Archive Enquête sur l'homme le plus riche de France Parti d'un négoce de bois e

Archive Enquête sur l'homme le plus riche de France Parti d'un négoce de bois en 1962, le voici à la tête d'un empire qui va de la distribution au BTP, en passant par TF 1. Portrait d'un bagarreur www.lexpress.fr Actualité Par Nouzille Vincent et Dupuy Georges et Scemama Corinne - publié le 10/12/1998 à 00:00 C' est l'histoire d'un grand fauve. Un chasseur féroce qui hume sa proie à cent lieues, la guette durant des heures. Surgit d'un bond, mord sa victime à la gorge et ne lui laisse aucune chance d'en réchapper. Puis s'en repaît à l'ombre, sûr de sa force... François Pinault est ainsi. «Je suis aux aguets 24 heures sur 24, confia-t-il un jour. Bien sûr, c'est fatigant, mais, sinon, on se traîne, on n'arrive à rien...» L'homme a l'instinct d'un prédateur. Vorace. Irrésistible. En moins de quatre décennies, cet autodidacte breton, ex-négociant en bois, propriétaire du groupe Pinault-Printemps-Redoute-Fnac, s'est hissé au premier rang des fortunes françaises avec 32 milliards de francs d'actifs, juste devancé - selon le dernier classement de Capital - par l'héritière Liliane Bettencourt, actionnaire de L'Oréal et de Nestlé. Une rentière... Cet entrepreneur inclassable - «Il est désormais hors catégorie», dit son ami Michel Giraud - aurait pu se contenter de ce titre de multimilliardaire. D'autant qu'un infarctus a failli le terrasser à la fin de 1994. Mais, après avoir loupé des raids sur Suez et sur le groupe Worms, ce boulimique de 62 ans s'est rattrapé depuis un an en ajoutant à son empire éclectique un hebdomadaire (Le Point), un club de football (le Stade rennais), un immense parc immobilier (Sefimeg) et Soutenez la rédaction. Abonnez-vous. 2 MOIS POUR 1 € OPE MONDE ÉCONOMIE NUMÉRIQUE SCIENCES IDÉES Recherche un club de football (le Stade rennais), un immense parc immobilier (Sefimeg) et le leader mondial des enchères (Christie's). Enfin, ces derniers jours, le groupe Bouygues et son joyau, TF 1. Sa capacité financière impressionne. «Il peut mobiliser 30 milliards pour n'importe quelle OPA», murmure un banquier. Son emprise culturelle inquiète: craignant des représailles de la Fnac, plusieurs éditeurs ont renoncé à publier une biographie non autorisée du tycoon. Et son influence politique - il est l'ami le plus proche du président de la République - risque d'être décuplée avec sa mainmise sur TF 1. Mais rien n'arrête l'ogre Pinault. Comme si cet autodidacte secret voulait sans cesse repousser ses limites. «Il n'est prisonnier de rien, toujours prêt à rebattre ses cartes», confie l'un de ses collaborateurs. «Il a un sens poétique des affaires», lâche le bouillonnant Alain Minc, l'un de ses conseillers les plus en vue. La poésie? Sa fureur d'achat traduit plutôt une rage qui vient de loin. Des arpents de la haute Bretagne, entre Rennes et Saint-Malo. C'est là que François Pinault est né, le 21 août 1936, - sous le signe du Lion, évidemment - dans une famille de marchands de bois parlant le patois gallo. La souche est rustre, terrienne, granitique. François? «Un gars solide et pas bavard», se souvient Jean Tessier, ancien commis à la ferme familiale de Trévérien. Sous l'Occupation, le père de François cache des aviateurs alliés. Revenant de leur porter des provisions, le fils se retrouve face à des soldats allemands qui décident de cravacher son père devant lui, afin de les faire parler. Ses yeux bleus ne cillent pas. Motus. François Pinault se forge un tempérament d'acier. Après guerre, il est envoyé au collège Saint-Martin, à Rennes. Là, dans ces classes de fils de bourgeois, le jeune paysan mal habillé subit moqueries et tourments (1). Humilié, il quittera l'école à 16 ans, nourrissant dès lors une haine froide pour tout ce qui est moulé par les diplômes, les castes et l'establishment. Ensuite, il endure les travaux des champs, une engueulade familiale et trente mois à crapahuter en Algérie. Rentré au pays, François Pinault est décidé: il se battra seul, dans ce monde cruel. En 1962, avec 100 000 F empruntés à sa famille et au Crédit lyonnais, il crée à Rennes les Etablissements François Pinault, négoce en résineux, bois et panneaux. Le milieu des négociants ne lui fait pas de cadeaux. Mais Pinault court-circuite les intermédiaires installés, négocie les contrats à la dure, vient parfois avec des gros bras pour négocier le déchargement des cargaisons bloquées par les dockers. Puis, à partir des années 70, Pinault, notamment conseillé par le socialiste Louis Le Pensec, entame une razzia sur des dizaines de PME de l'industrie du bois dont une menuiserie moribonde en Corrèze Soutenez la rédaction. Abonnez-vous. 2 MOIS POUR 1 € OPE MONDE ÉCONOMIE NUMÉRIQUE SCIENCES IDÉES Recherche PME de