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http://www.maitre- eolas.fr/post/2009/03/17/1345-vade-mecum- de-la-comparution-immediate-1 Vade mecum de la comparution immédiate (1) Par Eolas le mardi 17 mars 2009 à 13:05 :: Les leçons de Maître Eolas :: Lien permanent Ce billet s'adresse avant tout aux avocats débutants qui me lisent et qui vont bientôt se frotter au redoutable exercice de la défense en comparution immédiate (CI ; oralement, on parlera plutôt de “compa'”). Les vieux croûtons avocats expérimentés comme moi y trouveront matière à réfléchir à leur pratique et je l'espère à corriger la mienne. J'espère que les magistrats auront de leur côté un aperçu du travail concret de l'avocat, quant aux autres, extérieurs à l'arène du prétoire,cassez-vous cela vous donnera une idée de ce que c'est qu'être avocat, en vous priant de m'excuser pour les termes techniques que je vais immanquablement devoir employer. La défense en comparution immédiate est un travail essentiel de l'avocat pénaliste. On ne peut y échapper en début de carrière, c'est un vrai travail de défense mais qui obéit à des règles très différentes de la défense ordinaire, tout en maintenant les principes essentiels de la procédure pénale. Ce n'est certainement pas le lieu de l'improvisation, mais contrairement à ce qu'on a tendance à croire, une vraie défense est possible à condition de se saisir des possibilités laissées par le Code. Tout d'abord, une comparution immédiate, c'est quoi ? Cela relève de la politique pénale appelée étrangement “traitement en temps réel”. L'idée est de conduire directement devant le tribunal une personne qui vient d'être arrêtée en flagrant délit pour y être jugée immédiatement. Le Beccarien que je suis applaudit à l'idée : tonton Cesare a démontré il y a longtemps que l'immédiateté de la sanction est un des critères d'une dissuasion efficace (avec sa certitude, sa sévérité n'ayant que très peu d'effet). Las, l'idée n'a pas été inspirée par Beccaria mais par une logique toute technocratique de gestion des stocks et des flux : une CI, c'est un dossier entré et sorti le même jour. C'est très bon pour le chiffre, et le chiffre, c'est la drogue de la Chancellerie. Le futur prévenu doit être privé de liberté. C'est une condition sine qua non, aisément résolu par un placement en garde à vue. Soit, ce qui est l'idée originelle, que le prévenu a été arrêté dans le cadre d'une enquête de flagrance (à condition que la peine encourue soit d'au moins six mois, ce qui couvre la quasi totalité des délits), soit, cela arrive de plus en plus, que le prévenu a été convoqué dans le cadre d'une enquête préliminaire et a été placé en garde à vue (dans ce cas, la peine encourue doit être d'au moins deux ans, art. 395 CPP). Ce dernier schéma est légal, mais constitue à mon sens un détournement de la procédure de CI. Autant l'enquête de flagrance relève d'une certaine urgence dans laquelle la CI s'inscrit logiquement, autant l'enquête préliminaire exclut par sa nature l'urgence : on n'est plus dans le cas d'une sanction immédiate. C'est la logique technocratique qui l'emporte ici. À l'issue de la garde à vue, l'intéressé (qui n'est donc plus gardé à vue mais pas encore prévenu, ça a des conséquences, vous allez voir, il est simplement retenu), est déféré au parquet pour présentation au procureur de la République. C'est lors de ce bref entretien que le procureur, qui va consulter rapidement et pour la première fois le dossier de la procédure (jusqu'à présent, les PV étaient au commissariat ou à la brigade de gendarmerie), va faire le choix d'aiguillage du dossier. Soit une simple convocation à une audience ultérieure, et l'intéressé est laissé libre (c'est une convocation par procès verbal, CPPV), mais c'est rare : cela signifie que le dossier s'avère beaucoup moins grave ou complet que les comptes-rendus téléphoniques le laissaient entendre, sinon, le parquet aurait opté par une convocation par officier de police judiciaire (COPJ). Soit une présentation au JLD pour placement sous contrôle judiciaire jusqu'à une audience ultérieure : une convocation par procès verbal pour contrôle judiciaire (CPPVCJ, art. 394 al. 3 du CPP), assez fréquente pour les violences conjugales légère sans antécédents. Soit c'est la CI, et le tribunal est techniquement saisi par procès-verbal[1]. Ce n'est qu'à partir de ce moment que le prévenu est officiellement un prévenu, et que s'ouvrent les droits de la défense : droit à un avocat, droit à l'accès au dossier. Une incise, je ne peux pas m'en empêcher. On a ici une illustration du caractère jurassique de notre procédure. Le prévenu est entre les mains