SAINT OMER UN FILM DE ALICE DIOP Lion d’Argent – Grand Prix du Jury Lion d’Arge
SAINT OMER UN FILM DE ALICE DIOP Lion d’Argent – Grand Prix du Jury Lion d’Argent – Grand Prix du Jury Lion du Futur – Meilleur Premier Film Lion du Futur – Meilleur Premier Film SRAB FILMS présente AU CINÉMA LE 23 NOVEMBRE 2022 FRANCE • 2022 • COULEUR • 2H02 • 1.85 • 5.1 Lion d’Argent – Grand Prix du Jury Lion d’Argent – Grand Prix du Jury Lion du Futur – Meilleur Premier Film Lion du Futur – Meilleur Premier Film KAYIJE KAGAME GUSLAGIE MALANDA VALÉRIE DRÉVILLE AURÉLIA PETIT XAVIER MALY ROBERT CANTARELLA SALIMATA KAMATE THOMAS DE POURQUERY SAINT OMER Photos et dossier de presse téléchargeables sur www.filmsdulosange.com CANDIDAT DE LA FRANCE À L'OSCAR DU MEILLEUR FILM INTERNATIONAL Photo © LAURENT LE CRABE UN FILM DE ALICE DIOP SAINT OMER | 5 4 | SAINT OMER R ama, jeune romancière, assiste au procès de Laurence Coly à la cour d’assises de Saint Omer. Cette dernière est accusée d’avoir tué sa fille de quinze mois en l’abandonnant à la marée montante sur une plage du nord de la France. Mais au cours du procès, la parole de l’accusée, l’écoute des témoignages font vaciller les certitudes de Rama et interrogent notre jugement. SAINT OMER SYNOPSIS Image © FIDÉLIO pour LE CERCLE NOIR SAINT OMER | 7 SAINT OMER ENTRETIEN AVEC ALICE DIOP / De quelle intuition est né ton film ? Mes films sont toujours le fruit d’une intuition. Cette intuition grandit et devient alors une obsession tellement impérieuse que le film naît. Jamais je ne me formule “tiens, et si je m’intéressais à tel ou tel sujet” . Ça vient toujours de quelque chose qui percute une histoire intime parfois longtemps indicible. Pour Saint Omer l’obsession vient d’une photo, publiée dans Le Monde en 2015. C’est une image en noir et blanc, prise par une caméra de surveillance : une femme noire, gare du Nord, pousse un bébé métisse emmitouflé dans une combinaison. Je regarde cette photo et je me dis “ Elle est sénégalaise ! ” Deux jours avant, un bébé avait été retrouvé à Berck- sur-Mer, charrié par les vagues, à six heures du matin. Personne ne savait qui était cet enfant, les enquêteurs penchaient à l’origine pour une embarcation de migrants qui aurait dérivé. Mais très vite, ils avaient retrouvé une poussette cachée dans un fourré à Berck-sur-Mer, et de là, en étudiant les caméras de surveillance, ils étaient remontés à cette femme noire avec un bébé métisse. Moi je la regarde et je sais qu’elle est sénégalaise, je sais qu’elle a le même âge que moi, je la connais tellement que je me reconnais. Commence alors une obsession pour cette femme. Je n’en parle à personne, mais je suis l’enquête quasiment heure par heure, puisque tous les journaux parlent de ce bébé. Quelques jours après, on apprend qu’il s’agit bien d’une femme sénégalaise, Fabienne Kabou, et qu’elle a tué son bébé en le déposant à marée haute sur la plage. Elle vient d’avouer, j’écoute son avocate, et très rapidement la question de la sorcellerie arrive. J’apprends qu’elle est doctorante, que c’est une intellectuelle, les premiers commentaires des journalistes soulignent son QI exceptionnel de 150, pourtant elle justifie son geste en parlant d’un maraboutage par ses tantes au Sénégal… Pour moi, quelque chose ne colle pas. Je me demande pourquoi tout le monde insiste sur le fait qu’elle parle extrêmement bien, après tout elle parle comme une universitaire… Dès les premiers mots qui tentent de faire son récit, j’entends tout un impensé, se mettent en place une mécanique connue, une somme de projections de la presse et des médias sur cette femme. Le procès a lieu en juin 2016, et je décide d’y aller. Je n’en parle à personne. Je ne m’explique pas cet acte fou qui consiste à aller au procès d’une femme qui a tué son bébé métisse de quinze mois, alors même que je suis également la jeune mère d’un enfant métisse. J’en parle quand même à mes producteurs, qui ont, eux, l’intuition qu’un film se cherche. Je débarque à Saint-Omer, une ville du Nord complètement dévastée, où seule les affiches de campagne de Marine Le Pen ne sont pas déchirées. Comme le personnage de Rama au début du film, je traverse la ville de la gare jusqu’à l’hôtel. En marchant je sens des regards sur moi, des gens à la fenêtre me dévisagent, des gens dans la rue se détournent, ma valise fait un bruit énorme sur les pavés. Je me sens en danger