1 INTRODUCTION GENERALE 1. -La transaction, contrat par lequel les parties term

1 INTRODUCTION GENERALE 1. -La transaction, contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent celle à naître, a fait ses preuves dans le temps à travers toutes les disciplines juridiques. « Ce contrat spécial est, à la fois, une catégorie juridique - c’est-à-dire une figure permettant d’interpréter, sur le plan du droit, des situations empiriques ou des actions et agissements – et un instrument »1. 2. – On relèvera cependant que le régime juridique de ce contrat a été institué à la hâte en France et s’est perpétué tel quel en Belgique et en République démocratique du Congo. En effet, porté par le Titre quinzième dans le Livre troisième du code civil français, les articles relatifs à la transaction n’étaient pas précisés dans le projet originaire qui avait été soumis aux tribunaux français pour avis. Ces derniers firent constater cette carence. En vue de donner suite aux observations de ces tribunaux, les rédacteurs du projet élaborèrent alors une quinzaine d’articles sur la transaction. En réalité, les auteurs de ce texte empruntèrent donc ces dispositions « du traité des lois civiles dans leur ordre naturel » de Jean Domat et les firent adopter par le Corps législatif la veille de la promulgation du code civil. Comme l’écrit Jacques Mestre, il demeure patent que 1 A. JEAMMAUD, « Genèse et postérité de la transaction », in Bl. MALLET-BRICOUT et C.NOURISSAT, La transaction dans toutes ses dimensions, Paris, Dalloz, 2006, p.5. Sa préférence par les employeurs est soulignée par Christophe RADE en ces termes : « La complexification croissante du droit du travail, à laquelle contribue très paradoxalement la recodification du Code du travail, provoque chez de nombreux employeurs un fort sentiment d’insécurité ; les changements incessants qui affectent le cadre juridique applicable aux relations du travail, l’interprétation incertaine de quelques notions cardinales aux contours flous, les aléas qui le contentieux judiciaire , singulièrement devant les juridictions prud’homales, incitent alors les entreprises à rechercher des moyens juridiques de sécurisation du règlement des différents qui peuvent les opposer aux salariés ou aux représentants du personnel. C’est alors en se tournant vers la transaction que les employeurs espèrent trouver à leur désir de sécurité, compte tenu d’effets radicaux qui s’y attachent » : Voir Chr.RADE, « Transaction et sécurisation des procédures de licenciement : l’équation est-elle vraiment parfaite ? », Dr.soc., 2008, p.986 ; A propos de la référence à la transaction dans tous les secteurs de la vie juridique, Cfr E. SERVERIN et al., Transactions et pratiques transactionnelles, Paris, Economica, 1987, p.5 : « La référence à la transaction se rencontre aujourd’hui dans tous les secteurs de la vie juridique ». Si dans le droit ancien, cette référence se présente en termes de « restrictions », actuellement, il s’agit au contraire d’« aménager un régime juridique spécifique de la transaction », et de « l’intégrer comme procédé normal de règlement d’un litige ». 2 ces articles furent bricolés et bâclés. Le Titre du code civil qui les contient sera alors médiocre à la mesure de ces articles2. 3. -Et pourtant, en dépit de ces défaillances qui semblent décrédibiliser la transaction, sa circonstance d’apparition , son régime juridique lui accordant une valeur équipollente à celle d’un jugement, sa place de plus en plus prépondérante dans les pratiques juridiques, sa faveur vis-à-vis du législateur ou du droit étatique plus que peut-être d’autres types de contrat, ses vertus permettant notamment aux parties de pouvoir éviter les fréquentes lenteurs de la justice publique en se rendant plus rapidement justice à elles-mêmes, donnent ainsi à s’étonner et nécessitent qu’une attention soutenue lui soit portée. La transaction a dès lors un message à passer dans le monde juridique et plus précisément, dans la vie sociale3. 4. -Dans le contexte congolais particulièrement, la transaction fait aussi étonner en raison de la très vive controverse qu’elle a engendrée en matière du travail, notamment au sujet de sa validité comme mode légal de rupture du contrat de travail. Et pourtant, pareille controverse aurait pu être évitée si la lettre et l’esprit des dispositions du code civil congolais relatives à la transaction avait été suivie4. 2J.MESTRE, « Rapport de synthèse », in Bl. MALLET-BRICOUT et C.NOURISSAT, La transaction dans toutes ses dimensions, Paris, Dalloz, 2006, p.207 ; A. JEAMMAUD, « Genèse et postérité de la transaction », in Bl. MALLET-BRICOUT et C.NOURISSAT, op.cit., p.6. 