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Le Conseil européen confirme la fin des voitures thermiques en 2035, sauf si… La France est parvenue à un accord sur le paquet climat- énergie : la fin des véhicules thermiques pour 2035 est toutefois soumise à une clause de revoyure en 2026. Le conseil des ministres européens de l'Environnement est parvenu, après des négociations difficiles, à un accord dans la nuit de mardi à mercredi. Agnès Pannier-Runacher, la ministre française chargée des pourparlers, parle d'une « triple victoire pour le climat, pour nos citoyens, pour nos entreprises et nos territoires ». Le paquet énergie-climat correspond à un ensemble de textes censés réduire de 55 % les émissions de CO2 de l'UE à l'horizon 2030 pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Le Parlement européen a statué sur une partie des textes à la mi-juin (le reste sera examiné en septembre par les commissions des transports et de l'industrie). Avec l'accord de ce jour, le Conseil prend à son tour position sur l'ensemble des textes. Un tour de force de la présidence française de l'Union que très peu pensaient réalisable il y a encore quelques mois… Les divergences devront être comblées lors des trilogues qui seront conduits par la présidence tchèque qui succède à la France à compter du 1er juillet. La République tchèque ne fait pas partie des États les plus motivés. Le Conseil ménage la coalition allemande Allons à l'essentiel pour les consommateurs : les véhicules thermiques neufs, automobiles et camionnettes, ne seront plus mis sur le marché de la vente en 2035. Le Conseil confirme en cela la position récemment adoptée par le Parlement européen. Cependant, il a fallu contourner une difficulté posée par les Allemands, dont le contrat de gouvernement entre le SPD, les Verts et le FDP, les libéraux, prévoit un aménagement s'agissant des carburants synthétiques (e-fuels) et des moteurs hybrides. Les débats entre le FDP de Christian Lindner et les écologistes avaient été très vifs. Il fallait éviter de fracasser le compromis difficilement obtenu à Berlin. Faute de quoi une Allemagne de nouveau divisée se serait abstenue. Or, une abstention allemande aurait pu en déclencher d'autres, rendant impossible d'atteindre la majorité qualifiée nécessaire. Pour tenir compte de ce paramètre politique allemand, le Conseil prévoit une clause de revoyure en 2026 pour les véhicules thermiques et hybrides rechargeables afin de s'assurer que l'objectif de la transition est réalisable et que les technologies sont disponibles. Cette clause n'existe pas du côté du Parlement. Enfin, la Commission européenne pourra évaluer si, après 2035, des véhicules thermiques pourront n'émettre aucune émission de gaz à effet de serre (par exemple avec les carburants synthétiques). Et, dans ce cas, l'immatriculation serait possible. Quid de l'amendement Ferrari ? Une majorité d'eurodéputés italiens, auteurs d'un « amendement Ferrari », avaient introduit une exception pour les bolides de luxe à faible volume de production (entre 1 000 et 10 000 par an), qui pourront continuer jusqu'en 2036 (dont Aston Martin, Maserati…). Le Conseil s'en tient à une exemption jusqu'à la fin 2036. Le Parlement avait prévu que, s'agissant des constructeurs qui vendent moins de 1 000 exemplaires par an (Bugatti, Koenigsegg), l'interdiction soit levée. Mais le cœur de la réforme concerne les entreprises liées au marché européen du carbone, dit ETS. Ce marché est fondé sur un système de plafonnement et d'échange de quotas d'émissions pour les industries à forte intensité énergétique et le secteur de la production d'électricité. Plus vous réduisez les quotas de carbone, plus vous augmentez le prix du carbone et plus vous rendez nécessaire la conversion du modèle économique des entreprises vers des énergies moins émettrices de CO2. C'est tout le principe de cette réforme. « Il a fait ses preuves. Nous avons donc renforcé le marché carbone existant qui couvre les émissions des secteurs comme le ciment ou l'acier avec un nouvel objectif de – 61 % de gaz à effet de serre d'ici 2030 », annonce Agnès Pannier-Runacher. Le Parlement a été un peu plus ambitieux, de son côté, avec – 63 %. Pas très difficile de couper la poire en deux… Une fin plus lente des quotas gratuits Plus difficile, en revanche, de décider de mettre fin aux « quotas gratuits » dont disposent les entreprises européennes exposées à la concurrence internationale. Ces quotas gratuits ne peuvent pas durablement coexister avec la taxe carbone aux frontières que l'UE souhaite mettre en place sous peine d'une attaque devant l'OMC pour concurrence déloyale. La taxe carbone aux frontières (dite MACF) protégera les entreprises européennes d'une concurrence étrangère qui ne se soumettrait pas