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1. La démarche développée par Warner Le sociologue américain W. L. Warner a uti

1. La démarche développée par Warner Le sociologue américain W. L. Warner a utilisé les méthodes développé par l'ethnologie : il a réalisé la plus importante enquête jamais effectuée sur une petite ville américaine, Newburyport (Yankee City), 17 000 habitants. L'apport le plus remarquable de ses Yankee City Series (Yale University Press, New Haven, 5 vol., 1941-1949) concerne la stratification sociale. Pour classer et hiérarchiser les individus, Warner utilise deux séries d’indicateurs :  une série d’indicateurs « objectifs », reposant sur la source de revenus, la profession, le genre d’habitat et le type de quartier habité.  des « indices de prestige », liés à un classement subjectif donné par quelques informateurs choisis. 2. Les résultats Warner en tire une échelle de stratification, unidimensionnelle, en trois grandes classes (lower, middle et upper) elles-mêmes divisées en deux (upper et lower). Il met donc en évidence une structure à six classes dont l'unité repose sur l'identification sociale, le style de vie et le prestige. Chacune de ces six classes possède des caractéristiques propres, une unité interne sur le plan des attitudes ainsi qu'une culture spécifique. Warner en tire ce tableau : Classes, % population Identification Caractéristiques sociales Upper-upper class 1,44% « Aristocratie sociale » : riches familles ayant une position importante depuis plusieurs générations High WASP (White Anglo-Saxon Protestants), milieu fermé, tendance à l’endogamie. Lower-upper class 1,56% Milieux supérieurs fortunés : richesse plus récente, « parvenus », « nouveaux riches ». Imitation de upper-upper class mais considérée comme moins distinguée. Upper-middle class 10,22% Classe moyenne aisée : homme d’affaires, professions libérales. Actifs dans le fonctionnement de la cité, revendication et/ou exercice de responsabilités sociales ; entourés de respect Lower-middle class 23,12% Petite bourgeoise : petits patrons, commerçants, cols blancs au statut confirmé Moralité affichée, souci de respectabilité, désir de réussite sociale Upper-lower class Classe inférieure « honnête » : Modeste aisance, considérés 1 – Classes, stratification et mobilité sociale 112 – Les analyses théoriques des classes Sociologie 11 – Comment analyser la structure sociale? Acquis de première: groupe social Notions: classes sociales, groupe de statut Fiche 1124 – Les prolongements contemporains : l’approche empirique de Warner 32,6% boutiquiers, petits employés, ouvriers plutôt qualifiés comme honnêtes et respectables Lower-lower class 25,2% Population à statut précaire : travailleurs saisonniers, chômage fréquente, forte représentation de minorités (Noirs, Italiens...) Déclassés socialement : habitat dégradé, comportements « asociaux » La lower-lower class, la sous-classe la plus basse, regroupe environ un quart de la population. Elle compte surtout des minorités ethniques, des immigrés ou des Noirs. Une partie d’entre eux n’a pas forcément des conditions de vie matérielles inférieures à celles de strates supérieures, mais est classeé tout en bas en raison de leur prestige négatif (Noirs en particulier). 3. Intérêts et limites de l’analyse de Warner (pour les plus motivés)  Les intérêts :  Cette analyse souligne que le discrédit (le déshonneur social) compte et qu’il est en partie indépendant des conditions matérielles,  Warner reste une référence pour nombre d’études sur la stratification, notamment parce qu’il mêle des éléments matériels et des « échelles de prestige ». Les catégories socioprofessionnelles en France s’inspireront en partie de sa démarche.  Le travail de Warner a été cependant critiqué :  Warner considère que la dimension économique ne doit certes pas être négligée, mais que le critère essentiel à prendre en compte est d’ordre social et statutaire : c’est le degré de prestige et de reconnaissance qui permet de classer les individus. Sa définition de la classe en est le reflet : « par classe, il faut entendre certaines catégories de la population qui, selon l’opinion générale, se trouvent placées dans leurs rapports respectifs, en situation inférieure ou supérieure ». Or cette définition se trouve en contradiction flagrante avec la définition marxiste des classes qui postule une définition objectiviste et matérialiste en fonction de la place dans les rapports de production. Warner adopte une démarche subjectiviste puisqu' il essaye de déterminer le prestige de chaque individu en interrogeant ses concitoyens.  Les informateurs choisis sont essentiellement issus de l’upper-middle class, la neutralité de leur jugement est donc fortement discutable. En effet, le discrédit est un élément subjectif. Warner n’a interrogé que des classes moyennes supérieures blanches pour l’évaluer. Quelle échelle de prestige aurait-il trouvé s’il avait interrogé les membres de la lower-lower class ?  