Investissement, emprunt et trésorerie dans les modèles de finances publiques lo
Investissement, emprunt et trésorerie dans les modèles de finances publiques locales Philippe ABECASSIS* MODEM, Université Paris X-Nanterre Février 1994 (à paraître dans l’Annuaire des Collectivités Locales 1994) Résumé Les modèles de finances publiques locales sont-ils pertinents ? expliquent-ils les comportements locaux de façon satisfaisante ? C’est pour répondre à ces deux questions que cet article tente de synthétiser les résultats des principaux modèles de finances publiques locales. A cette fin, nous analysons les résultats fournis par ces études en suivant leur dynamique sous-jacente : celle-ci attribue aux collectivités locales une fonction principale de « fournisseur de biens et services publics » mesurable par leur niveau d’investissement. deux problèmes sont alors soulevés : celui de la révélation des besoins en investissements publics locaux -résolu en considérant que l’investissement public est induit par l‘investissement logement des ménages- et celui du financement de ces dépenses d’infrastructure sachant que la seule véritable marge de manoeuvre dont disposent les collectivités locales se concentre dans le financement par emprunt. L‘hypothèse réalisée dans cet article consiste donc à estimer que l’emprunt est une variable stratégique du comportement financier local et que cette caractéristique est connue des responsables locaux. Sous cette hypothèse, l’amélioration des conditions de l’emprunt semble être un objectif fondamental du comportement local. Or, les premiers modèles présentés ici sont réalisés sur une période pendant laquelle l’emprunt local était centralisé -et régulé- par la Caisse des Dépôts alors que les derniers modèles évoluent dans un environnement de grande liberté d’emprunt. C’est alors au travers du comportement d’encaisse que l’on pourra comparer ces modèles puisque celle-ci est utilisée à annihiler la politique conjoncturelle de l’Etat au cours de la première période alors que son rôle se transforme petit à petit en un instrument de politique électorale locale avec la libéralisation des prêts aux collectivités locales. * Je remercie vivement le professeur Pierre-Henri DERYCKE pour ses remarques et commentaires au cours de la préparation de cet article. Investissement, Emprunt et trésorerie dans les modèles de finances publiques locales 2 I. Introduction Les sciences économiques se sont tardivement intéressées aux finances locales et les tentatives de modélisation des comportements financiers locaux sont encore à ce jour peu nombreuses. Plus rares encore sont les expériences de modélisation des comportements de court terme. A cette rareté s’ajoute la méconnaissance : les travaux réalisés en la matière sont très disparates, puisqu’ils sont réalisés par des organismes aussi divers que des centres de gestion privés, des universitaires ou des administrations. De plus, ces travaux sont souvent peu explicites de par leur nature : thèses, rapports de recherches, programmes informatiques, etc. L’ambition de cet article est de pallier, dans la mesure du possible à cette méconnaissance en analysant succinctement les principaux travaux dans le domaine. Il est toutefois difficile voire impossible dans une synthèse comme celle-ci d’être à la fois exhaustif et explicite compte tenu de la diversité des modèles existants. Aussi, un critère de sélection des modèles s’imposait. Notre choix s’est porté sur la présentation des seuls modèles jugés pertinents au regard de deux critères : les modèles devaient d’une part être suffisamment représentatifs des collectivités locales, ce qui exclut toutes les monographies ; l’objet des recherches devait d’autre part être axé sur l’analyse des comportements locaux. Ces deux critères positionnent notre présentation dans un cadre à la fois statistique et macro-économique, ce qui écarte les nombreux modèles de simulation et de gestion. Malgré sa courte histoire, l’analyse de la modélisation des finances publiques locales montre pourtant une double dynamique : l’une, historique, oppose les modèles de simulation, issus de la vogue managériales du début des années 1970 - mais que l’on retrouve massivement depuis quelques années - aux modèles explicatifs apparus avec la nécessité de comprendre et d’intégrer les finances publiques locales au sein d’une articulation macro-économique. Par ailleurs, les modèles ont suivi une dynamique allant de plus en plus loin dans leur démarche explicative des comportements de court terme. Alors que les premiers modèles s’attachent à comprendre presque uniquement les comportements de long terme - et en particulier l’investissement - les suivants s’intéressent aux mécanismes d’emprunt, puis de l’utilisation de cet emprunt pour aboutir aux comportement de trésorerie. Le développement des modèles de simulation comptable et de gestion des collectivités locales a été important au début des années 1970. Fortement liées à l'essor de l'informatique, ces études reproduisent souvent, de façon purement technique, les documents budgétaires et/ou comptables locaux. Ce type d'approche opératoire, permettant aux élus locaux d'examiner l'effet de leurs choix sur les variables financières internes, ne comporte pas ou peu de fondements théoriques et les effets externes