1 Mon voyage autour du monde Jean-Baptiste Lagacé sous le pseudonyme Philéas La
1 Mon voyage autour du monde Jean-Baptiste Lagacé sous le pseudonyme Philéas Lachance Revue L’Oiseau bleu, Montréal, 1921 2 Exporté de Wikisource le 25 janvier 2021 3 L’OISEAU BLEU — Montréal (Roman-feuilleton publié de janvier 1921 à mai 1922.) MON VOYAGE AUTOUR DU MONDE ROMAN JEUNESSE PAR PHILÉAS LACHANCE 4 TABLE DES MATIÈRES (ne fait pas partie de l’ouvrage original) Le départ De Montréal à Rigaud De Rigaud à Ottawa D’Ottawa à Toronto Aux chutes du Niagara Sur les grands lacs Sault-Sainte-Marie et Lac Supérieur Au Lac des bois Dans la prairie Dans les montagnes Sur le Pacifique et au Japon Chez les chinois et les philippins En Australie et aux Indes Inde et Perse En terre sainte De Rome à Montréal 5 LE DÉPART Combien d’entre-vous, fillettes et garçonnets qui lisez la Revue de la Jeunesse, aimeraient à faire un voyage autour du monde ? N’est-ce pas qu’il serait intéressant de s’en aller sur ce globe qui mesure près de deux cent millions de milles carrés, à travers des régions dont la physionomie, les productions et les climats sont si divers d’un point à l’autre : sur ce globe qui porte l’humanité, c’est-à-dire l’étonnante variété des races humaines, différant entre elles non seulement par la taille et la couleur de la peau, mais par les usages, les langues, les croyances, et qui nous offre cependant la plus admirable preuve que ce qui est si divers peut avoir une seule et même origine ? J’entends des milliers de voix qui me disent : « Moi, moi ! » Déjà vous croyez arrivé le moment du départ. Enfants, vous quitteriez ainsi, d’un cœur léger, vos bons parents, vos amis, votre école avec celles ou ceux qui vous y instruisent, tout, enfin, pour aller courir les aventures d’un long et périlleux voyage ! Car on a beau dire que les 6 moyens de se déplacer ne laissent aujourd’hui que peu de dangers, il va sans dire que le risque existe toujours. Cet empressement à partir me plaît fort ; j’y vois la preuve que vous êtes de bonne race, que vous appartenez à une nation qui a compté beaucoup de voyageurs justement célèbres, et qu’enfin vous affichez des dispositions qui montrent que vous n’avez pas peur de la vie. Mais vous voilà songeurs ; d’ici, je distingue vos gestes d’hésitation ; et vous vous dites, tout pensifs : « N’est-il pas possible de voyager en esprit ? » À la bonne heure. Loin de renoncer au projet de vous laisser voir un peu du monde extérieur, je m’empresse de vous raconter les circonstances dans lesquelles j’ai fait mon voyage autour du globe, alors que j’avais votre âge. Au printemps de 1895, mon père fut chargé par le gouvernement de notre province de faire un long voyage d’études. Il n’était pas seul : l’accompagnaient un ingénieur, un naturaliste et un peintre. À douze ans, c’est bien tôt pour voyager de la sorte. Suffira-t-il de vous dire que maman n’était plus de ce monde et que papa tenait à faire lui-même, autant que possible, mon éducation. D’ailleurs, ma robuste santé allait me permettre d’accomplir ce voyage sans funestes conséquences. J’étais décidément trop jeune pour comprendre parfaitement le but de la mission que mon père et ses compagnons de voyage allaient remplir. Mais à en juger par 7 tous les lieux que nous avons visités et les personnages que mon père a consultés, j’en conclus que nous n’étions pas de simples touristes, et que nous ne voyagions pas toujours par les routes les plus fréquentées. Pendant les deux années que ce voyage a duré, j’ai écrit plusieurs fois à mes tantes et à des amis qui m’avaient instamment recommandé de ne pas les oublier. À l’exemple du chef de la mission, j’ai pris des notes et des croquis. C’est de tout cela que j’aide mon souvenir aujourd’hui pour vous raconter cet inoubliable voyage. Et maintenant que nos préparatifs sont terminés, vous riez, vous riez de bon cœur ! Mais où allons-nous ? — Sous tous les climats, à travers toutes les latitudes, par les villes et les solitudes, sur les plaines et les plateaux, à travers les exubérantes forêts et les brûlants déserts, dans les vallées et jusqu’au sommet des montagnes, emportés par la locomotive, en voiture, à dos de cheval, allant même à pied. Nous franchirons l’océan, les golfes, et nous naviguerons sur les fleuves et les lacs, tour à tour convoyés par des navires les plus variés de forme et de dimension. Parfois nous mènerons la vie que mènent les peuples dont nous visiterons les pays presque sauvages. Nous humerons les brises, nous sentirons les fleurs, nous goûterons les fruits de tous les climats. En