Généralités (A. Bounfour) La lexicographie utilitaire 1Elle est née dans la pér

Généralités (A. Bounfour) La lexicographie utilitaire 1Elle est née dans la période précoloniale et de « pacification » (1820- 1918). Elle s’adresse, quand elle n’est pas leur œuvre, aux commerçants, aux voyageurs, à l’armée et à l’administration installée après 1830 en Algérie. Ses traits essentiels sont : (a) le parler de base est le dialecte kabyle (Algérie) parlé dans une région reconnue par sa résistance traditionnelle à tout envahisseur. Il faut donc connaître cette population à travers sa langue. Il en sera de même pour le Rif et l’Atlas marocains. Néanmoins, les lexicographes ne tiendront pas compte de la dialectalisation du berbère. Certains (Paradis 1844) amalgament deux dialectes très éloignés (le kabyle et le chleuh). Ajoutons que la variation lexicale interne à un dialecte n’est pas abordée non plus, (b) Les dictionnaires sont souvent bilingues et parfois trilingues. Ceci pose le problème de la transcription qui est plus que fautive et oublie de se pencher sur la structure morpho-phonologique de la langue. On suppose, parfois, qu’elle est équivalente à celle de l’arabe, (c) Ce qui implique que la théorie et la méthodologie sont sommaires. En fait, c’est un travail d’amateurs. Les articles sont réduits à la traduction de lexèmes français. Seuls les dictionnaires de la génération du XIXe siècle et quelques rares lexiques du XXe siècle adoptent la transcription arabe. C’est donc la transcription latine qui domine d’autant plus que les études berbères sont autonomes par rapport aux études arabes, en France du moins. La lexicographie dialectale 2Elle correspond à la période coloniale proprement dite (1918-1950) et reste marquée par un dictionnaire (Foucauld 1951) et des recherches lexicographiques systématiques (Laoust 1920 et Destaing 1944). Les caractères de cette période peuvent être résumés ainsi : (a) On s’intéresse de manière systématique au lexique d’un dialecte (Tahaggart, Chleuh, etc.). (b) La structure morpho-phonologique de la langue est mieux étudiée ; la transcription phonétique est d’une grande précision et le classement par racine prend de l’importance (Foucauld 1951). (c) L’article est mieux structuré : il comporte une définition de chaque lexème et des dérivés. Souvent, on cite des exemples, (d) Des enquêtes ethnographiques (Laoust 1920) et des recueils de textes (Foucauld 1930, Destaing 1938, Boulifa 1904) rendent les définitions et les comparaisons plus précises. Néanmoins des problèmes théoriques et méthodologiques restent et seront repris par les lexicographes suivants. La lexicographie scientifique 3Même si les travaux préparatoires ont commencé avant les indépendances, on peut dire que cette lexicographie est post-coloniale. Elle profite des acquis de la période précédente et, surtout, des progrès de la linguistique elle-même. En plus donc des qualités citées en 3. on peut ajouter : (a) le respect des normes scientifiques actuelles (traitement des racines et leur classement, une meilleure structuration de l’article avec des indications grammaticales, etc.) (b) Un appareil de sigles et de signes important précise le sens, péjoratif ou familier, son utilisation dans un jargon, (c) Une information ethnographique d’une grande précision. Avec cette période, on peut dire que la lexicographie berbère scientifique est bien partie. 4Les dictionnaires de Dallet (1982) et de Delheure (1984), le premier consacré au parler kabyle des Ait Meuguellet et le second au dialecte mozabite, peuvent être considérés comme les premiers dictionnaires de la génération scientifique. Voici les raisons que l’on peut invoquer : - une transcription phonétique fine basée sur les derniers travaux de linguistique descriptive ; - une documentation riche et critiquée de manière scientifique ; - une présentation formelle et typographique des articles d’une rigueur et d’une clarté dignes des grands dictionnaires des langues comme le français ; - une introduction sociolinguistique et linguistique qui situe bien le dictionnaire dans la recherche actuelle (pp. XV-XXIX) ; - le contenu des articles fournit, en plus des sens des items, des renseignements grammaticaux de tout genre : a) pour le verbe nous disposons de toutes ses variations morphologiques ; b) il en est de même du nom ; certains comportements syntaxiques sont signalés (l’état d’annexion, par exemple) car ils ont des conséquences sur la forme phonétique de l’item. On trouve une liste des abréviations de ces renseignements dans l’ouvrage. 5Ceci nous amène à dire que ces dictionnaires développent les acquis du dictionnaire de Ch. de Foucauld. 6Les articles sont introduits par une racine de base consonantique. Ils sont ensuite subdivisés selon les grandes catégories grammaticales : la particule, le verbe puis le nom. 7Chacune de ces catégories est présentée avec ses variations morpho-phonologiques. Prenons l’exemple du verbe. On le présente d’abord sous sa forme simple puis dérivée. A l’intérieur de chaque forme, on présente l’impératif de l’aoriste, puis l’intensif et enfin le prétérit. 