I maginez que vous soyez responsable de la gestion des risques d’une grande ent

I maginez que vous soyez responsable de la gestion des risques d’une grande entreprise et que votre P-DG ait besoin de votre avis sur une nouvelle acquisition d’entreprise. Vous avez été submergé de rapports montrant que cette opération est très rentable et devrait créer de la valeur pour vos actionnaires. Quelles sont les analyses que votre P-DG attend de vous ? En tant que responsable de la gestion des risques, votre rôle consiste à analyser comment cette nouvelle entreprise va s’intégrer au sein du portefeuille d’activités actuel, ainsi que les synergies entre la performance de l’entreprise cible et le reste de votre entreprise. Si cette dernière rencontre des difficultés, la nouvelle entité présentera-t-elle également de faibles résultats ? Ou bien cette nouvelle acquisition viendra-t-elle compenser les écarts de performance du reste de l’activité ? Les entreprises doivent tenir compte des risques si elles veulent survivre et prospérer. Dans ce cadre, la fonction principale du risk manager est d’identifier le portefeuille de risques actuel supporté par son entreprise et d’anticiper son évolution. Il est à même d’évaluer si l’ensemble des risques pris sont acceptables ou s’ils sont, au contraire, trop élevés. Dans ce dernier cas, quelles actions sont à mettre en œuvre pour modifier ce portefeuille ? Cet ouvrage est en grande partie dédié à la façon dont les risques sont gérés dans les banques et les autres institutions financières. Cependant, de nombreux points abordés concernent également les activités non financières. La gestion des risques est devenue une préoccupation de plus en plus importante pour les entreprises au cours des dernières décennies. En particulier, les institutions financières se sont rendu compte qu’elles devaient consacrer de plus en plus de ressources à la gestion des risques. Les pertes énormes générées par des traders constatées à la banque Barings en 1995, Allied Irish Bank en 2002, Société Générale en 2007 ou encore UBS en 2011, auraient pu être évitées si des procédures efficaces de gestion des risques avaient été mises en place pour la collecte des informations sur les positions des intervenants. Celles subies par Citigroup, UBS ou Merrill Lynch lors de la crise financière des subprimes auraient été moins douloureuses si les responsables de la gestion des risques avaient su convaincre les managers que des risques inacceptables avaient été pris. Ce chapitre introductif plante le décor. Il aborde tout d’abord les arguments classiques concernant le couple rentabilité-risque auquel sont confrontés les investisseurs en obli­ gations ou en actions. Il montre ensuite comment les arguments avancés peuvent être utiles aux entreprises lors des choix d’investissement et de la gestion de leur exposition aux risques. Il décrit enfin les raisons pour lesquelles les entreprises – en particulier Chapitre 1 Introduction ©2018 Pearson France - Gestion des risques et institutions financières, 5e éd. John HULL 6 Gestion des risques et institutions financières les institutions financières – doivent être attentives au risque global auquel elles sont confrontées, et pas seulement le risque auquel est confronté un détenteur de porte­ feuille correctement diversifié. 1.1 La rentabilité et le risque Comme tous les gestionnaires de portefeuille le savent, il existe un arbitrage entre la rentabilité et le risque d’un investissement. Plus le risque est élevé, plus la rentabilité effective peut l’être. Le choix s’opère donc entre risque et rentabilité espérée (ou espé­ rance de rentabilité), et non entre risque et rentabilité observée. Le terme de rentabilité espérée peut lui-même prêter à confusion. Dans le langage courant, est espéré ce qui devrait le plus se produire le plus vraisemblablement. Les statisticiens définissent la valeur espérée d’une variable comme sa valeur moyenne. La rentabilité espérée est alors une moyenne pondérée de l’ensemble des rentabilités possibles de l’actif, et les pondé­ rations correspondent aux probabilités de réalisation des différentes rentabilités. Les rendements possibles et leurs probabilités peuvent être également approchés à partir de données historiques ou encore d’estimations subjectives. Supposons, par exemple, que vous investissiez 100 000 euros pour une période d’un an. Une première solution consiste à investir cette somme en bons du Trésor, dont le rende­ ment est de 5 % par an. Dans ce cas, vous ne courez aucun risque, et la rentabilité espérée de votre investissement sera de 5 %. Investir la même somme sur le marché des actions représente une autre alternative. Pour simplifier, supposons que les rentabilités possibles de cet investissement et les probabilités qui