Warner croit pouvoir extrapoler ses résultats à l’ensemble des Etats-Unis) : or la petit ville de Newburyport (Yankee City) n’est absolument pas représentative de la société américaine. Warner peut alors considérer que les différentes classes (en réalité strates) sociales présentes aux Etats-Unis ne sont pas structurellement en conflit, qu’au contraire elles sont complémentaires et s’articulent pour le bien de tous, donc que la conception marxiste des classes n’est pas adaptée au contexte américain. Les auteurs marxistes ont reproché à Warner d’avoir gommé la dimension conflictuelle dans la société américaine qui est alors définie comme une société consensuelle bâtie sur un continuum social (pas d’antagonisme de classes) A. L’analyse des classes de P.Bourdieu : une synthèse ? 1. Bourdieu : un héritier de Marx et Weber  L’analyse de Bourdieu repend des éléments de l’analyse de Marx :  Et l’enrichit par des éléments wébériens : 2. Un dépassement des analyses 3. L’analyse de Bourdieu Introduction (pour les plus motivés) Bourdieu cherche à dépasser les deux conceptions sociologiques dominantes qui, selon lui, ne permettent pas d’analyser la réalité : - la conception strictement déterministe conduit à poser l’individu comme manipulé par des forces qui lui échappent. Elle n’est donc pas adaptée aux sociétés modernes individualistes - la conception actionnaliste postule un individu rationnel sans attaches sociales et familiales. Elle ne lui paraît pas plus réaliste Paradoxalement selon Bourdieu ces deux conceptions, bien que développant des démarches opposées, conduisent finalement à des résultats comparables : les individus n’ont pratiquement aucune liberté d’action, puisqu’ils sont : - soit déterminés par des forces qui leur échappent - soit prisonniers des effets d’agrégation conduisant à des résultats non souhaités (effet pervers), sur lesquels ils n’exercent pratiquement aucun contrôle. Bourdieu veut développer une analyse lui permettant de dépasser les contradictions mises en évidence dans les deux traditions : - chaque individu est caractérisé par une histoire (une trajectoire familiale, sociale, personnelle), occupe une position sociale (appartenance à un milieu) qui déterminent un point de vue particulier sur le monde social : c’est l’habitus .C’est un ensemble de dispositions que l’individu a incorporé, assimilé au cours du temps et qui lui font percevoir le monde d’une manière particulière et guident ses actions (sans qu’il en est toujours conscience). L’habitus est donc l’ensemble des savoirs et des savoir-faire que l’individu a intériorisé qui lui permet de se comporter avec naturel, de s’adapter avec finesse à un milieu donné .Selon la belle définition de Bourdieu : « l’habitus est un produit de l’histoire qui produit de l’histoire » - Dès lors l’individu n’est pas seulement déterminé ; il est aussi un acteur dont la liberté (certes surveillée) n’est jamais inexistante. En effet, en fonction du système de valeurs intériorisé dans l’habitus, l’individu dispose d’une grille de lecture qui va lui permettre de choisir le comportement qui est le plus adapté aux buts qu’il cherche à atteindre. Ainsi, l’habitus n’est pas figé , il évolue avec l’histoire de l’individu , par exemple sa trajectoire professionnelle . a) Les différents capitaux Bourdieu distingue quatre types de capital :  le capital économique (revenu et patrimoine) consiste en moyens matériels qui favorisent la réussite aussi bien scolaire (par l’achat de livres, le recours aux cours particuliers aux voyages linguistiques, etc), que sociale.  le capital culturel c’est à dire le capital linguistique, culturel accumulé par la famille. Il va être transmis continument aux enfants au cours de la vie quotidienne, mais aussi par la visite de musées, etc. Il est de trois types selon Bourdieu :  Capital culturel objectivé (possession d’œuvres d’arts, de monuments historiques, etc.)  Capital culturel incorporé (aisance et maîtrise de la culture légitime : par exemple l’art de la conversation)  Capital culturel institutionnalisé (capital scolaire validé par le diplôme)  le capital social c’est à dire l’ensemble des relations sociales dont la famille dispose. Celui-ci va lui permettre de favoriser l’insertion des enfants dans des écoles privées dont le recrutement est basé sur la cooptation ou dans le milieu professionnel, ou de développer un réseau social (l’appartenance au who is who, au bottin mondain)  Enfin le capital symbolique « que l'on peut résumer comme la « reconnaissance » par autrui de l'agent social et de ses qualités, donc de ses capitaux. Le capital symbolique fonctionne comme une sorte de méta-capital puisqu'il est l'objectif suprême de l'action des agents. Le capital symbolique légitime la domination de l’individu b) La représentation schématique Ces 4 types de capital sont corrélés .Bourdieu oppose les professions libérales ayant de hauts revenus et des diplômes élevés aux employés de bureaux peu diplômés souvent issus des classes populaires. Les individus sont donc inégalement dotés en volume global de capital c’est à dire en uploads/Finance/ fiche-1124-les-prolongements-contemporains-l-x27-approche-empirique-de-warner.pdf