38413. LES MULTIPLES FACETTES DE LA SÉPARATION DE BIENS 38413. LES MULTIPLES FA

38413. LES MULTIPLES FACETTES DE LA SÉPARATION DE BIENS 38413. LES MULTIPLES FACETTES DE LA SÉPARATION DE BIENS AVEC SOCIÉTÉ D'ACQUÊTS AVEC SOCIÉTÉ D'ACQUÊTS (Analyse et formules) par Frédéric ROUVIÈRE, Docteur en droit, A.T.E.R. à l'Université Paul Cézanne (Aix Marseille III). 1. La résurgence périodique du régime : pouvoir et propriété. - Comme le « jeune homme vêtu de noir » qui revient sans cesse habiter la vie d'Alfred de Musset dans La Nuit de Décembre, la séparation de biens avec société d'acquêts est ce spectre (1) qui hante périodiquement les écrits de la doctrine en droit des régimes matrimoniaux. Les relations de la doctrine avec ce régime conventionnel sont ambiguës : elle l'invoque pour mieux le critiquer (2) ou finalement le valoriser (3). Tout laisse penser que ce régime conventionnel possède de multiples facettes qui ne sont pas encore toutes révélées (4). Pour comprendre que ce régime puisse répondre aujourd'hui à un besoin spécifique des futurs époux, il faut d'abord mettre à jour en quoi il ne peut plus être réellement utile à présent. La majorité des auteurs s'accorde sur l'utilité surannée du régime sous l'angle du pouvoir (5). En effet, avant la loi de 1965 (6), l'adjonction d'une société d'acquêts permettait d'établir une égalité dans la gestion des biens des époux, notamment en permettant à la femme d'avoir une autonomie sur ses biens propres tout en l'associant à l'enrichissement de son conjoint au cours du mariage. L'égalité des époux dans la gestion des biens, poursuivie et achevée par la loi de 1985, paraît rendre superflue l'adoption d'un régime conventionnel qui reprend mutatis mutandis les avantages que procure le régime légal (7). Une autre facette du régime, à savoir celle de la propriété, n'est pourtant guère explorée. Or, en répartissant harmonieusement les biens qui composent les différentes masses, le régime de la séparation de biens avec société d'acquêts pourrait se présenter comme une correction de la rigueur du régime de la séparation pure ou simple (8) ou, si l'on préfère, comme un infléchissement de l'association des intérêts organisée par le régime légal. 2. Inadéquation partielle des solutions actuelles. - Il suffit de penser à un cas précis pour se rendre compte que les régimes actuels ne répondent pas nécessairement aux objectifs poursuivis par les conjoints. Ainsi, lorsqu'un des futurs époux exerce une profession libérale et souhaite néanmoins associer son conjoint à son enrichissement tout en lui garantissant une protection pour lui et sa famille, le régime de la séparation de biens pure et simple, comme le régime légal, semblent inadaptés (9). Le régime de la séparation répond effectivement au souci de ne pas faire subir au conjoint les dettes résultant de la profession, ni de contraindre le conjoint survivant à céder sa clientèle civile s'il ne peut apporter la moitié de sa valeur lors de la liquidation, en supposant que le bien soit commun. C'est d'ailleurs pour cette dernière raison que le régime légal paraît inapproprié. De ce fait, sous la séparation, les acquisitions communes seront soumises au régime de l'indivision et la gratification du conjoint survivant ne pourra être réalisée que par des libéralités et non par un avantage matrimonial. Précisément, l'indivision n'est guère protectrice pour les époux et les libéralités sont soumises, non seulement à la réserve héréditaire, mais aussi à un régime fiscal nettement moins attrayant que celui de l'avantage matrimonial (10). Il est vrai que le régime de la participation aux acquêts est censé concilier les buts antagonistes d'indépendance et d'association des conjoints. Cependant, son application demeure problématique en cas de profession libérale et mieux vaut alors stipuler une exclusion des biens professionnels dans le calcul de la créance de participation (11). Cette façon de procéder n'est, malgré tout, pas exempte de difficultés et d'incertitudes. 1 L'interprétation par le juge des stipulations peut déjouer les prévisions des parties (12). En outre, selon la fortune personnelle des intéressés, la créance de participation peut devenir inéquitable (13) : il faut alors stipuler en prévision une nouvelle clause qui plafonne son montant (14). Si la pratique notariale s'est montrée inventive, elle n'a pas vaincu toutes les résistances afférentes à l'utilisation d'un tel régime. La raison qui pourrait expliquer la difficulté à promouvoir ce régime serait le cloisonnement trop strict entre indépendance et association des intérêts. En d'autres termes, la césure chronologique paraît trop accusée, en ce sens que le régime est séparatiste durant son fonctionnement et associatif au moment de la liquidation. 