leur sont associées sont celles présentées au tableau 1.1. Il existe une probabilité de 0,05 que le rendement s’élève à + 50 %, une proba­ bilité de 0,25 qu’il s’élève à + 30 %, et ainsi de suite. Tableau 1.1 : Rentabilité annuelle d’un investissement de 100 000 euros en actions. Probabilité Rentabilité 0,05 + 50 % 0,25 + 30 % 0,40 + 10 % 0,25 – 10 % 0,05 – 30 % L’espérance de rentabilité de cet investissement s’écrit alors : 0,05 ¥ 0,50 + 0,25 ¥ 0,30 + 0,40 ¥ 0,10 + 0,25 ¥ (– 0,10) + 0,05 ¥ (– 0,30) = 0,10 Cela montre que si vous acceptez d’augmenter le risque de votre investissement, son espérance de rentabilité augmentera également (5 % pour les bons du Trésor1 et 10 % pour les actions). En outre, si les événements sont favorables, le rendement de l’inves­ tissement en actions pourra atteindre 50 %. Mais dans le cas le plus défavorable, la 1. Ce chiffre correspond à une tendance historique de long terme, même s’il est supérieur aux rendements sur titres d’État observés dans beaucoup de pays depuis 2008. ©2018 Pearson France - Gestion des risques et institutions financières, 5e éd. John HULL 7 Chapitre 1 – Introduction rentabilité de votre investissement sera de – 30 %, soit une perte de 30 000 euros pour votre portefeuille. Markowitz (1952) a proposé l’une des premières pistes d’analyse du couple rentabilité-risque. Un peu plus tard, d’autres travaux, ceux de Sharpe (1964) en particulier, sont venus compléter ses recherches pour donner naissance au fameux modèle d’évaluation des actifs financiers, ou MEDAF (également nommé Capital Asset Pricing Model, CAPM). Ce modèle définit la relation entre l’espérance de rentabilité et ce que l’on appelle le risque systématique. En 1976, Ross a proposé une approche multifac­ torielle qui étend le modèle d’évaluation des actifs financiers à la présence de plusieurs sources de risque systématique (modèle couramment nommé Arbitrage Pricing Theory, APT). Ces modèles exercent une très grande influence sur la façon dont les gestionnaires de portefeuille analysent et gèrent le couple rentabilité-risque de leur investissement. Nous aborderons ce point dans les sections suivantes. 1.1.1 La mesure du risque Comment mesurer le risque associé à un investissement ? On utilise souvent l’écart-type de rentabilité annuelle, qui s’écrit ainsi : E R E R 2 2 ( ) ( ) [ ] − où R est la rentabilité annuelle. Le symbole E désigne l’opérateur d’espérance ; de ce fait, E(R) est l’espérance de rentabilité annuelle. Pour les données du tableau 1.1, E(R) = 0,1. Pour calculer E(R2), il faut pondérer le carré des rentabilités par la probabilité qui leur est associée : E(R2) = 0,05 ¥ 0,502 + 0,25 ¥ 0,302 + 0,40 ¥ 0,102 + 0,25 ¥ (– 0,10)2 + 0,05 ¥ (– 0,30)2 = 0,046 L’écart-type des rentabilités annuelles vaut par conséquent 0,046 –0,12 = 0,1897 ou 18,97 %. 1.1.2 Les opportunités d’investissement Supposons que nous puissions caractériser l’ensemble des opportunités d’investissement par l’espérance de rentabilité et l’écart-type de rentabilité. La figure 1.1 représente cet ensemble : les axes horizontal et vertical sont consacrés respectivement à l’écart-type de rentabilité et l’espérance de rentabilité. Maintenant que l’ensemble des investissements possibles est décrit au travers du couple rendement-risque, il devient possible de caractériser l’éventail des portefeuilles-titres parmi lesquels les investisseurs peuvent choisir. Considérons deux titres de rentabilités R1 et R2. Si l’on consacre une part de richesse w1 au premier actif et une part de richesse w2 au second, avec w2 = 1 – w1, la rentabilité du portefeuille s’écrit : w1R1 + w2R2 Si l’on note µ1 (respectivement µ2) l’espérance de rentabilité du titre 1 (respectivement du titre 2), l’espérance de rentabilité du portefeuille est de la forme : μP =w1µ1 + w2µ2 (1.1) ©2018 Pearson France - Gestion des risques et institutions financières, 5e éd. John HULL 8 Gestion des risques et institutions financières L’écart-type de rentabilité de ce portefeuille s’écrit alors : 2 1 2 1 2 2 2 2 2 1 2 1 2 w w w w P σ σ σ ρ σ σ = + + (1.2) où s1 et s2 sont les écarts-types de R1 et R2, et r est le coefficient de corrélation entre R1 et R2. Posons les valeurs suivantes (exprimées en base annuelle) : µ1 = 10 %, s1 = 16 %, tandis que µ2 = 15 % et s2 = 24 %. Si le coefficient de corrélation entre la rentabilité des deux titres s’élève à 0,2 ou 20 %, le tableau 1.2 donne les valeurs obtenues pour µp et sp en fonction des différentes parts de richesse investies dans les deux titres. . . . . . uploads/Finance/ lecture-4-gestion-des-risques-et-institutions-financieres-chap1.pdf

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  • Publié le Aoû 14, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
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