Afrique CFA: 2 400 F CFA, Algérie: 250 DA, Allemagne: 5,50 €, Antilles-Guyane:

Afrique CFA: 2 400 F CFA, Algérie: 250 DA, Allemagne: 5,50 €, Antilles-Guyane: 5,50 €, Autriche: 5,50 €, Belgique: 5,40 €, Canada: 7,50 $C, Espagne: 5,50 €, Etats-Unis: 7,50 $US, Grande-Bretagne: 4,50 £, Grèce: 5,50 €, Hongrie: 1835 HUF, Irlande: 5,50 €, Italie: 5,50 €, Luxem- bourg: 5,40 €, Maroc : 30 DH, Pays-Bas : 5,50 €, Portugal (cont.): 5,50 €, Réunion: 5,50 €, Suisse: 7,80 CHF, TOM: 780 CFP, Tunisie : 5,90 DT.                                       La morale en est la justification. La panoplie de réponses aux crises se réduit au triptyque condamnation, sanction, exclusion. La morale remplit le vide laissé par la diplomatie, fragilisée en régime démocratique par la difficulté à accepter la raison d’Etat, le secret et l’affirmation d’intérêts supérieurs nationaux. Nous ne parlons qu’à ceux qui nous ressemblent et rejetons tous les autres – ainsi de l’Iran et de la Russie – au risque d’encourager une spirale d’iso- lement et une dérive autoritaire. Enfin, l’occidentalisme sert de fondement à cette morale. Il a rattrapé l’exception française. Bien des Français semblent se vivre désormais en avant- poste d’une civilisation déclinante et volontiers alignés sur les Etats-Unis, «leader du monde libre», au point de devancer leurs désirs. H Quelques mois plus tard, la ville est déclarée en faillite. Pour éviter de supprimer les pensions de retraite de ses employés, la mairie envisage alors de vendre aux enchères certaines peintures de l’Institut des arts, dont des œuvres de Rembrandt, Henri Matisse ou Diego Rivera. Mais les fondations Ford, Knight et Kresge, associées à quelques citoyens fortunés, parviennent à réunir 330 millions de dollars pour consolider les fonds de pension des employés municipaux : la vente est évitée. En octobre 2013, c’est au tour de l’Etat fédéral de miser sur la générosité privée pour assurer des missions d’intérêt public. Devant l’incapacité des démocrates et des républicains à s’accorder sur le relèvement du plafond de la dette publique, Washington doit fermer, pendant seize jours, les services publics « non essentiels ». Afin de maintenir en activité une trentaine de garderies gérées par le ministère de la santé, un couple de milliardaires texans fait un don de 10 millions de dollars. « Cet argent va permettre à des milliers d’enfants de rester dans un environnement sûr et familier. C’est une bonne nouvelle (1) », se réjouit la journaliste Eleanor Barkhorn dans The Atlantic. La mobilisation des grandes fortunes au service d’œuvres sociales n’est pas chose nouvelle aux Etats-Unis.Au tournant du XXe siècle, tandis que le nombre de millionnaires s’accroît de manière specta- culaire – ils étaient une centaine en 1870, et presque quarante mille en 1916 –, émerge le concept de philanthropie. Pour donner une image généreuse d’eux-mêmes et légitimer leur opulence, les riches inves- tissent dans de nobles causes : ils construisent des bibliothèques, des hôpitaux ou des universités, comme Johns Hopkins à Baltimore ou Ezra Cornell à Ithaca; ils créent des fondations, à l’image de l’indus- triel du pétrole John D. Rockefeller ou du magnat de la sidérurgieAndrew Carnegie. (Lire la suite page 4.) (Lire la suite page 10.) LA FRANCE est mal dans sa peau. Elle est tentée de se détourner de la politique étrangère d’indépendance, d’influence et d’équilibre incarnée par le gaullisme, au profit de l’affirmation progressive d’une ligne militariste, moralisatrice et occidentaliste. Militariste, non tant parce que la France multiplie les interventions, en Libye, au Mali, en Centrafrique ou en Irak, car le premier mouvement peut être légitime, mais surtout parce qu’elle les mène en première ligne, parfois seule, sans réelle stratégie. Trop souvent, pour quelques heures, la certitude de l’impuissance laisse place, dans une étrange unanimité, à l’illusion de la victoire. Au scandale d’images intolérables, la logique médiatique substitue le spectacle de la guerre. 