DEPARTEMENT GENIE CIVIL Exposé d’économie THEME : LA BATAILLE DE L’ECO Professe

DEPARTEMENT GENIE CIVIL Exposé d’économie THEME : LA BATAILLE DE L’ECO Professeur : Mr sala GUEYE Membres : El hadji Abdoulaye DIOP Classe: DIT1/SOIR Papa Mbacké SYLLA Malick DIOUF Sidiky CAMARA Les enjeux de l’Éco deviennent plus clairs grâce aux actions des deux principaux acteurs, le Nigeria et la France. Pour comprendre l’Éco, il faut regarder du côté du Nigeria. En dépit de ces énormes problèmes de gestion intérieure, notamment une sorte d’incapacité systémique à mettre fin aux déprédations financières des élites politiques, le Nigeria a les moyens et la stature d’une puissance régionale, et cela, depuis toujours pourrait-on dire. Cela se manifeste notamment par le fait qu’il a très tôt mis en place une politique régionale qui contrastait, par son aspect concret, avec le panafricanisme idéaliste mais irréaliste de Kwamé Nkrumah, et par son aspect unificateur, avec la politique régionale balkanisante et néocoloniale de Houphouët-Boigny. Il s’est développé dans les cercles dirigeants du pays une ligne directrice qui refuse l’idée que le développement de l’Afrique viendrait de l’Europe ou de l’Occident, mais pour en tirer un véritable programme d’action plutôt qu’une simple idéologie de combat. Ainsi, au début des années 1960, le Nigeria n’a pas daigné adhérer aux conventions de Yaoundé entre les six de la CEE et leurs anciennes colonies. Non pas qu’il ignorait l’avantage d’avoir accès au marché européen, mais il n’était pas intéressé par le chemin que cela prenait, et qui revenait à donner aux pays dits associés le rôle et l’habitus de producteurs de matières premières – sans compter que ces conventions étaient en réalité proposées par les Européens sur le mode du « à prendre ou à laisser », même si cette espèce d’imposition était « sucrée » par la mise en place du Fond Européen de Développement (FED). Il faut voir, dès à présent, que la majorité des pays associés étaient des anciennes colonies françaises, et le FED était un moyen, pour la France, d’atténuer le poids de l’aide qu’elle leur accordait dans le but de maintenir son influence politique. Les pays anglophones n’étaient pas entrés dans ces conventions – en dépit des pressions de la Grande Bretagne qui avait alors enclenché son processus d’adhésion (plus tard sabordé par de Gaulle) au marché commun. Le Nigeria négocia de son côté une convention de commerce avec la CEE, et bien qu’elle ait abouti, sa mise en œuvre buta contre l’opposition de la France qui prétendait ainsi le sanctionner du fait de la guerre du Biafra. Mais déjà à l’époque, il était clair que si l’accès au marché européen créait une rente sectorielle pour certaines cultures commerciales (comme les arachides ou le cacao), il n’avait aucun effet structurel important sur le développement économique. Pour le Nigeria, la solution évidente au problème du sous-développement était l’industrialisation, ce qui, si on ne voulait pas dépendre du capital européen, requerrait la création d’un marché commun régional afin d’obtenir les économies d’échelle nécessaires, y compris en ce qui concerne le travail et la consommation. Au début des années 1970, les moyens du Nigeria furent décuplés par le boom pétrolier (il était alors le 8ème producteur mondial de cette hydrocarbure) et par ailleurs, les pays de la CEE (à présent au nombre de neuf) et leurs « associés » ACP étaient entrés en négociation pour une nouvelle convention. Le Nigeria décida d’en faire partie, bien qu’il n’y avait pas là, pour lui, d’enjeux économiques importants. Il prit le leadership des négociations côté Afrique et pour des raisons diverses – parmi lesquelles il faut compter au premier plan l’énergie négociatrice de Lagos – la nouvelle convention, Lomé I, fut bien plus équitable que les conventions Yaoundé. Mais pour le Nigeria, l’objet principal restait la construction d’une base industrielle régionale, et sa diplomatie du carnet de chèque finit par aboutir à la création de la CEDEAO en mai 1975, quelques mois après la signature de Lomé I (février). La politique ouest-africaine du Nigeria était hégémoniste de façon retenue. Tout en essayant de convaincre, finances à l’appui, les autres États d’adhérer à sa vision, il respectait scrupuleusement leur souveraineté. Le terrain francophone l’agaçait cependant, car il le savait ou le sentait miné par la France. Au début des années 1980, la vision du Nigeria put être exprimée au niveau panafricain à travers le Plan d’Action de Lagos. Mais à ce moment, le vent s’était mis à tourner. Les cours du pétrole et des autres matières premières minérales comme agricoles s’effondrèrent et le cours de la dette grimpa de façon rapide et vertigineuse, en grande