GRAND ANGLE La maîtrise de l’énergie repose sur trois types d’actions : gestion
GRAND ANGLE La maîtrise de l’énergie repose sur trois types d’actions : gestion de la demande pour réduire les besoins; amélioration de l’efficacité énergétique; valorisation des énergies renouvelables. Pour les pays émergents et en développement (PED), cette maîtrise nécessite des approches tenant compte des spécificités locales. Ces actions peuvent aider au développement local : encore faut-il les inscrire dans des plans à long terme associant pays du Nord et du Sud. Les coopérations démarrent laborieusement. IDans les PED (pays émergents et en déve- loppement), la maîtrise de l’énergie suppose d’agir sur deux catégories d’usagers : les consommateurs d’énergies modernes et le secteur «hors réseau». Pour les deux, la com- binaison d’interventions sur la gestion de la demande finale, l’efficacité énergétique des processus et la promotion des énergies renou- velables s’applique selon des modalités qui diffèrent. En outre, la forte disparité de consom- mations entre les mieux nantis et les plus démunis justifie des mesures différenciées selon les niveaux de consommation. La maîtrise de l’énergie offre un fort potentiel de croissance pour les pays du Sud. Sa pro- motion peut s’effectuer au travers de program- mes « énergie-climat », à l’image de celui récemment adopté au niveau européen. Ces programmes, en favorisant les économies d’énergie et le recours à des énergies renou- velables, créent localement de la valeur et de l’emploi, réduisent la dépendance aux éner- gies fossiles et améliorent de ce fait la rési- lience des économies concernées aux chocs énergétiques à venir, tout en limitant les émis- sions de CO2 et plus généralement des nui- sances environnementales (pollutions loca- les, bruit). La maîtrise de l’énergie constitue ainsi un domaine privilégié pour des coopéra- tions Nord-Sud. Pourquoi reste-t-elle embryonnaire et ne se développe-t-elle pas plus vite dans les PED? C’est ce que nous nous proposons d’appro- fondir à travers des cas concrets. Économiser l’énergie dans les secteurs consommateurs Les gisements d’économies d’énergie et les modes d’investissement diffèrent selon les secteurs. L’industrie, le bâtiment, le trans- port, la production d’électricité ont une phy- sique et une économie, qui nécessitent des politiques, ainsi que des réponses techniques et financières spécifiques. Dans ces secteurs, il faut agir sur le hard, les équipements et aménagements, et le soft, les organisations et les comportements. Maîtriser l’énergie dans les pays émergents et en développement LA JAUNE ET LA ROUGE • AOÛT-SEPTEMBRE 2009 PAR CHRISTIAN DE GROMARD chef de projet énergie à l’Agence française de développement ET ALEXIS BONNEL (90) responsable de la division environnement et équipement à l’Agence française de développement 40 ENVIRONNEMENT REPÈRES Les PED sont confrontés à un défi que n’ont plus les pays industrialisés : l’équipement d’une grande partie de leur population, localisée dans les zones rurales et périurbaines et qui ne bénéficie pas ou très peu des facilités éner- gétiques modernes. Les consommations de cette population «hors réseau» se caractérisent par la prépondérance du bois comme combustible, une utilisation très limitée d’hydrocarbures et d’électricité du fait d’un sous-équipement chronique et l’usage de consommables (piles notamment) à un coût élevé, pour s’éclairer et pour alimenter radios, télévisions ou téléphones portables. Par ailleurs, le manque d’accès à des services énergétiques modernes, économiques et de qualité et en particulier liés à la force motrice, affecte également la compétitivité des entreprises et la croissance économique. La combinaison de plusieurs leviers d’action s’avère beaucoup plus efficace que l’utilisation d’un seul GRAND ANGLE LA JAUNE ET LA ROUGE • AOÛT-SEPTEMBRE 2009 La combinaison de plusieurs leviers d’action s’avère beaucoup plus efficace que l’utilisa- tion d’un seul : outils législatifs et réglemen- taires coercitifs comme incitatifs, instruments tarifaires, incitations fiscales, crédits bonifiés, campagnes de communication et autres aides à la décision du consommateur pour lui per- mettre de «passer à l’action», constitution de réseaux techniques. Nombre de ces leviers font défaut dans la majorité des PED. Bien identifiés, les projets de maîtrise de l’éner- gie sont économiquement rentables, non seu- lement sur leur durée de vie, mais parfois dans un délai court. Ils se heurtent cependant à plu- sieurs obstacles tels que leur caractère sou- vent considéré comme non prioritaire, l’iner- tie des comportements, le montant limité des investissements (de ce fait peu attrayants pour les banques), ou la multiplicité des acteurs à convaincre. Sans soutien public, au Sud comme au Nord, les investissements de maîtrise de l’énergie se concrétisent difficilement. Réduire l’intensité énergétique dans l’industrie Le secteur industriel absorbe entre 30 et 50% de l’énergie primaire dans les pays émergents, mais très peu de ces pays se sont dotés de poli- tiques industrielles d’efficacité énergétique. La sensibilité à l’énergie de ce