Dermocorticoïdes B. Lebrun-Vignes, O. Chosidow Les dermocorticoïdes ont transfo
Dermocorticoïdes B. Lebrun-Vignes, O. Chosidow Les dermocorticoïdes ont transformé la thérapeutique dermatologique depuis le début de l’utilisation topique de l’hydrocortisone dans les années 1950. Des composés dérivés plus puissants ont ensuite été synthétisés et les indications des dermocorticoïdes se sont multipliées. Il existe actuellement une vingtaine de molécules différentes qui sont classées suivant leur activité anti-inflammatoire. De nombreuses pathologies cutanées, en particulier inflammatoires ou tumorales, sont sensibles aux dermocorticoïdes. Dans le but de minimiser le risque d’effets indésirables locaux ou systémiques, leur utilisation doit respecter des règles prenant en compte la dermatose traitée et sa localisation, ainsi que les caractéristiques du patient. Le choix du dermocorticoïde (niveau d’activité, excipient), son mode d’application (technique, rythme d’application) et l’information du patient et/ou de son entourage permettent d’obtenir un rapport bénéfice/risque optimal. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Dermocorticoïdes ; Corticoïdes locaux ; Corticostéroïdes ; Corticothérapie locale cutanée ; Dermatite atopique Plan ¶ Introduction 1 ¶ Principaux mécanismes d’action des glucocorticoïdes 2 Récepteur aux glucocorticoïdes 2 Action directe du récepteur activé sur la transcription 2 Action indirecte sur la transcription, par l’intermédiaire des facteurs de transcription 2 Effets non génomiques 2 Facteurs de variabilité de la réponse thérapeutique et des effets indésirables 2 ¶ Propriétés pharmacodynamiques des glucocorticoïdes 2 Activité à l’échelon moléculaire 2 Activité à l’échelon cellulaire 2 Propriétés utilisées et observées en thérapeutique 2 Activités des molécules plus récentes 3 ¶ Classification 4 ¶ Pharmacocinétique 4 Biodisponibilité cutanée 4 Effet réservoir 4 ¶ Modalités d’utilisation des dermocorticoïdes 6 Choix du niveau d’activité du dermocorticoïde 6 Quantification des dermocorticoïdes 6 Technique et rythme d’application 7 Modalités de prescription 7 ¶ Indications 7 Dermatite atopique 7 Psoriasis 8 Pemphigoïde bulleuse 9 ¶ Contre-indications 9 ¶ Effets indésirables 9 Effets indésirables locaux 9 Effets indésirables systémiques 9 Allergie de contact 9 Risques de l’utilisation des dermocorticoïdes chez la femme enceinte 10 ¶ Surveillance du traitement 10 ¶ Associations 10 ¶ Préparations magistrales 10 ■Introduction Les dermocorticoïdes ont été utilisés en dermatologie à partir des années 1950, époque à laquelle Sulzberger découvre l’effica- cité de l’hydrocortisone en application locale dans certaines pathologies cutanées inflammatoires ou prolifératives [1]. Des modifications chimiques ont ensuite été apportées à l’hydrocor- tisone pour améliorer la sélectivité, la biodisponibilité et l’efficacité de la molécule [2]. De nombreuses pathologies dermatologiques inflammatoires, dysimmunitaires ou tumorales sont sensibles aux dermocorti- coïdes. Mais leur utilisation abusive des premières années a conduit à des effets indésirables sévères, en particulier chez l’enfant, responsables d’une appréhension persistante des prescripteurs et des malades vis-à-vis de ces médicaments. Cette véritable « phobie » ressentie par les malades ou leur entourage conduit fréquemment à une mauvaise observance du traite- ment, responsable d’échec thérapeutique [3]. Cette mauvaise réputation des dermocorticoïdes n’a pas lieu d’être car ces médicaments ont révolutionné la prise en charge de nombreu- ses dermatoses comme la dermatite atopique. Leur utilisation ¶ 98-900-A-10 1 Dermatologie © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 16/02/2014 par Claude Bernard Universite (19411) doit cependant respecter des règles qui permettent dans l’immense majorité des cas d’éviter les effets indésirables. Les conditions d’utilisation doivent être clairement expliquées au patient et/ou à son entourage, en s’assurant au fil des consulta- tions qu’elles ont été comprises et respectées. ■Principaux mécanismes d’action des glucocorticoïdes [2, 4-13] Quelle que soit leur voie d’administration, l’activité des glucocorticoïdes passe principalement par l’activation d’un récepteur spécifique, qui permet ensuite l’activation ou l’inhibi- tion de nombreux gènes cibles. Récepteur aux glucocorticoïdes Le glucocorticoïde traverse la membrane cellulaire par diffusion passive et se lie ensuite à un récepteur spécifique intracytoplasmique. Ce récepteur appartient à la superfamille des récepteurs aux stéroïdes. Le récepteur aux glucocorticoïdes comprend trois domaines fonctionnels majeurs, qui sont de N-terminal en C-terminal : • le domaine d’activation du gène (ou de régulation transcrip- tionnelle), également appelé domaine immunogénique en raison de ses propriétés antigéniques ; • le domaine de liaison à l’acide désoxyribonucléique (ADN) (au niveau des glucocorticoid-response elements [GRE]) ; • le domaine de liaison au ligand (c’est-à-dire au gluco- corticoïde). Le récepteur aux glucocorticoïdes est ubiquitaire, mais sa densité varie selon la cellule et la concentration en corticoïde. Il est présent dans le cytosol sous forme inactivée par liaison à un complexe protéique comportant les deux sous-unités de la heat-shock protein HSP 90 (protéine de choc thermique) et une protéine de la famille des immunophilines appelée p59 (protéi- nes fixant des immunosuppresseurs de la famille de la ciclospo- rine ou du FK 506 et de la rapamycine). La