Lycée Hélène Boucher – ECS 1 – Dissertation de culture générale - Correction gu
Lycée Hélène Boucher – ECS 1 – Dissertation de culture générale - Correction guidée Suffit-il de bien juger pour bien faire ? Méthodologie appliquée Dissertation rédigée 1. Introduire la question par un exemple concret, une citation qu'il faut lier à tout le sujet. Pensez à citer le sujet. 2. Dégagez une problématique en mettant en lumière une zone d'ombre, une ambiguïté dans le sujet. Attention à ne pas remplacer le sujet par un autre mais explicitez-le pour en montrer la difficulté. 3. Précisez les enjeux du sujet en intégrant la réflexion dans un cadre plus général (morale, politique, science, art, etc) 4. Annoncez le plan comme une recherche à venir et non comme un résumé de la suite. Dans son livre Les décisions absurdes, le sociologue C. Morel tente d'expliquer pourquoi nous agissons parfois à l'encontre des buts que nous recherchons comme lorsque les ingénieurs de la NASA lancèrent la fusée Challenger en 1986 alors que les joints d'étanchéité des fusées d'appoint n'étaient pas étanches. Il semble que l'action n'ait pas alors été guidée par un jugement suffisamment éclairé susceptible d'éviter la catastrophe. Mais suffit-il de bien juger pour bien faire ? Bien juger c'est être en capacité de déterminer avec certitude la vérité d'une proposition, sa conformité avec la réalité. Cette connaissance est-elle alors une condition suffisante pour accomplir une action bonne ? Le terme de « bien » appliqué à l'action est ici ambigu car il peut dénoter à la fois son efficacité, sa réussite, ou relever de sa dimension morale. Et le rôle du bon jugement peut alors différer selon que l'on envisage l'action par son aspect « technique », son efficacité ou son aspect moral (sa bonté). La question nous impose donc de réfléchir aux conditions par lesquelles on peut passer de la théorie à la pratique. Mais il nous invite aussi peut-être à remettre en question cette distinction entre ces deux notions : se pourrait-il que bien juger ne soit possible qu'à la condition qu'il soit lui-même immergé dans l'action et non seulement un préalable théorique à agir ? Cette relation de la théorie à la pratique est évidemment centrale pour tout ce qui concerne le vaste domaine de la praxis : tout art, toute politique, toute morale se réclame de certains principes qu'elle tente de mettre en œuvre. En révélant les limites, voire l'impuissance du jugement pour l'action, nous risquons peut-être de laisser place à l'arbitraire ou à l'absurde : si nous ne pouvons concevoir efficacement avant d'agir, nous courrons le danger d'être démunis, perdus dans un univers de moyens sans fins. Il nous paraît cependant évident, de prime abord, que bien juger est une condition aussi bien nécessaire que suffisante pour bien agir. Pourtant, la contingence de l'action n'échappe-t-elle pas à l'ambition de juger selon la nécessité ? N'est-ce pas cette ambition intellectuelle qui nous empêche de saisir que l'on ne juge bien avant d'agir que si l'on juge pour bien agir ? 1 I. Bien juger, en tant qu'il permet de distinguer le bien du mal, n'est-il pas une condition suffisante pour bien agir ? 1. Raisonnement par l'absurde (apagôgê) : Sans bon jugement la réussite de toute action semble impossible donc bien juger est condition d'une action bonne. Référence : S. Kubrick, film Les sentiers de la gloire 2. Bien juger permet l'action bonne car il per met de distinguer clairement le bien du mal. Référence : Descartes, Discours de la méthode. 3. Objection de f ait et Que ce soit dans le domaine politique, dans le domaine technologique ou encore dans le domaine de l'action morale il semble qu'un bon jugement soit nécessaire à une action bonne, que cette action soit seulement techniquement efficace ou moralement bonne. Par exemple, un stratège militaire doit avoir une connaissance très précise de la situation présente et des forces en présence pour que l'action de ses troupes puisse mener à la victoire. Inversement, le militaire qui lance ses troupes à l'aveugle sans avoir bien évalué la situation les mène à coup sûr à leur perte. Ce risque de mal juger avant d'agir est ainsi dramatiquement mis en scène par S. Kubrick dans son film Les sentiers de la gloire (1957) : un général français aveuglé par son ambition exige de ses troupes qu'elles prennent une colline tenue par les allemands alors qu'elle est objectivement imprenable. Malgré les mises en garde de son lieutenant-colonel beaucoup plus clairvoyant sur l'impossibilité d'une telle attaque, le général donnera l'ordre d'avancer