Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrir
Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 1 I. Introduction Écrire la ville Par sa densité, mais aussi par son mouvement perpétuel, par ses métamorphoses continuelles, par ses tensions, la ville apparaît comme le lieu de tous les possibles et l’on ne s’étonne donc pas qu’elle soit aussi une source d’inspiration inépuisable pour la littérature. La ville, c’est le cadre par excellence du roman policier ou du roman noir, avec ses zones d’ombre, ses logiques meurtrières. C’est aussi le miroir du labyrinthe de la psyché ou le décor froid contre lequel se fracassent les espoirs individuels. À moins que ce ne soit le lieu de rencontres merveilleuses, l’espace de toutes les libertés. Ce peut aussi être l’Utopia, la cité idéale, qui permet de projeter le rêve d’un monde meilleur tout en dénonçant les travers contemporains. La ville c’est encore la relation complexe entre centre et périphérie, ce sont des espaces neutres, des non-lieux, des passages qui peuvent déboucher sur le vide ou se faire créateurs. Protéiforme, polysémique, contradictoire... la ville est prête à se charger de tous les symboles, à endosser toutes sortes de visions du monde. centre modernité périphérie mémoire Ville mouvement complexité fragmentation labyrinthe Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 2 II. Histoire littéraire A. Introduction La ville a sans doute toujours été une source d’inspiration. Mais au XIXe siècle, la révolution industrielle a entraîné un exode rural important et une forte urbanisation. La ville, avec ses usines, ses machines, ses gares puis ses voitures et plus généralement son effervescence et les nouveaux modes de socialité qu’elle impose, va devenir l’un des grands sujets de la littérature. Lieu de tous les espoirs, de tous les possibles, fascinante, séductrice, mais aussi cruelle, impitoyable aux faibles, lieu de perdition, la ville a tous les visages. Porteuse des cicatrices de l’histoire, elle est aussi lieu de mémoire par excellence, en même temps qu’elle ne cesse de s’adapter à la nouveauté. D’abord expression emblématique de la modernité, elle devient par la suite l’illustration des crises du sens de la postmodernité. B. Chronologie 1781-1788: Louis-Sébastien Mercier Le tableau de Paris Une succession de scènes présentées comme les observations d’un « piéton de Paris ». Ce genre d’écriture de la ville aura un grand succès. Deuxième moitié du XIXe siècle : Naissance de la modernité 1863-1864 : Charles Baudelaire Il définit la modernité (Le peintre de la vie moderne, 1863) et se passionne pour Paris, ville moderne par excellence (Le spleen de Paris, 1864). La ville est présentée à la fois comme séductrice et destructrice. 1895 : Émile Verhaeren Le poète belge flamand d’expression française, publie Les villes tentaculaires. Dans ces poèmes, l’auteur insiste sur la grandeur des villes, sur leur longue histoire, mais aussi sur leur monstruosité, leur capacité à broyer les hommes. Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 3 Début XXème siècle : Les mouvements des avant-gardes Futurisme, cubisme, simultanéisme Ces mouvements mettent en valeur l’esthétique de la juxtaposition et l’intérêt pour le mouvement. Le peintre Robert Delaunay réalise de nombreux tableaux représentant des monuments parisiens et notamment une série sur la Tour Eiffel. 1912 : Blaise Cendrars Poète qui s’est intéressé au futurisme et au cubisme sans y souscrire pleinement, publie Les Pâques à New York, recueil de poésies rédigé au sortir d’une nuit d’errance dans la ville. 1913 : Guillaume Apollinaire Il publie son recueil Alcools. Le premier poème, « Zone », est construit à partir d’une déambulation urbaine et semble constitué de collages : le passé et le présent se mêlent, les points de vue alternent brusquement, les images et les sons s’entrechoquent. Comme Les Pâques à New York de Cendrars, ce poème est l’un des plus emblématiques de la modernité. Les années 1920 : Romans des grandes villes modernes La grande ville moderne s’impose comme un motif incontournable en Europe et aux États-Unis. Elle inspire des romans qui bouleversent les règles du genre : Ulysse de James Joyce (1922), Manhattan Transfer de John Dos Passos (1925), Berlin Alexanderplatz d’Alfred Döblin (1929). Dans ces trois romans, c’est la ville qui dicte au texte sa structure. Les années 1920-1930 : Villes surréalistes Pour les surréalistes, la ville n’est pas une thématique sociale ni un paysage touristique, c’est le cadre où peut se produire l’improbable, le merveilleux. (André Breton, Nadja, 1928 ; Louis Aragon, Le paysan de Paris, 1926-1928) Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 4 Les années 1930-1950 : l’absurde 1932 : Louis-Ferdinand Céline Il publie Voyage au bout de la nuit. Dans ce roman la ville est à conquérir si on ne veut pas être broyé par elle. Ce roman préfigure les thèmes de la « littérature de l’absurde » qui se développera après la guerre : pessimisme et désespoir face à un monde qui semble dépourvu de sens. 1947 : Albert Camus Il publie La Peste. Dans ce roman, la ville d’Oran frappée par la peste devient un lieu clos, marqué par l’absurde. Elle apparaît comme une allégorie de toutes les villes du monde moderne. Les années 1950-1960 : Le nouveau roman. 