Séance 2 Commentai re : Le 19 janvier 2022, la cour d’appel de Paris a rejeté l

Séance 2 Commentai re : Le 19 janvier 2022, la cour d’appel de Paris a rejeté la demande de Volkswagen qui souhaitait l’arrêt des poursuites en France dans le cadre de l’affaire du dieselgate suite à sa condamnation en Allemagne et en avançant le principe de « ne bis in idem ». Ce principe est un principe fondamental en droit pénal français. Il est notamment important dans l’arrêt de rejet de la chambre criminelle de la Cour de Cassation rendu le 15 décembre 2021 qui porte sur le concours de qualification en cas de pluralité de fait. La chambre criminelle va alors limiter le champ d’application du principe de l'interdiction du cumul de qualification en matière de poursuites concomitantes. En l'espèce, à l'issue d’une information judiciaire, un individu avait été déclaré coupable de plusieurs infractions, en appel, la cour l'avait déclaré pour faux et usage, escroquerie, banqueroute et abus de biens sociaux, à trois ans d’emprisonnement et une interdiction de gérer. La Cour jugeait alors que les délits en cause aurait sanctionnés la « violation d'intérêts distincts » et comporterait des éléments différents constitutifs. Un pourvoi a été formé par le prévenu qui adressait un reproche au juge de s’être prononcé comme ça alors que « les faits qui procèdent indissociablement d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu contre le même prévenu à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent elles concomitantes ». Dans la décision finale, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi et maintiendra le principe de l'interdiction du cumul des qualifications lors de poursuite concomitantes applicable à la déclaration de culpabilité tout en limitant son champ d'application. La cour évoque sa règle pour établir un cadre général de règlement des conflits de qualification permettant « d’assurer le même traitement aux personnes poursuivies pour un comportement répréhensible sous plusieurs qualifications, que ce soit à l’occasion d'une même procédure ou alors de procédures successives ». Elle reproduit ainsi le principe selon lequel « des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu contre le même prévenu à deux déclarations de culpabilité de matière pénale, fussent-elles concomitantes ». La cour va concéder toutefois les limites de ce cadre général. La décision est critiquable dans son raisonnement, mais cet arrêt est une application du principe « ne bis in idem » notamment appliqué par un arrêt du 26 octobre 2016. L’arrêt présente une pluralité de fait. Il interdit notamment les poursuites ultérieures et concomitantes. On peut se demander si l'accusé peut être condamné deux fois pour le même fait, sous deux qualifications différentes, alors qu’une même valeur sociale est atteinte ? On remarque dans l'arrêt étudié une consécration du concours de qualifications (I). Mais la solution provoque, elle, un infléchissement de la règle de droit (II). I. Une consécration du concours de qualification L'arrêt étudié met en avant des interrogations autour du concours de qualification (A). Une aide pour y répondre serait de passer par le principe bien connu « ne bis in idem » (B). A) La question importante des qualifications Avec cette décision, l'interdiction de cumuler les qualifications s'applique à deux situations. D'abord celle où l'une des infractions exclut nécessairement la caractérisation des éléments constitutifs de l'autre. Ensuite, lorsqu'un ou plusieurs faits identiques sont en cause et que l'une des deux hypothèses suivantes s'applique. « Soit, que l'une des qualifications correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre, soit, lorsque l'une des qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l'action répréhensible sanctionnée par l'autre infraction, dite générale ». En l'espèce, la Cour de cassation considère que les qualifications d'escroquerie et de faux et usage de faux peuvent se cumuler. D'abord, parce que la caractérisation des éléments constitutifs de l'une de ces infractions n'exclut pas la caractérisation des éléments constitutifs de l'autre. D'autre part, car l'article 313-1 du code pénal, qui incrimine l'escroquerie, vise surtout les manœuvres frauduleuses, et non « spécifiquement » le faux et l'usage de faux. La chambre criminelle rejette donc logiquement le pourvoi formé. Avec la décision on comprend que désormais, il faudra uniquement se fier aux textes d'incrimination pour déterminer si deux infractions peuvent rentrer en conflit de qualification. Seulement, en l'espèce, bien que le faux et l'usage de faux ne soient pas mentionnés de façon explicite par le texte d'incrimination de l'escroquerie, ils peuvent évidemment constituer les « manœuvres frauduleuses » qui la caractérise. Le principe qui dit que personne ne peut être poursuivi ou puni