l industrie du bois, dont une menuiserie moribonde en Corrèze, rachetée en novembre 1981 à la demande d'un certain Jacques Chirac. «Mes concurrents? Soit ils sont morts, soit je les ai rachetés», dira cet Attila, qui applique des traitements de choc à ces nouvelles filiales. Dans l'une de ces PME, on dénombrera un infarctus et un suicide après son arrivée... Ces abordages brutaux perdurent. Lorsque, à la fin de 1989, Paul Paoli, PDG de la CFAO, une vieille société de négoce franco-africaine, invite Pinault dans son capital, il ne sait pas ce qui l'attend. En quelques mois, le corsaire, entré à 20%, plonge dans les comptes, hurle aux horreurs, éjecte Paoli et fusionne la CFAO avec son groupe! La méthode est aussi expéditive avec le patron du Printemps, Jean-Jacques Delort, débarqué en 1993 après être intervenu en faveur de Pinault auprès de la famille Maus, vendeur de l'enseigne. Sans oublier l'éviction brutale, en 1995, du rugueux Pierre Blayau, un manager appelé pour redresser Pinault- Printemps-Redoute (PPR). «Parti de rien, Pinault est prêt à tout pour réussir. Il élimine ses ennemis, puis les témoins de ses succès, afin de ne rien devoir à personne», ironise un ancien lieutenant... Ses colères sont d'autant plus redoutées que son flair est incontestable. «Il a l'instinct du moment», commente Alain Minc. Juste avant la crise pétrolière de 1973, il vend son entreprise de bois pour 30 millions à des Britanniques... et la rachète dix-huit mois plus tard pour seulement 5 millions. Quelques jours avant que les prix de l'immobilier parisien s'effondrent, au début de 1991, Pinault cède pour 1,3 milliard le siège de la CFAO au Crédit lyonnais, qui encaissera 1 milliard de pertes sur cet immeuble... Son sens des affaires, parfois aux limites des règles boursières et fiscales, s'accompagne d'incroyables acrobaties avec la banque publique, qui a les yeux de Chimène pour ce client prospère. Quand Pinault saute sur le richissime groupe Printemps-Redoute, en 1992, le Crédit lyonnais aligne plus de 3 milliards. Une fois dans les murs, Pinault pioche dans les caisses du Printemps pour faire racheter sa propre filiale Conforama, ce qui lui donne le moyen de renforcer son contrôle sur le grand magasin. Il suffisait d'y penser! Son empire de distributeur sur les rails, il décide en 1992 de loger ses nouvelles conquêtes dans une société familiale, Artémis, du nom de la déesse de la Chasse. La jonglerie reprend avec un énorme portefeuille de junk bonds des obligations Soutenez la rédaction. Abonnez-vous. 2 MOIS POUR 1 € OPE MONDE ÉCONOMIE NUMÉRIQUE SCIENCES IDÉES Recherche jonglerie reprend avec un énorme portefeuille de junk bonds, des obligations émises par des entreprises américaines, que le Lyonnais vend à Artémis à la fin de 1992, en lui appor tant les crédits nécessaires. Pinault, pressentant la reprise américaine, attend que ces sociétés - dont Converse, Florsheim, Samsonite - se redressent pour les revendre au plus haut. Bilan prévisible, selon son entourage, de cette opération inachevée: 6 milliards de francs de profit pour 12 milliards de mise! Pinault peut remercier le Lyonnais. Avec le navire PPR, dont la valeur boursière a décuplé en cinq ans, et les très rentables actifs américains, le capitaliste breton est assis sur deux trésors qui grossissent à vue d'oeil. Comment, dès lors, ne pas se croire tout permis? En 1993, il rafle Château- Latour, le plus grand cru du Médoc, à un prix canon. Il hisse, au sens propre, un drapeau breton sur le vignoble légendaire et renoue avec ses racines terriennes. «Son bon sens paysan lui permet de comprendre vite l'alchimie des crus», témoigne un exploitant, impressionné par son perfectionnisme. Qu'il ait récemment tenté de mettre la main sur Ausone, premier cru de Saint-Emilion, afin de l'élever au rang mythique de Petrus ne surprendra personne. Car, pour ses affaires comme pour ses passions, François Pinault est intraitable: il ne s'intéresse qu'au «meilleur». «Il a attendu le soir du dernier match et le maintien du Stade rennais en première division pour s'engager», se souvient Janine Huon, maire adjointe de Rennes, chargée des sports. Son appétit pour l'art contemporain - Mondrian, Miro, Pollock, Rothko, Rauschenberg - relève du même esprit sélectif. «Vous ne me connaissez pas, je veux des toiles beaucoup plus importantes», a-t-il lâché, en colère, à un marchand qui lui présentait des tableaux de petits maîtres il y a quelques années. Depuis - «avec des goûts épurés et minimalistes», selon l'expert Marc Blondeau, qui le uploads/Finance/ enque-te-sur-l-x27-homme-le-plus-riche-de-france-l-x27-express.pdf

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  • Publié le Mai 14, 2021
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