33 Dr Sim Kilosho Kabale Université Kenyatta, Kenya/ Institut supérieur pédagog
33 Dr Sim Kilosho Kabale Université Kenyatta, Kenya/ Institut supérieur pédagogique de Bukavu - RDC kiloshokabsim@yahoo.com Mots-clés : plurilinguisme, intégration, DRC, université, Région des Grands lacs, Afrique de l’Est. How to manage multilingualism and plurilingualism in the universities of Great Lakes and Central Africa: The case of the Democratic Republic of Congo Abstract: Multilingualism poorly managed in East Africa and in the Great lakes, more especially in the DRC thus causing academic failure and indifferences displayed here and there. However, a good planning and development of this linguistic wealth would be useful to all countries concerned. The Congolese academics have interest in controlling/mastering the official and national languages taught in their country and outside their national territory. The time of national pride and confinement is a thing of past. All nations are converging towards cultural diversity and openness towards the other. However, language as an instrument of social communication is likely to cement relationships amongst the people population with common interest. No doubt, teaching/learning which favors multilingualism will be useful not only to the Democratic Republic of Congo but also to all her neighboring countries. Key words: multilingualism, integration, DRC, universities, Greate lakes Region, East Africa. Synergies Afrique des Grands Lacs n° 2 - 2013 pp. 33-43 Comment gérer le multilinguisme et le plurilinguisme dans les universités des Grands lacs et de l’ Afrique centrale. Cas de la RD Congo Reçu le 20-05-12, accepté le 17-10-12 Résumé : Le plurilinguisme mal géré en Afrique de l’Est, dans la région des Grands lacs et plus particulièrement en RDC est à la base des échecs scolaires et certaines indifférences affichées par-ci par- là. Et pourtant une bonne planification et un bon aménagement de cette richesse linguistique serait utile dans les pays concernés. Les universitaires congolais ont tout intérêt à maîtriser les langues officielles et nationales enseignées dans leurs pays et dans les pays voisins. Ceci leur permettra une double intégration : nationale et internationale. L’époque de l’enfermement et d’orgueil national est dépassée. Toutes les nations convergent vers l’inter culturalité et l’ouverture vers l’autre. Or, la langue comme instrument de communication sociale est susceptible de cimenter les relations des habitants d’une même région ou aire géographique ayant les intérêts communs. De même, un apprentissage favorisant le plurilinguisme donne plus de chance aux enfants issus de tous les coins d’un pays à apprendre dans les langues qu’ils maîtrisent mieux. 34 Introduction La République démocratique du Congo, le géant situé au cœur de l’Afrique et au centre de ses dix voisins, n’a cessé d’être un vivier, au fil du temps, dans lequel les langues se créent, se côtoient et se repoussent. De ce fait, à l’instar de la plupart des universitaires africains, l’étudiant congolais est à la fois multilingue et plurilingue. Non seulement il s’exprime en plusieurs langues de son terroir mais aussi, dans certaines circonstances d’énonciations et dans différents « contextes situationnels » (Christian Baylon, 1996 : 204) ; chaque fois qu’il parle, son répertoire linguistique englobe les expressions qu’il a d’ores et déjà acquises dans sa langue maternelle (LM), dans ses quatre langues nationales (LN) et dans sa langue officielle (LO), en l’occurrence le français. En plus de ces langues, il n’est pas étonnant d’entendre aussi les étudiants vivant près des frontières de la RDC avec les pays voisins s’exprimer, par exemple, en portugais (parlé en Angola), en kinyarwanda, en kirundi ou en luganda (parlés respectivement au Rwanda, au Burundi et en Uganda). Certes, comme on le constate, cette exposition à plusieurs langues apprises depuis la tendre enfance peut simultanément constituer un atout et un blocage à un enseignement/ apprentissage effectué prioritairement en français. Il devient donc capital d’examiner comment ces langues se gèrent et s’apprennent au Congo et surtout à l’université. Et ceci, afin d’envisager les propositions adéquates pouvant amener un jour les décideurs à bien planifier et aménager un système éducatif susceptible d’y favoriser le développement harmonieux des compétences plurilingues et amener les étudiants congolais à participer activement à l’intégration régionale de leur pays et , par extension, au développement des pays des Grands lacs et de l’Afrique de l’Est. 1. L’étudiant congolais, héritier d’un multilinguisme à plus de cinq vitesses Linguistiquement parlant, la RDC figure parmi les pays les plus multilingues de la planète. Alors que ses dix voisins1 comptent moins des langues, elle seule en a plus de 250. Parmi elles, les linguistes dénombrent plus de 245 langues autochtones, quatre langues nationales (à savoir le kiswahili, le lingala, le ciluba, et le kikongo) et