1957 : Michel Butor Il publie L’emploi du temps. Dans ce roman, la ville imaginaire de Bleston prend les apparences d’un labyrinthe, dans lequel malgré la possession d’une carte, le personnage ne cesse de se perdre. La ville apparaît comme un texte complexe qu’il convient de déchiffrer en même temps que le processus de l’écriture évoque la construction d’une ville. À partir des années 1960 : l’OuLiPo L’OUvroir de LIttérature POtentielle est fondé en 1960 autour de François le Lionnais, Raymond Queneau, Georges Perec ou Jacques Roubaud. Leur principe d’écriture s’organise à partir de la contrainte, conçue comme un appel à la créativité. Les contraintes propres de la ville, sa dimension au moins en partie « mathématique » fascinent. (Raymond Queneau, Courir les rues, 1967 ; Georges Perec, Espèces d’espaces, 1974) En retour, de nombreux artistes oulipiens ont créé des projets en lien avec l’urbanisme (Troll de Tram à Strasbourg, 1994 ; Les Clous de l’Esplanade à Rennes, 2010). Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 5 Les années 1980-2000 : À partir des années 1980, les auteurs sont de plus en plus sensibles aux espaces de la postmodernité ou de l’hypermodernité, parfois appelés « non- lieux » : aéroports, zones de transit, centres commerciaux, etc. En outre, l’accent est mis encore davantage sur les liens entre écriture et architecture tandis que les formes sont souvent éclatées, fragmentées. Le thème de la banlieue et de ses exclusions prend également de l’importance. (Jean Echenoz, Olivier Rolin, Insa Sané, Wilfried N’Sondé, Patrick Chamoiseau). Dans Quitter Dakar de Sophie-Anne Delhomme, la ville apparaît comme un lieu mouvant et changeant. Elle est très fortement associée aux figures féminines qui la traversent : Manuela, Prudence, Viviane. C. Focus sur… Les villes dans le roman africain Les littératures africaines accordent également une place importante à la thématique de la ville. Des indépendances jusqu’aux alentours des années 1980, les villes des romans africains se conçoivent souvent dans leur opposition au village. Elles incarnent l’espoir d’une ville meilleure, d’une éducation de qualité, mais se révèlent souvent des lieux de perdition et d’acculturation. Aux douceurs de la vie villageoise, la ville oppose sa froideur, son anonymat, son caractère impitoyable comme le montrent les romans d’Abdoulaye Sadji (Maïmouna, 1965) ou de Cheikh Hamidou Kane (L’aventure ambiguë, 1971). À cet égard, on note que dans la littérature de cette période la grande ville africaine et Paris sont traitées sensiblement de la même manière. Il est également fréquent que la ville soit montrée comme le lieu d’opposition entre colonisateurs et colonisés ou entre élite africaine et couches populaires (Ferdinand Oyono, Le vieux nègre et la médaille, 1972 ; Thierno Monenembo, Les écailles du ciel, 1986). À partir en gros des années 1980, les représentations de la ville se font plus autonomes. Les romans explorent les possibles de la vie urbaine, insistent sur les nouveaux modes de vie qui s’y développent (voir par exemple les romans policiers africains). La ville est le lieu des jeux d’enfants ou de la découverte du cinéma (Alain Mabanckou, Demain, j’aurai vingt ans, 2010 ; Thierno Monenembo, Cinéma, 1997), l’espace d’une possible libération de la pression sociale (Fatou Diome, Le ventre de l’Atlantique, 2003) ainsi qu’un espace marqué par l’histoire et par le passage du temps. De ce point de vue, la ville peut aussi bien être associée à la nostalgie (chez Henri Lopès par exemple) que l’occasion de s’interroger sur le devenir de tout un pays, de toute une société. Copyright Éditions Didier 2012 Auteure : Myriam Louviot FICHE DE SYNTHÈSE Écrire la ville 6 Paris, la capitale française, découvre également de plus en plus sa face africaine (Alain Mabanckou, Black Bazar, 2009, Leonora Miano, Blues pour Elise, 2010, Marguerite Abouet et sa série de BD Aya de Yopougon, 2005-2010) D. Vers d’autres mondes Outre uploads/Geographie/ 01-fiche-de-synthese-ecrire-la-ville-b1-delhomme.pdf
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- Publié le Nov 15, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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