41 La société victime d’infractions pénales Le dirigeant, les salariés, les ass

41 La société victime d’infractions pénales Le dirigeant, les salariés, les associés/actionnaires, voire des tiers à la société peuvent commettre des actions qui vont nuire à l’entité même de la société qui se trouvera en position de victime. Cette dernière peut, en effet, être victime par exemple d’infractions financières, informatiques, environnementales ou sociales. La société peut alors engager des actions contre les auteurs dont le but est tant d’obtenir la réparation du préjudice subi que leur condamnation pénale. Quelles sont les infractions pénales dont l’entreprise peut être victime ? Quels sont les moyens pour l’entreprise d’obtenir réparation du préjudice subi ? Les infractions commises par les dirigeants Certaines infractions ne peuvent être commises que par les dirigeants de la société. Il s’agit de l’abus de bien sociaux et la banqueroute. L’abus de bien sociaux L’abus de biens sociaux59 consiste, pour le dirigeant d’une société, à effectuer un acte contraire à l’intérêt social de cette dernière, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société dans laquelle il a des intérêts. A noter que l’auteur de cette infraction ne peut être que la personne ayant la qualité de dirigeant de la société, soit : - - le gérant d’une SARL ; - - le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d’une société anonyme (SA) ; - - le gérant d’une société en commandite par actions (SCA) ; - - le président d’une société par actions simplifiées (SAS). Pour qu’une condamnation pour abus de biens sociaux soit prononcée, des conditions doivent être respectées. • Les conditions matérielles Pour que l’infraction pénale soit caractérisée, le dirigeant doit avoir engagé un acte « contraire à l’intérêt de la société » : - - concernant la nocivité à l’intérêt social, elle se caractérise par une atteinte effective au patrimoine de la société. Plus largement, il s’agit de tout risque anormal auquel la société ne devait pas être exposée. - - concernant l’acte abusif, celui-ci peut être un usage abusif des biens sociaux, du crédit de la société, des pouvoirs ou des voix : 59 Article L241-3 4° du Code de commerce : «Le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement.» Article L242-6 3° du Code de commerce « Le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirecte- ment. » 42 42 L’usage abusif de bien sociaux A titre d’exemple, il peut s’agir de l’utilisation des fonds, véhicules ou immeubles de la société comme si ces biens appartenaient personnellement au dirigeant. Il peut également s’agir du paiement de dettes ou d’achats personnels avec la carte bancaire de la société. L’usage abusif du crédit Cet acte comprend aussi bien l’utilisation de la surface financière de la société, c’est à dire sa capacité à emprunter, garantir ou cautionner, mais aussi sa réputation ou sa crédibilité. Par exemple, sera constitutif d’un abus de biens sociaux, l’invitation à des déjeuners ou des voyages sur le compte de la société dans le but d’être désigné candidat à des élections. L’usage des pouvoirs Le terme « pouvoir » est entendu largement, dans la mesure où il correspond à tous les droits et toutes les prérogatives dont sont investis les dirigeants sociaux par la loi et les statuts. Il peut par exemple, s’agir du fait pour le dirigeant, d’éluder à son profit les règles statutaires restreignant la liberté de cession des actions aux tiers, d’organiser une fusion absorption dépourvue de toute justification économique pour la société mais avantageuse pour le dirigeant ainsi que pour d’autres sociétés dans lesquelles il est intéressé.60 L’usage des voix Cette pratique vise à empêcher que les mandataires sociaux, par le biais de procurations en blanc, représentent les actionnaires et votent pour eux dans les assemblées. • L’élément intentionnel Pour que l’infraction soit pleinement caractérisée, il faut que l’auteur (le dirigeant) ait agi « volontairement », c’est-à-dire qu’il ait eu connaissance ou du moins conscience que ses agissements étaient contraires à l’intérêt social de la société. La loi n’exige pas la preuve d’une intention de nuire. Cette connaissance ou conscience est, en effet, souvent déduite par les juges des faits matériels commis et de leurs circonstances (dissimulation, manipulations comptables, compétences du dirigeant..). A noter que dans les groupes de sociétés, un acte préjudiciable à une des sociétés du groupe peut ne pas être considéré comme un abus de biens sociaux si cet acte était nécessaire à l’intérêt du groupe, que le concours financier consenti n’était pas démuni de contrepartie et ne rompait pas l’équilibre entre les engagements respectifs des différentes sociétés du groupe.61 La banqueroute La banqueroute62, quant à elle, correspond à des agissements du dirigeant commis alors que la société était en état de cessation des paiements (état préalablement constaté par un jugement de redressement ou liquidation judiciaire prononcé par un Tribunal de commerce ou un Tribunal de Grande instance). 