CHAPITRE V Etude expérimentale et modélisation de l’évaporation dans un capilla

CHAPITRE V Etude expérimentale et modélisation de l’évaporation dans un capillaire L’évaporation d’un liquide contenu dans un milieu poreux se différencie de l’évaporation d’un milieu continu par la division de l’interface liquide-gaz en un ensemble de ménisques dispersés au sein du milieu. Ces différents ménisques sont influencés les uns par les autres au travers des conditions dans les trois phases. L’étude du comportement d’un ménisque situé au sein d’un pore est donc fondamentale pour permettre l’étude globale de l’évaporation dans le milieu poreux. Dans ce chapitre, nous nous intéresserons donc aux phénomènes à l’échelle du pore au travers d’une analogie avec un capillaire cylindrique (comme illustré sur la figure V.1). Cette approximation, bien que fortement simplificatrice, permet d’évaluer le comportement du mé- nisque au cours de l’évaporation dans une situation idéalisée. Nous pouvons ensuite discuter les différentes hypothèses simplificatrices pour tirer des tendances plus générales. Nous commençons par présenter les principaux phénomènes impliqués. Ensuite, nous décri- vons le dispositif expérimental permettant le suivi fin de l’interface à l’aide d’un interféromètre Mach Zehnder [91]. Les résultats sont ensuite exploités pour valider différents modèles. Dans un premier temps, nous négligeons les spécificités des régions proches de la paroi pour nous limiter à un modèle de transport global dans le capillaire. Dans un second temps, nous les incluons dans une version simplifiée du modèle global. L’objectif est d’en déduire des lignes directrices d’améliorations possibles pour les modèles d’évaporation en milieux poreux. Les résultats de ce chapitre reprennent, modifient et approfondissent ceux obtenus lors de notre DEA [92]. V.1 Phénomènes impliqués V.1.1 Diffusion de vapeur dans un gaz inerte L’évaporation dans un tube fin est utilisée depuis longtemps comme méthode de mesure du coefficient de diffusion binaire d’une vapeur dans un gaz ; c’est la méthode de Winkelmann [93]. Cette méthode suppose que l’évaporation est contrôlée uniquement par la diffusion de la vapeur. Supposons l’interface plane et située à une distance Lg de l’embouchure du capillaire ; Fig. V.1 – Assimilation d’un capillaire avec une liaison avec ménisque dans un milieu poreux. Fig. V.2 – Division de l’interface en différentes parties. le taux d’évaporation, contrôlé par la diffusion, vaut : J = ScDsat ext Lg (V.1) où – D est le coefficient de diffusion binaire – sat est la masse volumique de vapeur correspondant à la pression de saturation, – ext est la masse volumique de vapeur à l’embouchure du capillaire, – Sc est la section du capillaire. Ce taux d’évaporation provoque un mouvement de l’interface qui fait augmenter Lg au cours du temps : Sc dLg dt = J g (V.2) où g est la masse volumique de la phase gazeuse. En introduisant (V.1) dans (V.2) et en intégrant nous obtenons : Lg = q L2 0 + (D(t t0)(sat ext)=g) (V.3) où L0 est la valeur de Lg à l’instant initial t0. Donc, lorsque l’évaporation dans le capillaire est limitée par la diffusion, l’étendue de la phase vapeur Lg est proportionnelle à la racine carrée du temps. La méthode de Winkelmann consiste en une déduction de D sur base du coefficient angu- laire de la droite formée par la variation de Lg en fonction de la racine carrée du temps. Le modèle ci-dessus permet, dans la mesure de ses hypothèses, une description globale de l’évaporation dans le pore. Les conditions pour lesquelles la diffusion est réellement le phéno- mène contrôlant l’évaporation sont discutées plus en détail dans ce chapitre. Cette méthode ne donne par ailleurs aucune information sur le comportement précis du ménisque, ni sur ce qui se passe dans sa périphérie. Or, dans certaines circonstances, le comportement précis du ménisque peut conditionner l’évaporation. Des études plus détaillées qu’un simple modèle diffusif sont dans ce cas requises [94]. V.1.2 Etude de l’interface gaz-liquide Il est courant de diviser l’interface gaz-liquide en trois parties distinctes, illustrées sur la figure V.2 [95] : Le ménisque zone centrale qui occupe l’essentiel du rayon du capillaire. Dans cette région, les équations de transport sont influencées par la pression capillaire. La zone de transition lien entre le ménisque et le film adsorbé à la paroi. Le comportement du liquide est influencé par la pression capillaire et par l’effet des interactions avec la paroi, exprimé au travers de la pression de disjonction. Le film adsorbé sur la paroi du capillaire. Dans ce domaine, les interactions avec la paroi dominent les effets