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MERCREDI 17 AVRIL 2019 75E ANNÉE– NO 23099 2,80 € – FRANCE MÉTROPOLITAINE WWW.LEMONDE.FR ― FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY DIRECTEUR : JÉRÔME FENOGLIO Algérie 220 DA, Allemagne 3,50 €, Andorre 3,20 €, Autriche 3,50 €, Belgique 3,00 €, Cameroun 2 300 F CFA, Canada 5,50 $ Can, Chypre 3,20 €, Côte d'Ivoire 2 300 F CFA, Danemark 35 KRD, Espagne 3,30 €, Gabon 2 300 F CFA, Grande-Bretagne 2,90 £, Grèce 3,40 €, Guadeloupe-Martinique 3,20 €, Guyane 3,40 €, Hongrie 1 190 HUF, Irlande 3,30 €, Italie 3,30 €, Liban 6 500 LBP , Luxembourg 3,00 €, Malte 3,20 €, Maroc 20 DH, Pays-Bas 3,50 €, Portugal cont. 3,30 €, La Réunion 3,20 €, Sénégal 2 300 F CFA, Suisse 4,20 CHF, TOM Avion 500 XPF, Tunisie 3,80 DT, Afrique CFA autres 2 300 F CFA LE REGARD DE PLANTU ▶ Drame La cathédrale Notre­Dame de Paris a été ravagée, lundi 15 avril, par un incendie qui a provoqué une onde d’émotion en France et dans le monde ▶ Récit Toute la soirée, la foule parisienne a assisté, impuissante, consternée mais unie, à la destruction partielle de cet édifice emblématique de la ville ▶ Origine La justice a ouvert une enquête pour « destruction involontaire par incendie ». Le feu a démarré dans un chantier de restauration ▶ Histoire Au­delà du lieu de culte, ce monument est devenu le décor des grands événements qu’a traversés notre pays et une source d’inspiration artistique ▶ Politique En raison du drame, le président de la République a repoussé les annonces qu’il devait faire ce même lundi PAGES 2 À 15 ET ÉDITORIAL PAGE 30 Yémen Des armes françaises offensives pour l’Arabie saoudite paris livre des armes, qui ne sont pas seulement « défensives », à l’ Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis, dans la guerre me­ née au Yémen contre les rebelles houthistes. Une note de la direc­ tion du renseignement militaire (DRM) d’octobre 2018, rendue pu­ blique par le collectif de journalis­ tes Disclose, révèle que la coali­ tion arabe utilise des canons automoteurs français Caesar, des Mirage 2000, des systèmes de guidage Damoclès et des chars Leclerc dans l’arrière­pays. Matignon répète que « les armes françaises sont placées pour l’es­ sentiel en position défensive » et assure ne pas « avoir connais­ sance de victimes civiles » en rai­ son de leur utilisation au Yémen. PAGE 16 Indonésie La place de l’islam, enjeu central des élections générales PAGE 17 Entretien Guillaume Faury et les défis du nouveau patron d’ Airbus PAGE 19 A 17 ans, un garçon sur deux avoue au moins une soirée de beuverie par mois (38 % pour les filles), et 21,7 % des garçons en déclarent trois : ces « alcoolisa­ tions ponctuelles importantes » ont des conséquences sur la santé SUPPLÉMENT L’ALCOOL ET LES JEUNES, DANGEREUX COCKTAIL Notre­Dame, notre histoire ÉDITION SPÉCIALE 14 PAG ES Paris, 15 avril 2019. MICHEL EULER/AP 2| L’INCENDIE DE NOTRE­DAME MERCREDI 17 AVRIL 2019 0123 Quai d’Orléans, sur l’île Saint­ Louis, près de la cathédrale Notre­Dame, lundi 15 avril. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/ FRENCH POLITICS POUR « LE MONDE » RÉCIT T ous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire ; sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la ro­ sace centrale, il y avait une grande flamme qui montait, qui montait en­ tre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par mo­ ments un lambeau dans la fumée. (…) Il se fit un silence de terreur. » Les mots de Victor Hugo ont deux siècles, et ils disent ce lundi d’avril, vers 19 heures, où Paris n’est plus qu’un cri : Notre­Dame brûle ! Notre­Dame brûle ! Le ciel encore bleu se fend d’une co­ lonne de fumée jaune, que l’on regarde sans y croire. On ne voit d’abord qu’elle, qui enfle et gonfle, toujours plus jaune, puis blanche, puis jaune à nouveau. Et en son cœur, ce bra­ sillement orange qui dit que oui, Notre­ Dame brûle. Et l’on reste là, figé, hébété par cette image médiévale. La flèche s’empourpre, la fumée la voile et la dévoile. A chacune de ses réapparitions, elle semble plus fragile. De la fenêtre d’un toit de Paris, on fixe avec un mélange de fas­ cination et d’effroi cette pointe de 93 mètres de haut qui se fait déchiqueter par les flam­ mes. D’autres images reviennent en mé­ moire. Les tours du World Trade Center, bien sûr, en septembre 2001. Et l’on pressent la