ANTHROPOLOGIE DU NOMADISME Author(s): Françoise Aubin Source: Cahiers Internati
ANTHROPOLOGIE DU NOMADISME Author(s): Françoise Aubin Source: Cahiers Internationaux de Sociologie, NOUVELLE SÉRIE, Vol. 56 (Janvier-juin 1974), pp. 79-90 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40689671 . Accessed: 07/09/2014 20:26 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers Internationaux de Sociologie. http://www.jstor.org This content downloaded from 105.158.215.14 on Sun, 7 Sep 2014 20:26:03 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions ANTHROPOLOGIE DU NOMADISME par Françoise Aubin RÉSUMÉ Pour le sociologue, une société de pasteurs nomades n'est qu'une variante de société rurale, par opposition aux sociétés urbaines et industrialisées. Le nomadisme est défini par trois éléments, nécessaires et suffisants à son existence : 1) Une unité humaine : le groupe de nomadisalion, à mettre en parallèle avec le village ou la communauté rurale ; 2) Le bétail, qui est, comme la terre chez les sédentaires, le moyen de production essentiel, le principal bien d'appropria- tion, d'accumulation et de discrimination sociale ; 3) Le parcours de noma- disation, qui, d'un point de vue sociologique, doit être comparé au matériel agri- cole du paysan. Lorsqu'il subit des modifications dans l'une de ses composantes (itinéraire, rythme saisonnier, amplitude annuelle du mouvement), celles-ci sont équivalentes aux amendements technologiques dans le domaine de l'agriculture. En conclusion, le développement de la grande agriculture en milieu nomade a un effet sociologique similaire à l'industrialisation en pays agricole. SUMMARY To a sociologist, a society of nomadic shepherds is no more than a variation of rural society, in contrast with urban and industrial societies. Nomadism is defined by three factors necessary and sufficient for its existence : 1) Human unity - the group of nomadization, to be put in parallel with the village or the rural community ; 2) Livestock, which is, like earth to the settlers, the essential means of production, the main asset of appropriation, accumulation and social discrimination ; 3) The route of nomadization, which, from a sociological point of view, must be compared to the agricultural material of the peasant. When it undergoes modifications in one or other of its elements (itine- rary, seasonal rhythm, extent of annual movement), these are equivalent to technological amendments in the domain of agriculture. In conclusion, the development of large-scale agriculture in a nomadic environment has a sociological effect similar to industrialization in an agri- cultural country. Pour l'historien, une société de pasteurs nomades s'oppose, par l'ensemble de son destin et de ses caractéristiques, à une société d'agriculteurs sédentaires. Pour le sociologue, au contraire, elle doit n'en être qu'une variante, face à la société urbaine et à la société industrialisée (1). En effet, sans vouloir nier la réalité des antagonismes qui, au cours des siècles, ont jeté les nomades (1) Nous donnons ici le texte élargi d'une communication présentée en mai 1973 à un symposium organisé par TUnesco à Ulan-bator, sur Le rôle des peuples nomades dans les civilisations d'Asie centrale (la version brève de notre contribution devant paraître en russe et en mongol dans les actes du Symposium publiés par les soins de l'Académie des Sciences de Mongolie). - 79 - This content downloaded from 105.158.215.14 on Sun, 7 Sep 2014 20:26:03 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions FRANÇOISE AUBIN des steppes contre leurs voisins sédentaires, sans prétendre négliger les incompatibilités irréductibles qui opposent les exi- gences de leurs deux modes de vie, l'enquêteur placé sur le terrain constate assez vite combien, d'un point de vue pratique, la connaissance des mécanismes propres au nomadisme peut enrichir la typologie du monde rural, et, à l'inverse, combien la problé- matique posée par ce dernier aide à s'interroger sur la civilisation nomade. Ainsi, de la diversité qu'ont revêtue les sociétés nomades dans le temps et dans l'espace (1), prenons le cas des Mongols - et, particulièrement des Mongols aux xixe et xxe siècles ; en parlant de sociétés paysannes, ayons-en présentes à l'esprit deux formes spécifiques : celle de l'Europe occidentale à l'âge préindustriel, et celle de la Chine traditionnelle. Et ne perdons pas de vue que le parallélisme que nous voulons esquisser n'est qu'un schéma opératoire, destiné à suggérer de nouvelles ouver- tures de réflexion théorique, et nullement une comparaison rigide, prétendant avoir valeur entre tous les peuples nomades et tous les peuples