GERARD MARIE HENRY La crise de 1929 COLLECTION CURSUS • ÉCONOMIE ______________
GERARD MARIE HENRY La crise de 1929 COLLECTION CURSUS • ÉCONOMIE ________________________________________________________ SOMMAIRE GENERAL Introduction .................................................................................................................................... Chapitre 1. De la stabilisation du mark au début de la Grande Dépression: 1923-1929 ................. Chapitre 2. Les changements structurels et la crise mondiale ......................................................... Chapitre 3. Les situations nationales face à la catastrophe des années 1930 .................................. Chapitre 4. L’envolée des cours boursiers et l’effondrement du marché en octobre 1929 .............. Chapitre 5. Les causes de la dépression américaine: l’explication par la théorie de la dépense ...... Chapitre 6. Les effets du krach boursier sur la consommation et l'analyse de Keynes ................... Chapitre 7. L’aggravation de la Grande Dépression et le rôle des forces monétaires ..................... Chapitre 8. La transmission de la récession américaine au reste du monde .................................... Chapitre 9. La reprise américaine et les leçons de la Grande Dépression ....................................... Epilogue : Une comparaison des krachs boursiers de 1929, de 1987 et de la correction boursière à venir ....................................................................................................................................................... LES UTILITAIRES Bibliographie Table des encadrés Table des tableaux Table des graphiques Index Introduction A Mathilde Françoise Marie-Louise Gaonarc'h, sans laquelle ces pages n'auraient pas été écrites ! 1. Un ébranlement aux conséquences politiques gigantesques La Grande Dépression est vraiment un événement qui secoue la planète. Ses répercussions politiques sont énormes et elles continuent à être ressenties jusqu'à l'effondrement de l'empire soviétique à la fin des années 1980. S’il n’y avait pas eu le chômage massif de 1930, Hitler ne serait probablement pas arrivé au pouvoir, ou, si il y était arrivé, il n’aurait pas bénéficié de ses succès économiques initiaux, car il n’aurait pas pu donner simultanément aux Allemands "le beurre et les canons". De même, l’immunité apparente de la Russie soviétique à la dépression augmente singulièrement son prestige aux yeux des Occidentaux et renforce son poids économique : c’est seulement lorsque la dépression contracte les marchés intérieurs que le commerce avec l’Union Soviétique devient significatif pour certains pays (ou secteurs industriels) occidentaux. A titre d'exemple, de 1929 à 1931, les exportations allemandes vers la Russie passent de 2,6 % à 7,9 % des exportations totales allemandes. En 1931-32, 55 % des exportations américaines de machines-outils vont en Russie, 81 % des exportations anglaises et 74 % des exportations allemandes. La récession qui commence en 1929 et qui atteint rapidement tous les pays - qu’ils soient industrialisés ou producteurs de produits primaires - apparaît, à partir du second semestre 1930, comme une dépression qui sort nettement de l’ordinaire. Même s’il ne s’agit pas de la plus longue période de crise ininterrompue dans l’histoire mondiale récente, elle est la plus sévère, selon pratiquement tous les indicateurs. L’augmentation du chômage, la chute des revenus nominaux, l’augmentation rapide des capacités de production inutilisées, la chute du prix des produits primaires se combinent pour déprimer l’économie mondiale d’une façon que personne - même pas John Maynard Keynes - n’aurait pensée possible à la fin de l'année 1929. En 1931, Keynes affirme lors d’une conférence qu’il donne aux Etats-Unis: «Nous sommes aujourd’hui au milieu de la plus grande catastrophe économique - la plus grande catastrophe due presque entièrement à des causes économiques - du monde moderne ... A Moscou, on affirme que c’est la dernière crise du capitalisme, la crise finale, et que notre organisation sociale actuelle ne survivra pas...Il est fort possible que cette crise sera, dans le futur, vue comme un des tournants majeurs.» et dans l’audience, ou parmi ceux qui vont lire ultérieurement le texte de la conférence, il s’en trouve peu qui pensent que l4économiste de Cambridge force le trait. Tout à fait naturellement, les marxistes voient la dépression comme la confirmation des idées de Marx et Engels qui prévoient que les crises capitalistes vont devenir de plus en plus sévères jusqu’à ce que le système s’effondre dans un big bang final. L’impérialisme est le stade suprême du capitalisme, a dit Lénine, et la crise du début des années 1930 ne peut avoir comme résultat que la destruction du système capitaliste, soit par la révolution prolétarienne, soit par une nouvelle guerre mondiale. Quand il devient évident avec la reprise mondiale que “ l’alternative révolutionnaire ” ne se matérialise pas encore, la ligne officielle de la Russie soviétique est donnée en 1934 par Eugene Varga, économiste officiel du régime stalinien : Une nouvelle guerre mondiale est inévitable, à moins que le prolétariat ne l’empêche. L’histoire a donné au prolétariat le choix...soit d’être massacré au service de la bourgeoisie, soit de tourner ses armes contre sa propre bourgeoisie, et sous la direction des partis communistes de transformer la guerre impérialiste en guerre civile et de renverser la bourgeoisie pour toujours. 