I N T R O D U C T I O N AU CATALOGUE D Ε S MONNAIES MEROVINGIENNES D E L A B I

I N T R O D U C T I O N AU CATALOGUE D Ε S MONNAIES MEROVINGIENNES D E L A B I B L I O T H È Q U E N A T I O N A L E P A R M. Maurice P R O U SOU S-BIBLIOTHÉCAIRE AU DÉPARTEMENT DES MÉDAILLES ET ANTIQUES DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE PARIS C H E Z C. R O L L I N & F E U A R D E N T 4, rue de Louvois, 4 Même Maison, iy, Bloomshury Street, Londres 1 8 9 2 I N T R O D U C T I O N CHAPITRE LES MONNAIES DANS LES LOIS SALI QUE ET RIPUAIRE 1 Avant d'aborder l'étude des monnaies mérovingiennes, il est indispensable d'examiner quelles étaient les institutions monétaires des Francs à l'époque de leur établissement en Gaule. La loi salique, dont la rédaction remonte au régne de Clovis2, est le plus ancien document qui nous renseigne sur ce point. Les compositions et amendes dues par le coupable, les premières à la victime ou à ses représentants, les secondes au fisc sont toujours exprimées à la fois en deniers et en sous de la façon suivante : « tant de deniers qui font tant de sous. » Ainsi nous lisons au chapitre premier : « Siquis ad mallum legibus dominicis mannitus fuerit et non venerit, hoc est DC dinarios 1 . Parmi les nombreux mémoires dont la matière traitée ici a été l'objet, nous ne citerons que les plus remarquables : J . de Pétigny, Eclaircissements sur la valeur des monnaies mérovingiennes, dans Revue numismatique, 1 8 3 6 , p. 3 3 1 . — G u é r a r d , Du système monétaire des Francs, dans Revue numismat., 1 8 3 7 , p. 406. — J . de Pétigny, Continuation de la discussion sur la valeur des monnaies courantes au temps de la première race, dans Revue numismat., 1 8 3 7 , p. 1 9 3 . — Du même, Encore quelques doutes sur le système moné- taire des mérovingiens, dans Revue numismat., 1838, p. 169. — Guérard, Note relative au système monétaire des Francs, dans Revue numismat., 1838, p. 275. — D u même, Polyptyque de l'abbé Irminon, t. I, p. 109 à 1 5 7 . — Grote, Die solidi und denarii der Merowinger, dans Mun^studien, t. I ( 1 8 5 7 ) , P· 7^9- — G . Waitz, Ueber die Miin^verhâltnisse in den alteren Rechtsbiichern des Frankischen Reichs ; Gottingen, 1 8 6 1 , in-4 0. (Extrait du 9 e volume des Abhandlungen der koniglichcn Gcsellschaft der IVissenschajten τιι Gottingen.) — A . Soetbeer, Beitrâge \ur Geschichtc des Geld-und Mïmy.vesens in Deutschland, dans Forschungen χur deutschen Geschichtc, t. 1 ( 1 8 6 2 ) , pp. 205, 263, 286, t. II, p. 293. — Inama-Sternegg, Deutsche Wirt- schaftsgcschischte, t. I (Leipzig, 1 8 7 9 , in-8°), p. 1 8 3 . — G . Waitz, Deutsche Verfassungsgcschichte, 3e éd., t. II, 2, p. 305. — II. Brunner, Deutsche Rechtsgeschichle, t. I (Leipzig, 1887,111-8°), p. 2 1 3 . 2. Voyez P . Viollet, Précis de l'histoire du droit français, p. 83. 3. Brunner a remarqué que, dans la loi salique, l'amende infligée au coupable comprend le wehrgeld et 1 efredus. Ainsi, l'amende de 1 5 sous se décompose en un wehrgeld de 1 0 sous et un fredus de 5 sous. Voyez H. Brunner, Duodecimalsystem und Decimalsystem in den Bussiahlen der frankischen Volksrcchte, dans Sit^ungsberichte der kônigl. Preussischen Akademie der IVissenschaften χμ Berlin, année 1889, p. 1039. Menti. me'rov. de la Bill. val. * VI INTRODUCTION qui faciunt solidos XVculpabilis judicetur l. » Ce seul passage suffirait à établir que quarante deniers valaient un sou. Le chapitre II est plus précis encore : « Si quis porcellum furaverit, qui sine matrem possit vivere et ei fuerit adprobatum, hoc est XL dinarios qui faciunt solidum I culpabilis judicetur2. » La formule de cette équivalence semble indiquer que le compte en sous était moins familier aux Francs que le compte en deniers. Ce dernier mode de numéra- tion nous reporte à un état plus ancien de la coutume germanique. D'abord, il n'est pas sans intérêt de noter que les Francs Saliens avaient dans leur langue une expression particulière pour désigner une centaine de deniers : c'était le mot chiwna. Une glose de la loi salique est consacrée à la conversion des chunnas en sous 3. En second lieu, Waitx ι a fait cette remarque ingénieuse que dans plusieurs pas- sages de la loi salique, la conversion d'une somme de deniers en sous donne des fractions. Or il n'est pas vraisemblable qu'un peuple d'une civilisation assez primi- tive ait adopté dans son