partie du fait du deficit financing américain sous Reagan. Le Nigeria se retrouva tout d’un coup considérablement affaibli tandis que les pays d’Afrique de l’Ouest s’abîmaient dans une crise fiscale accablante, rendant la situation intérieure bien plus urgente qu’un projet d’intégration régionale. Il convient de noter, ici, que si la politique ouest-africaine du Nigeria est consistante à travers le temps, elle reste tout de même tributaire de variations en termes de volonté politique liée à chaque présidence. De ce point de vue, les deux chefs d’État qui se sont montrés les plus engagés à ce jour sont sans doute Yakubu Gowon (1966-75), qui fut le véritable père fondateur de l’organisation(sa tournée de charme des capitales ouest-africaines a joué un rôle clef dans le processus) et Ibrahim Babangida (1985-93), qui essaya de la raviver vers la fin des années 1980. Par contraste Mohammed Buhari représente la tendance qui tend à considérer que les voisins ouest-africains du Nigeria sont autant de parasites. Le projet CEDEAO est si enraciné dans la vision du Nigeria que même cette tendance « repli nationaliste » ne peut l’éliminer, comme on le voit encore aujourd’hui sous une nouvelle présidence de Mohammed « je ferme les frontières » Buhari (en 1984, le même Buhari avait fait expulser des centaines de milliers d’ouest-africains). Néanmoins, il faut en tenir compte. En essayant de raviver la CEDEAO au début des années 1990, le Nigeria de Babangida réaffirma l’idée que l’organisation devait être « self-reliant » (compter sur soi) et devrait éviter l’idée fallacieuse de l’intégration aux marchés internationaux, i.e., la mondialisation libérale. Au fil des années, le Nigeria parvint à stimuler le développement d’un programme économique qui doit culminer avec la mise en œuvre d’une « politique industrielle commune ». Si, au cours des années 1990, ce programme avait peu de chances d’avancer – c’était l’époque de l’ajustement structurel au cours duquel les États et économies d’Afrique de l’Ouest avaient été réformés de façon à les convaincre que seule « l’ouverture commerciale », i.e., la mondialisation libérale, pouvait les sauver – la persistance du Nigeria le fit évoluer au cours des années 2000. Mais pour le Nigeria, une source de blocage clef réside dans l’attitude des États francophones. Du point de vue nigérian, ces États ont le mérite d’avoir mis en place une organisation de coopération régionale – l’UEMOA – bien plus avancée que la CEDEAO, et en fait, les Nigérians voudraient capitaliser sur cette expérience UEMOA pour améliorer la CEDEAO. Mais d’un autre côté, ils voient bien que les États UEMOA sont réticents à la vision d’une révolution industrielle régionale qui est celle que le Nigeria a pour la CEDEAO. Et c’est ici que l’Éco représente un enjeu important. Il est clair que dans l’architecture de l’Éco CEDEAO (pas le faux Éco Macron-Ouattara), la garantie financière serait donnée par le Nigeria, avec un apport de la Côte d’Ivoire et du Ghana (cela serait proche, de ce fait, de la garantie de l’Euro donnée par l’Allemagne avec un apport de la France et des Pays-Bas, mais peut-être de façon encore plus déséquilibrée). L’économie du Nigeria est assez forte pour absorber des chocs auxquels ne résisteraient pas celles des autres pays de la région. Le problème du Nigeria réside dans le fait que la corruption systémique semble être consubstantielle à sa politique intérieure, ce qui entraîne parfois des hémorragies financières scandaleuses au plan budgétaire. Une bonne partie de la dette colossale que le Nigeria a dû éponger dans les années 2000 provenait, en quelque sorte, de la corruption, dans la mesure où l’État nigérian a garanti des emprunts privés et créé une situation d’aléa moral qui a permis aux malfaisants de se « lâcher », pour ainsi dire. En ce sens, la conversation que les États CEDEAO devraient avoir en ce moment aurait dû porter sur les mécanismes à mettre en place pour isoler une banque centrale CEDEAO des turpitudes internes du Nigeria. Au lieu de quoi, ils sont en train de se battre autour de l’existence même de la monnaie envisagée. Quoi qu’il en soit, le fait est qu’une fois l’Éco en place, les pays francophones entreraient en coopération financière avec le Nigeria, ce qui, en pratique, ferait sauter les verrous formels et informels maintenus aujourd’hui grâce au système CFA. Le Nigeria pourrait alors envisager une expansion industrielle sur toute l’Afrique de l’Ouest (comme le cimentier Dangote le montre en ce moment). Ses efforts de satellisation des États anglophones ne suffisaient pas à satisfaire une telle ambition, en partie du uploads/Geographie/ la-bataille-de-l-x27-eco.pdf

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