La mise en place du Transport Maritime à Courte Distance du plateau des Guyanes

La mise en place du Transport Maritime à Courte Distance du plateau des Guyanes à la Mer des Caraïbes : la perception des parties prenantes Sherline DUMANO Doctorante en Science de Gestion CRET-LOG Aix Marseille Université Aix-en-Provence France Rémy Louis BUDOC Docteur en Sciences de Gestion Directoire du Grand Port maritime Guyane France Claude FIORE Professeur des Universités CRET-LOG Aix Marseille Université Aix-en-Provence France Résumé — Ce travail de recherche tente d’analyser la perception des parties prenantes du Plateau de Guyanes à la Mer des Caraïbes, de disposer d’un service de Transport Maritime à Courte Distance (TMCD)1 dans leur périmètre géographique. En effet, dans un contexte de commerce extérieur déséquilibré entre les territoires du Plateau des Guyanes et ceux de la Caraïbe, il est nécessaire de développer des infrastructures et des modes de transport pour les désenclaver et favoriser des échanges commerciaux intra zone. En Guyane, ce déséquilibre est porté par l’importation essentiellement de la France et de l’Europe alors qu’elle est voisine du Brésil - 700 km - avec qui, elle ne dispose que de liaisons économiques illégales ou informelles et peu d’infrastructures pouvant faciliter des échanges entre eux. Les relations maritimes interrégionales étant à ces jours inexistantes, notre objectif est de croiser la vision et perception des acteurs les plus proches des activités économiques de notre projet, afin de déterminer si le TMCD est une solution crédible de transport et identifier les critères de viabilité du projet en vue de sa mise en œuvre et de sa prospérité. Mots clés — Transport Maritime à Courte Distance (TMCD) ; plateau des Guyanes, Caraïbe ; théorie des parties prenantes INTRODUCTION La Guadeloupe, et la Martinique – ainsi que Saint Martin et Saint Barthelemy – sont des Territoires Français et Européen (TFEA) de la Caraïbe. La Guyane française forme avec le Suriname, le Guyana et deux Etats du Brésil (Pará et L'Amapá), un grand ensemble sur le Plateau des Guyanes2, de 1 Il est à noter que le Short Sea Shipping (SSS), expression anglaise traduite Transport Maritime à Courte Distance (TMCD) en français, est aussi dite « Cabotage » par les professionnels du transport maritime. 2Le Plateau des Guyanes s’étend sur six pays (d’ouest en est) : Colombie, Venezuela, Guyana, Suriname, Guyane Française, et Nord Brésil. Dans cette étude, l’analyse se concentre sur les espaces maritimes de deux Etat Fédérés du Nord Brésil, l’Amapá et le Pará, une collectivité territoriale française et deux pays, le Guyana et le Suriname. 11 millions d’Сabitants – dont 8 millions pour le seul Etat du Pará – au sein duquel de nombreux acteurs socioéconomiques et politiques sont mobilisés et montrent un intérêt affirmé pour une nouvelle offre de transport par cabotage maritime intra zone, respectueuse des standards internationaux de sécurité. Ces territoires disposent des ressources naturelles, matérielles et immatérielles pour se développer, mais des facteurs comme la culture, les règles et lois propres à chaque pays les empêchent de trouver des accords durables pour travailler ensemble sur des projets synergiques, en établissant des infrastructures de transports et en favorisant des échanges commerciaux, dont les retombées pourraient bénéficier au développement local des territoires concernés. Malgré l’amplification de la mondialisation symbolisée par l’aРrandissement du Canal de Panama et son accès aux plus gros navires du monde, certains pays et/ou territoires restent en marge de cette ouverture internationale. Le manque d’infrastructures adaptées, est l’une des causes de cette marginalisation. En Guyane, l’infrastructure de transport fait partie des réclamations de la population : ce fut le cas notamment lors des mouvements sociaux de mars 2017, qui ont paralysé le territoire3. C’est une problématique que l’Etat français et les collectivités locales prennent au sérieux et pour laquelle des solutions sont recherchées, en commandant notamment des rapports et études, axés sur les ressources comme les ports, acteurs incontournables du développement local. En effet, dans un rapport gouvernemental sur « Les ports ultramarins au carrefour des échanges mondiaux », BUDOC [1] explique qu’il y a une réelle volonté politique de développement des territoires ultramarins grâce à leurs ports, lieux incontournables de passage des flux économiques vitaux tant à l’international, qu’au niveau interréРional voire intra 3Il y a un seul axe de transport principal qui desserve les principales villes (Cayenne-Matoury) et donc quand les grévistes le bloquent, le territoire est paralysé. régional. Ce rapport recommande, entre autres, la mise en place d’un dispositif de Transport Maritime à Courte Distance (TMCD) pour la prospérité des échanges intra zone. Face à la mondialisation et à la globalisation du transport, les stratégies maritimes et portuaires d’accueil