LA CôTE D’AMAPA, DE LA BOUCHE DE L‘AMAZONE A LA BAIE D’OYAPOCK, A TRAVERS LA TR
LA CôTE D’AMAPA, DE LA BOUCHE DE L‘AMAZONE A LA BAIE D’OYAPOCK, A TRAVERS LA TRADITION ORALE PALIKUR* Françoise Grenand u Pierre Grenand u* RESUMO. Uma análise eho-histórica do passado da Costa do Amapá é apre- sentada aqui como uma contribuição ao estudo do passado das populações indi- genas da Amazônia. É uma confrontação entre a tradição oral dos indios Palikur, os dados dos arquivos, e os resultados da pesquisa arqueológica contemporânea. A conclusão é um esboço de alguns pontos fortes da pesquisa eho-histórica. &SUMÉ. Üne analyse ethnohistorique du passé de la Cdte dilmapa estprésen- tée ici en tant que contribution à I’étude du passé des populations indigènes de l’Amazonie. II s’agit d’une confrontation entre la tradition orale des Palikur, les données d’archives, et les résultats de la recherche archéologique contemporaine. Quelques lignes directrices rur la recherche en ethnohistoire sont esquissées en con clusion. INTRODUCTION La région de savannes et de forêts inondées entrecoupées de lacs qui s’étale * Ce travail est une reprise approfondie d‘une communication présentée au symposium sur l’ethno- histoire de l’Amazonie, durant le 45eme Congres des Americanistes, tenu a Bogotti (Colombie), en Juillet 1985. +* Ethnolinguiste, CNRS. u* Anthropologue, ORSTOM. 1 I Y 1 B o l . Mas. Par. Emilio Goeldi. .Cr. Antropol.. 3 (1). 1987 de la bouche nord de l’Amazone à la baie d’Oyapock (l), forme un ensemble nettement différencié des grandes étendues de forêt dense de terre ferme qui com- mencent immédiatement à l’ouest. Aujourd’hui, cette région n’abrite plus dans sa partie septentrionale, que trois groupes amérindiens différents, les Palikur, les “Galibi” de Uaça et les Karipuna, totalisant 2624 personnes en 1982 (Povos Indígenas no Brasil, 1983), alors qu’à l’inverse, les évidences archéologiques (Meggers et Evans, 1957; Hilbert, 195 7) montrent que le peuplement y fut autrefois continu et relativement , important. Cependant, de façon quelque peu contradictoire avec ces évidences de peu- plement, cette région marécageuse fut ressentie parles voyageurs qui la longèrent ou la jkmétrèrent, et ce jusqu’à aujourd’hui, comme rébarbartive pour les établis- sements humains (2). De plus, enjeu colonial entre la France et le Portugal puis le Brésil, elle demeura de facto un refuge pour !es groupes indigènes fugitifs jusqu’h la fin du XVIIIeme siècle. Pour ces raisons, en bonne partie, la côte d‘Amapa a toujours été présentée par les auteurs anciens ou les anthropologues contemporains comme un em- brouillamini ethnico-géographique dont peu de cohérence pouvait ressortir. Toutes les tentatives, au reste superficielles, àde rares exceptions près, pourcom- prendre le peuplement de la région, soit persistent dans cette impression de noeud inextricable, soit procèdent par classifications ou identifications hâtives reprises ensuite sans examen critique. Dans nos travaux précédents sur l’histoire des Amérindiens de Guyane (Grenand, P., 1979 et surtout 1982), nous avions effleu- ré le süjet du peuplement de la région côtière en cédant aux mêmes démons. L‘examen attentif, quoique non définitif (des sources nous manquent en- core) des documents anciens et de la littérature moderne, en particulier arche@ logique, confronté à Yétude des traditions orales de la population survivante la plus importante de la région, les Palikur, nous amène aujourd‘hui à réexaminer ce thème de recherche ethnohistorique. Nous espérons en cela répondre modeste- ment au. voeu émis par Betty MEGGERS et Clifford EVANS (1957): “lfar- 1 De 1978 a 1982, nous avons effectué plusieurs missions chez les Palikur de Guyane française, totalisant environ six mois d’enquête sur le terrain chacun. La premiere mission, de Juillet a Septembre 1978, fut menée en coopération entre I’ORSTOM et les ERA 43 1 et 715 du CNRS, avec la présence de Mme. Simone Dreyfus-Gamelon Toutes les autres missions ne comptaient plus que 1’ORSTOM et l’ER4 431 du CNRS. Nous remercions particulierement M. Expedito Arnaud, du Museu Paraense Emilio Goeldi de Belem, de nous avoir fourni l’agréable occasion, pendant trois jours, de sejoumer au grand village de Ukumene, sur le Rio Urucaua. Nous remercions également M. Hugues Petitjean-Roget, qui, au cours de la premiere mission, Facilita grandement notre introduction au sein de plusieurs familles palikur. 2 Un texte anonymede 1652, cité par Arturen 1750, nous dit:“Le butétaitd‘engagerles Arecarets a quitter leurs terres, presque toutes noyées” ... ce qu’ils refusèrent de faire. 