Les critiques sur le contrôle budgétaire Après avoir envisagé de façon globale
Les critiques sur le contrôle budgétaire Après avoir envisagé de façon globale la montée en puissance des critiques à l’adresse du contrôle budgétaire, nous nous intéresserons, en reprenant le processus budgétaire, aux principales difficultés de mise en œuvre des budgets en les regroupant par grandes catégories afin de faciliter le diagnostic. Des critiques déjà anciennes Les entreprises tiennent à leurs budgets. Pourtant, des critiques nombreuses sont adressées aux procédures budgétaires. Elles sont déjà anciennes, même si l’acrimonie vis-à-vis du contrôle budgétaire a été relancée par les réflexions autour de l’Activity Based Costing (ABC). Elles émanent souvent d’universitaires, et n’auraient peut-être eu aucune importance si elles n’étaient relayées (ou précédées ?) par les critiques des professionnels de la comptabilité et ducontrôle. De nombreuses critiques ont été émises depuis longtemps par les praticiens et les théoriciens du contrôle. Elles concernent, tout à la fois, la capacité à faire des prévisions justes et pertinentes, la possibilité de réaliser un contrôle objectif et équitable ou portent encore sur les conflits entre les rôles attribués au contrôle budgétaire. En effet, le contrôle budgétaire sert-il à coordonner les actions de l’entreprise, à évaluer une performance, à planifier ou tout cela à la fois ? Pyhrr [1973], avec le budget base zéro (BBZ), montrait déjà que les organisations avaient du mal à évoluer autrement qu’à la marge par rapport au budget antérieur. Ce dernier apparaît alors comme une contrainte plus qu’il ne permet à l’entreprise d’évoluer. Il fallait, selon cet auteur, tout remettre à plat afin de repartir sur de nouvelles bases pour espérer briser la routine d’un processus de plus en plus bureaucratique. Cette première vague de reproches ou de doutes date des années soixante et soixante-dix. Récemment, la presse professionnelle a repris les critiques sur le contrôle budgétaire. Son coût apparaît trop élevé [Schmidt, 1992]. Ainsi, selon Fortin et al. [1999], pour plus de 70% des entreprises canadiennes, le coût d’établissement des budgets représenterait entre 1% et 5% du chiffre d’affaires et pour 18% d’entre elles, ce coût monterait jusqu’à 10% (ce qui paraît exagéré). En outre, il ne permet pas une amélioration incrémentale et continuelle des performances de l’entreprise [Drtina et al., 1996]. Deschamps [1997] y voit parfois un « piège à cadres » et s’interroge sur le rôle exact du budget, faisant ainsi écho à Stéphane Doblin, l’un des fondateurs de la DFCG, ancien contrôleur de gestion de Renault et consultant. Les critiques sont habituelles : trop de personnel employé pour un coût trop élevé, réunions inutiles, concentration excessive sur les chiffres au dépend des objectifs, maquillage comptable au détriment du futur, etc. Certaines sociétés, comme Bull, vont même jusqu’à se passer complètement des budgets dans les moments difficiles, pour se concentrer sur des indicateurs « non chiffrés » : croissance, amélioration de la profitabilité et de la liquidité [Option finance, 1996]. En nous basant sur l’articulation du processus budgétaire décrite précédemment, nous pouvons isoler les points critiques qui font aujourd’hui l’objet de discussions quant à leur efficacité : 1. Comment s’assurer de la pertinence de l’articulation stratégie/budgets ? 2. L’environnement étant de plus en plus turbulent, les prévisions et les plans d’action du processus budgétaire ne risquent-ils pas de devenir rapidement obsolètes ? 3. Comment définir des centres de responsabilité adéquats ? 4. Entre l’élaboration ascendante ou descendante des budgets, comment choisir ? 5. Comment affecter les écarts à des responsables ? Qu’est-ce que la contrôlabilité ? 6. Quelles conséquences doivent avoir les résultats budgétaires ? L’ensemble des critiques peut être résumé à partir du schéma que nous avons déjà utilisé : La difficulté à relier stratégie et budgets Le fonctionnement du contrôle budgétaire repose sur le modèle, désormais classique, développé par Donaldson Brown et Alfred Sloan à la General Motors au début des années vingt. Ce modèle permet de décliner les objectifs stratégiques de l’entreprise auprès des opérationnels dans le cadre de leurs budgets. Pour les dirigeants, l’objectif ultime de l’entreprise est exprimé en termes de ROI (Return On Investment). C’est un objectif purement financier en relation assez étroite avec la création de valeur de l’entreprise. Le but du chef d’entreprise est de s’assurer de la maximisation sur longue période de cet indicateur afin de permettre la croissance de l’entreprise et la rémunération des actionnaires. Ce ratio comptable qui fait intervenir une marge (au numérateur) et les moyens nécessaires pour obtenir cette marge (au dénominateur) est décliné dans toute l’entreprise en suivant une décomposition logique : Productivité Coûts Prix Marge Bénéfice Niveau d'activité Distribution Marketing Marché Chiffre d'affaires Bénéfice/chiffre d'affaires Chiffre d'affaires Immobilisations Crédit clients Stocks Taux de rotation Capital investi Chiffre d'affaires/capital investi Bénéfice/capital investi D’après Bouquin, 2001, 248 Chaque responsable se voit ensuite affecter des objectifs dont les valeurs s’inspirent de cette décomposition globale. La cohérence de la décomposition sert à garantir celle de la stratégie. Les différentes variables du bas du tableau sont gérées grâce à des indicateurs physiques et des indicateurs monétaires Ce modèle est toutefois très critiqué pour les effets pervers qu’il induit. Tout d’abord, le modèle oppose des préoccupations de court terme à celles de long terme. Dans leur modèle originel, Donaldson Brown et Alfred Sloan définissait un ROI de longue période avec des résultats lissés sur plusieurs mois, voire plusieurs années. Il est bien sûr tentant pour un responsable de chercher à maximiser le résultat de court terme au détriment de celui de long terme (ainsi réduire les dépenses de publicité fait augmenter le ROI des ventes, mais au détriment de l’image de l’entreprise à long terme et donc de son ROI de longue période). La publication de comptes trimestriels par les sociétés américaines a incité les responsables d’entreprise à privilégier le respect à court terme des objectifs. On peut penser que la multiplication de la publication de résultats semestriels en France, voire trimestriels pour les sociétés françaises, de plus en plus nombreuses, cotées sur des places financières internationales, a entraîné une évolution identique. De la même façon, il est tentant pour un supérieur de juger sur des performances instantanées un opérationnel sans prendre en compte les perspectives futures ou les conditions réelles de l’activité. uploads/Finance/ les-critiques-sur-le-controle-budgetaire.pdf
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- Publié le Sep 18, 2022
- Catégorie Business / Finance
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