CHAPITRE 1 Le risque de crédit Toute opéraƟ on de crédit fait naître un risque

CHAPITRE 1 Le risque de crédit Toute opéraƟ on de crédit fait naître un risque : la probabilité qu’un débiteur n’honore pas ses engagements. L’évaluaƟ on de ce risque est primordiale pour les créanciers, dans un contexte où les diffi cultés des entreprises (défauts de crédit, faillites) sont fréquentes et parce que leurs conséquences perturbent sévèrement l’économie. Pour le créancier, l’existence de ce risque aff ecte la rentabilité qu’il espère de ses opéraƟ ons de crédit et l’expose potenƟ ellement à de graves diffi cultés si la contreparƟ e s’avérait incapable de rembourser le prêt. Son évaluaƟ on a longtemps été sommaire. Face à la montée des risques, des modèles d’analyse du risque de crédit ont été conçus pour le mesurer. Pour comprendre ces systèmes, il importe, préalablement, de défi nir avec précision le risque de crédit et les conƟ ngences de sa mesure. 1. LA NATURE DU RISQUE DE CRÉDIT Le risque de crédit est le risque parƟ culier naissant d’une opéraƟ on de prêt. Il correspond à la probabilité qu’un événement négaƟ f aff ecte le service de la deƩ e sur lequel le débiteur s’est engagé. 1) LA NOTION DE RISQUE Le risque est défi ni comme la possibilité de survenance d’un événement ayant des conséquences négaƟ ves. Il se réfère par nature à un danger, un inconvénient, auquel on est exposé. Il est considéré comme la cause d’un préjudice. Ce terme serait apparu en français au XVIe siècle, mais son étymologie est relaƟ vement opaque. On lui prête des racines italiennes, grecques ou arabes. Avant son usage, les linguistes indiquent que l’on uƟ lisait de manière équivalente les termes aléa ou danger. À l’origine, le mot « risque » est réservé à l’univers mariƟ me et ne se généralise qu’au XVIIIe siècle. Dans le langage courant, le risque a une connotaƟ on négaƟ ve car on oppose « le risque d’échec » à « la chance d’un succès ». Cependant, le risque est associé à une situaƟ on d’une faible probabilité ; si celle-ci était élevée, on uƟ liserait, plus justement, le terme « danger ». Ainsi, le risque est considéré comme une conƟ ngence négaƟ ve et peu probable. Longtemps, le risque a été ignoré : « Les raisonnements appuyés sur des vraisemblances ne sont que charlatanismes » (Socrate). Pour les Grecs, l’avenir est déterminé par les Dieux ; le risque n’existe pas. Retrouver ce titre sur Numilog.com 16 | ANALYSE DU RISQUE DE CRÉDIT Ce terme générique trouve une accepƟ on parƟ culière dans les domaines du management. Il y est perçu comme le corollaire d’une acƟ on, d’une entreprise, supposée générer un gain. Celui-ci, n’étant ni connu ni certain, se trouve exposé à un risque. Il prend alors sa défi niƟ on classique en Finance comme étant le degré d’aléa qui pèse sur le dégagement d’une rentabilité. CeƩ e percepƟ on s’inspire de la défi niƟ on scienƟ fi que du risque de Bernouilli (1738) qui le considère comme la dispersion d’une foncƟ on de probabilité d’événements. Ainsi réputé mesurable, le risque suppose que l’on soit capable d’établir la série de probabilités des valeurs possibles d’une variable (aléatoire). Les XVIIe et XVIIIe siècles marquent le début d’une réelle analyse du risque avec l’énoncé des foncƟ ons d’uƟ lité (probabilités condiƟ onnelles), la naissance de l’assurance (échanƟ llonnage staƟ sƟ que) et le développement des ouƟ ls staƟ sƟ ques (loi des grands nombres). Le XIXe voit apparaître la mesure du risque, les ouƟ ls staƟ sƟ ques deviennent des ouƟ ls de décision. Knight (1921) invitait à disƟ nguer le risque (où des probabilités mathémaƟ ques peuvent être assignées) de l’incerƟ tude (où elles ne le peuvent pas). En économie, un risque exprime une probabilité staƟ sƟ que de survenance d’un événement non désiré. Le risque lui-même n’a pas de nature, mais renvoie à l’événement auquel il se raƩ ache ; il existe pour les acteurs concernés par l’événement qu’il probabilise. Un éclairage original contemporain précise le concept en gesƟ on. Le risque supporté par les stakeholders peut s’analyser dans le cadre conceptuel de l’incomplétude des contrats. Comme il est impossible, ou trop coûteux, de spécifi er ex-ante l’ensemble des éventualités futures (exhausƟ vité des hypothèses et soluƟ ons), les contrats ne peuvent prévoir les disposiƟ ons applicables à tous les états de la nature, ce qui génère le risque. De la sorte, le risque correspond à la possibilité qu’un événement négaƟ f se produise, entraînant des conséquences néfastes pour ceux qui le subissent. Le Comité de Bâle, organisme parƟ cipant à la régulaƟ on prudenƟ elle du secteur bancaire, défi nit le risque comme étant l’associaƟ on de deux éléments : un aléa et une perte potenƟ elle. Si l’aléa ne porte que sur des scénarios posiƟ fs, il n’est pas considéré comme du risque. D’autre part, si la perte est certaine, elle n’est plus considérée comme un risque. 