000, 3 mai 2000, p. 6). 9 A. COLENS, Le contrat d’emploi, Verviers, 1973. 10 Cass., 2 oct. 1968, Pas., 1969, I, p. 129. 11 Cass., 6 mars 2000, Pas., 2000, I, p. 154 ; Cass., 25 mai 1998, Pas., 1998, I, p. 270 . 12 C.T. Mons, 27 juin 2003, inédit, R.G. 17.489 ; C.T. Mons, 8 juin 2001, J.T.T., 2001, p. 442 . 13 Le tribunal du travail de Bruxelles précise qu’« exécuter un travail pour autrui n’est in se en rien un élément constitutif d’un contrat de louage de travail. Les prestations pour autrui pouvant tout aussi bien être exécutées en vertu d’un mandat ou d’un contrat d’entreprise » (2 févr. 1987, J.T.T., 1988, p. 237). 14 Cass. 9 janv. 1995, Pas., 1995, I, p. 28 ; Cass., 3 avr. 1995, Pas., 1995, I, p. 384. Dans un arrêt du 19 mai 2008, la Cour de cassation a censuré un arrêt de la Cour du travail d’Anvers qui avait décidé d’exclure du champ d’application de la loi sur les contrats de travail des éplucheurs de pommes de terre au motif que leur prestation était limitée dans le temps et en volume (J.T.T., 2008, p. 297). 15 Cass., 19 mai 2008, inédit, R.G. S.07.0004.N. En l’espèce, il s’agissait d’éplucheurs de pommes de terre qui avait travaillé quelques heures par mois. La Cour dit pour droit que « l'arrêt, qui écarte les prestations de travail fournies par les ouvriers précités contre rémunération et sous l'autorité du défendeur du champ d'application de la loi du 3 juillet 1978 par le motif que ces prestations étaient d'une durée et d'une ampleur limitées, viole l'article 2 de cette loi ». 16 Cass., 13 avr. 1992, J.T.T., 1992, p. 217 ; C.T. Liège, 13 oct. 1993, J.T.T., 1993, p. 447. § 2. Le contrat de stage 11. - Le stage n’a pas pour objet une prestation de travail en échange d’une rémunération17 mais soit l’obtention d’un diplôme ou d’un certificat de fin d’études18, soit l’obtention d’un accès à la profession19, soit le perfectionnement du stagiaire. Même si une libéralité est octroyée au stagiaire20, le contrat de stage ne peut, a priori, être considéré comme un contrat de travail21, car « le stage ne profite pas au patron, sinon de manière limitée ou occasionnelle. Ce qui explique qu’il a un caractère gratuit, même si certaines gratifications sont allouées bénévolement »22. En revanche, s’il est démontré que le stagiaire fournit une activité utile à son patron23 sous un lien de subordination, le contrat de uploads/S4/ droit-social-syllabus-3-2014-2015-officiel 1 .pdf
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- Publié le Nov 02, 2022
- Catégorie Law / Droit
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