Spécificités de l’économie numérique et réflexes de bon sens pour l’entrepreneu
Spécificités de l’économie numérique et réflexes de bon sens pour l’entrepreneur et l’investisseur INNOVATION ET NUMÉRIQUE PARTAGER Didier Célisse Temps de lecture 9 mn Numérique, digital… Tout le monde ne parle que de ça ! Ces termes sont même parfois devenus une sorte d’étendard que l’on brandit comme l’argument absolu : n’ayez aucun doute, soyez sans crainte, nous sommes bons, nous sommes « digital » ! Alors, pour paraphraser le général de Gaulle, suffit-il de sauter sur sa chaise comme un cabri en disant « numérique ! digital ! » ? Au-delà de ces mots-valises, qui peuvent parfois être un cache-sexe bien pratique couvrant l’absence d’une vraie réflexion stratégique, de quoi parle-t-on exactement ? Qu’est-ce qui caractérise l’économie numérique ? Qu’est-ce qui en fait quelque chose de si singulier ? Et comment distinguer les « bons » projets numériques, notamment quand on veut se lancer ou investir ? Avant d’entrer dans le vif du sujet, précisons qu’il existe une abondante littérature sur cette thématique. Nous n’aurons évidemment pas la prétention au travers de ces quelques lignes d’être exhaustifs. Le lecteur curieux et avide de savoirs pourra aisément compléter sa lecture avec de nombreux ouvrages sur ce sujet… Quelques particularités de l’économie numérique Les technologies numériques ont cette particularité de transformer radicalement la façon dont des « biens » ou des « services traditionnels » peuvent être apportés ou fournis à leurs clients. Cela se traduit la plupart du temps par une baisse des coûts, une réduction des délais, et aussi par une personnalisation du service offert. Ainsi, au lieu d’aller au kiosque à journaux, le journal du dimanche matin sera directement téléchargé sur la tablette. Pas besoin d’aller acheter le DVD du dernier Clint Eastwood, on le visionnera directement sur une plate-forme de « streaming » qui nous recommandera par ailleurs d’autres films ou séries du même genre. Finies les brocantes, on chinera désormais directement depuis le canapé du salon… De tels exemples de la vie quotidienne sont aujourd’hui nombreux et montrent à quel point les services numériques ont transformé nos habitudes de consommation. Au-delà de la forme d’optimisation que permet le numérique dans l’économie traditionnelle, il suscite de nouveaux modèles de création de valeur, qui sont caractéristiques de ce que l’on pourrait appeler l’ « économie numérique » : Une nouvelle distribution des contenus Le numérique crée une nouvelle économie de production de contenus mais aussi et surtout de distribution de ces contenus (presse en ligne, vidéo à la demande…). Ces facilités dans la distribution permettent une diffusion rapide du côté des clients. Elles rendent les choses plus simples et moins coûteuses pour le « commerçant » qui se passe ainsi, totalement ou en partie, d’un réseau de commercialisation physique (points de vente) en s’appuyant désormais sur le réseau de distribution offert par Internet. D’autres encore, comme Amazon, mettent en place en parallèle un réseau logistique extrêmement puissant. Outre cette facilitation de la distribution, ce modèle facilite aussi grandement le passage à l’échelle, qu’il soit national ou même international. De nouveaux producteurs Le numérique tire parti de la multitude, en mobilisant de nouveaux « producteurs », conscients ou non de ce rôle de producteur. Il peut s’agir de simples particuliers qui par leur utilisation d’un service et par la production de données associées, permettent de rendre ce service encore plus performant. Un exemple frappant de cette utilisation de la multitude est le service « waze » qui sans la production de données de circulation de ses utilisateurs ne servirait pas à grand-chose ! Mais la multitude peut aussi être composée de travailleurs indépendants voire d'entreprises trouvant un complément de revenu dans un nouveau service. Blablacar ou Airbnb sont de parfaites illustrations de ce concept : chaque particulier devient ainsi un acteur potentiellement rémunéré du service proposé. Un modèle d’affaires « biface » Le modèle d’affaire d’un service numérique est souvent « biface »Que cela signifie-t-il ? Biface signifie que le service s’adresse à deux cibles, deux groupes d’« agents » distincts. La participation d’un groupe à ce modèle augmente la valeur de la participation pour l’autre groupe, et souvent réciproquement. L’exemple sans doute le plus illustratif de ce modèle est celui de Google qui s’adresse à la fois aux particuliers et aux annonceurs. C’est la participation de la première catégorie qui permet de tirer des revenus publicitaires de la seconde. Ce modèle « biface » peut permettre d’offrir apparemment « gratuitement » le service à une des cibles. C’est le fameux « si c’est gratuit, c’est ce que vous êtes le produit ! » Le « freemium » Le modèle d’affaires peut parfois être « freemium », c’est-à-dire