3. L'apport de la séparation de biens avec société d'acquêts. - L'idée que pourrait permettre d'introduire le régime de la séparation de biens avec société d'acquêts est une dissociation des intérêts qui n'est pas chronologique mais qui relève de la nature des biens en cause (15). Autrement dit, l'objectif est de prévoir des règles de composition des masses propre et commune - étant précisé que les termes de propre et commun seront ci-après utilisés de préférence à ceux de personnel et acquêt - de façon à ce que les biens propres reflètent l'indépendance des conjoints et les biens communs l'association des intérêts. Concrètement, les biens nécessaires à la profession devront être propres et l'association des conjoints devra être réalisée en déterminant quels biens seront considérés comme acquêts de communauté. Le régime permet « une réelle séparation et une réelle communauté » (16). Cette façon de procéder est confortée par le fait que le législateur a prévu un régime en raison de la nature du bien. Le bien commun obéit à une gestion concurrente, si ce n'est une cogestion, ce qui aboutit à l'égalité et à la protection des conjoints. En outre, le bien commun, conformément à sa nature, est partagé au moment de la liquidation du régime (17). Inversement, le bien propre est soumis à la gestion exclusive et n'est pas partagé au moment de la liquidation. La jurisprudence relaie cette idée : « La société d'acquêts adjointe à un régime principal de séparation de biens est soumise en principe aux règles de la communauté » (18). La ligne directrice de la présente étude sera de tenter de montrer que le régime de la séparation de biens peut être tempéré lorsque les époux veulent associer leurs intérêts pécuniaires, notamment en substituant au régime de l'indivision le régime de bien commun. Ce dernier paraît indéniablement mieux adapté aux buts poursuivis, dans la mesure où ce régime complète harmonieusement des règles de même nature qui ont pour objectif commun l'organisation des relations pécuniaires entre époux. Cette dernière remarque permet de devancer certaines objections : en créant un nouveau régime conventionnel, non prévu par le Code civil, n'est-ce pas s'exposer aux incertitudes de l'interprétation judiciaire ? Ne faut-il pas préférer user de régimes éprouvés par la pratique et dont les acteurs du droit matrimonial ont une sûre connaissance ? Le Code civil lui-même (art. 1387 et 1497) prévoit le principe de la liberté contractuelle en la matière : rien ne s'oppose par principe à la promotion d'un nouveau type de régime. La rançon de la liberté est le risque d'imprécision (19), pire, d'imprévision des problèmes futurs. C'est de ce point de vue que le rôle du notaire est prépondérant : son activité de conseil devrait permettre aux parties de ne pas faire des expérimentations sauvages (20). En préparant soigneusement la convention, c'est-à-dire en anticipant les difficultés, l'objectif recherché devrait pouvoir être mené à bien. D'autant plus que le régime de la séparation de biens avec société d'acquêts n'est pas un régime strictement original (comme celui du régime de la participation aux acquêts), au contraire, il est une combinaison mesurée et équilibrée des règles régissant la communauté et la séparation. Pour le dire autrement, il s'inscrit dans la continuité des règles du Code civil tout en revendiquant une spécificité. 2 Pour paraphraser des conclusions scientifiques célèbres à propos du cerveau, on pourrait dire que la liberté contractuelle s'use si l'on ne s'en sert pas. Celle-ci peut se concrétiser dans la détermination rigoureuse de la composition des masses de biens qui décident de la liquidation et du fonctionnement du régime du point de vue du pouvoir. Ce n'est qu'en raison de la composition de ces masses que la liquidation sera considérée comme équitable (I) du point de vue des conjoints, tout en leur garantissant indépendance et protection (II) au regard de la spécificité de leur situation, ce qui est une autre façon de reprendre la distinction classique entre les questions de propriété et de pouvoir. I. L'ÉQUITÉ DE LA LIQUIDATION I. L'ÉQUITÉ DE LA LIQUIDATION 4. La composition des masses de biens est le problème central : de la nature du bien dépend son régime, c'est-à-dire, principalement, le fait de savoir s'il devra être partagé ou non lors de la liquidation (A). Cette dernière pourra en outre être aménagée, ce qui confère au régime de la séparation de biens avec société d'acquêts toute la souplesse découlant de la richesse des clauses pouvant assortir la liquidation (B). A. La composition des masses propre et commune A. La composition des masses propre et commune 5. Séparation et communauté. - Le régime envisagé est uploads/Finance/ les-multiples-facettes-de-la-separation-de-biens-avec-societe-d-x27-acquets-f-rouviere-defrenois-38413.pdf

  • 30
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Dec 29, 2022
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1146MB