des territoires ultramarins, y compris dans les ports secondaires, doivent évoluer afin de conserver leur attractivité et continuer à irriРuer l’économie domestique. À défaut, le risque de perdre des escales, de rencСérir les importations et à termes, de pénaliser l’économie de ces territoires, devient plus que probable. Si la question de l’attractivité des Рrands ports français est importante en métropole, elle est bien souvent vitale dans les territoires ultramarins et plus particulièrement pour les insulaires, très dépendants du transport maritime : les grands ports de commerce y sont donc des éléments essentiels de compétitivité. C’est dans ce contexte que le GPM-Guyane, a proposé le thème de recherche : « le Transport Maritime à Courte Distance (TMCD) et le développement territorial ». Ce projet doit assumer efficacement une double fonction : loРistique pour contribuer à la prospérité de l’économie et stratégique pour faire des territoires ultramarins de la façade Atlantique, un espace d’influence économique et de croissance, en lien avec leur environnement proche. En effet, comme la plupart des pays insulaires, les territoires de l’étude n’écСappent pas à cette règle de dépendance du transport maritime et de leurs ports. Tableau 1 : Trafics des GPM par type de marchandises (tonnes) Source : GPM Guyane L’analyse typologique4, de leur clientèle que nous avons réalisée (grandes masses) montre que ces ports accueillent 95 % des marchandises environ, destinées à la consommation locale. Par exemple, concernant le port de Dégrad-des- cannes/Pariacabo5, en Guyane, nous avons constaté que plus de 54% du trafic global s’élève à 805 100 tonnes brutes en 2016, concerne le fret conteneurisé. La ligne maritime hebdomadaire NEFGUI (ligne transatlantique opérée par CMA-CGM - 4 navires - et MARFRET - 2 navires -) assure, via les Antilles et Trinidad TobaРo, l’importation de marcСandises diverses conteneurisées et conventionnelles. Ces navires poursuivent ensuite leur route 4Analyse de documents mis à notre disposition par le GPM-Guyane 5Le GPM-Guyane regroupe les installations de Dégrad des Cannes à Rémire- Montjoly dans l’Ile de Cayenne et celles de Pariacabo à Kourou (confiées en Рestion au Centre Spatial Guyanais pour les transports de l’industrie spatiale). vers la côte est du Brésil pour remonter au nord de l’Europe via l’EspaРne. La ligne régionale GUYANAS Antilles-Plateau des Guyanes, opérée par CMA-CGM - 2 navires - assure une escale par semaine au port de Guyane. Aucun navire n’assurant un transport « retour » du Brésil via la Guyane et les Antilles, un projet de TMCD revêtirait une importance capitale pour l’approvisionnement des populations des Etats brésiliens du Pará et de l’Amapá, ceux du Suriname et du Guyana ainsi que des territoires de la Guyane et des Antilles françaises. Ce contexte géographique et géopolitique exceptionnel, regroupe des territoires certes voisins mais très différents (niveau de vie, ressources, économies, culture), ayant peu d’écСanРes économiques entre eux, mais néanmoins, une volonté de proposer un service complémentaire aux lignes existantes. Ce travail de recherche est inédit au niveau de l’Outre-mer et la problématique abordée dans le périmètre de l’Amazonie jusqu’à la Caraïbe, nous questionne d’emblée sur la perception par les parties prenantes de ce projet de Transport Maritime à Courte Distance (TMCD) en Outre-mer. Pour répondre à cette problématique, nous ferons, d’abord au niveau théorique, une revue de littérature afin de comprendre les contours du concept de TMCD. Puis, grâce à la théorie des parties prenantes (stakeholder theory) de FREMAN [2], nous identifierons les acteurs susceptibles d’impacter ou non la décision de mettre en place ce mode de transport à priori adapté aux contraintes géographiques de cette partie du monde. Enfin, l’analyse des résultats permettra de démontrer si le TMCD peut être un mode de transport viable pour le développement économique des territoires concernés par ce projet. I. LE TRANSPORT MARITIME À COURTE DISTANCE (TMCD) La revue de littérature que nous avons effectuée, permet de constater que les définitions du TMCD sont partielles (prise en compte de quelques aspects), ambiguës et ne permettent pas vraiment de comprendre le concept dans sa globalité. En effet, MUSSO et MARCHESE [3], ont relevé quelques ambiguïtés dues à l'utilisation de différents critères de définition tels que des critères géographiques, commerciaux et juridiques entre autres. Dans cette section, une définition du TMCD sera proposée de façon concrète et applicable compte tenu du contexte de notre étude. Au niveau académique, BALDUINI [4] définit le concept de TMCD comme : « le trafic entre les ports du même pays, incluant parfois des ports de frontière aux coffins avec d’autres pays ». Quelques années plus tard, MARLOW et al. [5], vont l’aborder en tant uploads/Geographie/ 2018-plateau-des-guyanes-a-la-mer-des-caraibes.pdf

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