sédentaires. I. - Les composantes du nomadisme et du sédentarisme Comme on le sait, le nomadisme peut être défini par trois éléments principaux, nécessaires et suffisants à son existence : 1) Une unité humaine (le groupe de nomadisation) ; 2) Liée à un troupeau ; 3) Et affectée dans sa totalité d'un déplacement périodique selon un itinéraire fixe. Si l'on dresse ces facteurs en un tableau dont la deuxième face est constituée par le monde sédentaire, il semble que l'on puisse établir la série de corres- pondances logiques suivantes : Facteurs constitutifs Milieu nomade Milieu paysan Facteur social Groupe de nomadisation Village ou commu- nauté rurale Facteurs économiques : 1) Capital Bétail Terre 2) Produit Accroît et produits de Fruits de la terre l'élevage Facteur instrumentaire . Aire parcourue au rythme Matériel agricole et des saisons selon un iti- semences néraire déterminé (1) On trouvera un exemple de la variété des situations possibles dans un intéressant recueil, consacré à un thème voisin de celui qui nous concerne - le développement de la notion d'Etat au contact des nomades et des séden- taires : Das Verhältnis von Bodenbauern und Viehzuchtern in historischer Sicht (Institut für Orientforschung, Veröffentlichung, 69), Berlin, Akademie- Verlag, 1968, 233 p. ; et un parallèle entre nomadisme des déserts chauds (ou arabe) et nomadisme des déserts froids (ou turco-mongol) dans la fine analyse des Fondements géographiques de Vhistoire de V Islam due à Xavier de Planhol, Paris, Flammarion, 1968, pp. 39-46. - 80 - This content downloaded from 105.158.215.14 on Sun, 7 Sep 2014 20:26:03 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions ANTHROPOLOGIE DU NOMADISME A) Le groupe humain Dans l'étude historique d'un système de nomadisation, les éléments humains sont, cela va de soi, les plus faciles à déter- miner. On sait bien, par exemple, qu'au xne siècle, les Mongols nomadisaient en groupes importants, les küriyen (1), alors que dans les trois ou quatre premières décennies du xxe siècle, le groupe typique de nomadisation en Mongolie extérieure, le xot-ajl (ou xoton) ne comptait que quelques familles (2), de même que le sûr1 dans le système actuel des coopératives d'éle- vage de la République populaire de Mongolie (3). Il est bien connu aussi que le groupe de nomadisation mongol est tradi- tionnellement fondé sur un lien de parenté agnatique - la disso- ciation du voisinage et de la parenté dans le xot-ajl (4) et plus encore dans le sur' étant une tendance récente. Lorsqu'on met en parallèle société nomade et société séden- taire, on est tenté de rapprocher le groupe de nomadisation traditionnel, comme le xot-ajl, des communautés familiales du monde sédentaire (du type « communauté taisible » de l'ancienne France), et le groupe de nomadisation moderne, le sûr1, d'une ferme paysanne. Cette comparaison est légitime, dans une cer- taine mesure, pour éclairer les principes de l'organisation interne du groupe, et spécialement son organisation du travail. Mais pour appréhender dans sa totalité et dans son évolution continue le système du nomadisme, il apparaît bien plus fructueux de (1) Sur le küriyen, voir B. Vladimirtsov, Le régime social des Mongols. Le féodalisme nomade, trad. Michel G arso w, Paris, Adrien-Maisonneuve, 1948, xviii + 291 p. (pp. 44-45). (2) L'essentiel de la bibliographie sur le xot-ajl (en russe xoton) est en langue russe. Ainsi, on trouvera d'excellentes généralités sur le groupe de nomadisation en région de montagne par T. Trofimov, Xangajskie kocev'ja (Les territoires de nomadisation du xangai), dans Sovremennaja Mongolija (La Mongolie contemporaine), Ulan-bator, 1934/1 (=n° 4), pp. 36-53; des statistiques sur la composition du xot-ajl dans ces mêmes régions par A. Simukov, Xotong (Les xoton), op. cit., 1933/3, pp. 18-32, et par N. B. Bolo- don, K voprosu o xotonax (A propos des xoton), op. cit., 1938/2 (= n° 27), pp. 76-89 ; sur la composition du xot-ajl en région de gobi par A. Simukov, Mater ialy po koöevomu by tu naselenija M.N.R. (Matériaux sur le mode de vie nomade de la population de la R.P.M.), op. cit., 1935/6 (= n° 13), pp. 89-104 ; une discussion des théories émises sur le xot-ajl par S. Belen'kij, K voprosu o xotonax (A propos des xoton), op. cit., 1934/2 (= n° 5), pp. 114-117 ; etc. (3) La bibliographie en langues mongole et russe sur le mouvement ae coopération rurale en R.P.M. est considérable. On trouvera un condensé de ces études uploads/Geographie/ anthropologie-du-nomadisme-pdf.pdf
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- Publié le Jul 30, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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