BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS 2001 63 Études Créés en 1985, le

BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS 2001 63 Études Créés en 1985, les billets de trésorerie, titres de créances négociables à court terme, s’affirment aujourd’hui, sur la place de Paris, comme un instrument financier de premier plan. Leur encours, désormais supérieur à 80 milliards d’euros, fait du marché français le principal marché domestique de billets de trésorerie (commercial paper) en Europe et le troisième au niveau mondial, derrière les marchés américains et japonais. La profondeur et la liquidité du marché français tiennent largement à son ouverture aux émetteurs et investisseurs non résidents, à la souplesse de sa réglementation, à son haut niveau de sécurité et de transparence ainsi qu’à l’efficacité des systèmes de règlement-livraison par lesquels transitent les billets de trésorerie. Christine-Marie SAHATDJIAN Direction générale des Opérations Service des Intermédiaires et des Instruments des marchés Le marché français des billets de trésorerie 64 BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS 2001 Études Le marché français des billets de trésorerie 1. L’importance du marché Les billets de trésorerie connaissent depuis six ans un développement considérable, leur encours étant passé de 22 milliards d’euros au 31 décembre 1995 à plus de 80 milliards aujourd’hui (cf. graphique). En 1999, la conjonction de l’allégement des contraintes réglementaires, du lancement de la monnaie unique et des opérations de croissance externe avaient eu pour effet de faire progresser de 50 % l’encours global de ces titres. Tiré par l’arrivée de nouveaux émetteurs et la poursuite des opérations de croissance externe, le dynamisme du compartiment des billets de trésorerie s’est confirmé en 2000, tant au niveau des encours (+ 42 %) qu’à celui des émissions. Les volumes annuels d’émission ont continué à progresser de façon spectaculaire, passant de 432 milliards d’euros en 1999 à 699 milliards en 2000, soit une progression annuelle de 62 %. Le marché français devance de ce fait très largement les autres marchés domestiques d’Europe dont les encours au 30 septembre 2000, selon la Banque des règlements internationaux (BRI) 1, s’élevaient respectivement à 26,9 milliards d’euros pour le Royaume- Uni, 18,5 milliards pour la Suède et 13,8 milliards pour l’Allemagne. Le passage à la monnaie unique a été déterminant pour amener certaines entreprises à développer le billet de trésorerie comme instrument de financement privilégié, pour répondre aux besoins générés par l’ensemble de leurs activités sur la zone euro. De nouveaux émetteurs français et étrangers ont mis en place, en 2000, un programme de billets de trésorerie et, pour certains d’entre eux, installé conjointement une centrale de trésorerie à Paris. La combinaison de la faculté d’émettre des titres à un jour et du traitement en temps réel des opérations en valeur-jour dans les systèmes de règlement-livraison a stimulé le recours au marché français des billets de trésorerie et renforcé son attrait auprès des grands émetteurs internationaux. Presque aussi aisé et flexible pour les responsables financiers que les facilités de découvert, l’accès à ce marché leur permet désormais de limiter le recours aux emprunts bancaires. Le billet de trésorerie est ainsi devenu un outil efficace de gestion centralisée (cash-pooling) permettant aux trésoriers d’entreprise de se financer ou de faire des placements auprès des meilleures signatures privées (corporate). 1 Les statistiques fournies par la BRI concernant le papier commercial domestique recensent les billets de trésorerie émis par les entreprises et ceux émis par des institutions financières. BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS 2001 65 Études Le marché français des billets de trésorerie Encours des billets de trésorerie (toutes devises, en moyennes mensuelles, en milliards) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Janv. 1995 Janv. 1996 Janv. 1997 Janv. 1998 Janv. 1999 Janv. 2000 2. Les caractéristiques du marché 2.1. Un marché structuré et flexible La refonte au début de l’année 1999 des principaux textes réglementaires relatifs aux titres de créances négociables s’est opérée autour de deux axes majeurs : la libéralisation des conditions d’émission et son ouverture européenne et internationale. Les nouvelles dispositions d’orientation libérale se sont avérées favorables au développement du marché français et à son positionnement concurrentiel. Elles ont principalement concerné la durée minimale des titres, leur rémunération, les conditions de rachat et de remboursement anticipé, l’élargissement des possibilités de placement et de négociation. La durée minimale des titres a été réduite de dix jours à un jour, alors que la durée maximale reste fixée à un an — au-delà, l’émetteur peut recourir aux bons à moyen terme négociables (BMTN). Cette disposition, souhaitée par la profession et qui rencontre une véritable