8Le nom est présenté aussi avec le souci de rendre compte des variations morpho- phonologiques. Certains renseignements syntaxiques -ceux qui ont des effets de variation phonétique comme l’état d’annexion – sont présents. Néanmoins, ils sont insuffisants. 9C’est, sans doute, dans ce secteur et celui du classement par racine (voir Dallet, p. XXIII) que des progrès restent à faire. Mais ceci relève des lacunes de la recherche en syntaxe et non du travail lexicographique. Problèmes actuels 10Sans aborder les questions théoriques et méthodologiques très discutées en milieu berbérisant, on fera l’inventaire des grands problèmes purement liés à la lexicographie berbère : (a) tous les dialectes ne sont pas aussi bien décrits que le touareg et le kabyle. Certains ne le sont pas du tout, (b) Cette remarque conditionne l’élaboration d’une recherche sur le lexique pan-berbère qui doit déboucher sur le problème de l’histoire de la langue et donc sur des questions comme l’étymologie, la synonymie, etc. (c) La lexicographie berbère reste tributaire des langues européennes et une recherche en langue berbère semble à l’ordre du jour. Ces problèmes retiennent l’attention des linguistes berbérophones. Mais le statut socio-politique du berbère pèsera encore lourdement sur la recherche. Les dictionnaires kabyles (classés selon la date de leur parution) (J. Lanfry) 111844 VENTURE DE PARADIS Jean-Michel de Grammaire et Dictionnaire abrégés de la langue berbère revus par P. Amédée Jaubert et publiés par la Société de géographie, Paris, Imprimerie Royale, 1844. - Grammaire, pp. 3 à 16. - Dictionnaire berbère-français, pp. 17 à 183, en 4 colonnes : la première donne le mot ou la tournure en français ; la deuxième transcrit en caractères latins les mots kabyles ; la troisième figure les mêmes mots en caractères arabes avec vocalisation ; la quatrième donne en caractères arabes le mot arabe classique correspondant. 12Ce dictionnaire est suivi d’un « index alphabétique des mots berbères et arabico-berbères contenus dans le dictionnaire de Venture », par M. P. Amédée Jaubert. Le mot berbère est écrit en caractères arabes vocalises et suivi de l’équivalent français : pp. 185 à 209. 13Né à Marseille en 1739 d’une famille d’interprètes et de consuls, Jean- Michel VENTURE DE PARADIS part pour Constantinople en 1754 afin de se fortifier dans l’étude de la langue turque. En 1770, il est au Caire. En 1781, il est nommé secrétaire interprète du roi (Louis XVI) en langues orientales au ministère des Affaires étrangères, à Paris. 14En 1788, il rencontre à Paris « deux Maures sujets de Maroc (provinces de Haha et de Sous) et travaille avec eux à découvrir leur langue berbère durant trois mois environ ». 15Cette même année 1788, il est envoyé en mission à Alger. Il fait connaissance « parmi les étudiants en théologie musulmane... de deux jeunes gens nés dans les montagnes de Felissen (Felissah), situées dans la caiderie de Sebou (caïdat du Sebaou). Pendant près d’un an, ils vinrent passer chaque jour une ou deux heures avec moi. C’est par leurs secours que j’ai composé ce vocabulaire ». 16Le dictionnaire que VENTURE rédigea à partir de ces deux enquêtes fondues en un seul travail est composite, à la fois marocain et kabyle. Publié longtemps après sa mort (1844), il était achevé en 1790. 17VENTURE DE PARADIS prit part à l’expédition d’Egypte, dirigée par BONAPARTE, comme « premier secrétaire interprète du général en chef de l’Armée d’Orient ». Il accompagna le corps expéditionnaire de Syrie. Il mourut de dysenterie près de Saint-Jean-d’Acre, en mai 1799. 181844 BROSSELARD Ch. et Sidi Ahmed ben EL HADJ ALI, imam de Bougie Dictionnaire français-berbère « Le dictionnaire contient à peu près tous les mots en usage parmi les populations des montagnes de Bougie, parmi les tribus de Mzita, des Beni-Abbas, des Zouaouas, et dans toute la chaîne de l’Atlas, jusqu’à Médéah. » Transcription double présentée en deux colonnes, arabe vocalisé et caractères latins. Paris, Imprimerie Royale, 1844, 656 p. 191873 CREUSAT J.-B. Essai de dictionnaire français-kabyle Alger, Jourdan, 1873, 374 p. 201878 OLIVIER P. Dictionnaire français-kabyle Le Puy, 1878, 316 p. 211901 LE P. G. HUYGHE Dictionnaire kabyle-français Paris, Imprimerie nationale, 2e éd., Alger, Jourdan, 1901. 354 p. (La première édition de ce dictionnaire, lithographiée, 815 p., est datée de 1896 ; elle n’est plus objet de référence.) 221903 Le P. G. HUYGHE Dictionnaire français-kabyle Malines (Belgique), 1902-1903, 893 p. 231907 Le P. G. HUYGHE Dictionnaire chaouïa, arabe, kabyle et français Alger, Jourdan, 1907, 371 p. 241982 DALLET J.-M. Dictionnaire kabyle-français, parler des AT MANGELLAT uploads/Geographie/ lexicographie-berbere.pdf

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