qu’une offre gratuite permet de rassembler une large base d’utilisateurs. Une offre complémentaire payante, souscrite par une partie de ces utilisateurs, permet alors de générer des revenus et alimentent ainsi le modèle économique La production de données à valeur marchande Une autre caractéristique de ces services numériques c’est qu’ils créent des données qui ont une très forte valeur et participent ainsi parfois au modèle économique. C’est sur cette valeur des données que s’est créé par exemple la société DAWEX qui propose une plateforme sécurisée de monétisation et d’échange de données (marketing, commerciales, industrielles, financières, administratives…). La vocation de cette plateforme est extrêmement simple : faire se rencontrer « détenteurs » de données et acheteurs, et simplifier drastiquement les étapes qui permettent la commercialisation ou le partage de la donnée. La question de la valorisation des données peut parfois susciter des débats, en particulier quand il s’agit des données individuelles. En France, ceci est encadrée, notamment par la CNIL, et également par la réglementation RGPD. La diversification des sources de revenus Les sources de revenus potentielles des services numériques sont ainsi multiples : abonnement, à la transaction, publicité, freemium, valorisation des données, etc. L’innovation marketing L’innovation dans les services numériques est finalement assez rarement technique mais elle est avant tout marketing. Ainsi, Uber est un succès considérable qui ne repose sur aucune innovation technique particulière ; dans cet exemple, le design et la facilité d’usage sont des facteurs-clés de succès du service numérique. Le MVP Un service numérique est souvent lancé sur la base d’une offre réduite par rapport à la cible envisagée, mais suffisante pour tester le concept ; d’où la notion de produit minimum viable ou MVP en anglais (Minimum Viable Product) ; c’est ainsi l’essai directement sur le marché, et non des études plus ou moins théoriques, qui apportent les indications nécessaires à poursuite des développements et permettent ainsi une grande réactivité ainsi qu’une plus grande souplesse et flexibilité dans le développement du produit. Le succès n’est pas toujours immédiatement au rendez-vous, et plusieurs cycles d’essai peuvent être nécessaires avant de trouver les clefs du marché et d’assurer ainsi une rentabilité à la solution. Le modèle à rendement croissant La croissance est souvent à la fois une opportunité et une obligation. Les modèles d’affaires sont en effet souvent à rendement croissant. Le « leader » du marché créé par le service peut alors rapidement acquérir une position extrêmement dominante. C’est le concept bien connu du « winner takes all » . L’exemple qui vient évidemment tout de suite à l’esprit est celui des GAFAM (google, amazon, facebook, apple, microsoft) qui ont acquis chacun une position si dominante que nombreux sont ceux qui se demandent si de tels monopoles peuvent être mis à mal par la concurrence. Au-delà de la spécificité liée aux plates-formes numériques, quelques indications commencent à montrer que cette domination n'est pas sans recéler certaines faiblesses : demande de plus en plus forte de régulation, méfiance grandissante des utilisateurs, émergence de solutions techniques (exemple des adblocks notamment qui bloquent la publicité sur les navigateurs Internet), émergence de solutions alternatives parfois plus « locales ». La loi de Metcalfe L’effet réseau et la fameuse loi de Metcalfe sont souvent une caractéristique forte des services numériques. La Loi de Metcalfe dit simplement que plus il y a d'utilisateurs dans un réseau, plus ce réseau a de la valeur. Elle trouve notamment à s'appliquer dans n'importe quel réseau social (de type Facebook par exemple). Si vous êtes le seul inscrit, vous n'y trouvez aucune utilité, mais si toutes vos connaissances font également partie du réseau alors les fonctions de partage et d'échange commencent à prendre du sens, et le service de l’intérêt ! La loi de Metcalfe explique aussi que le contenu d'outils collaboratifs (Wikipédia ou OpenStreetMap par exemple) s'enrichit et devient plus efficace, de manière encore plus rapide que la vitesse de croissance du nombre des contributeurs. Les applications Un service numérique est une application, conçue pour un usage particulier (ex : Blablacar) ou une plateforme (ex : Appstore), qui permet le développement d’applications par des « sur- traitants », intermédiaires avec les utilisateurs finaux. A noter que d’un point de vue technique une plateforme donne accès à ses ressources (fonctionnalités, données…) par des API (Application Programming interface). Enfin, il ne faut pas oublier que l’innovation est uploads/Finance/ numerique.pdf
Documents similaires









-
25
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Nov 13, 2022
- Catégorie Business / Finance
- Langue French
- Taille du fichier 0.1319MB