9 - DOMINANCE ATYPIQUE : GAUCHERIE ET DYSLEXIE On sait que 10% environ des indi
9 - DOMINANCE ATYPIQUE : GAUCHERIE ET DYSLEXIE On sait que 10% environ des individus sont gauchers et cette proportion est sensiblement la même dans toutes les cultures. Toutefois, le pourcentage de gauchers semble plus faible chez les personnes âgées que dans la population générale. La question des origines de la gaucherie est inséparable de celle des origines de la préférence, largement majoritaire, pour la main droite. Vrais et faux gauchers Certains auteurs ont prétendu établir une liaison entre le type d'écriture et la localisation des centres du langage. Ainsi l'écriture "en crochet" de certains gauchers ne serait pas dûe à une commodité (ne pas cacher ce qui vient d'être écrit) mais correspondrait à un positionnement du stylo dans le champ visuel gauche correspondant à l'hémisphère droit spatial comme chez les droitiers "normaux" dont le langage est à gauche. Par contre un gaucher qui écrit "normalement" serait l'équivalent d'un droitier qui écrit "en crochet" et qui place le stylo dans le champ visuel droit correspondant à l'hémisphère gauche qui serait donc ici doté des attributs spatiaux (hémisphère droit verbal). Performances des gauchers par rapport aux droitiers La spécialisation des hémisphères et donc la latéralisation des fonctions corticales sont moins marquées chez les gauchers que chez les droitiers (comme chez les femmes). Aux tests verbaux on ne constate pas de différence entre les droitiers et les gauchers adultes mais Geschwind note que les difficultés d'apprentissage du langage et de l'écriture sont 12 fois plus fréquentes chez les gauchers que chez les droitiers. Aux tests de performance spatiale on constate un léger déficit des gauchers que l'on peut interpréter en terme de compétition entre le verbal et le spatial moins strictement localisés (plus dissiminés) que chez les droitiers. On trouve encore un pourcentage important de gauchers parmi les sujets atteints de divers malformations (bec de lièvre, scoliose). On trouve également un nombre élevé de gauchers parmi les épileptiques et les autistes. Ces éléments suggèrent l'intervention de facteurs maturationnels et/ou d'un trouble du développement et/ou d'un facteur génétique à l'origine de ces anomalies. Geschwind insiste également sur l'association de la gaucherie et de certains talents comme en témoigne le nombre important de gauchers dans certaines professions (architectes, artistes, sportifs...). Il voit dans la gaucherie un processus biologique préservé par l'évolution pour générer des talents hors du commun (il parle de "pathologie de la supériorité"). Ainsi, des malformations mineures peuvent être associées, non pas à des fonctions anormales mais à de meilleures performances de certaines aires. On constate chez certains sujets (dyslexiques et même autistes) de remarquables talents artistiques malgré la pauvreté de leurs capacités linguistiques. Corrélats neurobiologiques La surface du corps calleux est plus importante chez les gauchers et les ambidextres que chez les droitiers (+11%). Dans la mesure où ils ont une répartition plus bilatérale des fonctions corticales on peut supposer que les connexions inter- hémisphériques sont plus nombreuses. La spécialisation des hémisphères s'accompagne normalement d'une diminution de ces connexions. Le cerveau des gauchers serait donc moins différencié que celui des droitiers. De ce fait l'hémisphère mineur resterait davantage disponible pour le langage ce qui expliquerait que les gauchers récupèrent généralement mieux d'une aphasie consécutive à un traumatisme de l'hémisphère majeur. La dyslexie On appelle dyslexie un ensemble de troubles du développement mental de l'enfant, touchant principalement les garçons (en particuliers les gauchers) ayant en commun une perturbation ou un retard de l'acquisition et de l'apprentissage du langage écrit, en l'absence de toute autre altération des capacités intellectuelles. Le trouble de la lecture et de l'écriture est relativement stéréotypé. Les erreurs les plus fréquentes sont les inversions de consonnes dans les mots à trois lettres (sel pour les, cas pour sac...) et des confusions sur l'orientation de certaines lettres (p et q, b et d). Ceci mérite d'être rapproché du fait qu'une anomalie du système visuel serait associée à la dyslexie. Les dyslexiques semblent avoir en effet une vision périphérique meilleure que la vision centrale qui paraît chez eux plus ou moins "masquée". Dyslexies (260) - deux manières de passer du mot écrit au mot parlé : prise en compte globale du mot par les systèmes lexicaux / analyse alphabétique - utilisation de la correspondance graphème-phonème / mots familiers compréhension directe et globale - mots inconnus ou non-mots stratégie grapho-phonémique puis stratégie globale (passages réciproques analytique-global) Schéma à deux voies également pour l’écriture (voie lexicale et voie phonologique (agraphie 261) Dyslexie et