2 Les Palikur et I’hintoire de 1‘Amapa cheologists and ethnologists will develop an awareness of assistance, they can render to each other, then the only result can beprofit to both specialties and the advuncement of the general field of anthropology”. Quoique le présent exposé ne s’intéresse pas directement à l’impact des conquérants européens, il est clair que celui-ci constitue un facteur décisif influant négativement de façon permanente sur la nature et l’importance des grou- pes indigènes de la région. En sens inverse, les migrations, conflits ou alliances que cet impact a engendrés sont autant de révélateurs permettant de définir l’ori- gine et?mique, la culture et les stratégies politiques de ces groupes. ANALYSE DE LA LZTTEXATURE ANTHROPOLOGIQUE ET ARCHEOLOGlQUE Bien que nous ne possédions pas d’écrit, pas même extensif, de facture mo- deme, sur la région qui nous intéresse avant la monographie sur les Palikur de Nimuendaju (1926), il est important de noter l’introduction déjà ancienne de deux erreurs essentielles qui grèveront largement une bonne partie des écrits ulté- rieurs. La première est celle de Ferreira Pena, qui, relevant àMarajó, en 1881, un vocabulaire amã (le meilleur que l’on possède), déclare que cette langue, parlée . par un peuple qui fut fort guemer, ne peut ètre que karib*. Bien qu’elle eut été classée ultérieurement, et àjuste raison, par Rivet (1 924) comme arawak, ce qui fut pleinement confirmé par la collecte d’un second vocabulaire aruã dans le nord de 1’Amapa par Nimuendaju l’erreur fut reprise en 1957(3) sous la plume de Meggers et Evans dans leur investigation archéologique de l’Amapa et du Bas- Amazone. La seconde erreur est beaucoup plus sérieuse en ce sens qu’elle va perdurer, implicitement ou explicitement, dans la quasi-totalité des écrits évoquant ou se consacrant à la classification ethno-linguistique de la région (Rivet, 1924; Schmidt, 1926; Loukotka, 1935; Mason, 1950; Meggers et Evans, 1957; Noble, 1965; Dreyfus, 1981). I 1 s’agit de l’identification que firent Rivet et Reinburg (1 921) des MARA- WAN aux anciens MARAON puis aux PALIKUR, identification qui fut ensuite gauchie par les linguistes qui firent du MARAWAN-MARAON et du PALI- * Dans ce travail, la graphie CARIB sera utilisée pour désigner l’ethnie des Carib côtiers, OU Galibi La reprise de cette erreur renferme pour le moins une ambiguïté, car, p. 249, B . Meggers et C. Evans acceptent les conclusions de NIMUENDAJU (1 926) et les integrent a leur analyse, cepen- dant que p. 581, elles sont mises endoute. Ce changement d‘opinion est regrettable, dans la mesure ou la minutieuse analyse archéologique des diverses zones occupées par les ARUA (Amapá, Mexiana, Caviana et Nord Marajó) leur permet de conclure a des traits communs entre ARUÄ et civilisations archéologiques arawak de l’Orénoque et des Antilles. ou Kalbïa. La graphie KARIB sera réservée pour la famille linguistique. 3 Le No ‘rd de D o n 4 L u Pdiknr et l’histoire da 1’Aa;p. 1 ‘ KUR, soit deux langues étroitement apparentées, soit deux dialectes d’une même langue. La confusion part en fait de DEYROLLES (1916) qui signale l’immigra- tion d’“Indiens” du temtoire contesté à l’est de l’Oyapock “autourde la Crique (= rivière) Maraouane, d’où le nom d’lndiens de Maraouane ou simplement MARAOUANES, qui leur a érd donné”. RIVET et REINBURG (1921) feront d’une imprécision, une erreur, en ne se contentant pas d’assimiler les “Indiens de Maraouane” aux PALIKUR mais e c L les considérant identiques aux MA- RAONES (MARAON) dont parle la littérature s’echelonnant du XVIème au début du XÏXeme siècles. . MMUENDAJU en 1926 a longuement montré que les MARAON appa- raissent chez les auteurs anciens comme un groupe nettement différent des PA- LIKUR, ce qui est entièrement confrmC par les traditions orales de ces derniers. En particulier, nous possédons de nombreuses évidences que leur langue était dif- ferente du Palikur (cf. Tableau 3). Les derniers MARAON constituant des com- munautés spécifiques, vécurent dans les bas-Oyapock (LEPRIEUR, 183 1) et il n’est pas impossible qu’ils aient entre autres résidé àla même crique Maraouane, petit fluent de rive gauche du bas-Oyapock et constituant l’écoulèment naturel d’un grand marais riche en gibier et en poisson. Cependant, à la fin du XIXème siècle, il n’y avait plus d’Amérindiens clans cette région hormis une population mixte habitant les premiers sauts de 1’0,yapock. Cette population incluait certes des éléments MARAON (COUDREAU, 1892, cite d’ailleurs le cas précis de l’épouse du chef Gnongnon) et il estde mi)me certain que des éléments MARAON existaient parmi les trois populations du bassin de la Uaça. Tout concourt cepen- dant à afErmer, qu’à cette époque, c’est ii dire peu de temps avant l’éclatement de l’affaire du Contesté franco-brésilien (1 899, les MARAON avaient cessé d‘exister en tant qu’ethnie. Le destin du groupe PALIKUR., nommé à tort MARAOUANE (MARA- WAN) par RIVET et REINBURG est de son côté bien connu. NIMUEN- DAJU a bien montré son évolution, en particulier le retour du plus grand nombre des uploads/Geographie/ la-cote-d-amapa-de-la-bouche-de-l-amazone-a-la-baie-d-oyapock-a-travers-la-traditiion-orale-palikur.pdf
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- Publié le Mar 19, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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