de la police depuis 24 voire 48 heures (techniquement, il peut même avoir été arrêté trois jours plus tôt avec le délai de retenue de 20 heures). Il a été interrogé par la police, puis par le procureur, qui est partie au procès qui va intervenir, et même l'adversaire du prévenu. Cet entretien a pourtant lieu hors la présence de l'avocat, sans qu'un avocat ait seulement pu examiner le dossier et s'entretenir de cela avec le prévenu. Bref, tout est fait pour tenir l'avocat éloigné jusqu'au dernier moment, afin de laisser le futur prévenu désemparé s'accabler lui-même. Nous sommes un des derniers pays occidentaux à pratiquer ainsi, et ce n'est pas la commission Léger, chargée de liquider le juge d'instruction, qui va faire œuvre révolutionnaire puisque dans son rapport d'étape, l'avocat n'aurait qu'un accès —partiel— à la procédure qu'au bout de 12 heures, et ne pourra assister aux interrogatoires. Les États-Unis assurent depuis 1966 l'accès effectif à un avocat à toute personne arrêtée (Arrêt Miranda v. Arizona, 13 juin 1966, 384 U.S. 436 (1966).), ce qui ne les empêche pas d'avoir des prisons remplies à ras-bord et d'exécuter des innocents de temps en temps, vous voyez qu'il n'y a pas de raison d'avoir peur. Bref. Le prévenu va comparaître sur-le-champ devant un tribunal. Sauf s'il n'y a pas de tribunal, ce qui arrive les dimanches et jours fériés. Dans ce cas, le prévenu va être présenté au juge des libertés et de la détention, statuant en chambre du conseil, pour placement sous mandat de dépôt jusqu'à la prochaine audience utile (art. 396 du CPP). À Paris, les permanences du dimanche consistent donc à assister le prévenu devant le JLD et s'il est placé sous mandat de dépôt, à l'audience du lundi matin devant la 24e chambre. Si vous faites libérer tous vos clients (qui sont alors reconduits devant le procureur pour une CPPV classique, parfois le lendemain matin s'il y a renonciation au délai de 10 jours en votre présence, mais hors régime de la CI), vous avez votre lundi matin de libre, mais vous ne serez pas payé de votre permanence, uniquement de l'audience JLD (2 UV, soit un peu plus de 40 euros par affaire ; oui, un excellent dimanche, ça valait le coup de ne pas voir vos enfants ce jour là). La préparation du champion. Une permanence, c'est un marathon qui se court à la vitesse d'un sprint. C'est éprouvant, fatigant, et vous n'avez pas une minute à perdre. Le matériel indispensable : — Votre kit à prendre des notes. Chacun son truc. Moi, c'est stylo plume (c'est ce qu'il y a de moins fatiguant pour prendre longtemps des notes), plusieurs pour prévenir les pannes d'encre. Plus des stylos de toutes les couleurs, c'est mon côté greffier, j'ai des codes couleurs pour distinguer la simple note du dossier (ex : “victime : il m'a porté des coups de pied au sol”) du commentaire personnel (ex : “le prévenu n'est-il pas cul-de-jatte ?”) voire des instructions importantes (“Soulever la nullité de la GAV, demander la non inscription au B2”). Et bloc note, bien sûr. — Les codes. Je sais, ça pèse lourd, mais c'est notre arme, avec le stylo. Code pénal à jour, code de procédure pénale à jour et idéalement, code des étrangers. Le guide des infractions de Saint-Jean-Christophe Crocq est très utile, mais il ne remplace pas les précieuses annotations de jurisprudence des codes modèle scoliose précoce. — Signets, post-it, stabilos. Surlignez les passages importants pour les retrouver facilement, mettez un signet ou un post-it sur les pièces importantes (auditions, confrontation, certificat des UMJ, éventuellement saisine interpellation et notification de GAV si vous soulevez des nullités). Vous ne pouvez pas vous permettre de chercher pendant cinq minutes un passage clé. — Votre mobile, chargé à bloc. S'il le faut, prenez votre chargeur, vous avez une prise dans le local. Vous allez passer des coups de fil. À Paris, un téléphone est à votre disposition. Mais il faut que la famille ait votre numéro de mobile pour vous retrouver facilement où que vous soyez. Donc vous appelez de votre portable, numéro affiché. Pas de chichis. — À manger et à boire. Vous n'aurez pas le temps d'aller casser la graine. Prévoyez de quoi proposer à votre client (une pomme, un paquet de gâteaux peuvent faire l'affaire). L'intendance du dépôt est ce qu'elle est, votre client est épuisé par la garde à vue, ce n'est pas la peine qu'en plus il soit à jeun et assoiffé. uploads/S4/ vade-mecum-de-la-comparution-immediate.pdf
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- Publié le Jan 07, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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