n'y sont que peu pris en compte à cause de la quasi inexistence de variables extérieures au budget. Simples outils d’aide à la décision, ces modèles ont accompagné, peut-être même en partie développé, la vague de rationalisation des gestions locales des années 80. Face à des besoins nouveaux, leur nombre s'est considérablement accru depuis cette période et s'est accompagné d'une spécialisation importante (calcul de l'endettement, suivi de la trésorerie, équilibre budgétaire...). Mais si la puissance et la rapidité de traitement ont beaucoup évolué au cours du temps, si la facilité de traitement s'est considérablement accrue et si certains intègrent des techniques de gestion récentes, les logiques de fonctionnement de ces modèles sont restées quasiment identiques depuis 20 ans. Malgré l'intérêt, pour les collectivités locales, des modèles de simulation, ceux-ci ne dégagent, en définitive, que peu d'informations explicatives. Les raisons en sont multiples : - les modèles de ce type se contentent, dans un souci d'objectivité, de ne reproduire que des relations certaines (relations comptables et institutionnelles) ; lorsqu'elles sont nécessaires, les relations mettant en jeu un comportement collectif sont le plus souvent demandées à l'utilisateur (ce sont les "options" des modèles) et, si de telles relations ne peuvent être traitées de façon exogène, les hypothèses sous-jacentes sont très strictes (comme celle qui consiste à considérer qu'un équipement nouveau est entièrement utilisé la troisième année) ; - le caractère opératoire de ces modèles les rend incompatibles avec tout fondement économique élaboré. Même si l'on distingue quelquefois une analyse un peu plus poussée sur Investissement, Emprunt et trésorerie dans les modèles de finances publiques locales 3 tel ou tel problème (théorie du bien-être par exemple), toute tentative d'estimation rendrait trop aléatoire les résultats de la simulation. Deuxième type de modèles, les modèles de projection élaborés par les administrations ont souvent pour objet de s'intégrer au sein d'une articulation macro-économique générale. C'est pour cette raison que, comme le font remarquer P.H. Derycke et G. Gilbert [1988] (pages 235 et 239), ceux-ci évoluent dans le cadre de la Comptabilité Nationale et sans distinction entre les différents types de collectivités locales. C’est parmi ces recherches, qui débutent en 1977 avec les travaux de B. Theret, que l’on trouve les premières véritables tentatives d’explication des comportements locaux. Ainsi, l’objectif explicite de la majeure partie de ces travaux est de "traduire sous forme de liaisons stables, déduites de l'examen des résultats passés, un comportement macro-économique des collectivités locales en matière de politique financière et de politique d'équipement" (B. Theret [1977], page 4). Ambitieux, cet objectif ne sera pourtant que partiellement atteint pas les modèles d’administration. Les raisons de ce relatif échec sont à rechercher dans la nature même des modèles : - en premier lieur, les soubassements théoriques n'existent pas ou peu ; en conséquence, la structure des modèles est le plus souvent financière, voire purement comptable, ce qui ne nuit pas à l'objectif mais limite la portée de la recherche ; - ensuite, les APUL sont considérées au sens de la Comptabilité Nationale : aucune distinction n'est faite entre les différents types de collectivités. Si cette approche du SPUL constitue un avantage, puisqu'elle permet de disposer de séries financières longues, elle dissimule une grande partie des disparités de comportement financier des collectivités locales ; - enfin, aucune de ces estimations n'est en mesure de tenir compte des changements structurels de comportements induits par les différentes réformes locales. Certes, la préexistence de la majorité des modèles aux lois de décentralisation (mais pas à la globalisation des prêts) justifie, en partie, cette lacune, mais cette faiblesse a contribué à rendre caduque la quasi-totalité des recherches dès leur élaboration. C’est parmi les modèles explicatifs des comportements financiers locaux que l’on trouve les résultats les plus intéressants au regard des critères choisis. Il ne s'agit plus comme pour les modèles de simulation ou de projection, de reproduire, grâce à des relations financières, un comportement global des APUL, mais véritablement d'expliquer les fondements des comportements financiers locaux. Des modèles déductifs précédents, où l'analyse statistique précédait la démarche économétrique, on aboutit à une série de modèles inductifs où l'hypothèse de comportement, déduite d'une approche théorique, débouche sur une modélisation visant à en confirmer, ou à en infirmer la validité. D'autres spécificités des modèles viennent s'ajouter à cette caractéristique fondamentale : - les recherches portent sur une partie du secteur public local jugée économiquement homogène (ensemble des communes, voire échantillon de communes) ; - le cadre d'analyse, choisi en fonction de la nature du comportement uploads/Finance/ 1995-abecassis-annuaire-des-cl-investissement-emprunt-et-tresorerie-dans-les-modeles-de-finances-publiques-locales 1 .pdf
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- Publié le Jui 21, 2022
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