demande de la part des investisseurs pour lesquels elle offre une alternative au marché de la pension livrée, est utilisée par quelques émetteurs très présents sur les émissions à un jour. Ceci contribue à assurer la liquidité du marché par des volumes d’émission importants et récurrents. Il est significatif que les émissions à un jour, autorisées depuis 1999, aient crû de façon exponentielle : alors qu’elles ne représentaient que 2 % du volume global d’émissions en 1999, elles ont atteint 24 % des émissions réalisées en 2000. Les conditions de rémunération ont été libéralisées. Il est ainsi possible d’émettre à taux fixe ou variable (en 2000, 32 % des billets de trésorerie émis ont une rémunération indexée sur l’Eonia ou ses déclinaisons), ou en fonction d’un indice de référence, sous la seule réserve d’une information de la Banque de France lorsque la rémunération varie en application d’une clause d’indexation ne portant pas sur un taux usuellement employé sur les marchés interbancaire, monétaire ou obligataire. 66 BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS 2001 Études Le marché français des billets de trésorerie Les conditions de rachat des titres émis et de remboursement anticipé ont été complètement libéralisées sous réserve d’une information périodique de la Banque de France. Le rachat peut donner lieu à annulation des titres (remboursement anticipé). Les titres rachetés peuvent aussi être conservés par l’émetteur (portage) ou revendus sur le marché secondaire. La négociation et le placement des billets de trésorerie sont ouverts à tous les prestataires de services d’investissement agréés dans l’Espace économique européen. Cette disposition de mise en conformité avec la loi de modernisation des activités financières a conféré une plus grande ouverture au marché, déjà accessible aux émetteurs non résidents qu’ils soient localisés au sein de la zone euro ou au-dehors. La part relative, en termes d’encours, des émetteurs non résidents, incluant les véhicules de titrisation, a doublé en deux ans, passant de 14 % à 28 % entre janvier 1999 et décembre 2000, tandis que celle des investisseurs non résidents triplait sur la même période, passant de 2 % à 7 %. En volume annuel d’émissions, la part relative des émetteurs non résidents est passée de 33 % en 1999 à 43 % en 2000. Le placement direct est très rare, la plupart des émetteurs ont recours aux services de plusieurs établissements placeurs, pour certains d’origine étrangère, susceptibles de varier au fur et à mesure du développement du programme. 2.2. Un marché sécurisé L’existence d’une réglementation libérale est parfaitement compatible avec un haut niveau de sécurité et de transparence tel qu’attendu par les émetteurs et les investisseurs. Le marché des billets de trésorerie tire sa force du fait que, sans être un marché réglementé au sens de la directive européenne sur les services d’investissement et de la loi française qui l’a transposée, il fait l’objet d’une réglementation, d’une organisation et d’un contrôle efficaces. La surveillance du marché des billets de trésorerie est assurée par la Banque de France et la Commission des opérations de bourse (COB). Ainsi, avant de pénétrer sur le marché, toute entreprise doit déposer un dossier de présentation financière auprès de la Banque de France, le dossier devant être visé préalablement par la COB si l’émetteur n’est pas noté. Ce dossier, qui fait l’objet d’une mise à jour annuelle, présente la situation juridique et financière de l’émetteur ainsi que le programme d’émission (plafond du programme, établissement domiciliataire, garantie éventuelle…). En outre, la Banque de France est chargée de prendre toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement du marché et veille au respect, par chaque émetteur, des conditions d’émissions prévues par les textes législatifs et réglementaires. En cas de manquement, elle peut suspendre ou interdire les émissions de l’émetteur concerné. Participe également de la sécurité, dans un marché de titres dématérialisés depuis 1993, le rôle spécifique dévolu aux domiciliataires, en liaison avec les établissements teneurs de comptes, d’une part, et les dépositaires centraux, d’autre part. Le domiciliataire, institution financière obligatoirement établie en France (établissements de crédit ou entreprises d’investissement agréés en France ou leurs succursales intervenant dans le cadre du passeport européen, Caisse des dépôts et consignations) joue un rôle essentiel dans le fonctionnement du marché : il est le teneur de compte de l’émission dont il assure le service financier (issuing agent, paying agent), il veille à la régularité des émissions et procède auprès de la Banque de France aux déclarations statistiques prévues BULLETIN DE LA BANQUE DE FRANCE – N° 87 – MARS uploads/Finance/ bdf-bm-87-etu-2.pdf

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  • Publié le Apv 26, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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