anomalies morphologiques Le fait que l'on trouve une majorité de gauchers parmi les dyslexiques et le type d'erreurs commises laissait supposer un trouble de l'équilibre inter-hémisphérique caractérisé par une moindre dominance de l'hémisphère gauche pour le langage (Orton 1930). Cette interprétation fut longtemps ignorée au profit des explications psychologiques. Ce n'est que récemment que Galaburda et Kemper ont démontré, à partir de l'étude anatomique de cerveaux de sujets dyslexiques décédés accidentellement, que ceux-ci présentaient des anomalies discrètes mais systématiques et identiques d'un sujet à l'autre. Ces anomalies intéressent particulièrement le cortex de la région sylvienne gauche (région de Wernicke au sens large). Il s'agit d'amas anormaux de cellules (ectopies) et de désorganisations segmentaires de l'architecture corticale (dysplasies) évoquant une perturbation de la migration des cellules corticales au cours de la maturation cérébrale lors des derniers mois de la vie foetale. Ces sujets présentent également des particularités anatomiques (absence d'asymétrie des régions temporales, corps calleux plus développé) évoquant un trouble de l'équilibre inter- hémisphérique. On présume que le cerveau des sujets dyslexiques a subi pendant les dernières semaines de la vie intra-utérine une agression d'ordre chimique, hormonale ou immunitaire à l'origine des lésions anatomiques qui modifieraient les capacités d'apprentissage du langage par le cerveau. Origines de la dyslexie Les anomalies morphologiques (absence d'asymétrie du planum temporale, ectopies, dysplasies) constatées chez le dyslexique évoquent donc un trouble de la migration neuronale vers la 24ème semaine de gestation, c'est-à-dire au début de la période de maturation axonale, conduisant à un défaut de latéralisation. Or, le fait que 80% des dyslexiques soient des garçons parmi lesquels on compte un nombre important de gauchers a conduit à imputer ces anomalies morphologiques et les troubles qui leur sont associés à un excès de la production de testostérone durant cette période cruciale du développement cérébral. La dyslexie serait donc une exagération du processus de dominance atypique que l'on rencontre chez 30 à 35% des sujets. Toutefois d'autres arguments suggèrent l'intervention d'autres facteurs en particulier d'ordre immunologique. Dyslexie et immunité En effet Geschwind a mis en évidence de surprenantes corrélations entre la dyslexie (et la gaucherie) et certaines affections immunitaires. Ainsi en comparant une population de gauchers absolus et une population de droitiers absolus on constate chez les premiers un risque plus élevé pour certaines affections ayant en commun un dysfonctionnement du système immunitaire comme les maladies allergiques (asthme, eczéma, rhume des foins) et les maladies auto-immunes (thyroïdites, affections intestinales, myasthénie). Dans toutes ces affections Geschwind montra, à l'inverse, qu'il existe une plus forte proportion de gauchers (et de dyslexiques) que dans la population générale. L'explication de Geschwind prend en compte les liaisons qui existent entre le système nerveux et le système immunitaire (en particulier le thymus), d'une part, et celles qui existent entre ces systèmes et les hormones d'autre part. Un excès de testostérone pendant la croissance foetale serait responsable à la fois des troubles du développement cérébral et des perturbations du système immunitaire. Plus récemment Galaburda a montré que des souris appartenant à une souche porteuse d'un trouble immunitaire responsable de manifestations auto-immunes présentaient des anomalies corticales très semblables à celles observées chez les dyslexiques en particulier des ectopies dans la couche superficielle du cortex cérébral. Or on a constaté que ces souris présentaient des troubles de l'apprentissage. Il semble donc que certaines prédispositions aux maladies auto-immunes puissent également jouer un rôle (en plus des facteurs d'environnement hormonal) dans l'établissement d'une dominance atypique, comme dans le déterminisme de la dyslexie. On a également constaté que, chez le rat, des lésions du cortex cérébral gauche réduisent le nombre des lymphocytes K (killers) de la rate et diminuent leur activité biologique. L'inverse est observé lors d'une atteinte du cortex droit. L'activité du cerveau gauche serait donc associée à un renforcement des défenses immunitaires et au contraire la dominance droite (ou l'absence de dominance gauche) serait associée à la dépression des défenses. Un travail récent (1991) montre que de jeunes femmes présentant une intense activation du cortex frontal droit ont une activité lymphocytaire (natural killers) plus faible que celle des sujets présentant une intense activation frontale gauche. uploads/S4/ lambert-02.pdf
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- Publié le Jan 31, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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