capillaires. Les équations résolues se basent généralement sur la théorie de la lubrification. Nous y revenons plus précisément au point V.1.6. Nous devons donc tenir compte de deux pressions particulières dans la résolution de nos équations de transport : – la pression capillaire – la pression de disjonction 46 V.1.3 La pression capillaire La pression capillaire pc est la différence de pression existant de part et d’autre d’une interface liée à l’existence d’une tension de surface. Elle est exprimée par la loi de Young- Laplace [96] : pc =  1 Lr1 + 1 Lr2  (V.4) où – est la tension superficielle de l’interface, – Lr1 et Lr2 sont les rayons de courbures principaux de l’interface. En particulier, pour un capillaire cylindrique de diamètre dc et un angle de contact entre le ménisque et la paroi nul, cette loi se ramène à pc = 4 dc (V.5) V.1.4 La pression de disjonction Lorsqu’un fluide est proche d’un solide, des interactions physico-chimiques, principalement les interactions de Van der Waals [97], modifient l’écoulement du fluide. Pour les liquides, une technique courante consiste à prendre en compte ses interactions au travers d’un terme de pression appelée pression de disjonction [98]. L’impact de ces forces se marque principalement aux niveaux des interfaces entre le liquide et un autre fluide [99]. Différents modèles existent pour exprimer la pression de disjonction. Une expression unique ne permet pas de tenir compte de toutes les interactions possibles. Les modèles existant dis- tinguent généralement les liquides polaires des liquides apolaires [100]. Pour les fluides apolaires, le modèle le plus courant fait usage de l’expression [101] : pd = CHam y 3 (V.6) – CHam est la constante de dispersion ou constante de Hamaker, – y est l’épaisseur du film liquide. Pour CHam > 0, les interactions entre le solide et le liquide sont attractives. Il est d’usage de parler des forces attractives à longue distance. Un second terme, en y 4 [102] ou y 6 y est parfois soustrait pour tenir compte des interactions répulsives à courte distance. Pour les fluides polaires, plusieurs expressions sont proposées. La présence du solide pro- voque l’apparition d’une double couche électrique proche de la paroi [99]. De là, une expression peut être dérivée [103] : pd = C1exp(y=C2) (V.7) où C1 et C2 sont des constantes. Sur base d’un raisonnement thermodynamique, il est possible d’obtenir une autre expression de la forme [104] : pd = lRTln C3y C4 (V.8) où – l est la masse volumique du liquide, – R est la constante des gaz parfaits, – T est la température, 47 Fig. V.3 – Pression de disjonction prédite par différents modèles pour l’eau. Le modèle apolaire correspond à l’équation (V.6), le modèle logarithmique à l’équation (V.7), le modèle exponentiel à l’équation (V.8) et le modèle combiné à l’équation (V.9). Paramètre Valeur CHam [101] 3 1021 J LBorn [103] 1; 58 1010 m C1 [103] 1; 1 107 Pa C2 [103] 1; 4 1010 m C3 [104] 1; 49 mC4 C4 [104] 0; 0243 Tab. V.1 – Valeur des constantes apparaissant dans les différentes expressions de la pression de disjonction. – C3 et C4 sont des constantes. Les forces liées à l’apparition d’une double couche sont importantes pour des films plus épais que les films influencés par les forces de Van der Waals, c’est pourquoi une forme parfois rencontrée dans l’étude des films mince combine la formule (V.6) avec une expression de la forme de (V.7) [105] : pd = CHam y 3 + C1exp LBorn y C2  (V.9) où LBorn est la longueur de répulsion de Born. La figure V.3 compare ces quatre modèles pour l’eau sur une surface hydrophile (CHam > 0 et C1 > 0). Les axes utilisés sont bilo- garithmiques pour permettre de voir le comportement des différents modèles à des échelles différentes. L’écart entre les modèles est très marqué et peut atteindre deux ordres de gran- deurs. Les valeurs des constantes utilisées pour ce graphiques sont les valeurs classiques de la littérature (reprises dans la table V.1). Remarquons que l’expression logarithmique ne mène pas à une pression de disjonction nulle pour un film d’épaisseur infinie. Notons également le comportement de l’expression combinée qui est dominée par le apolaire pour les plus grandes et les plus petites épaisseur du film. Le terme polaire n’a d’influence que dans une gamme intermédiaire d’épaisseurs. V.1.5 La pression de vapeur saturante La pression d’une vapeur se comportant comme un gaz parfait en équilibre avec son liquide à une interface plane, en absence d’interactions avec une paroi, est donnée par la loi de Clausius-Clapeyron [106] : pCC sat = pref sat exp  HvapMv R uploads/Geographie/ chap-5.pdf

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