60 Arrêt de la Cour de cassation (chambre criminelle) du 10 juillet 1995 (n°94-82.665) 61 Arrêt de la cour de cassation (chambre criminelle) du 4 février 1985 62 Article L626-1 et suivants du Code de commerce Concernant l’appréciation du caractère frauduleux, le juge va : - - replacer l’acte dans le contexte industriel, commercial ou financier de la société ; - - se placer au jour de l’opération effectuée pour rechercher si l’on pouvait prévoir ou craindre un résultat préjudiciable à la société. 43 Î Î Pour rappel, la société est considérée comme étant en cessation des paiements lorsqu’elle ne peut plus faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le législateur a prévu différents cas de banqueroute : - - L’achat pour revente au-dessous du cours et l’emploi de moyens ruineux ; Il peut, par exemple, s’agir du dirigeant qui souscrit des crédits excessifs, bien au-delà des capacités de remboursement de l’entreprise. - - Le détournement et la dissimulation d’actifs ; On parle d’abus de bien sociaux post-cessation des paiements. En effet, si le dirigeant détourne ou dissipe des biens dans une société encore prospère, il commet un abus de biens sociaux, mais s’il le commet après l’état de cessation des paiements alors dans ce cas-là, il commet un délit de banqueroute. A titre d’exemple, a été condamné le dirigeant qui verse sur son compte bancaire personnel des fonds de la société63 ou qui vend des biens de la société à très faible valeur à une autre société qu’il possède64. - - L’augmentation frauduleuse du passif ; L’intérêt étant généralement de dépouiller l’entreprise en difficulté en aggravant ses dettes au profit d’une autre entreprise ou société dans laquelle le dirigeant a des intérêts directs ou indirects (société possédée par les enfants, épouses, associés...). Par exemple, il peut s’agir pour le gérant d’une société, d’octroyer des avances sur trésorerie à certains associés, sans contrepartie et sans autorisation de l’assemblée générale. Il en est de même, pour le fait de vendre des marchandises sans chercher à se faire payer. - - La banqueroute par voie comptable. Dans ce cas, il s’agit d’une tenue de comptabilité fictive ou irrégulière Les infractions commises par les salariés, les associés ou les tiers D’autres infractions peuvent être commises tant par les salariés, les associés/actionnaires (non dirigeant) de la société que par des tiers. Les principales infractions dont l’entreprise peut être victime sont le vol, l’abus de confiance, l’escroquerie et les infractions informatiques. Ces infractions ne peuvent pas être commises par le dirigeant sans être qualifiées d’abus de biens sociaux. Le vol Le vol est défini comme étant la « soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ». 65 Pour que l’incrimination de vol soit véritablement constituée, il faut : - - la soustraction d’une chose qui appartient à autrui, - - la volonté de soustraire cette chose. Au niveau de l’entreprise, cette infraction sera constituée, par exemple, à chaque fois qu’une personne (salarié ou tiers) s’appropriera, même temporairement, un bien matériel qu’il sait appartenir à une autre personne ou à la société et ce sans autorisation de celle-ci. Il peut s’agir d’outils, de matériaux ou des éléments de stock, etc. En droit français, seules les choses mobilières et matérielles sont effectivement susceptibles de vol. C’est donc le critère de la matérialité, qu’il convient de prendre en compte. Il faut avoir une appréhension matérielle sur la chose, que celle-ci puisse être déplacée. 63 Jugement de la Cour d’appel de Grenoble du 24 juin 2005 (n° 2005-292505) 64 Arrêt de la Cour de cassation (chambre criminelle) du. 23 mai 2013, (n°12-82199) 65 Article 311-1 du Code pénal 44 44 Quid des vols par reproduction d’informations ? La copie non autorisée de données de l’entreprise sur des supports (photocopie, copie uploads/Finance/ la-societe-victime-d-x27-infractions 1 .pdf

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  • Publié le Jui 23, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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