1 Fiche réalisée par Agnès Picot – Site de Français Langue Etrangère – http://l
1 Fiche réalisée par Agnès Picot – Site de Français Langue Etrangère – http://lewebpedagogique.com/ressources-fle Ghettos, sweet ghettos Lecture avec mise en évidence des nasales Disneyland est à 10 kilomètres, mais on s'y croirait. Bienvenue à Bussy-Saint-Georges, en Seine-et- Marne, un monde enchanté où toutes les rues se ressemblent. Façades proprettes aux tons coordonnés, tuiles rouges, parc paysager: le décor d'une vie rêvée que l'on veut à tout prix protéger. Aux Jardins de Bussy plus qu'ailleurs. Ici, les 200 habitants vivent retranchés derrière une clôture et des caméras de vidéosurveillance. Les résidences sécurisées comme celle-là, versions miniatures des gated communities américaines, fleurissent en France. Un tiers des constructions seraient aujourd'hui sécurisées. Selon le géographe François Madoré, coauteur de Villes fermées, villes surveillées (Presses universitaires de Rennes, 2005), «les quatre cinquièmes des régions métropolitaines sont concernées». Le concept, fortement implanté dans le Sud, gagne rapidement le Nord et l'Ouest. «40% des promoteurs affichent sur leur site Internet au moins une opération immobilière close», constate François Madoré. On sonne. Le joli Interphone doré est doté d'une caméra incorporée. La porte s'ouvre... sur un autre parlophone. Le sas d'observation. Souriez, vous êtes encore filmé. Trois étages plus haut, un couple de résidents allume son téléviseur, chaîne 9. L'image est en noir et blanc, mais la vue est imprenable sur le hall d'entrée. La vraie télé-réalité. «Cela décourage les intrus, confie Eric, 38 ans, mais ce n'est pas un bunker.» Chaque appartement est équipé d'une alarme, et la présence rassurante d'un régisseur complète le dispositif. Au centre de la résidence trône la piscine, elle aussi grillagée. Il faut une clef pour y barboter entre voisins. Mais pas de caméra en vue autour du bassin. «Au départ, nous en installions, mais nous les avons retirées par crainte du voyeurisme», explique Robert Monné, du groupe Monné- Decroix, l'un des 300 exposants du Salon immobilier de Paris, qui se tient à l'Espace Champerret du 29 septembre au 1er octobre. Il est le premier à avoir introduit le concept en France, en 1991. Un ghetto de riches paranoïaques? Non. Ces petites forteresses s'adressent majoritairement aux classes moyennes. «Ce sont elles qui subissent de plein fouet le sentiment d'insécurité, observe le psychiatre Serge Hefez. Les plus aisés, eux, vivent déjà dans des lieux privilégiés et protégés.» A Bussy, un 3- pièces se loue moins de 800 euros par mois. «Nous voulons offrir le confort au plus grand nombre, affirme Robert Monné. La sécurité en fait partie.» Une stratégie payante pour le groupe, qui a construit 250 résidences dans l'Hexagone et dont le chiffre d'affaires a été multiplié par 5 en dix ans. Les promoteurs ont dû convaincre les collectivités locales. «Jusqu'à il y a peu, elles ne voulaient pas de notre produit», reconnaît Robert Monné. Avant de retourner leur veste à partir de 2002. Parce que les élus n'hésitent plus à parler de sécurité. Parce qu'ils y ont vu leur intérêt financier, aussi. «Les résidences sécurisées sont synonymes de réduction des coûts de gestion de l'espace public, explique la sociologue Marie-Christine Jaillet, directrice de recherche au CNRS. La prise en charge des espaces verts, des parkings et de la voirie est privatisée, puisqu'elle est l'affaire de la copropriété.» Pour leurs habitants, ces enclaves résidentielles sont surtout synonymes de cocon ultraprotégé. «La sécurité est une des préoccupations majeures de nos clients, soutient Pierre Auberger, directeur marketing chez Bouygues Immobilier. Elle arrive en troisième position, derrière l'architecture et la qualité du site.» Le droit au logement se double d'un sacro-saint droit à la tranquillité. Selon Thierry Paquot, éditeur de la revue Urbanisme, cette obsession est «une des tendances planétaires les plus fortes». De Los Angeles à Sydney, en passant par São Paulo et Varsovie, les résidences sécurisées cultivent l'entre- soi, accentuant le phénomène de ségrégation urbaine. «Chaque groupe s'évertue à fuir ou à contourner le groupe immédiatement inférieur dans l'échelle des difficultés», analyse l'économiste Eric Maurin, auteur du Ghetto français. Enquête sur le séparatisme social (Seuil). Une dérive qui fait grincer des dents. Celles de David Mangin, architecte et auteur de La Ville franchisée (éd. de la Villette, 2006), qui 2 Fiche réalisée par Agnès Picot – Site de Français Langue Etrangère – http://lewebpedagogique.com/ressources-fle envisage de lancer prochainement une pétition à ce sujet. Celles de François Cuillier, directeur général de l'urbanisme de la métropole bordelaise, qui y voit une «réponse lepéniste» à notre incapacité à vivre ensemble. «Ici, on se sent à l'écart des problèmes» Peur de l'autre? Dans son coquet appartement de Bussy-Saint-Georges, Marjorie, 25 ans, mère d'un petit garçon, ne semble pas s'inquiéter outre mesure. Elle n'allume jamais sa télé pour vérifier qui sonne à l'Interphone, n'utilise pas non plus son alarme. «Ici, on se sent à l'écart des problèmes, dit-elle. Lors des émeutes urbaines, en novembre 2005, nous n'avons eu aucun souci.» Pourtant, l'arsenal sécuritaire de la résidence ne résiste pas longtemps aux petits malins qui veulent à tout prix y entrer. La piscine aurait même tendance à attirer les jeunes des alentours. «Ils arrivent du RER avec leurs serviettes et sautent par-dessus la clôture, soupire Eric, qui a eu la mauvaise idée de les chasser. Quatre voitures de la résidence ont été rayées et ont eu les pneus crevés.» C'est l'arroseur arrosé. Par Solenne Durox, Anne Vidalie, publié le 28/09/2006 uploads/Geographie/ ghettos-les-nasales-pdf.pdf
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- Publié le Jan 11, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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