suite, on la guette. On croit voir la flèche pen­ cher. On se trompe sans doute. Elle n’est plus qu’une aiguille dont le chas, soudain, se brise. Le feu la mord, toujours plus fort. Elle se rompt. Plus bas, la charpente n’en finit pas de flamber. Une forêt de chênes de plus de cent mètres de longueur, treize de largeur dans la nef, quarante dans le transept. Un hélicop­ tère de la gendarmerie survole l’incendie. Sur la Seine, les derniers bateaux­mouches sont escortés par la police fluviale. Absurdité de l’instant : alors qu’ils longent l’île de la Cité au pied des flammes, leurs haut­ parleurs continuent de diffuser la voix enre­ gistrée qui présente les monuments de Paris. Partout, des sirènes des pompiers. Mais que font­ils ? Notre­Dame brûle ! A 20 heures, le parvis, fermé au public, est envahi de camions de pompiers. Plusieurs de leurs hommes se plaignent d’avoir eu du mal à parvenir jusque­là, la circulation n’a été bouclée que tardivement aux alentours de la cathédrale. La maire de Paris, Anne Hi­ dalgo, est déjà sur place, bouleversée. Elle était à son bureau de l’Hôtel de ville, juste de l’autre côté de la Seine, quand elle a vu les premières flammes. NUAGE DE FUMÉE NOIRE Le curé Olivier de Cagny a accouru depuis l’église voisine de Saint­Louis­en­l’Ile. Il était en train de célébrer la messe quand des pa­ roissiens l’ont prévenu. Il a été ordonné prê­ tre dans la cathédrale. « C’est horrible », répè­ te­t­il, le regard rivé aux nacelles des pom­ piers, déployées au bout de longs bras méca­ niques qui ne parviennent que jusqu’au premier étage de la cathédrale. Les jets de leurs lances arrosent les murs sans atteindre le second étage et le toit en feu. Un groupe de pompiers parvenu au sommet de l’une des deux tours doit battre en retraite quand la flèche s’abat dans un nuage de fumée noire. Tout le monde se demande : « Mais pour­ quoi n’envoie­t­on pas des avions Canadair ? » Donald Trump se pose la question aussi. Il tweete : « Terrible de voir l’incendie de la ca­ thédrale de Notre­Dame à Paris. Peut­être que des Canadair pourraient être utilisés. Il faut agir vite ! » La réponse de la sécurité civile ar­ rive, sur Twitter elle aussi, en français et en anglais : « #NotreDame : Le largage d’eau par avion sur ce type d’édifice est impossible. Il pourrait en effet entraîner l’effondrement de l’intégralité de la structure. » Sur le même ré­ seau, des citoyens américains présentent leurs excuses aux Français pour l’interven­ tion de leur président. Le président de la République française, Emmanuel Macron, a déjà fait savoir qu’il re­ nonçait à l’allocution qu’il devait prononcer à 20 heures pour annoncer ses décisions en réponse à la crise sociale des derniers mois. Au moment où il en terminait l’enregistre­ ment, les premières flammes s’échappaient de Notre­Dame. Il rejoint le parvis, en com­ pagnie de son épouse, Brigitte Macron, et du premier ministre, Edouard Philippe. Ils échangent quelques mots avec les pompiers et repartent vers la Préfecture de police, juste en face de la cathédrale. De Mayotte, où il est en déplacement, le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, confie aux journalistes qui l’accompagnent qu’il « culpabilise de ne pas être au côté des pompiers ». Autour, sur les ponts qui encerclent l’île de la Cité, les policiers ont tendu à la va­vite des rubans de protection orange et blanc pour contenir la foule qui afflue. Toutes les rues de Paris semblent converger vers le « point zéro ». Des grands boulevards, des ruelles étroites de la rive gauche, on vient voir l’im­ pensable. Le photographier, le filmer. Un quinquagénaire découvre la scène et hurle : « Mais qui a fait ça, c’est pas possible ? ! » Une femme, la quarantaine, crie dans son télé­ phone : « Mais ça fait deux heures que ça brûle, me dis pas qu’on ne sait pas éteindre un feu en deux heures ? ! » Un couple de touristes fait défiler sur son téléphone les photos de la cathédrale prises dans l’après­midi, « à l’épo­ que » où l’édifice possédait encore un toit et une flèche. Un vieux Parisien confie à son voisin : « J’arrive pas à partir. – C’est vrai qu’on reste scotchés… – On aimerait tellement que ça s’éteigne là, sous nos yeux. » Soudain, des cris. Des flammes sortent de uploads/Geographie/ le-monde-incendio-notre-dame.pdf

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