coûte que coûte, allant même jusqu'à pilonner ses propres soldats lorsqu'ils seront contraints de battre en retraite. L'action est ici un échec à cause d'un jugement incorrect. Kubrick double d'ailleurs l'échec militaire du général d'une faute morale impardonnable (tirer sur ses propres soldats) : non seulement son erreur de jugement a mené l'armée à sa défaite mais elle l'a lui-même conduit à la faute et au crime. Du fait d'un mauvais jugement, l'action est alors doublement mauvaise, elle est inefficace et immorale. Si la cause de cet échec provient du jugement, on peut donc penser que sa réussite serait de la même manière déterminée par un jugement adéquat. C'est en ce sens que Descartes, dans la troisième partie de son Discours de la méthode, affirme qu' « il suffit de bien juger pour bien faire ». Il entend montrer par là qu'une connaissance adéquate de la réalité est la condition suffisante d'une action réussie, notamment dans le domaine moral. Comment comprendre cette relation entre la connaissance et l'action morale ? Il s'agit sans doute d'une connaissance de l'homme, de ses passions mais aussi de ce qu'il est bon de suivre ou d'éviter pour atteindre une forme d'excellence morale. Si je juge correctement c'est, au sens étymologique d'un jugement (krisis : séparation), que je suis capable de distinguer le bien du mal dans une situation que je comprends avec clarté. Fort de ce savoir, je suis alors capable d'agir et de réaliser ce que j'ai jugé bon avec la plus grande objectivité. Ainsi la pratique n'est alors que la réalisation de la théorie : si je comprends bien, j'agirai de la meilleure manière possible. N'est-ce pas ce que voulait dire A. Hitchcock quand, dans ses entretiens de 1969 avec F. Truffaut, il déclarait : « Dès que le scénario est prêt, j'aimerais autant ne pas faire le film du tout… » ? Manière de dire qu'il lui suffisait d'avoir conçu, jugé parfaitement chacun de ses plans pour que la réalisation ne soit qu'une simple formalité qui n'ajoute rien au film qu'il avait déjà en tête. 2 difficulté : n'échouons-nous pas parfois à cause des circonstances et non de la qualité de notre jugement ? II. Bien juger peut certes être une condition nécessaire pour bien faire mais n'est pas une condition suffisante et peut même être un obstacle à l'action. 1. Hétérogénéité entre la nécessité visée par le jugement et la contingence à l'oeuvre dans l'action. Référence : A r i s t o t e , De l'interprétation, 9. 2. Conséquence : l e b o n jugement peut empêcher la réussite de l'action. Référence : G . F l a u b e r t , L'éducation sentimentale. 3. Bien juger est impuissant à déclencher le désir d'agir et donc de bien faire. Mais ne peut-il arriver que parfois des événements imprévus, le hasard des circonstances, parasitent notre action et que, malgré le meilleur jugement possible, elle subisse un échec que rien ne laissait présager ? Le domaine de l'action ne contient-il pas une infinité de possibilités que notre jugement, aussi bon soit-il, est incapable d'embrasser ? Quand il s'agit de bien juger, de distinguer le vrai du faux et le bien du mal, il s'agit de saisir une forme de nécessité : ce que je juge vrai, si je le juge bien, ne peut être autrement ; de même ce que je juge adéquatement comme un bien ne peut être que ce qu'il est. Nous parlons ici du bon jugement, qui, par définition, n'est plus susceptible d'erreur. Mais nous pouvons bien sûr aussi mal juger. Là n'est pourtant pas la question puisque ce qui nous intéresse est le problème du passage d'une bonne théorie à une action bonne. Une difficulté apparaît pourtant : le domaine de l'action est, à la différence de celui du jugement, le domaine de la contingence. En effet, dans le chapitre 9 De l'interprétation, Aristote note que le fait qu'il y ait une bataille navale demain n'est pas une proposition nécessaire : à la différence de l'énoncé « demain il y aura ou non une bataille navale », l'événement de la bataille navale est susceptible ou non de se produire. Même si certains événements sont plus probables que d'autres, ils ne sont pas pour autant nécessaires, c'est-à-dire qu'ils peuvent ou non se produire. Or, toute action se déroule dans un monde où surviennent des circonstances aléatoires, parfois imprévisibles. Cela ne tient pas à notre jugement, cela provient de la nature même de l'action et de la contingence qui l'entoure. D'ailleurs si mes uploads/Finance/ ecs1-correction-juger-et-faire-pdf.pdf
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- Publié le Oct 01, 2022
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