parce qu’en voyant quel type de blancs me regardent, je comprends que je suis le miroir de leur déclassement. Je suis une femme noire, habillée comme une parisienne, qui traîne une valise, et qui est là, dans cette ville dévastée, exposée à ces blancs déclassés… Cette image de thriller ou de film d’angoisse est quelque part dans le film. En tout cas j’ai travaillé à partir de cette première sensation. Dans la chambre d’hôtel je commence à penser à cette femme et là, je sens la présence de Fabienne Kabou qui hante la chambre. SAINT OMER | 9 8 | SAINT OMER Je suis face à mon point limite, à une part de moi- même qui me fait peur : mon obsession inavouable pour cette histoire… Ce qui a rendu aussi le film très concret, c’est que j’ai été obsédée par le rituel documentaire de la justice. Le dernier jour du procès, je me suis rendu compte que cette petite fille avait été nommée. Plus que nommée, sa plainte avait été déposée quelque part, elle avait été vue… / Elle est née une deuxième fois parce qu’avant elle était dans les limbes ? Sa naissance est un acte de justice. On a posé un acte de justice sur tout ce qu’elle a vécu, sur l’entièreté de sa vie, pas seulement sur le meurtre commis par sa mère. On lui a rendu justice. C’est quelque chose qui m’a bouleversée. Je me suis vue en tant que petite fille à qui on pouvait rendre justice, pour toute ma vie et toute l’histoire de ma mère. Ce jour-là, quand l’avocate a raconté le vrai rêve que Fabienne Kabou avait fait, avec la petite fille qui vient se loger dans sa robe d’avocate, elle a dit qu’elle avait compris que Fabienne Kabou lui demandait de porter non pas que sa voix mais aussi la voix de sa petite fille. Je me suis effondrée en larmes. Une journaliste qui avait suivi le procès depuis le début et était enceinte de six mois, pleurait, elle aussi, à côté de moi… C’est là que j’ai compris que j’allais faire ce film, qui serait pour nous toutes, pour les petites filles que nous avons été, un acte de justice. C’est comme cela que j’ai imaginé l’histoire d’une femme enceinte qui assiste au procès. Tout le film est né ce moment-là, dans la confrontation des larmes de deux femmes, une femme noire et une femme blanche, nous qui pleurions pour quelque chose de différent mais aussi quelque chose de commun. / Le titre de ton film précédent, Nous, désigne aussi cette question de l’universel. Oui, et au fond c’est la question de tous mes films : offrir au corps noir la possibilité de dire l’universel. J’ai intuitivement toujours su qu’il l’était, mais politiquement cela ne me semble pas encore accepté. Notre intimité n’est pas encore tout à fait considérée comme pouvant parler à l’intimité de l’autre. J’ai l’impression que ce dialogue n’est pas envisagé. L’échange ne se fait que trop rarement dans ce sens-là. Or moi, je me suis toujours reconnue chez des femmes blanches et des hommes blancs, j’ai pleuré sur Anna Karenine, et Madame Bovary, “ c’est moi ” aussi. Le premier film qui m’a convaincue de ce que j’ai toujours su, à savoir que le corps noir pouvait porter l’universel, c’est 35 Rhums de Claire Denis. Tout d’un coup je voyais des acteurs noirs traversés par une question qui n’avait rien à voir avec celle de leur négritude, sans que ça fasse débat, et ça m’a bouleversée. / Qu’est-ce que ce film mettait en jeu sur un plan existentiel pour toi ? J’y allais à reculons. Ce film est très organique, très intime à bien des endroits, même si j’ai mis beaucoup d’énergie à affirmer le contraire, à savoir que Rama, ce n’est pas moi, ce qui est vrai, en partie, mais comme toute fiction, elle est nourrie par des choses qui m’appartiennent, qui appartiennent à mon vécu, à des émotions connues. Maintenant que le film est fini, je suis plus tranquille avec l’idée de l’assumer et je considère que c’était pour moi nécessaire de le faire, tant intimement que politiquement d’ailleurs. Dans ma nécessité de raconter l’histoire de ces femmes, il y avait la volonté d’inscrire leur silence, de réparer leur invisibilité. C’est aussi l’un des projets politiques du film. Et puis de dire de quelles mères on est faits, de quel bagage, de quel héritage, de quelles douleurs… À partir de quel uploads/S4/ st-omer-2.pdf
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- Publié le Aoû 01, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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