3ème Année Licence Fondamentale en Droit Privé Matière : D.I.P. COURS GENERAL D

3ème Année Licence Fondamentale en Droit Privé Matière : D.I.P. COURS GENERAL DE DROIT INTERNATIONAL PRIVE Chargé du Cours : Sami BOSTANJI Professeur à la Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis Année Universitaire 2020-2021 Cours général de droit international privé 1 PREMIERE PARTIE- LES CONFLITS DE JURIDICTIONS L’expression conflits de juridictions recouvre l’ensemble des règles de droit judiciaire applicables à un litige comportant un élément d’extranéité 1- Ces règles de procédure spécifiques aux relations privées internationales comprennent trois questions essentielles : 2- La compétence internationale des juridictions tunisiennes. 3- Les immunités de juridiction des Etats et des personnes morales étrangères de droit public agissant au nom et pour le compte de ces Etats. 4- Les effets en Tunisie des décisions et jugements étrangers. TITRE 1- LA COMPETENCE INTERNATIONALE DES JURIDICTIONS TUNISIENNES Par compétence internationale des juridictions tunisiennes, il faut entendre l’ensemble des règles qui déterminent les cas où les tribunaux judiciaires tunisiens sont compétents pour connaître des contestations, à caractère civil ou commercial, présentant un caractère international. En droit interne la résolution de la question de savoir quel est le tribunal compétent pour résoudre le litige se fait par référence aux règles de compétence d’attribution et aux règles de compétence territoriale. La première série de règles sert à déterminer la juridiction qui est matériellement compétente pour connaître du litige. De manière concrète, il s’agit de fixer l’ordre auquel appartient cette juridiction (ordre judiciaire ou ordre administratif et préciser au cas où l’ordre judiciaire est retenu, si l’affaire doit être déférée devant une juridiction civile ou une juridiction pénale); de même, ces règles déterminent le degré de la juridiction appelée à connaître du litige (juge cantonal, juge de première instance ou juge d’appel), voire parfois la chambre compétente au sein de la juridiction désignée. Par exemple, si le Cours général de droit international privé 2 Tribunal de première instance est désigné, il importe de savoir si c’est la Chambre civile, la Chambre commerciale ou la Chambre prud’homale qui est appelée à connaître de l’affaire. La seconde série de règles (les règles de compétence territoriale) vise à localiser la juridiction qui est géographiquement compétente. Dire que c’est le tribunal de première instance qui est compétent pour connaître du litige ne suffit pas ; encore faut-il préciser de quel tribunal de première instance il est question. S’agit-il du tribunal de première instance de Tunis, de Sousse, de Sfax ou d’une autre région de la Tunisie ? C’est précisément la fonction dévolue aux règles relatives à la compétence territoriale qui sont contenues dans les articles 30 à 37 du Code de procédure civile et commerciale. Lorsqu’il est question d’un litige présentant un élément d’extranéité, les règles internes relatives à la compétence des tribunaux tunisiens contenues dans le Code de procédure civile et commerciale ne peuvent être a priori d’aucune utilité. Elles n’apportent aucune réponse à la question de savoir si les tribunaux relevant de l’Etat tunisien sont compétents ou non pour connaître du litige international en cause ? Cette question est totalement étrangère aux règles précédemment mentionnées car celles-ci concernent les litiges qui sont totalement intégrés dans l’ordre juridique tunisien, c'est-à- dire les litiges qui présentent un caractère exclusivement interne. Pour savoir si les tribunaux tunisiens sont compétents pour connaître du litige international en cause, il faut alors recourir à des normes spécifiques lesquelles prennent en charge le caractère transfrontière du litige et tentent de lui apporter des solutions appropriées. A ce propos, il faut souligner que ces normes relatives à la compétence internationale trouvent leur source dans des textes divers. Pour l’essentiel, la question est réglée par les articles 3 à 10 du Code de droit international privé. Mais ces dispositions doivent être complétées par d’autres textes d’origine multiple. Aussi, peut-on citer, à ce propos, les dispositions de l’article 106 du Code de commerce maritime, l’article 21 de la Convention de Hambourg du 30/03/1978 sur le transport de marchandises par mer1 ou 1Cette Convention est ratifiée par la Tunisie en vertu de la loi n°33-1980 du 28/05/1980. Cours général de droit international privé 3 encore les articles 33 à 36 de la Convention d’entraide judiciaire entre les pays de l’UMA2. Compte tenu du fait que ces normes conventionnelles sont peu nombreuses et couvrent un domaine d’application sectoriel bien ciblé, leur étude sera exclue de ces enseignements qui couvriront exclusivement les règles générales du Code de droit international privé. Ces dernières règles permettront au juge tunisien saisi de vérifier, avant de statuer sur le litige, sa