Ohadata D-11-05 Droit pénal de la comptabilité en droit uniforme OHADA : princi

Ohadata D-11-05 Droit pénal de la comptabilité en droit uniforme OHADA : principales incriminations et sanctions encourues par M. ADJITA A. Shamsidine Enseignant-chercheur, Faculté de Droit - Université de Lomé Atelier de Formation DROIT PENAL OHADA, 25 & 26 septembre 2009 à Lomé Revue de Droit Uniforme Africain n° 00 / 1er trimestre 2010, pp. 36-41. (pages roses) Le droit pénal est la branche du droit positif qui a pour objet l’étude de la répression par l’Etat, des comportements de nature à créer un trouble intolérable à l’ordre public1. De quels comportements s’agit-il ici ? Il s’agit des comportements humains interdits. Le domaine n’est pas limité et s’étend à toutes les activités humaines, qu’elles soient lucratives ou purement altruistes. Quid alors du droit comptable ? En effet, le droit comptable est défini comme la branche du droit privé qui régit les comptables et la comptabilité2. La comptabilité est la « technique de tenue des comptes consistant essentiellement à enregistrer au jour le jour, les recettes et les dépenses et, en fin d’exercice, à établir l’inventaire, le bilan et le compte de résultat. Elle est aussi définie comme l’ensemble des livres et documents comptables d’une entreprise, permettant d’apprécier sa situation financière3. Le comptable, quant à lui, est défini comme celui qui doit tenir et rendre compte des sommes qu’il brasse (revenus perçus, sommes dépensées) dans la gestion à lui confiée4. Comme on peut le constater, le droit comptable met en œuvre des obligations inhérentes à la tenue d’une comptabilité dans une entreprise, dont le comptable en assume l’exécution. Or, l’Acte uniforme du 24 mars 2000 portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises oblige les entreprises opérant dans l’espace OHADA, à tenir une comptabilité aux fins d’information aussi bien interne qu’externe. L’article 1er, al. 1 dudit Acte dispose : « Toute entreprise au sens de l’article 2 ci-après doit mettre en place une comptabilité destinée à l’information externe comme à son propre usage ». Or, selon de l’article 3, « la comptabilité doit satisfaire, dans le respect de la règle de prudence, aux obligations de régularité, de sincérité et de transparence inhérentes à la tenue, au contrôle, à la présentation et à la communication des informations qu’elle a traitées ». De façon générale, on doit retenir de ces dispositions ci-dessus citées, que la comptabilité d’une entreprise est un outil d’information pour les tiers, futurs contractants de la société ou du commerçant. A cette fin, elle se doit d’être fiable et non mensongère. 1 G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil, B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, 14e édition, Dalloz, 2002, p. 1. 2 A. Viandier et C. de Lauzainghein, Droit comptable, précis Dalloz, 2e éd., 1993, p. 1. 3 G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF 2003, p. 185. 4 Ibid., p. 186. Pour garantir la fiabilité, la compréhension et la comparabilité des informations, pour éviter que les informations dont elle est porteuse ne soient mensongères, destinées à tromper les tiers, un droit pénal de la comptabilité a été mis en place par le législateur de l’OHADA. Il relève non pas de l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises, mais de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE), et plus précisément, de la partie III dudit Acte. Il est le gendarme qui veille au respect des obligations que contient l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises dans l’espace OHADA. Il s’articule autour des « interdictions de faire » qu’on a coutume d’appeler « incriminations » en droit pénal et dont la violation est sanctionnée par la loi nationale de l’Etat sur le territoire duquel l’infraction a été commise. Il s’ensuit donc un éclatement de compétence en matière pénale dans l’espace OHADA : si les incriminations relèvent de la compétence du législateur de l’OHADA, les sanctions quant à elles sont du domaine du législateur national. Le thème objet de l’exposé de ce matin porte en lui-même son plan de par la forme de l’intitulé. Il nous invite tout simplement à vous présenter ce que chaque législateur, selon ce qui relève de sa compétence, a prévu en matière de droit pénal de la comptabilité des entreprises dans l’espace OHADA. Le travail sera donc organisé autour de deux grandes idées : on verra, d’un côté, la typologie des principales incriminations (I) et, de l’autre, les sanctions encourues par les contrevenants (II). I.- TYPOLOGIE DES PRINCIPALES INCRIMINATIONS Deux principales incriminations nous occuperont sous cette rubrique : d’une part, les incriminations relatives aux irrégularités comptables (A) et, d’autre part, celles relatives au contrôle de la gestion (B). A.