le français, langue officielle. Sur cette liste peuvent aussi s’ajouter toutes les langues voisines parlées aux frontières et voire à l’intérieur du pays, par les « réfugiés éternels » et les « immigrés ». En principe, le lingala, la langue de l’armée depuis l’époque coloniale jouit d’un statut particulier en RDC, La plupart des Congolais s’expriment parfaitement ou imparfaitement dans cette langue parlée surtout dans la ville de Kinshasa et la province de l’Equateur, tout au long du fleuve Congo jusqu’aux pools Malebo et Kisangani, sur l’Oubangui ainsi qu’au Nord de l’Uélé. Le kikongo, quant à lui se répand dans les provinces du Bandundu et du bas Congo, tandis que le ciluba se parle dans les deux Kasaï. Qu’en est-il du kiswahili ? Comme l’atteste Alain Ricard dans son ouvrage très récent Le kiswahili une langue moderne (paru aux Editions Karthala en 2009), cette langue des marins zanzibarites et tanzaniens devient une langue bantoue très importante en Afrique. Il se parle dans tous les pays de l’Afrique de l’Est et Synergies Afrique des Grands Lacs n° 2 - 2013 pp. 33-43 35 dans la région des Grands lacs. Selon les données démo-linguistiques de 2005, le Congo-Kinshasa compte plus de 9 millions de locuteurs à l’Est, au Katanga, dans les deux Kivu (Nord et Sud), dans le Maniema et dans le Haut- Congo. En dépit de cette diversité linguistique énorme, comme on le constatera, le système éducatif congolais n’en tire pas profit. Comme dans la plupart des pays africains francophones, l’adoption du français dans l’enseignement occulte les yeux de décideurs. Au lieu de concevoir plus tôt des programmes bilingues ou multilingues qui puissent privilégier l’acquisition des matières en langues locales et étrangères à tous les niveaux, ils ont opté uniquement pour la langue du maître belge. Les raisons de ce choix sont multiples. D’aucuns citeront l’indisponibilité des manuels, l’incapacité de transmettre les matières complexes en langues locales, l’embarras de choix de langue, etc. Fabienne Lallement, (2002 :87) citerait les difficultés inhérentes du genre « choix de la langue, élaboration du matériel didactique et des supports, formation des enseignants, articulation avec le français et les autres langues. » Ainsi, la RDC, en suivant la logique des quinze autres pays francophones du continent utilise la langue de Molière comme véhicule de l’enseignement au degré moyen tandis qu’au degré élémentaire les élèves étudient en langues véhiculaires nationales utilisées dans leur région d’origine. Après l’indépendance, selon Nyembwe Ntita (2009 : 7), il faut distinguer deux périodes : - « - de 1962-1975 : les langues congolaises sont supprimées au seul profit du français qui devient l’unique langue d’enseignement à tous les niveaux. - De 1975 à nos jours, l’emploi des langues nationales est admis dans les deux premières années du primaire et l’emploi du français intervient à partir de la 3ème année d’après le prescrit du programme. » Qu’en indique le bilan ? La suppression des langues nationales congolaises comme leur maintien partiel, seulement en première et en deuxième année, loin de satisfaire les attentes des décideurs et des parents ont favorisé la déperdition et l’échec scolaire. Selon le Projet du plan d’Action National de l’éducation pour tous en RDC de 2005 « Au moment de l’indépendance en 1960, la RDC avait le taux de scolarisation brut (TBS) le plus élevé d’Afrique subsaharienne ». Le même document indique qu’en 1972/73 la scolarisation primaire du même pays connut « un pic d’environs 93%. » Et pourtant, à en croire le Rapport de la Banque mondiale de 2004, le taux brut de scolarisation au primaire est passé de 89% en 1975/1976 à 64 % en 2001/2002. Dans un pays pansant difficilement les plaies de ses guerres civiles, les raisons de cette chute libre abondent. Cependant, en toute sincérité avant d’épingler des causes non moins négligeables ; telles que la pauvreté, de nombreuses fluctuations et les remous sociopolitiques de quinze dernières années, le rapport cité en haut mentionne, de prime abord, le problème linguistique : « L’instruction dans l’une des langues nationales est offerte dans les deux premières années du primaire, tandis que le français devient la langue d’enseignement à partir de la troisième année. La considérable diversité linguistique mentionnée ci-dessus complique la tâche d’enseignement apprentissage dans les premières années du primaire en zones rurales, où beaucoup d’enseignants peuvent ne pas être familiers Comment gérer le multilinguisme et le plurilinguisme dans les universités des Grands lacs et de l’Afrique centrale. Cas de la RD Congo 36 avec la langue maternelle des élèves. Le manque de fournitures pédagogique dans la langue maternelle implique que uploads/Geographie/ comment-gerer-le-multilinguisme-et-le-plurilinguisme.pdf
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- Publié le Jui 15, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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