RECAMP Le concept français de renforcement des capacités africaines de maintien
RECAMP Le concept français de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix ou l’incidence de l’ONU sur la politique africaine de la France. Mémoire de géopolitique du chef de bataillon Renaud DEVOUGE dans le cadre de l’étude dirigée « les organisations internationales et la prévention des crises » Directeur : Mr Thierry TARDY Fondation pour la Recherche stratégique Avril 2001 - 2 - FICHE DE PRESENTATION 1. RECAMP, le concept français de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix ou l’incidence de l’ONU sur la politique africaine de la France 2. Chef de Bataillon (Terre) Renaud DEVOUGE 3. 5 Avril 2001 4. Division D 5. Mémoire de géopolitique La France a conservé des relations privilégiées avec ses anciennes colonies africaines, devenues après les indépendances le « pré carré » français. Suspectée de néocolonialisme, condamnée pour ses interventions en Afrique par la communauté internationale, la France a, au milieu des années 90, réorienté son action vers un partenariat euro-africain qui trouve son aboutissement dans le concept RECAMP et qui lui permet de conserver sa place en Afrique, et même d’affirmer son influence, en toute légitimité. 6. Mots clés : RECAMP, ONU, OUA, CEDEAO, SADC, CEAC, Afrique, France, Europe, États-Unis, Opérations de maintien de la paix. - 49 - Le concept français de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix ou l’incidence de l’ONU sur la politique africaine de la France. SOMMAIRE Introduction 1ÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DE LA GESTION DES CRISES PAR L’ONU DANS LES ANNÉES 90 ET SON IMPLICATION SUR LE CONTINENT AFRICAIN LES SUCCÈS DIPLOMATIQUES FRANÇAIS FACE À L’INEXPÉRIENCE ONUSIENNE UNE GESTION DES CRISES AMENDÉE PAR L'ONU DANS LA DÉCENNIE 90 L'ONU À LA RECHERCHE D'UN PARTENARIAT AVEC LES ORGANISATIONS RÉGIONALES AFRICAINES 2ÈME PARTIE : LA RENOUVEAU, CONFORME AUX ORIENTATIONS DE L’ONU, DE LA POLITIQUE AFRICAINE DE LA FRANCE DE LA FIN DE L’INTERVENTIONNISME AU PARTENARIAT UNE DÉMARCHE COHÉRENTE AVEC CELLE DES ALLIÉS CONSERVER UN LIEN PRIVILÉGIÉ AVEC L’AFRIQUE CONCLUSION - 4 - Introduction Le déploiement de la force interafricaine de surveillance des accords de Bangui (MISAB), relevée quelques mois plus tard par la mission des Nations Unies en République Centrafricaine (MINURCA), mettait fin à une longue période de crise interne, qui avait vu se développer trois mutineries successives d'une partie de l'armée centrafricaine entre 1996 et 1997. Cette force de 500 hommes, armée par des contingents du Burkina Faso, du Gabon, du Mali, du Sénégal et du Tchad et du Togo, fut l'un des premiers exemples de la prise en compte directe par les pays africains de la nécessité de gérer une crise. Cet événement n'est pas l'expression d'une prise de conscience brutale d’une nouvelle dimension africaine, mais la preuve de la transformation progressive des relations des pays africains entre eux d’abord, avec les pays extérieurs au continent noir ensuite. D'autres manifestations de cette évolution ont eu lieu depuis la fin des années 1980, avec la participation de pays africains à la guerre du golfe, aux côtés des nations occidentales, et la prise en compte de la crise du Libéria par l'ECOMOG. Djib Diédhiou, éditorialiste au quotidien sénégalais le Soleil le remarquait en 1998, lorsqu'il écrivait : « la légion ne sautera plus sur Kolwezi. Quant aux Marines, ils n'iront plus crapahuter à Mogadiscio, sous les caméras des chaînes de télévision rameutées pour la circonstance. Est-ce la fin de l'interventionnisme ? (...) Plus question pour les occidentaux d'envoyer un seul de leurs concitoyens mourir à des milliers de kilomètres de son pays au nom de "la défense des libertés". (...) Et comme pour adhérer au slogan "l'Afrique aux Africains", ils ont décidé de laisser ces derniers régler eux-mêmes leurs conflits. » Bien sûr, ce constat du journaliste est outrancier. Mais il indique assez clairement avec quel état d’esprit une partie de l’opinion publique africaine accueille les bouleversements récents qui ont marqué les relations entre les pays occidentaux et les pays africains, et plus encore les relations franco-africaines. Car la France est bien au cœur du débat, grâce à – ou à cause de –sa position longtemps dominante parmi les nations occidentales impliquées en Afrique. Sur le plan militaire, en particulier, le redéploiement de ses forces dû à la professionnalisation décidée en 1996 a modifié profondément le paysage diplomatique africain, tout autant que la diminution très sensible de la coopération, civile ou militaire. L’arrivée dans les cercles politiques d’une nouvelle génération de décideurs, d’autant moins concernés par l’Afrique qu’ils se sentent attirés par l’ouverture de l’Europe de l’Est, a augmenté le sentiment de changement d’époque. C’est au moins