compétence à connaître des faits qui lui sont soumis. Cette vérification préalable de la compétence internationale des tribunaux tunisiens peut connaître deux issues : 1ère hypothèse: les règles tunisiennes de compétence internationale n’autorisent pas le juge à connaître du litige. Celui-ci doit, dans ce cas, se déclarer incompétent pour connaître de l’affaire. Il n’a pas à désigner la juridiction compétente étrangère appelée à connaître du litige car il est unanimement admis que l’un des attributs de la souveraineté de l’Etat est l’exclusivité qui lui appartient dans la détermination des cas où ses tribunaux sont compétents. Cette dernière opération est, en effet, une manière d’organiser un domaine régalien de l’Etat : le service public de la justice. Dans ce secteur où la souveraineté est en jeu, aucun Etat ne peut tolérer la concurrence d’un autre Etat qui viendrait fixer les règles organisant la compétence de ses tribunaux. 2ème hypothèse: le juge tunisien est compétent pour connaître du litige ; ce qui l’amène à se saisir de l’affaire en vue de la résoudre. Dans cette dernière hypothèse, sa compétence à connaître du litige international qui lui est soumis est autorisée par les règles relatives à la compétence internationale des juridictions tunisiennes. Sa saisine correspond normalement dans cette hypothèse à un des cas de compétence internationale des tribunaux tunisiens prévus par les dispositions adoptées à cet effet par le Code de droit international privé. 2 Convention conclue en Lybie les 9 et 10 Mars 1991 a été ratifiée par la Tunisie par la loi n° 93-1991 du 29/11/1991. Cette Convention n’est pas encore entrée en vigueur en raison de sa non-ratification par le Maroc. Cours général de droit international privé 4 Configuration générale du système de la compétence internationale des tribunaux tunisiens- Les règles relatives à la compétence internationale des juridictions tunisiennes sont de deux sortes. D’un côté, il y a des règles qui confèrent au juge tunisien une compétence exclusive pour connaître de certains litiges. D’un autre côté, il y a des règles qui ne reconnaissent qu’une compétence possible pour le juge tunisien à l’égard d’autres litiges. Si on essaye de schématiser l’articulation de ces deux sortes de compétence, on pourrait dire qu’il existe des cas où les parties doivent nécessairement soumettre leur litige aux juridictions tunisiennes ; il s’agit dans ces hypothèses d’une compétence internationale imposée aux parties par le système juridique tunisien. Hors de ces hypothèses de compétence imposée, la compétence des tribunaux se justifient par le choix opéré par le demandeur qui décide de soumettre l’affaire aux juridictions tunisiennes ou encore lorsque les deux parties ont convenu en vertu d’un accord conclu entre elles de soumettre leur litige à l’ordre juridictionnel tunisien. On trouve très tôt écho à cette logique dans les premières applications judiciaires du Code de droit international privé. Dans une décision inédite du Tribunal de première instance de Tunis en date du 13 octobre 1999, les juges ont affirmé : « … qu’il est certain que le droit international privé tunisien a ventilé la compétence internationale des tribunaux nationaux en deux catégories : une première catégorie où la compétence est obligatoire qui intègre la solution prévue par l’article 8 du Code de droit international privé et une seconde catégorie où la compétence est facultative englobant les cas visés aux articles 3 à 7 du Code de droit international privé »3. Plus de vingt ans plus, la Cour de cassation est venue rappeler cette configuration binaire de la compétence internationale des tribunaux tunisiens en soutenant que si les règles de compétence prévues au sein de l’article 8 sont d’ordre public et ne supportent pas, par conséquent, la convention contraire des parties dans la mesure où elles touchent à la souveraineté de l’Etat, les autres normes adoptées au sein du Titre II du Code de droit international privé 3 Tribunal de première instance de Tunis, Jugement n°9901 en date du 13 octobre 1999, STA, Inédit. Cours général de droit international privé 5 prennent en charge des intérêts privés et peuvent, de ce fait, la soumission du litige en cause à un tribunal autre que le tribunal tunisien4. Chapitre 1- La compétence internationale exclusive des tribunaux tunisiens Il importe de présenter, en premier lieu, la notion de compétence exclusive (Section 1), avant d’analyser en détail, en deuxième lieu, la teneur de l’article 8 du Code de droit international privé (Section 2). Enfin, il conviendra, en troisième lieu, d’évoquer les conséquences qu’emporte l’admission de cette catégorie de compétence (Section 3). Section 1- Présentation de la notion de compétence exclusive Lorsqu’un litige touche un ou plusieurs uploads/S4/la-compe-tence-internationale-exclusive.pdf

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  • Publié le Oct 21, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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