2. La thèse "keynésienne" de la stagnation De nombreux économistes qui se font appeler "keynésiens" sont également amenés à penser - ou sont confirmés dans leurs analyses - que les dépressions des économies de marché vont nécessairement devenir chroniques et plus sérieuses à moins qu’elles ne soient contrées par un déficit budgétaire permanent et par des mesures visant à réduire la propension “ excessive ” à épargner. Ces propositions d'économie dirigée contribuent fortement au biais inflationniste des politiques économiques d’après- guerre. En fait, comme la dépression s’aggrave tout particulièrement dans l'économie la plus développée techniquement, certains économistes n’hésitent pas à affirmer qu’un changement fondamental s’est produit dans l’économie américaine et se produira nécessairement dans les autres économies industrialisées. La dépression des années 1930 marque un tournant de l’histoire économique et elle n'est pas un simple retournement cyclique mais bien le début d’une stagnation durable. Le partisan le plus connu de cette thèse, Alvin Hansen, affirme que la croissance qu’a connue l’économie américaine à la fin du XIX° siècle était due à des forces telles que la croissance rapide de la population, la mise en valeur de nouveaux territoires et le progrès technique. Dans les années 1930, le progrès technique, qui selon Hansen ralentit comme conséquence inéluctable de la maturité économique, ne peut pas compenser la faiblesse des autres variables. Le résultat inévitable de l'épuisement des gains de productivité passe par l’insuffisance structurelle des opportunités d’investissements privés et donc par la stagnation économique. Une telle explication semble vraiment peu crédible de nos jours mais on doit la mentionner car elle est très populaire dans les milieux keynésiens des années 1930 et 1940 et parce qu'elle a fortement influencé l'organisation et l'exécution des politiques économiques après la Seconde Guerre Mondiale. On a développé cette théorie de multiples manières. Il suffit de dire que l'évolution économique depuis 1945 est en totale opposition avec les thèses de la théorie de la stagnation. Les cinquante dernières années sont une période d'inflation et non de déflation, de forts investissements et de pénurie et non de surabondance de capital, de prospérité et non de stagnation. Le pessimiste des "stagnationnistes" semble cependant corroboré à l'époque par les indicateurs économiques les plus directement perceptibles par le grand public. 3. Le chômage massif La dépression des années 1930 a en effet des conséquences humaines que les récessions du XIX° siècle, ou même celle de 1907 particulièrement sévère aux Etats- Unis, n’avaient jamais eues. La dégradation de la situation économique à partir de 1931 crée de telles tensions politiques et sociales que les institutions existantes se révèlent souvent incapables d’y faire face. Dans les économies les plus touchées, on assiste à des bouleversements institutionnels qui ouvrent la voie aux diverses politiques économiques des années 1930, dont le New Deal, l’économie national- socialiste et la généralisation du nationalisme économique ne sont que quelques exemples. Dans l’esprit de la plupart des gens, c’est la menace du chômage qui est omniprésente. Les statistiques de l'époque sont assez déficientes, même dans les pays comme la Grande-Bretagne où existent depuis longtemps des systèmes d’assurance- chômage et il est pratiquement impossible de calculer l’importance du chômage rural et du sous-emploi dans les pays sous-développés qui constituent la majorité de la population mondiale. L’indicateur du chômage mondial de la Société des Nations (base 100 : 1929) passe à un maximum de 291 en 1932 avant de tomber à 277 en 1933 et 255 en 1934. Des pays comme l’Allemagne, les Etats-Unis et la Suède sont particulièrement touchés - en 1932, 25 % de la population active est sans travail en Suède et aux Etats-Unis - mais d’autres pays, en particulier l’Australie, l’Autriche, le Canada et les Pays-Bas ne sont pas très différents en ce qui concerne l'ampleur du chômage. 4. L'effondrement de la production industrielle La production industrielle mondiale augmente régulièrement à partir du milieu des années 1920, avant de retomber brutalement d’un niveau 100 en 1929 à un minimum de 69 seulement en 1932. Dans certains pays, le pic de la production industrielle n’est pas forcément atteint en 1929, mais un peu avant comme dans le cas de la Pologne, ou un peu plus tardivement comme le Chili et la Norvège. Toutefois, les années 1929 et 1930 semblent bien correspondre à un retournement complet de la conjoncture économique. Comme le montre le tableau 1, de nombreux pays, parmi lesquels l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis et la Pologne subissent une contraction beaucoup uploads/Finance/ la-crise-de-1929.pdf
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- Publié le Sep 24, 2021
- Catégorie Business / Finance
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