2) LE RISQUE NAISSANT DES OPÉRATIONS DE CRÉDIT Si de mulƟ ples risques existent, en économie et en fi nance, une aƩ enƟ on parƟ culière est portée au risque de crédit. a) Défi nition générique Dès qu’un agent économique consent un crédit à une contreparƟ e, une relaƟ on risquée s’instaure entre le créancier et son débiteur. Ce dernier peut en eff et, de bonne ou de mauvaise foi, ne pas payer sa deƩ e à l’échéance convenue. L’aléa qui Retrouver ce titre sur Numilog.com LE RISQUE DE CRÉDIT | 17 pèse sur le respect d’un engagement de régler une deƩ e consƟ tue le risque de crédit. Une opéraƟ on de crédit consiste pour un créancier à consenƟ r un prêt à un débiteur. Le prêt peut être fi nancier (prêt générant un plan de remboursement), lié à une opéraƟ on commerciale ou encore correspondre à un simple délai pour eff ectuer un règlement. Dans tous ces cas, l’emprunteur s’engage à payer une somme convenue à une échéance déterminée (la maturité). Le montant à régler peut correspondre au simple capital (crédit brut) ou être, dans le cas des prêts fi nanciers, majoré d’intérêts. A priori, en termes de gravité, le risque de crédit renvoie à deux situaƟ ons diff érentes. Dans le cas où le débiteur ne peut tenir son engagement, il peut s’agir soit d’une incapacité temporaire due à des diffi cultés ponctuelles, soit d’une incapacité défi niƟ ve liée à des problèmes structurels pouvant amener la dispariƟ on de l’emprunteur. Si on généralise, ce risque peut être considéré comme l’incerƟ tude aff ectant les montants et les dates auxquels les paiements du débiteur seront eff ectués. Il est lié aux aléas qui pèsent sur l’évoluƟ on de la situaƟ on économique et fi nancière de la contreparƟ e. On appréhende alors le risque de crédit comme une possibilité de pertes consécuƟ ves à ceƩ e évoluƟ on du débiteur, ce qui renvoie à deux états de la nature : → la dégradaƟ on de la situaƟ on de l’emprunteur : le gain original espéré ne rémunère pas l’incerƟ tude grandissante à laquelle le créancier est exposé, c’est une forme de perte d’opportunité, → la cessaƟ on des paiements du débiteur : s’il ne peut payer, son créancier constate un défaut de paiement dont les conséquences seront plus ou moins graves selon qu’il y a, ou non, faillite de la contreparƟ e. Ainsi, on disƟ ngue dans le risque supporté par un créancier un risque de dégradaƟ on (downgrading risk), un risque de défaut (default risk) et un risque de faillite (failure risk). Ceci explique les diffi cultés pour appréhender le risque. L’expression « risque de crédit » recouvre donc deux éléments disƟ ncts : un risque de perte potenƟ elle (downgrading) et un risque de perte extrême (risque de défaut). b) Typologie des risques de crédit en économie Dès qu’un agent consent un crédit 3 à une contreparƟ e, un risque de crédit apparaît. Dans une approche très simplifi ée, on considère que l’économie regroupe quatre types d’agents : les États, les entreprises, les banques et les ménages. On recense ainsi, de manière volontairement restricƟ ve, ces intervenants, respecƟ vement notés : E, Ent, B et M. Si l’économie réelle comporte d’autres parƟ es prenantes (médias, groupes de pression, autorités locales, régulateurs, assureurs, intermédiaires fi nanciers, etc.), le raisonnement peut être conduit sur les quatre agents principaux. Ces acteurs sont suscepƟ bles d’être à la fois créanciers et emprunteurs. Cependant, la fréquence et le poids de ces posiƟ ons ne sont pas idenƟ ques. 3. De la racine laƟ ne credere : « faire confi ance ». Retrouver ce titre sur Numilog.com 18 | ANALYSE DU RISQUE DE CRÉDIT Le tableau suivant montre que tous les agents peuvent être impliqués dans des opéraƟ ons de crédit, volontairement ou non. 4 5 6 Tableau 1 – Les agents économiques : créanciers et débiteurs Agents (modèle simplifi é) Créancier Emprunteur États Prêts publics Délais de paiement pour des taxes DeƩ e publique Banques Crédits aux ménages Prêts aux entreprises Prêts aux uploads/Finance/ analyse-du-risque-de-credit 1 .pdf

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  • Publié le Mar 02, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
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