tarif d'amendes d'autres sommes que des sommes rondes. L'amende à payer pour le vol d'un verrat > était de 700 deniers, ce qui fait 17 sous±. Si certains manuscrits donnent exactement ce dernier chiffre, quelques-uns ont négligé la fraction, d'autres ont élevé la somme à 18 sous6. On pourrait faire les mêmes observations sur l'amende de 2.500 deniers qui, transformée en sous 7, donne 62 s o u s A ceux qui nous opposeraient que la moitié d'un sou est une fraction simple, représentée au vc siècle par une monnaie d'or romaine, nous alléguerons une amende qui ne pouvait être exactement exprimée en sous, c'est celle de 7 deniers que payait le voleur d'un agneau à la mamelle 8. Le rédacteur de la loi salique a écrit que 7 deniers valaient un demi-tiers de sou, ce qui ne s'accorde pas avec le système monétaire suivi partout ailleurs, puisque, dans cette hypothèse, nous aurions un sou de 42 deniers. Aussi certains manuscrits ne fournissent-ils pour cette amende que l'évaluation en deniers 9. C'est même la leçon adoptée dans la Lex cm aidai a. 1. Lex Sali ai) I, 1. (Lex Salica, heransgegeben von J . Fr. Behrend nebst den Capitularien xjir Lcx Salica bearheilet von A. Boretius, Berlin, 1874, in-8.) 2. Lcx Salica, éd. Bclirend, II, 2. 3. Lcx Salica, éd. Behrend, p. 128. « Incipiunt chunnas. IIoc est 111111111 tho alasti, solidos III culpa- bilis judicetur. Sexan chunna, solidos X V culpabilis. Septun chunna, solidos X V I I culpabilis judicetur » Voyez Waitz, Deutsche Vcrfassungsgesehichte, 30 éd., t. II, 2° partie, p. 306, note 3. 4. Uebcr die Mïinxyerhiiltnisse in denaltercn Rechtsbiïcbern des Frânhischen Rcichs; Gôttingen, i 8 6 r , 111-4", p. 5. (Extrait des Abhandlungen der Iwniglichen Gesellschaft der Wissenschajten ^u Gôttingen.) 5. Lcx Salica, éd. Behrend, II, 1 1 : « Si quis verrem aut scrobam ducariam furaverit, hoc est D C C dinarios qui faciunt solidos X V I I culpabilis judicetur, excepto capitale et dilatura. » 6. Voyez les différentes leçons dans l'édition de la loi salique d'Hessels. 7. Lcx Salica, éd. Behrend, II, 14 : « Si quis X X V porcos furaverit, ubi amplius non fuerit in grege illo et ei fuerit adprobatum, hoc est M M D dinarios qui faciunt solidos L X I I , culpabilis judicetur. » 8. Lex Salica, éd. Behrend, IV, 1 : « Si quis agnum lactantem furaverit et ei fuerit adprobatum, hoc est V I I dinarios qui faciunt medio trianti culpabilis judicetur. » c). Voyez les Codiccs, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 10 de l'édition d'Hessels. LES MONNAIES DANS LES LOIS III Je trouve une autre preuve de la postériorité du compte en sous dans ce fait que certains manuscrits de la loi salique ont systématiquement supprimé l'évaluation en deniers », sans doute parce qu'elle était devenue inutile. D'autres manuscrits plus récents ont, il est vrai, conservé la double évaluation qui se retrouve jusque dans les chapitres additionnels à la loi salique et dans le texte revisé par Charle- magne. Le respect des Francs pour la forme et pour la lettre de la loi suffit à expliquer ce phénomène. D'ailleurs, il est notable que dans les chapitres addition- nels, quand une des deux évaluations fait défaut, c'est toujours celle en deniers 2. Enfin, si nous ouvrons la loi des Ripuaires, dont la rédaction est certainement postérieure à celle de la loi salique, nous verrons que, dans tous les chapitres empruntés à la loi salique on a négligé l'estimation des amendes en deniers pour ne garder que l'estimation en sous; évidemment parce que l'unité monétaire était alors le sou et que la numération en deniers était tombée en désuétude. Ce qui semble indiquer que le denier tendait à disparaître devant le sou dès la fin du vc siècle, c'est qu'il a paru inutile au rédacteur de la loi salique d'indiquer l'équivalence des deniers en sous là où il s'agissait, non d'une amende, c'est-à-dire d'un payement à effectuer, mais seulement de l'appréciation d'un délit, comme aux titres XI et XII 4. Cependant au titre LUI, la chose volée est évaluée en sous >'. Quel est donc ce sou que les uploads/Finance/ introduction-au-catalogue-des-monnaies-merovingiennes-de-la-bibliotheque-nationale-par-maurice-prou.pdf

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  • Publié le Dec 14, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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