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HAL Id: halshs-01920249 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01920249 Submitted on 13 Nov 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. La contractualisation du droit du travail djiboutien Ilyas Said Wais To cite this version: Ilyas Said Wais. La contractualisation du droit du travail djiboutien. Revue de Droit du Travail, Dalloz, 2017, pp.352-360. halshs-01920249 1 La contractualisation du droit du travail djiboutien Ilyas Said Wais1 Parmi les normes qui obligent, attachent à autrui, il faut distinguer celles qui procèdent des individus eux-mêmes et celles qui leur sont imposées. En langage juridique, on parle de contrat et de statut pour qualifier ces deux sortes de liens qui « nous tiennent et nous font tenir ensemble »2. L’histoire du droit du travail en Europe fut marquée durablement par une opposition entre le contrat et le statut. En effet, il a été question un temps d’une phase de déclin du contrat de travail avant une période de renouveau3. Même si le mécanisme contractuel n’a jamais été totalement évacué du rapport individuel entre le salarié et l’employeur et ce même au plus fort de l’expansion statutaire4. Ce mouvement de va-et-vient du contrat de travail trouve une explication dans la variabilité5 ou la réversibilité6 du droit du travail. Plus que les autres branches du droit, le droit du travail est déterminé par les données politiques, économiques et sociales7, évoluant entre logiques contractuelle et statutaire. La logique contractuelle est portée par les politiques de flexibilisation des marchés de travail souvent prescrites, par les Institutions financières internationales (IFI) et/ou les marchés financiers8. Concrètement, elle se traduit par une privatisation accrue de l’encadrement juridique des relations individuelles mais aussi collectives du travail. La protection du statut du salarié n’apparaît plus comme une priorité. Il s’agit de se doter au travers des rapports contractuels de règles supposées être plus en concordance avec les conditions réelles de l’économie. On assiste ainsi à un changement de 1 Docteur en droit du travail, maître de conférences à l’Université de Djibouti. 2 Supiot, A., La contractualisation de la société, in Université de tous les savoirs, Qu’est ce que l’humain ?, vol. 2, Odile Jacob, Paris, 2000, p 158. 3 Cf. Waquet, Ph., Le renouveau du contrat de travail, RJS 1999, p. 383. Sur l’ensemble de cette évolution et sur les différents rôles désormais attribuées à la figure contractuelle, voir notamment Jeammaud, A., La centralité retrouvée du contrat de travail en droit français, Estudos juridicos en homenage al doctor Nèstor de Buen Lozano, 2003 (disponible sur www.bibliojuridica.Org/libros/3/1090/24.pdf). 4 Cf. not. Durand, P., A la frontière du contrat et de l’institution : la relation de travail, JCP 1944, I, p. 337. 5 Cf. Claude, N., La variabilité du droit du travail, Thèse, Droit, Angers, 2010, 355 p. 6 Cf. Lyon-Caen, G., Le droit du travail. Une technique réversible, Dalloz-Sirey, 1997, 99 p. 7 A ce propos, des auteurs ont écrit : « le droit, dans toutes ses branches, reflète les caractères généraux de la société et évolue avec elle. Mais le droit du travail, plus que la plupart des autres disciplines, est déterminé par le jeu des forces en présence et par les données de la politique, de l’économie, de la technique, de la psychologie collective » (Rivero, J., et Savatier, J., Droit du travail, PUF, coll, Themis, 1993, p. 36). 8 Cf. not. Redor, D., Les réformes du marché du travail en Europe, Cahiers français, septembre-octobre 2016, pp. 60-65 2 paradigme dès lors que les acteurs professionnels sont autorisés à définir eux-mêmes les règles régissant leurs relations avec le parrainage par l’Etat9. La contractualisation peut être définie comme la prééminence de la logique contractuelle sur la logique statutaire dans l’élaboration et la mise en œuvre des règles du droit du travail. Selon certains auteurs, elle n’est qu’une manifestation des idéaux de la « régulation » ou de la « gouvernance »10. Elle constitue avant tout une relativisation de la place du législateur. Celui-ci, par la loi, traduit la volonté souveraine du peuple. Dans le cadre et du fait de la contractualisation, la volonté législative n’est plus souveraine. La loi devient relative, d’une part, parce que les pouvoirs du législateur sont partagés, d’autre part, parce que les pouvoirs du législateur sont amoindris11. Le législateur djiboutien, à l’instar de ses homologues africains12, a longtemps fait primer la logique statutaire sur la logique contractuelle en faveur du salarié. Le Professeur Lachaud écrit à ce sujet : « A Djibouti, la législation nationale, longtemps issue du