3 Sur l’étonnement suscité par la transaction,voir également pour de plus amples détails, idem, pp.5-11 ; En réalité, on pourrait rentrer la transaction dans ce qu’en théorie du droit, on appelle « justices parallèles ». C’est qu’il existe ainsi plusieurs justices qui viennent menacer la justice publique, à savoir, une justice médiatique, des espaces de délocalisation d’un débat jadis contradictoire, ritualisé, sophistiqué : Au sujet de ces justices parallèles, voir les développements faits par P. MARTENS, Théories du droit et pensée juridique contemporaine, Bruxelles, Larcier, 2003 : pp.133-134 ; Cette vertu reconnue à la transaction de pouvoir réaliser la justice aux parties contractantes en dehors de la justice publique ne signifie pas que la transaction est désormais une opération contractuelle qui ne veut plus du Droit, qui proscrit totalement le Droit. Au contraire, « la transaction permet bien entendu d’écarter l’application stricte des règles de droit substantielles, mais elle reste dominée par la référence à ces mêmes règles. Elle intervient comme moyen d’aménager les solutions à apporter à un conflit, à partir d’un même corpus de règles » : Cfr E. SERVERIN et al., op.cit, pp.3-4. 4 Nous ne voulons pas dire par là qu’il n’y aurait plus de contestations en matière de transaction en République démocratique. En effet, même si la lettre des dispositions du code civil sur la transaction peuvent être claires à comprendre, cela ne pourrait pas exclure l’existence des litiges y relativement, car comme l’écrit Jacques MESTRE dans son rapport de synthèse sur le colloque relatif à « la transaction dans toutes ses dimensions » organisé à la Faculté de Droit de l’Université Jean Moulin (Lyon III) les 2 et 3 décembre 2005, « qui dit transactionnel ne dit pas nécessairement juste… » : J.MESTRE, « Rapport de synthèse », in Bl.MALLE-BRICOURT et C.NOURRISSAT ( sous la direction de ), La transaction dans toutes ses dimensions, Paris, Dalloz, 3 5. -Ainsi, pour bien appréhender cet état des choses en matière sociale congolaise, il conviendra de poser clairement le problème survenu lors de l’application du mécanisme transactionnel en droit contractuel congolais du travail (I). Les enjeux suscités à cet effet étant fort évidents (II), il importera par la suite de préciser la méthodologie sur laquelle nous nous fonderons pour mener notre recherche (III), et d’annoncer sommairement à cet effet le plan qui fort à propos, nous guidera tout au long de notre étude(IV) . I.La position du problème : Questions congolaises 6. –Le contexte de l’application du mécanisme de la transaction en matière sociale congolaise est fait globalement de deux mouvements opposés. On a assisté, en p.213 ; On comprend bien toute cette controverse car dans tous les cas, même si on peut s’autoriser d’affirmer que les dispositions relatives à la transaction sont claires, dispositions qui logiquement ne devaient pas donner lieu à interprétation en vertu de l’adage « interpretatio cessat in claris » (l’interprétation cesse en présence d’un texte clair), la notion de clarté est –elle-même équivoque. Même si un texte peut passer pour clair aux yeux de la majorité, rien ne peut empêcher une juridiction d’en procéder à l’interprétation afin d’en tirer un résultat qui lui convient ; Qui dit interprétation, dit diversités de réponses à une question de droit, et donc survenance subséquente de controverse ( ce nous qui soulignons) : Voir A.RIEG, « Rapport français », in X, L’interprétation par le juge des règles écrites, Travaux de l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française, Tome XXIX, Paris, Economica, p.78. ; Ainsi, quelle que soit la nature de l’interprétation faite par le juge, implicite ou explicite, celui-ci paraît toujours respectueux de la loi. Celle-ci est presque expressément invoquée. Aucun juge ne peut avoir la prétention de heurter de front une disposition légale. Mais les résultats de cette interprétation judiciaire sont parfois l’absence de transparence et l’absence de clarté. Ce postulat qui est bien dégagé par MOREAU-MARGREVE et P.DELNOY, est très significatif lorsqu’il s’agit d’essayer de comprendre tout le contour de cette controverse : C’est qu’au départ, quelle que soit la position adoptée par le juge congolais dans le cadre de cette controverse, le sens de l’intervention judiciaire aura été d’essayer d’interpréter correctement la loi, de lui restituer sa portée réelle et donc raisonnablement de ne pas heurter cette loi, mais le défaut de transparence et de clarté de certaines décisions rendues par ce juge, serait, selon nous, à l’origine de cette controverse et l’aura davantage accentuée : Pour plus de précisions sur l’activité interprétative du juge, voir MOREAU- MARGREVE et P. DELNOY, « Rapport belge », in X, L’interprétation par le juge des règles écrites, Travaux de l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française, Tome uploads/S4/ these-dieudonne-diumi-transaction-et-contrat-de-travail-une-analyse-comparative-en-droits-congolais-francais-et-belge 1 .pdf

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  • Publié le Aoû 07, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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