- Les incriminations relatives aux irrégularités comptables Le législateur de l’AUSCGIE a prévu plusieurs incriminations dans les articles 889 et 890. A travers ces incriminations, il cherche à sanctionner le défaut de sincérité comptable. Mais de façon générale, les irrégularités sanctionnées pénalement sont la répartition de dividendes fictifs entre les associés, d’une part, et la communication d’états financiers ne donnant pas une image fidèle de la situation financière et comptable de la société, d’autre part. Examinons ces deux incriminations pour découvrir leur contenu réel. 1.- L’interdiction de la distribution de dividendes fictifs L’article 889 dispose : « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui, en l’absence d’inventaire ou au moyen d’inventaire frauduleux, auront sciemment opéré entre les actionnaires ou les associés, la répartition des dividendes fictifs ». L’interdiction se justifie aisément. Une telle distribution serait préjudiciable non seulement aux associés, mais aussi à la société, en ce sens que c’est le capital social lui-même qui sera entamé, puisqu’en réalité il n’y a pas de bénéfice à partager. Ainsi, l’infraction sera-t-elle consommée lorsque ses éléments constitutifs seront réunis, à savoir l’élément matériel et l’élément moral. Pour que l’infraction existe, il faut une condition préalable : le caractère fictif ou l’inexactitude de l’inventaire. Il faut en plus, une répartition des dividendes et la mauvaise foi des auteurs. • • • • Le caractère fictif ou l’inexactitude de l’inventaire L’inventaire apparaît comme un relevé descriptif et estimatif des créances, des dettes et des biens de la société. Il s’agit du bilan ou de tout compte rendu permettant d’apprécier l’état du patrimoine social. Pour que l’infraction existe, il faut que l’inventaire soit absent ou frauduleux, à défaut, l’infraction disparaît, même s’il y a distribution de dividendes fictifs. • • • • La distribution des dividendes Il s’agit de l’élément matériel de l’infraction. Il se dédouble en deux actes : - l’acte de distribution : pour que l’on retienne l’existence d’un acte de distribution, il n’est pas nécessaire que les dividendes mis à la disposition des actionnaires aient effectivement été perçus. L’essentiel, c’est « qu’un droit privatif soit créé au profit des actionnaires ». Le délit peut même se réaliser par compensation. - le caractère fictif des dividendes : le caractère fictif des dividendes résulte des irrégularités liées au bénéfice. Est donc fictif, tout dividende distribué lorsque le bénéfice lui-même est fictif ou n’est pas encore réalisé. C’est la distribution d’un bénéfice inexistant, irréel. • • • • La mauvaise foi des auteurs La nécessité d’une intention délictueuse résulte, à l’évidence, de l’emploi dans le texte de l’article 899 AUSCGIE, des termes « fictifs, frauduleux et sciemment ». Cette image du texte rime avec mauvaise foi des auteurs. Cette mauvaise foi consiste dans la connaissance, par l’auteur, aussi bien du caractère fictif des dividendes que de l’inexactitude de l’inventaire ou du bilan ou des conditions dans lesquelles la distribution des dividendes a été décidée. 2.- L’interdiction de la publication ou de présentation de comptes infidèles L’article 890 AUSCGIE interdit la publication ou la présentation des comptes infidèles, sous peine de sanction pénale. Ce texte dispose : « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui auront, sciemment, même en l’absence de toute distribution de dividendes, publié ou présenté aux actionnaires ou associés, en vue de dissimuler la véritable situation de la situation financière et de celle du patrimoine de la société, à l’expiration de cette période ». L’analyse de ce délit laisse apparaître un élément matériel doublé d’un élément moral. • • • • L’élément matériel Le délit de communication d’états financiers de synthèse suppose un acte de communication, c’est-à-dire le fait de publication ou de présentation et une infidélité de l’objet de cette communication. - L’acte de communication : la publication ou la présentation Il ressort de la lecture de l’article 890 de l’AUSC, que les états financiers de synthèse doivent faire l’objet d’une présentation ou d’une publication. - La présentation. Elle correspond à la communication des documents comptables à l’assemblée générale des actionnaires5 ou leur mise à disposition, au siège social ou encore, leur envoi aux actionnaires dans les quinze jours avant l’assemblée 5 Cass. crim., 30 mai 1930, Revue des sociétés 1930, 325 ; 1er mars 1945, D., 1946, 1, 129. d’approbation des comptes. L’infraction ne serait pas réalisée si la communication est adressée à d’autres personnes ou à un autre moment. La jurisprudence avait retenu que « par présentation, il faut entendre, non la uploads/Finance/ droit-penal-de-la-comptabilite-en-droit-uniforme-ohada-principales-incriminations-et-sanctions-encourrues.pdf

  • 62
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Fev 16, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.0701MB