Code du travail d’Outre-mer de 1952, a incarné, tout d’abord, l’intérêt national par rapport à l’exploitation coloniale, en régulant le comportement des employeurs et, ensuite, le souci d’assurer une sécurité juridique et accrue aux travailleurs. Cette protection et valorisation des travailleurs nécessitant la remise en cause de la liberté contractuelle des parties au contrat de travail »13. Une telle approche restrictive est remise en cause à partir de la fin des années 90 marquées par la crise économique et financière qui atteint alors le pays14. Le législateur djiboutien opère alors un rééquilibrage des rapports entre salariés et employeurs pour engendrer, in fine, un droit du travail contractualisé, du moins sur certains aspects. Cette évolution est le reflet de la volonté de tenir compte des nécessités économiques en permettant à l’employeur et au salarié de déterminer dans le contrat de travail et, via la négociation collective, dans les conventions et accords collectifs les conditions de leur collaboration. Notre étude concerne précisément cette tendance à la contractualisation du droit djiboutien du travail. Elle entend mettre en lumière les éléments attestant de la prééminence de cette logique contractuelle au niveau des relations salariales. Afin de déterminer l’ampleur de cette tendance, nous tenterons de l'appréhender à travers ses expressions (I) avant d’envisager ses limites (II). 9 Cf. Ray, J.-E, Du tout-Etat au tout-contrat ?, Dr. soc, 2000, p. 574 10 Cf. Supiot, A., La contractualisation des relations de travail en droit français, in Auvergnon, Ph., (dir.), « La contractualisation du droit social », Comptrasec, Bordeaux, 2003, p. 23. 11 Comme l’écrit Philippe Auvergnon : « Là où il avait un rôle important l’Etat ne disparaît pas, il se fait humble, change de rôle, propose un service d’accompagnement. Il participe directement, passivement ou activement, à une réorganisation des relations entre sources du droit, au changement de formes et de contenus des contrats individuels comme des contrats collectifs » (Cf. Auvergnon, Ph., L’hypothèse d’une contractualisation du droit social dans plusieurs systèmes juridiques, in Auvergnon, Ph. (dir.), « La contractualisation du droit social », Comptrasec, Bordeaux, 2003, p. 14). 12 Cf. Mohamadou, B., La contractualisation du droit sénégalais du travail, Penant, 2012, p.91. 13 Lachaud, J.-P, Marché du travail, emploi et pauvreté à Djibouti : analyse et politiques, OIT, Genève, 2004, p.129. 14 Cf. Said Wais, I., L’évolution du droit du travail en République de Djibouti, Revue de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 2016/1, p 30. 3 I- Les expressions de la contractualisation en droit du travail djiboutien La contractualisation touche tant les relations individuelles du travail que les rapports collectifs. C’est la raison pour laquelle nous envisagerons la contractualisation dans ces deux dimensions, notamment dans deux sous-domaines : la libre détermination du salaire (A) et le renvoi à la convention collective de questions relevant antérieurement de la seule loi (B). A- La libre détermination du salaire La détermination du salaire repose sur le principe du laisser-faire et, ce, depuis la loi du 23 septembre 1997 portant aménagement du Code de 1952. Celle-ci précise, dans son article 31, que « la rémunération fixée au contrat de travail résulte des accords d’entreprise, des conventions collectives ou, le cas échéant, d’un accord entre les parties. Aucun plancher de rémunération n’est fixée par la législation »15. Cette initiative législative défait le système de fixation et de révision du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) issu des textes antérieurs. Pareille option ne peut être bien comprise que si elle est replacée dans le contexte des Politiques d'Ajustement Structurel (PAS), qui exigeait un assouplissement des textes en conformité avec l'économie de marché16. En somme, on opère ainsi le passage d'un régime de fixation des salaires basé sur l'intervention des autorités publiques (1) à celui d'une libéralisation totale des salaires (2). 1- La fixation réglementaire des minimas salariaux L'exigence d'un « salaire minimum garanti » trouve son origine dans les dispositions de l'article 95 du Code de 1952 qui précisaient que les salaires minima interprofessionnels garantis sont fixés par des arrêtés du chef du territoire17. Il s'agit là de salaires minima garantis, c'est-à-dire que ni les conventions collectives, ni les contrats individuels ne 15 Devenu l'article 60 du Code du travail du 28 janvier uploads/S4/ ilyas-said-rdt-2017.pdf
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- Publié le Jan 23, 2022
- Catégorie Law / Droit
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