secteur évolue et les banques de développement soutiennent main- tenant des lignes de crédit dédiées à l’effica- cité énergétique, qui mobilisent des banques locales. Depuis 2003, une dizaine de finance- ments de ce type a été engagée dans des pays comme la Turquie, la Tunisie ou la Chine. Les pays du Sud gagneraient cependant à s’enga- ger de manière volontariste sur des stratégies qui ont fait leur preuve au Nord, comme la négo- ciation d’accords volontaires avec les entrepri- ses grosses consommatrices d’énergie ou de plans d’action définis par branches industriel- les. La mobilisation d’aides à la décision ciblées sur les PMI donne également de bons résul- tats, comme le montre l’exemple de l’Inde. Bâtiments économes en énergie La consommation dans les bâtiments, qui représente souvent plus de 30 % des bilans énergétiques finaux, est en forte croissance dans les PED, avec notamment la diffusion d’équipements électroménagers et des clima- tiseurs bon marché, qui entraînent une augmen- tation sensible des demandes de pointe. Les potentiels d’économies d’énergie sont significatifs mais diffus. La combinaison d’in- terventions sur le bâti et sur les équipements permet d’économiser jusqu’à 30 à 40% d’éner- gie, pour des surcoûts à l’investissement sou- vent inférieurs à 5%. Ces opérations s’avèrent ainsi très rentables, même si encore trop rare- ment mises en œuvre. Les modalités d’application doivent être diver- sifiées – en distinguant le neuf et l’ancien, le résidentiel et le tertiaire, le collectif et l’indi- viduel. Chacun nécessite des financements adaptés et articulés sur une régulation inci- tative à définir avec les acteurs concernés : promoteurs et entreprises de la construction, banques de l’habitat, crédits dédiés à la construc- tion performante, sociétés de services énergé- tiques («ESCO» ou Energy Services Companies en anglais). Une mobilité sobre en CO2 Si la part des transports dans le bilan éner- gétique des pays émergents est moindre que dans les pays de l’OCDE, elle croît exponen- tiellement. Au niveau mondial, le secteur dépend à 95 % du pétrole et en consomme 60%, générant 14% des émissions de gaz à effet de serre. La maîtrise de l’énergie dans les transports constitue ainsi un défi considé- rable au cours de ces prochaines années, et implique d’actionner des leviers tant techno- logiques que méthodologiques et organisa- tionnels, ces derniers visant à limiter les acti- vités de transports. Les transports dépendent à 95% du pétrole 41 Des programmes pour améliorer l’habitat Les premiers programmes pilotes ont été lancés à la fin des années quatre-vingt-dix, notamment en Chine, en Tunisie et au Liban avec l’appui du FFEM (Fonds français pour l’environnement mondial). En tirant parti de cette expérience, l’AFD (Agence française de développement) instruit des lignes de crédit ciblées sur le logement économique efficace, les prêts étant accordés en contrepartie d’améliorations des performances énergétiques. Elle examine également des mécanismes pour financer la réhabilitation thermique du parc existant, avec l’objectif de mobiliser les propriétaires et les professionnels du bâtiment sur des réalisations à échelle significative. ® GRAND ANGLE Une électricité renouvelable et efficace Plusieurs filières sont mobilisables pour réduire l’intensité carbone du secteur électrique, qui augmente dans la majorité des PED, du fait notamment de la rapide progression des cen- trales à charbon. Un cadre réglementaire et des conditions incitatives de rachat de l’élec- tricité renouvelable ou efficace sont nécessai- res pour que ces filières se développent. Si ces dispositions se mettent en place dans certains pays émergents comme l’Inde, la Chine ou plus récemment l’Afrique du Sud ou la Turquie, elles font défaut dans la plupart des PED. L’hydroélectricité connaît un regain d’appli- cation, qu’elle soit «grande», notamment dans des infrastructures régionales transfrontaliè- res, ou «petite» à travers des minicentrales loca- les. Les fermes éoliennes se développent en mobilisant le plus souvent des investissements privés, en particulier en Chine, en Inde et dans les pays méditerranéens (Maroc, Égypte et Turquie notamment). La bioélectricité et la cogénération offrent éga- lement de nombreuses opportunités. Les pro- jets, plus complexes et encore peu nombreux, souffrent de l’insuffisance de cadres institu- tionnels pour permettre leur intégration dans les réseaux nationaux. Électrifier les zones rurales et périurbaines 1,6 milliard de personnes n’a pas accès à l’élec- tricité. Ces ménages «hors réseau» dépen- sent des sommes significatives en piles, pétrole lampant, ou batteries pour des services de piè- tre qualité. Le recyclage de ces dépenses sur des solutions plus efficientes est à la base de schémas d’électrification ciblés sur ces popu- lations de faibles revenus. L’accès aux servi- ces énergétiques d’une multitude de petits consommateurs en situation précaire présente uploads/Geographie/ energie-des-pays-emergents.pdf
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- Publié le Mar 10, 2021
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