pénalement à raison des mêmes faits va nous aider à saisir l'idée générale de l'arrêt du 15 décembre 2021. B) Le sens de l'arrêt par le principe « ne bis in idem » La Cour infléchit la solution dégagée en 2016. La Cour parle « d'un fait ou de faits identiques ». On pourrait penser que la nouvelle règle résous les concours réels.. La précision est importante car la décision de 2016 émettait quelques doutes sur le sujet. En l'espèce, la nouvelle solution, qui n'est plus le principe « ne bis in idem », permet de cumuler les qualifications de faux, usage et escroquerie alors que la première infraction permet de commettre les deux suivantes. Comme le précise la chambre criminelle de la Cour de Cassation, la caractérisation des éléments constitutifs de l'une des infractions n'exclut pas la caractérisation des éléments constitutifs de l'autre. L'appréciation abstraite des éléments constitutifs de chaque incrimination permet de retenir le cumul de qualifications quand bien même les faits reprochés seraient identiques. La solution illustre la sévérité de la nouvelle forme. Le prévenu avait commis plusieurs faits à savoir un faux, et l'utilisation de ce faux afin de tromper autrui. Le faux et son usage sont en concours réel car il s'agit de faits distincts non séparés par une condamnation. Cependant, aucune qualification n'est selon la Cour incompatible avec une autre. C'est vrai que pour qualifier un faux, il n'y a pas à disqualifier un usage ou une escroquerie. Il faut rappeler que la règle de base « ne bis in idem » est un principe d'après lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement à raison des mêmes faits. De plus, « il résulte des articles 313-1 et 441-1 du code pénal qu'aucune de ces infractions n'est un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'une des autres. En effet, l'article 313-1, qui incrimine l'escroquerie, vise les manœuvres frauduleuses et non spécifiquement le faux ou l'usage de faux comme élément constitutif de ce délit ». La question des intentions concrètes de l'agent en question est maintenant remplacée par une analyse abstraite des éléments constitutifs des délits en concours (ce qui rendrait par exemple impossible le cumul recel et blanchiment). L'orientation de la jurisprudence se voit modifiée par la solution de l'arrêt du 15 décembre. II. Un infléchissement de la règle de droit Apparaît avec les moyens sur lesquels se base la chambre criminelle de la Cour de Cassation, une borne pour le cumul de qualifications (A), ce qui a pour effet de diminuer les effets de la jurisprudence (B). A) Les limites du cadre de cumul de qualifications Dans la décision du 15 décembre 2021, la Cour de cassation commence par rappeler le cadre général dans lequel s'inscrit le règlement des conflits de qualification, en citant notamment in extenso la jurisprudence du 26 octobre 2016. Cependant, cette démonstration veut juste démontrer les imperfections de cette jurisprudence. D'abord, en cas de qualification unique, des plaignants recevables à se constituer partie civile pour l'un des faits poursuivis pourraient ne pas obtenir réparation de leur préjudice, puisque celui-ci doit résulter de « l'ensemble des éléments constitutifs » visés par la poursuite. Ensuite, cette jurisprudence pose une difficulté à ce que le juge individualise la peine, par exemple en prononçant une peine complémentaire réprimant une infraction non retenue. Enfin, l'abandon d'une des qualifications peut « occulter un intérêt auquel l'action délictueuse a porté atteinte ou une circonstance de cette action ». Rejoignant la Cour européenne des droits de l'Homme, la chambre criminelle avait déjà accepté d'infléchir sa jurisprudence sur ce point, selon le point de vue où seul le cumul permet « d'appréhender l'action délictueuse dans toutes ses dimensions ». De ce fait, non seulement le cumul de qualifications favorise une appréhension globale de l'action lorsque les éléments constitutifs de chaque infraction sont définis par la loi, mais il n'est pas non plus un obstacle au prononcé de peines nécessaires et proportionnées. Alors, au regard des problèmes présentés par la jurisprudence de 2016, une évolution semblait nécessaire. Cette jurisprudence du 26 octobre 2016 n’était vraiment pas parfaite. Mais pour une évolution positive de la jurisprudence, ça aurait été plus cohérent que la Cour de cassation s'appuie sur les faits commis pour aller vers la possibilité d'un cumul. En réalité, la nouvelle direction que prend la jurisprudence risque d'affecter la pratique, et d'ouvrir, de plus, la voie à une augmentation significative des condamnations. La jurisprudence qui précède l'arrêt se uploads/Finance/ commentaire 2 .pdf

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  • Publié le Jui 19, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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