aux mêmes normes environnementales dans certains secteurs. Mais, dans ce cas, on ne peut pas avoir, en plus, des quotas gratuits de carbone. Il faut choisir… Il faut donc, pour le législateur européen, diminuer progressivement les quotas gratuits et la montée en puissance de la taxe carbone. Le Conseil a décidé d'étaler l'extinction des quotas gratuits entre 2026 et 2035. Le Parlement européen, lui, s'est accordé sur la période allant de 2027 à 2032. Donc le Conseil veut commencer plus tôt mais finir bien plus tard et s'aligne sur la proposition initiale de la Commission (2035) : une réduction plus lente au début et un taux de réduction accéléré à la fin de cette période de dix ans. L'accompagnement de la décarbonation de ces secteurs sera possible via le fonds d'innovation. Le Conseil a également demandé à la Commission d'évaluer si l'impact de la taxe carbone aux frontières nécessite des mesures supplémentaires. Transports et bâtiments entrent dans le marché carbone S'agissant de l'extension du marché carbone aux transports (20 % des émissions de gaz à effet de serre) et aux bâtiments (40 % des émissions de gaz à effet de serre), le Conseil a connu des négociations « difficiles », selon Agnès Pannier-Runacher. Cette extension est appelée ETS 2 dans le jargon européen. Le sujet est potentiellement dangereux car les particuliers pourraient voir leur facture de chauffage ou d'essence nettement augmenter, bien plus qu'aujourd'hui sous l'effet de la guerre en Ukraine. Sensible à un risque d'effet « Gilets jaunes » , le Parlement européen a, quant à lui, préféré botter en touche en exonérant les ménages jusqu'en 2029… Le Conseil a préféré une autre approche : il fait reposer le nouveau système sur les distributeurs « qui fournissent des carburants destinés à la consommation dans les secteurs du bâtiment et du transport routier », et non directement sur les particuliers. « Ce que l'on veut changer, c'est le comportement des fournisseurs d'énergies », explique Frans Timmermans, le commissaire européen responsable du pacte vert. Sauf que les distributeurs répercuteront forcément les coûts de cette transition sur les consommateurs… Toutefois, il est prévu que les États membres dont la tonne de carbone est déjà au niveau de 45 euros pourront s'abstraire de l'ETS 2. C'est précisément le cas de la France. Donc le gouvernement français peut annoncer que, pour les ménages français, rien ne change. Et c'est sans doute ce qu'il va faire. Les discussions entre le Conseil et les eurodéputés pourraient être vives sur ce point lors des trilogues, étant donné que les options retenues sont très différentes. La bataille du fonds social pour le climat Il y a un avantage au système du Conseil : le « signal prix » sera le même partout en Europe dans ces deux secteurs (bâtiments et transports), ce qui recrée les conditions d'une concurrence loyale entre les États. Mais la ministre française annonce toutefois que le « signal prix pourra être plus ou moins lissé par les États en fonction de l'adaptation de leurs propres dispositifs fiscaux ou économiques ». Les recettes du marché carbone pourront soutenir les ménages les plus exposés dans cette transition. Traduction : les riches paieront pour les pauvres qui ne peuvent pas se passer de voiture en province… Le Conseil s'est d'ailleurs beaucoup écharpé sur le fonds social pour le climat, censé soutenir les ménages, les microentreprises et les usagers des transports vulnérables. Les pays de l'Est et d'Europe centrale comptaient beaucoup sur ce fonds, à l'origine prévu par la Commission à hauteur de 72 milliards d'euros. À l'inverse, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Suède, bref les pays dits « frugaux », n'avaient pas tellement envie d'abonder ce fonds européen et entendaient conserver au maximum les recettes générées par le marché carbone pour eux-mêmes. 59 milliards d'euros pour aider les plus vulnérables À la fin, le compromis est le suivant : ce fonds social pour le climat serait doté de 59 milliards d'euros. Il ferait partie du budget de l'UE et serait alimenté par des « recettes affectées externes » (vraisemblablement les recettes issues du marché carbone). On ne serait donc pas obligé de rouvrir la discussion budgétaire entre les 27, un moment de déchirement toujours délicat. Cela dit, le système du Conseil diffère sensiblement de la décision du Parlement européen. La clé de répartition entre les États membres de ces 59 milliards d'euros obéit à celle proposée par la Commission, soit une série d'indicateurs tels que le taux de précarité énergétique, le revenu uploads/Finance/ 2.pdf
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- Publié le Sep 28, 2022
- Catégorie Business / Finance
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