la perception qu’en a Béchir Ben Yahmed, observateur depuis plus de quarante ans des relations franco-africaines lorsqu’il écrit : « Ni Giscard, qui courtisait l’Afrique et les Africains - 49 - bien avant d’être président – il pensait même qu’il ne pourrait le devenir qu’en étant « africain » - , ni Mitterrand qui, lui, se considérait comme un Africain d’honneur, ne songèrent à rogner la place de l’Afrique en France et de la France en Afrique, ou à diminuer l’interdépendance et l’interpénétration. Il faudra attendre Édouard Balladur (1993) puis Hubert Védrine (1997) pour que la France, sans le dire expressément, tire un trait sur sa dimension africaine. Alors, l’Afrique apparaîtra peu à peu, non pas comme un atout, mais comme un boulet1. » Les relations internationales ne se font heureusement pas que dans les médias, et l’action de la France en Afrique n’est pas aussi déliquescente que les éditorialistes veulent bien le laisser entendre. Bien au contraire, elle est marquée depuis quelques années par une réorientation importante dans la mesure ou la France tente, avec succès, de ne plus jouer cavalier seul et d’impliquer ses partenaires européens sur un continent ou beaucoup d’entre eux pensaient n’avoir rien à apporter. Le concept de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP) est très représentatif de cette évolution, d’autant plus qu’il s’inscrit dans un mouvement général initié par les Nations Unies. En effet, les crises très importantes qu’ont connu tant l’Afrique que les Balkans depuis la chute du mur de Berlin ont montré à quel point il était vain de croire à l’établissement d’un nouvel ordre mondial exempt de tout conflit d’intérêt. Elles ont montré également l’inadaptation relative des structures internationales héritées de la guerre froide, et la nécessité de les rénover. Ce travail de réflexion et de transformation a été accompli par les Nations Unies et les principales organisations régionales, comme l’OUA. La France s’en est inspirée pour rénover elle aussi les fondements de sa coopération avec l’Afrique, lui donnant davantage de relief en élargissant ses perspectives. 1 Éditorial de Jeune Afrique, n° 2089, semaine du 27 mars au 2 avril, édition internationale. - 6 - 1ère Partie : l’évolution de la gestion des crises par l’ONU dans les années 90 et son implication sur le continent africain I.1. Les succès diplomatiques français face à l’inexpérience onusienne I.1.1. Une décolonisation française assez bien réussie Le mouvement vers l’indépendance Contrairement à une idée largement répandue, l'accession à l'indépendance des colonies françaises au tournant des années soixante s'est déroulé en bon ordre, et dans une compréhension mutuelle réelle entre les nouveaux États et l’ancienne métropole. Les épisodes de la guerre d'Indochine et de la guerre d'Algérie, pour dramatiques qu'il fussent, n'ont pas été la règle générale. Cette décolonisation a été l'aboutissement d'une dynamique initiée dès 1947 au moment de l'indépendance de l'Inde, et traitée dans un contexte international assez tendu dans lequel la nouvelle Organisation de Nations Unies tenait une place importante. Jusqu'en 1954, la France avait été épargnée par les critiques des pays du bloc de l'Est, alors que le Royaume Uni et les Pays Bas étaient, eux, fortement mis en cause. La crise de Suez, au cours de laquelle la France, la Grande Bretagne et Israël intervinrent militairement en Egypte sonna le glas de l'immunité de la France dans le cercle des Nations Unies. Ce mouvement général vers l’indépendance a généré une vague de contestation parmi les pays africains qui avaient adhéré le 28 septembre 1958 au principe de la Communauté souhaitée par le général de Gaulle. En 1958, la Guinée, sortie de la Communauté, entrait à l'ONU et devenait le premier pays francophone d'Afrique à intégrer l'Organisation. En montrant l'exemple, elle entraînait derrière elle les autres Etats de la Communauté et, en 1960, la plupart des nouveaux Etats africains étaient admis aux Nations Unies. Ils ne coupaient pas pour autant les ponts avec l'ancienne puissance coloniale, non plus qu'ils ne déniaient à la France son autorité. Au contraire, ces nouveaux pays revendiquaient l'appui de la France pour les aider à s'affirmer comme des partenaires à part entière de la communauté internationale. Tous les délégués africains de l'assemblée des Nations Unies souhaitaient rendre hommage à l'ancienne métropole « et à son chef prestigieux, le général de Gaulle, qui a su comprendre à temps que nous avions atteint - 49 - le moment de la maturité et de l'indépendance1. » Pour autant, cette position favorable à la France, si elle est partagée par uploads/Geographie/ afrique-europe-onu.pdf
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- Publié le Jui 14, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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