liaison du glucocorticoïde sur le récepteur va provoquer la dissociation du complexe protéique, et l’ensemble ligand- récepteur, formant la forme activée du récepteur, subit une translocation (migration) nucléaire. Action directe du récepteur activé sur la transcription Dans le noyau, le récepteur activé change de configuration grâce à la formation de dimères, lui permettant d’interagir avec l’ADN au niveau de sites spécifiques de deux types : • les GRE, sur lesquels le récepteur activé exerce une activation de la transcription, conduisant à une augmentation de la production de protéines anti-inflammatoires (lipocortine- 1 ou annexine-1, interleukine 10, protéine IjB) ; • les nGRE, sites de liaison négatifs conduisant au contraire à une inhibition de transcription de certains gènes par régula- tion négative directe, responsable d’une diminution de production de protéines comme certaines kératines [8] ou la propiomélanocortine [12]. Action indirecte sur la transcription, par l’intermédiaire des facteurs de transcription Le principal mécanisme responsable des effets anti- inflammatoire et immunosuppresseur des glucocorticoïdes n’est pas lié à l’interaction directe avec un GRE mais passe par une interaction avec des protéines de régulation transcriptionnelles, appelées facteurs de transcription. Les glucocorticoïdes inhibent en particulier l’action des facteurs de transcription activator protein-1 (AP-1) et nuclear factor-kappa B (NF-jB). • AP-1 : sa fonction principale est d’activer l’expression de multiples gènes comme ceux de cytokines et de collagénases. En interagissant directement avec le facteur AP-1, le complexe glucocorticoïde-récepteur va empêcher sa fixation sur ses sites de liaison et ainsi inhiber la synthèse des cytokines et des collagénases « cibles ». Pour d’autres gènes, le site de liaison du facteur AP-1 est voisin de GRE. La fixation du complexe glucocorticoïde-récepteur sur les GRE entraîne un encombre- ment stérique empêchant l’interaction du facteur AP-1 avec son site de liaison. • NF-jB : il est considéré comme un régulateur essentiel des gènes impliqués dans la réponse à l’infection, à l’inflamma- tion et au stress. Il existe sous forme inactive dans le cyto- plasme, couplé à une des sept protéines inhibitrices IjB qui empêche son entrée dans le noyau. NF-jB est activé par phosphorylation puis dégradation de IjB, lui permettant de migrer sous forme libre dans le noyau où il va se fixer sur une région spécifique d’ADN. Cette fixation conduit à la production d’acide ribonucléique messager (ARNm) à l’origine d’une synthèse protéique. Les glucocorticoïdes inhiberaient l’action de NF-jB par deux mécanismes : C activation de la transcription du gène de IjB, C interaction directe entre le complexe glucocorticoïde- récepteur et une sous-unité de NF-jB. D’autres facteurs de transcription comme p53 et signal transducers and activators of transcription (STAT) interagissent également avec les glucocorticoïdes. Effets non génomiques En dehors des effets sur la transcription décrits ci-dessus, les glucocorticoïdes ont également des effets non génomiques via le récepteur cytosolique ou via un récepteur membranaire. Facteurs de variabilité de la réponse thérapeutique et des effets indésirables La variabilité interindividuelle observée aussi bien dans la réponse thérapeutique que dans l’apparition des effets indésira- bles est multifactorielle. La description d’un polymorphisme génétique concernant le gène du récepteur aux glucocorticoïdes pourrait être un facteur de variabilité important, expliquant soit une hypersensibilité, soit une hyposensibilité du récepteur après fixation du glucocorticoïde [14]. ■Propriétés pharmacodynamiques des glucocorticoïdes [4-12, 15] Activité à l’échelon moléculaire Les glucocorticoïdes ont une action inhibitrice ou activatrice sur la transcription de nombreux gènes, rendant compte de propriétés pharmacodynamiques non sélectives (Tableau 1) [16]. Activité à l’échelon cellulaire Cellules sanguines de la lignée blanche L’action des glucocorticoïdes sur les cellules de la lignée blanche est synthétisée dans le Tableau 2. Autres cellules L’action des glucocorticoïdes sur les cellules endothéliales et les fibroblastes est synthétisée dans le Tableau 3. Propriétés utilisées et observées en thérapeutique Propriétés anti-inflammatoires Cette activité est la plus utile en pratique clinique. Elle résulte de tous les mécanismes détaillés ci-dessus, mais les dermocorti- coïdes ont également des propriétés vasoconstrictrices qui participent à leur effet anti-inflammatoire. La vasoconstriction locale permet en effet de diminuer rapidement l’érythème et l’œdème et donc d’agir sur les manifestations cliniques de l’inflammation. Cette propriété de vasoconstriction sert de 98-900-A-10 ¶ Dermocorticoïdes 2 Dermatologie © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 16/02/2014 par Claude Bernard Universite (19411) support au test de McKenzie [17] mis au point dans les années 1960 pour comparer sur la peau humaine l’effet vasoconstric- teur des différents corticoïdes entre eux. L’intensité de la vasoconstriction est évaluée par la mesure du blanchiment obtenu après application cutanée chez le sujet sain, sous occlusion. Ce test a participé, avec les résultats des études cliniques comparatives, à uploads/Finance/ corticoides-locaux.pdf
Documents similaires







-
24
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jui 02, 2021
- Catégorie Business / Finance
- Langue French
- Taille du fichier 0.1963MB