un mot, nous ferons de la géographie vivante, en tâchant de comprendre pourquoi il y a une si grande diversité dans les choses et chez les humains. Ces émouvants spectacles de la nature, ces souvenirs, ces notions acquises à travers le vaste Canada et chez les 8 peuples étrangers nous apprendront à mieux aimer Dieu, auteur, maître et dispensateur de tant de merveilles. Et voilà que chaque livraison de la Revue de la jeunesse va vous donner une tranche de ce récit, qui est fait à votre intention. Cette revue, qui veut avant tout vous être agréable et contribuer à votre instruction, n’exige en retour qu’un léger sacrifice. De temps à autre, au cours du voyage, vous enverrez à M. le directeur une mappe-monde en esquisse, sur laquelle vous aurez tracé le chemin parcouru. Compagnes et compagnons de voyage le moment est venu de dire adieu à tous les êtres que vous chérissez. Déjà sonne l’heure du départ. 9 DE MONTRÉAL À RIGAUD 15 mai 1895, gare Windsor, 8 heures du matin. — Cinq voyageurs causent sur le quai de la gare, avec animation et de bonne humeur, en attendant le « tout-le-monde-à-bord », qui me semble tarder. Ce groupe comprend ceux qui vont faire le curieux voyage que j’ai entrepris de vous raconter. Papa m’a présenté à ceux qui deviennent nos compagnons de route : M. Louis Séverin, ingénieur, M. Jean Bernard, naturaliste, et M. Octave Lebrun, artiste-peintre. Chacun d’eux fait montre d’une parfaite urbanité et témoigne un grand respect pour le chef de la mission. Pendant que la locomotive égrène ses dang dong empressés et nous emporte vers l’ouest, je salue ma ville natale, tout en regardant le mont Royal s’abaisser à l’horizon. De quelque côté et en quelque saison que l’on te considère, ô Ville-Marie, fondation des Maisonneuve, des Lambert Closse, des Jeanne Mance, des Marguerite Bourgeoys, des Youville, des Viger et des McGill, tu demeures intéressantes : le jour par la féconde activité de tes magasins et de tes usines, par la beauté de tes monuments et l’étendue de tes parcs ; le soir par ton 10 fourmillement de vie, sous l’abondance de tes étoiles électriques. Au revoir, tours crénelées de Notre-Dame, flèches altières de Saint-Jacques, de Saint-Pierre, de Sainte-Cunégonde et de Saint-Henri ; étincelantes coupoles de Saint-Jean-Baptiste et de la cathédrale. C’est lorsqu’on se sépare des bonnes choses qu’on en connaît mieux le prix. Nous passons près de Lachine, petite ville industrielle, d’où commence le canal qui conduit Les corrections sont expliquées en page de discussion à Montréal, en permettant d’éviter les grands rapides qui barrent ici le Saint-Laurent. Papa me raconte les circonstances du lugubre massacre que les Iroquois firent des habitants de Lachine, dans la matinée du 5 août 1689. En poussant leurs terribles cris de guerre, ils enfoncent les portes à coups de haches, font cent cinquante victimes, allument l’incendie et emmènent un grand nombre de prisonniers qu’ils tortureront dans leur captivité. Un autre souvenir, moins lugubre celui-là, se rattache à Lachine. Non loin de la ville on peut voir des ruines : ce sont celles de la maison qui fut habitée par Cavelier de la Salle, le futur découvreur du Mississipi et de la Louisiane. Mon père me fit observer, à propos de cet audacieux voyage, combien la route du Saint-Laurent et des grands lacs offre de facilités pour pénétrer sur tout le continent, ce qui ne diminue en rien le courage persévérant dont cette explorateur a fait preuve. Salut à une autre villette : Sainte-Anne-de-Bellevue. C’est ici qu’au siècle passé commençait ou finissait l’existence pleine de dangers des canotiers, des bûcherons et des « hommes de cages » qui firent la fortune des traitants de pelleteries et des exploiteurs des forêts de pins et de chênes sur l’Outaouais 11 supérieure. M. Lebrun m’a fait observer la modeste église où tant de voyageurs, soit en partance, soit au retour, venaient invoquer leur patronne tutélaire. Sortis de l’île de Montréal, nous longeons la rive droite de l’Outaouais en passant vis-à-vis Oka, remarquable par sa vieille mission des Sulpiciens auprès des Algonquins-Iroquois, son calvaire au sommet de la montagne, et son monastère de Trappistes : Notre-Dame-du-Lac. Et voici Rigaud, logée au pied de sa montagne. Elle porte une curiosité naturelle que nous avons pris soin de visiter et que M. Bernard uploads/Geographie/ 6-mon-voyage-autour-du-monde.pdf
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- Publié le Aoû 14, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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