5,40 € - Mensuel - 28 pages N° 729 - 61e année. Décembre 2014 N O T R E P R O J E T P O U R U N E P R E S S E L I B R E – pages 20 et 21 APOLLINAIRE ET SES PEINTRES PAR LAURENCE CAMPA Page 14 et 15. Le premier ministre Manuel Valls affectionne les proclamations martiales qui assimilent quelques islamistes à un «ennemi intérieur». Et son gouvernement a aussitôt rejeté sur des «casseurs» la responsabilité du «drame» de Sivens. Prolongeant leur raisonnement dans un savant amalgame, un syndicat de policiers prétend redouter qu’une «frange des militants verts ou rouges ne bascule vers l’action armée, comme au temps des mouvements révolutionnaires des années 1970 (1)». C’est dans ce climat détestable que l’Assemblée nationale vient de voter, à la quasi-unanimité, une nouvelle loi anti- terroriste. La quinzième du genre depuis 1986. Officiellement motivée par les dangers que ferait peser sur la France le radica- lisme djihadiste, elle comporte des dispositions générales – interdiction administrative de quitter le territoire, délit d’«apologie du terrorisme» – qui demain pourraient s’appliquer à n’importe quel combat. En 2001, le Parlement français avait déjà adopté une panoplie répressive du même acabit. Alors un peu penaud, un sénateur socialiste s’en justifiait ainsi : «Il y a des mesures désagréables à prendre en urgence, mais j’espère que nous pourrons revenir à la légalité républicaine avant la fin 2003 (2).» Onze ans plus tard, un pouvoir déconsidéré et sans avenir ne peut plus se passer d’un «ennemi intérieur». (1) Patrice Ribeiro, secrétaire général du syndicat de policiers Synergie-Officiers, cité par Le Figaro du 15 novembre 2014. (2) Michel Dreyfus-Schmidt, cité par Le Monde, 29 octobre 2001. H S O M M A I R E C O M P L E T E N P A G E 2 8 Depuis trente ans, les gouvernements occidentaux usent de multiples artifices pour réduire leurs dépenses. L’un d’eux consiste à sous-traiter les services sociaux à des bénévoles et à des associa- tions, tout en encourageant la charité privée. Si le Canada, la France et le Royaume-Uni, par exemple, suivent cette méthode, c’est aux Etats-Unis qu’on trouve le modèle le plus avancé. Désormais majoritaire au Congrès, la droite américaine en a fait un pilier de sa stratégie politique. ESSOR DE LA PHILANTHROPIE DANS LES PAYS OCCIDENTAUX La charité contre l’Etat PAR BENOÎT BRÉVILLE (1) Eleanor Barkhorn, «Head Start will stay open in shutdown, thanks to hedge-fund money », The Atlantic, Boston, 7 octobre 2013. © GRAPHICAARTIS/BRIDGEMAN IMAGES L’ennemi intérieur PAR SERGE HALIMI D ANS la nuit du 25 au 26 octobre, une grenade offensive de la gendarmerie a tué Rémi Fraisse, un manifestant de 21 ans. Le gouvernement français a attendu deux jours avant de réagir. Il s’est montré plus prompt à saluer la mémoire d’un patron de compagnie pétrolière décédé dans un accident d’avion. De son côté, le président socialiste du conseil général du Tarn a jugé carrément «stupide et bête» de mourir pour des idées. A vrai dire, son idée à lui – achever la construction d’un barrage réclamé par les notables de son département – ne l’a jamais exposé au même type de danger ; elle vient même de favoriser sa réélection au Sénat. Néanmoins, il est désormais probable que la grenade tirée par les gendarmes aura également tué ce projet de barrage. En France, doit-on mourir dans une manifestation pour faire triompher ses idées? En janvier 2011, la ministre des affaires étrangères Michèle Alliot-Marie avait suggéré au dictateur tunisien Zine El-Abidine Ben Ali de sauver son régime agonisant en s’inspirant du «savoir-faire, reconnu dans le monde entier, de nos forces de sécurité». Un savoir-faire reconnu, mais à éclipses : sans parler des dizaines d’Algériens assassinés à Paris le 17 octobre 1961 et des neuf personnes tuées au métro Charonne en février de l’année suivante, cinq manifestants français ont perdu la vie à l’occasion d’affrontements avec la police. Rémi Fraisse sera donc le sixième. Peu après sa mort, le commandant du groupement de gendarmes mobiles opérant sur les lieux a témoigné que le préfet du Tarn avait demandé aux forces de l’ordre de «faire preuve d’une extrême fermeté vis-à-vis des opposants» au barrage. Quarante-deux grenades offensives furent tirées cette nuit-là. P EU AVANT le déclenchement de la crise financière, la municipalité de Detroit fit bâtir un vaste centre communautaire dans un quartier pauvre du sud-ouest de la ville. Une fois la construction achevée, en 2008, le bâtiment resta désespérément vide : frappée par le chômage et la multiplication des saisies immobilières, la ville plongeait dans la dépression et coupait à tout-va dans les programmes sociaux. Se sentant peut- être un peu coupables des malheurs de la capitale de l’automobile, les dirigeants de l’entreprise Ford, qui avait délocalisé de nombreuses usines, font, en décem- bre 2012, un don de 10 millions de dollars (8 millions d’euros) au centre communau- taire. Lequel peut enfin ouvrir et distribuer des colis alimentaires, proposer des cours d’alphabétisation ou encore organiser des loisirs pour les jeunes. Iran, Syrie, Russie, Gaza : la uploads/Geographie/ le-monde-diplomatique-2014-12.pdf

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